Que regardent les morts ?

Que regardent les morts ? Voici la question quelque peu paradoxale posée par le philosophe Nancy, et qui nous a interpellés. Cette question est inspirée par les masques mortuaires que réalisaient les anciens pour garder la trace du visage des défunts, peut-être pour ne jamais les oublier, pour garder une trace de leur existence et pour pouvoir encore les regarder après leur mort. Nancy évoque aussi le mort qui regarde en employant le verbe allemand aussehen, qui signifie regarder au dehors et s’interroge sur le fait que l’on regarde uniquement ce que l’image veut nous montrer. Le masque mortuaire nous montre la façon dont un mort aussieht. On se demande alors comment se montre un mort et comment un mort regarde au dehors, ce sont les deux sens de aussehen. Imago qui désigne le masque mortuaire en latin a donné le mot image et vient de imitor en latin qui signifie imiter, reproduire et de ago qui signifie faire. Une image peut être considérée comme une reproduction de quelque chose, une chose que l’on ne veut pas oublier, que l’on veut garder. On peut également faire le lien avec l’image d’un défunt, nommée umbra par les anciens et qui signifie «ombre». L’enveloppe corporelle du défunt est donc bel et bien morte et est amenée inévitablement à disparaître. D’après Nancy «le regard des morts ne regardera plus», mais ce qui subsiste est son ombre, c’est-à-dire son âme, terme judéo-chrétien. Le mort ne peut donc plus voir d’un point de vue physique, c’est son âme qui regarde et perçoit les choses.

La Tombe du Plongeur est un exemple qui illustre parfaitement cette théorie. En effet, pourquoi peindre seulement l’intérieur d’un tombeau puisque, à première vue, personne ne pourra l’admirer ? Un nombre infini de réponses à cette question existe, mais l’on peut penser entre autres que cela vient d’une volonté des vivants de se rassurer sur la mort de leurs proches et sur leur propre mort, de rendre cela moins effrayant pour les aider à faire leur deuil. Les croyances de l’époque étaient bien différentes des nôtres et ils croyaient aux Enfers, à une forme de vie après la mort, ils considéraient la mort comme un rite de passage, comme la fin d’une vie et le début d’une nouvelle. D’ailleurs dans la Tombe du Plongeur, la paroi que peut « voir » le mort est le plongeon qui représente cette transition. Ce ne sont donc pas les yeux du défunt qui vont regarder les peintures, mais son âme et elles peuvent avoir pour but de l’aider dans son passage vers les Enfers.

Anna, Audrey, Clotilde, Dayane, Jade et Maëlys

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