QUESTION PROBLEMATISEE (guidée) – Les sociétés en guerre : des civils victimes et acteurs de la guerre

Cf. : leçon SORTIR DE LA GUERRE : LA TENTATIVE DE CONSTRUCTION D’UN ORDRE DES NATIONS DEMOCRATIQUES et méthode QUESTION PROBLEMATISEE

Sujet : Comment la guerre a-t-elle engendré le génocide des Arméniens ?
Vous répondrez à cette problématique en montrant que la guerre accélère la fabrication d’un « ennemi intérieur » par le gouvernement ottoman et que la tentative d’extermination est planifiée et systématique.

CORRECTION :

POINT MÉTHODE : Comprendre et analyser le sujet

  • Identifier les limites chronologiques et spatiales du sujet : si elles ne sont pas explicites, il faut les déterminer en les justifiant. Un sujet peut ne faire référence qu’à une partie de la période ou des espaces travaillés en cours. Ne pas en tenir compte constitue un hors-sujet.
  • Repérer et expliquer les mots clés du sujet. Il faut les définir de manière précise pour ensuite chercher les notions qui leur sont associées dans le cours.

Décryptage :
Le sujet est centré sur l’Empire ottoman, mais il est indispensable d’évoquer le contexte général des alliances pendant la Première Guerre mondiale et le rôle des opérations militaires contre l’Empire russe.

La notion centrale est celle de génocide, définie comme la destruction physique, intentionnelle, systématique et programmée d’un groupe ou d’une partie d’un groupe en raison de ses origines ethniques ou religieuses.

POINT MÉTHODE : Mobiliser ses connaissances pour construire un plan

  • Comprendre le plan suggéré : en Seconde et en Première, le sujet suggère les grandes lignes du plan. Ces grandes idées permettent de répondre à la problématique.
  • Il existe deux grands types de plans :
    • Chronologique, le mieux adapté pour étudier une évolution dans le temps. Le cadre chronologique du sujet est alors découpé en plusieurs périodes (une période = une partie).
    • Thématique, qui permet de distinguer les principales caractéristiques d’un phénomène historique (un thème = une partie).
  • Élaborer le plan détaillé :
    • Écrivez au brouillon toutes les informations qui vous viennent à l’esprit en lien avec chaque partie (idées, notions, événements, acteurs…). Il faut être le plus précis possible.
    • Regroupez et hiérarchisez ces informations pour établir des liens entre elles (opposition, comparaison, évolution, explication…). Vérifier qu’aucune n’est hors-sujet, et qu’elles s’enchaînent de manière logique.

Décryptage :
La mise en relation du génocide et de la guerre se fait ici dans un plan thématique. Il aborde successivement l’explication du déclenchement du génocide et la description de la violence du génocide. Il faut néanmoins penser à introduire, lorsque c’est nécessaire, des éléments de chronologie : par exemple, évoquer les différentes étapes de la mise en œuvre (janvier 1915, avril-août 1915, mars-décembre 1916).

1. La guerre accélère la fabrication d’un « ennemi intérieur » par le gouvernement nationaliste de l’Empire ottoman :

  • Montrez d’abord que la dictature affirme l’existence d’une question arménienne avant le déclenchement de la guerre ;
  • Expliquez ensuite comment les difficultés militaires entraînent le basculement dans le processus génocidaire.

2. Le génocide est un crime planifié et systématique :

  • Expliquez les étapes du génocide (désarmement et massacre des soldats arméniens, élimination des élites, déportation, internement puis liquidation des survivants);
  • Montrez les modalités du génocide qui en révèlent les objectifs : catégories d’Arméniens visées, conditions de la déportation et de l’internement, bilan humain…

POINT MÉTHODE : Rédiger la conclusion

La conclusion dresse le bilan du développement pour montrer comment il répond à la problématique.

Décryptage :
Vous pouvez par exemple, après avoir rappelé la problématique et le plan, en ouverture, poser la question de la difficile reconnaissance du génocide des Arméniens après 1916.

 

QUESTION PROBLEMATISEE – Sortir de la guerre : la tentative de construction d’un ordre des nations démocratiques

Cf. : leçon SORTIR DE LA GUERRE : LA TENTATIVE DE CONSTRUCTION D’UN ORDRE DES NATIONS DEMOCRATIQUES et méthode QUESTION PROBLEMATISEE

Sujet : 1917-1923 : comment sortir de la guerre?
Vous décrirez les processus de règlement du conflit armé ainsi que son bilan humain et matériel et les modalités pour le surmonter.

