« Le dernier des Justes  » d’André Schwarz Bart: « Un livre majeur ».

  Présentation du roman d’André Schwarz Bart à partir de la Conférence du 1 11 09 de Francine Kaufman, directrice de l’Ecole de traducteurs et d’interprètes, université de Bar et d’autres sources trouvées sur Internet ( voir fin de l’article).

le dernier des justes« Le dernier des Justes »  date de 1959. C’est le premier roman  d’André Schwarz Bart. Le livre est immédiatement un succès de librairie. 80 000 exemplaires sont vendus avant même de recevoir le prix Goncourt. Comment expliquer un tel succès ?

Tout d’abord  l’auteur. La vie de celui-ci explique ce premier roman.Les parents d’André Schwarz-Bart  sont nés en Pologne et s’exilent en France en Lorraine. André nait le 28 mai 1928 à Metz (mort en 2006). Ils sont, comme tous les Lorrains en 1940, évacués pour être installés en Haute Vienne. La famille de l’auteur compte 4 garçons et une fille. La plus grande partie de la famille d’André Schwarz Bart va périr lors de la Shoah, excepté sa petite sœur qu’il sauve alors qu’elle est déjà dans le wagon. Par contre sa mère et ses frères sont déportés. A 15 ans il entre dans la résistance. Il est arrêté et torturé dans la prison de Limoges. Au moment de la libération, il entre dans l’armée et rejoint une compagnie juive, il n’a que 17 ans. Comme l’écrit Kathleen Gyssels dans son article consacré à l’auteur « toute son écriture part de cette histoire indicible et intraduisible ».

  Lorsqu’André Schwarz-Bart publie son livre il est inconnu du grand public et pourtant  l’œuvre est « un livre majeur » d’après Elie Wiesel. « Le dernier des Justes » date de 1959, il arrive au moment où l’Europe prend conscience de la Shoah. Sa volonté en publiant cet ouvrage n’est pas d’expliquer en soi cet événement, il s’agit d’une part,  de  faire comprendre que l’héroïsme des combattants du Ghetto de Varsovie ou d’ailleurs n’est pas supérieur à l’héroïsme spirituel des générations de juifs assassinés dans les ghetos ou les camps et donc qu’ils ne sont pas allés à La mort comme des moutons. De plus il veut faire découvrir et faire revivre une culture juive présente en Europe chrétienne depuis des siècles et qui a disparu avec le génocide.

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( En photographie Jacques Schwarz Bart en 1959 lors de la remise du prix Goncourt) 

Entre 1953 et 1958, l’auteur rédige 4 versions de son roman. Il apporte aux Editions du Seuil sa dernière version en 1958. Il la retravaille, la réduit. Il choisit comme héros « un juste » « un lamed –waf ». A chaque génération, selon la légende, il existe 36 Justes qui supportent la souffrance du monde et ainsi lui permettent de vivre. André Schwartz Bart dans son roman reprend cette légende sans en devenir prisonnier.

On suit ainsi cette « saga »  juive à travers la chronique familiale des Lévy, famille où l’on trouve un Juste par génération,  depuis le Moyen-âge jusqu’à Auschwitz. Dans les dernières pages de son roman, Ernie Levy, le dernier des Justes encore en vie, arrive au camp d’Auschwitz.

  Pour rédiger son roman,  André Schwarz-Bart  lit beaucoup, se documente énormément. Certains d’ailleurs l’accuseront injustement de plagiat . Il montre que La Shoah n’a fait que reprendre les éléments d’une histoire européenne marquée par un antijudaïsme religieux traditionnel auquel succède l’antisémitisme moderne. Ainsi :

–          En 1018, un juif meurt au cours de la cérémonie toulousaine de COLAPHISATION, abolie seulement au XIIe siècle. Un juif le jour de Pâques était frappé par un gant de fer avec des clous

–          Lors de la 1ère croisade en 1098-1099 des pogroms ont lieu à Spire, Mayence, Worms et Cologne et Prague.

 –  Lors de la 3e croisade, 1189 – 1192, dans la nuit du 16 au 17 mars, massacre de Juifs. Yom Tov ben Isaac de Joigny à la tête des juifs réfugiés dans la forteresse d’York choisirent de s’égorger pour échapper à leurs persécuteurs.

–          Le port de la Rouelle est imposé par Louis IX aux juifs au 13e siècle. La rouelle, ce cercle blanc et rouge apposé sur la poitrine, préfigure l’Etoile jaune.

–          En 1240, Abraham Ben Salomon meurt à Paris. L’auteur dans son livre prétend qu’il a été brûlé sur le bûcher, en réalité seul le Talmud est brûlé. Salomon meurt avant l’exécution de la sentence.

–          Martin Luther en 1542 et 1544 est l’auteur de pamphlets contre les Juifs.

    Ce voyage dans une Europe chrétienne antijudaïque et antisémite à travers les siècles jusqu’à Auschwitz, cette découverte de la culture juive et cette chronique familiale sur fond d’une légende ancestrale font toute La richesse du roman d’André Schwarz-Bart.Comme l’écrit Claire Salomon- Bayet, professeur à Paris I,  « en retraçant l’épopée et la persécution des juifs en Europe, du XIIe siècle à l’année 1943, en dessinant la figure du Juste, André Schwarz-Bart  a rompu un double silence, un silence assourdissant : la mise entre parenthèses de la culture et de l’histoire juives dans l’Europe chrétienne [….], mais aussi et surtout la sidération dans l’immédiat après-guerre devant la destruction systématique des juifs d’Europe, planifiée, poursuivie par le régime nazi. « une génération privée de mémoire » disait Jules Isaac dans « l’enseignement du mépris » (1962) ».

Pour en savoir davantage:

Un article d’Hérodote sur l’antijudaïsme et l’antisémitisme.

Un hommage de Francine Kaufman peu après le décès d’André Schwartz en 2006.

En plays list Jacques schwarz Bart, jazzman et fils d’André Schwarz Bart

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