Rivalités (III)

Cándido et Guillén ont été les protagonistes de la deuxième rivalité de l’histoire du toreo après celle de Romero et Costillares et la première du XIXe siècle. Rappelons le contexte de ces années là : Pepe Hillo venait de mourir en 1801 alors que 4 ans plus tard Carlos IV et Godoy interdisaientnt les corridas. Cette même année de 1805 sera celle de la défaite franco-espagnole de Trafalgar, au sud de Cadix – où apparaîtra rapidement la première Constitution espagnole – contre l’Angleterre. Trois années plus tard, l’ancien allié envahit le territoire espagnol et le dominera un lustre, non sans résistance, jusqu’en 1813, pendant une guerre d’indépendance qui désorganisera l’empire espagnol au point de provoquer l’émancipation des colonies américaines. Quelques années plus tard, le roi absolutiste Fernando VII, après que le général Riego n’ouvre la parenthèse libérale de 1820-1823, rachètera en 1832 l’élevage créé par José Vicente Vázquez.

Jerónimo José Cándido est le fils du célèbre matador José Cándido, tué par un toro au Puerto de Santa María. Il devint l’élève de Pedro Romero avant d’entrer dans son quadrille puis de devenir son gendre. De 1792 à 1800, il est demi-épée puis semble se retirer un temps des arènes avant la prohibition. En 1810, il connaît un grand succès à Madrid aux côtés de Curro Guillén puis se retire à la fin de la saison 1812 pour réapparaître en 1816, moins fringant, jusqu’en 1823. Ni rondeño ni sevillano, il emprunte aux deux écoles. Son toreo est sobre et un peu à la défensive. Il préfère le volapié mais crée l’estocade al encuentro. En1820, il reçoit un coup de corne à Madrid puis à Medina del Campo en 1822. Une fois retiré, il obtient un emploi à Sanlúcar de Barrameda avant de devenir le directeur-adjoint de l’école de tauromachie de Séville. Il torée à nouveau à Madrid en 1834 puis lors des saisons 1837 et 1838, à l’âge de 75 ans environ. Il meurt peu après, dans la capitale, le 1eravril 1839. Très varié, il fut le premier torero largo, en fait le fondateur de l’école de Chiclana où l’efficacité est aussi importante que les fioritures.

Curro Guillén, Francisco Herrera selon l’état civil, serait né à Utrera le 16 novembre 1783. Il était fils et petit-fils de matador. Cándido le prend comme banderillero en 1797-98 avant de toréer semble-t-il face à lui à Madrid ou Séville. Il se montre à son avantage dans la ville de l’ours et de l’arbousier en 1803 en tant que demi-épée, une ville où il semble s’être présenté le 3 septembre 1799. Il perd vie le 21 mai 1820, tué par un toro de Cabrera à Ronda alors qu’il s’apprêtait à l’occire en recevant sa charge, comme il convient à Ronda, selon ce que je venais de lui rappeler un spectateur. Il commence sa rivalité avec Cándido en 1810 et celle-ci se poursuit l’année suivante dans les corridas madrilènes organisées par José Ier El Botella, le frère de Napoléon Ier. Après un séjour prolongé au Portugal, il revient en Espagne en 1814. La rivalité avec Cándido reprend en 1816, mais ce dernier est à ce moment-là physiquement diminué. C’est en 1819 qu’il atteint l’apogée de sa carrière. Torero à la fois physique et technique, enjoué, en bon sévillan, complet sans être un grand estoqueador, il tuait autant a volapié qu’a recibir.

Tragabuches, le bandit torero qui a inspiré Mérimée, et Panchón, sont à ce moment là les meilleurs représentants de l’école de Ronda. Par la suite El Sombrero et Juan León, deux sévillans, élèves de Guillén tous deux, vont donner jour à une nouvelle rivalité dont on parlera une prochaine fois. Pour l’anecdote, disons simplement que Juan León a également été pris par le toro ayant tué Guillén alors qu’il tentait un quite salvateur pour son ancien maestro, l’animal portant au bout de chaque corne un torero, comme on peut le voir dans cette lithographie :

Muerte de Curro Guillén Atienza


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