Un classique ? Quèsaco ?

Inciter les élèves à des lectures variées est une mission essentielle du professeur documentaliste. Pour y parvenir de nombreuses tactiques peuvent être utilisées avec succès au collège : réalisation de booktrailers, actualisation régulière du portail documentaire, mise en place d’échanges autour de la lecture dans des clubs et ateliers. Pourtant, une catégorie de livres échappe sans cesse à cet engouement et fait même figure d’épouvantail auprès des collégiens. Laquelle me direz-vous ? Celle des fameux classiques….

Vous savez, ces « vieux » livres qu’il faut avoir lu au moins une fois dans sa vie ou dont on est sensé avoir entendu parler. Madame Bovary, Roméo et Juliette, Cyrano de Bergerac, Le Petit Prince, tout le monde les connait, non ? Ces personnages intemporels se sont imposés grâce à la fascination qu’ils exercent sur nous. Lire les œuvres d’hier présente aujourd’hui de nombreuses vertus : comprendre l’évolution du monde, connaître répliques et citations cultes pour avoir une bonne culture en société, voyager dans le temps… bref, chacun peut y trouver son compte.

Nos adolescents ultra-connectés ont-il la même vision des choses quant à ces bénéfices ? Principalement lus à l’école, les classiques ont marqué l’histoire littéraire française et créé du lien entre les générations. On ne les ouvre plus une fois adulte mais on les transmet à ses enfants. Les classiques souffrent, auprès des jeunes, d’une image désuète. Ceux-ci n’ont guère envie d’avoir en main le livre lu il y a longtemps par leurs parents voire par leurs grands-parents !

Dépoussiérer les classiques

Je constate au quotidien ce peu d’engouement de la part des élèves pour ces célèbres «antiquités» qui ont traversé les époques et parsèment les étagères du C.D.I. Détrônés par les mangas et les derniers titres aguicheurs de littérature de jeunesse, les incontournables ne font pas l’objet d’une lecture plaisir spontanée, encore moins d’un choix pour le quart d’heure lecture quotidien. Peu d’amateurs empruntent également, sur un coup de cœur, ces œuvres souvent méconnues.

Oui mais voilà comme la lecture ou l’étude détaillée de ces œuvres est recommandée dans les programmes scolaires afin de transmettre une culture littéraire commune, les jeunes les recherchent généralement à la demande de leur professeur de français. Mis devant le fait accompli, les élèves fuient tout d’abord les couvertures datées, peu attrayantes à leurs yeux, et traquent la moindre page jaunie de ces monuments de la littérature. Exit donc les éditions du siècle dernier, dignes des rayons des bouquinistes ! Mes jeunes lecteurs sont nés…… après l’an 2000. Il est primordial de racheter régulièrement les classiques dans les collections rajeunies et attractives proposées par plusieurs éditeurs. Une fois l’ouvrage en main, l’adolescent doit encore lutter contre l’idée préconçue que le lire ne lui apportera aucun plaisir. En effet, certaines lectures imposées passées ont laissé chez nombre d’entre eux, un goût amer et des mauvais souvenirs. L’obligation induit une difficulté à apprécier le livre à titre personnel et peu de classiques échappent à la réputation de livres ennuyeux.

Des stratégies pour appréhender le contenu

Une fois ces préjugés vaincus, le livre classique peut s’avérer ardu à lire en raison des difficultés pour accéder à un texte démodé, à un style d’écriture qui a beaucoup évolué. Les élèves ne sont pas adeptes des longues descriptions des romans incontournables et disent se « cultiver » sur les réseaux sociaux. Les éditions abrégées ou guidées proposent des textes littéraires remaniés et mis à portée du public scolaire. Ainsi, Au bonheur des dames de Zola, un pavé jadis étudié à reculons, suscite un nouvel intérêt. Les jeunes lecteurs optent souvent pour les classiques plus récents comme Harry Potter. Ils se tournent aussi volontiers vers les nouvelles, plus accessibles, et donc davantage plébiscitées : Le Horla de Maupassant, Les Histoires extraordinaires d’Edgar Allan Poe et les nouvelles policières de Conan Doyle et d’Agatha Christie.

Pour ramener vers la lecture, des jeunes qui ont tendance à moins lire, les éditeurs de classiques s’orientent vers les éditions interactives et qui offrent un prolongement du livre sur Internet, notamment en répondant sur les réseaux sociaux aux questions que les lecteurs posent.

Pour faire découvrir les œuvres littéraires au plus grand nombre, plusieurs grands chefs-d’œuvre de la littérature ont aussi été adaptés en bande dessinée. Victor Hugo (Les Misérables, Notre Dame de Paris), Zola (Germinal), Jules Verne (De la Terre à la Lune) et bien d’autres auteurs voient désormais leurs œuvres revisitées dans des versions modernes qui plaisent aux collégiens.

La diffusion de séries et la médiatisation des adaptations cinématographiques créent une demande certaine de la part des élèves : ils n’ont jamais lu le livre mais ils ont « vu le film ». De là à se laisser tenter par l’ouvrage… il n’y a souvent qu’un pas ! Les romans de Maurice Leblanc qui mettent en scène le célèbre gentleman cambrioleur ont retrouvé une seconde jeunesse au C.D.I. grâce à la série « Lupin » de Netflix. Plusieurs chaines Youtube s’attachent également à faire découvrir avec humour des œuvres classiques. La vulgarisation de cette littérature peut effectivement réconcilier les jeunes avec Molière ou Tolkien.

Une façon, qui sait, de leur faire apprécier les classiques quand ils décideront eux-mêmes de les lire…

 

Une chronique de Sylvie Delord

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