CORRECTION :

Sortir de la Grande Guerre ne consiste pas seulement à déposer les armes, L’enjeu est de retrouver la  vie en paix après une guerre longue et traumatisante.
Pourquoi l’expérience de la Grande Guerre rend-elle difficile le retour à la paix ?
De 1917 à 1923, armistices et traités de paix mettent fin aux combats et tentent d’établir une paix durable entre les États (partie 1). Mais l’expérience de la guerre a profondément marqué les individus et les sociétés (partie 2). La reconstruction, tant à l’échelle individuelle que collective, est longue et difficile (partie 3).        

(Idée générale 1 : ) La diplomatie est l’outil traditionnel des sorties de guerre. Elle recompose territorialement l’Europe, impose des sanctions aux vaincus et donne naissance à un nouvel ordre mondial.
(Idée secondaire 1 : ) Les armistices et les traités de paix mettent peu à peu fin au conflit. De 1918 à 1923, différents traités de paix sont signés, inspirés par les Quatorze Points du président Wilson. Ils redessinent l’Europe en tentant de tenir compte des nationalités pour établir une paix durable.
(Exemples : ) Les traités signés à la conférence de la Paix (janvier à juin 1919) démantèlent les empires. Ils laissent place à une Europe des nations et créent la Société des Nations (SDN) pour instituer de nouvelles relations entre les États.
(Idée secondaire 2 : ) Mais les chemins vers la paix sont difficiles et les traités ne font pas l’unanimité. Celui de Versailles (1919) ou celui de Sèvres (1920), par exemple, sont mal acceptés ou contestés par les vaincus qui ont été exclus des négociations, tandis que dans le camp des vainqueurs, certains, comme l’Italie, s’estiment lésés.
(Exemples : ) L’Allemagne vit le traité de Versailles comme un « Diktat»; la Turquie s’engage dans une guerre contre la Grèce qui aboutit, en 1923, à la signature du traité de Lausanne, dernier traité de paix de la Grande Guerre.

(Idée générale 2 : ) Sortir de la guerre, c’est aussi, pour les sociétés et les individus qui ont vécu le conflit, parvenir à se détacher des violences de la guerre et retrouver la vie en paix. Du fait du caractère total du conflit et des empreintes profondes qu’il a inscrites, ce processus est long et difficile. L’abandon de l’uniforme, pour plus de 60 millions de démobilisés, n’est qu’une étape dans le retour à la vie civile.
(Idée secondaire 1: ) Après les longues démobilisations militaires, il s’agit pour les anciens combattants de se réinsérer dans la vie civile. La réinsertion professionnelle, même accompagnée par les pouvoirs publics, est difficile pour nombre d’entre eux.
(Exemple : ) En France, la démobilisation des 6 millions de soldats s’étend jusqu’en 1921. Les gueules cassées témoignent de la violence des combats et de la difficulté à retrouver une place dans la société.
(Idée secondaire 2 : ) Le retour au foyer est troublé par l’expérience de guerre que nombre d’anciens combattants peinent à mettre à distance. Les blessures physiques et psychiques (difficiles à quantifier mais bien réelles) marquent durablement leur existence.
(Exemple : ) Les associations d’anciens combattants se multiplient pour les soutenir. C’est en France que le mouvement est le plus puissant, la moitié des anciens combattants en font partie.

(Idée générale 3 : ) Le caractère total et la durée de la guerre expliquent le très lourd bilan matériel et humain auquel les sociétés et les individus doivent faire face et qui rend la sortie de guerre difficile. Sortir de la guerre nécessite une reconstruction longue et coûteuse. Cela implique aussi de rendre hommage aux millions de morts pour dépasser le deuil de masse auquel la guerre a donné lieu.
(Idée secondaire 1 : ) Les dommages matériels sont considérables dans les zones où se sont déroulés les combats. Les impacts environnementaux touchent les espaces agricoles et forestiers et les rendent impropres à  toute utilisation.
(Exemple : ) Le Nord et l’Est de la France humaine.sont particulièrement touchés. Les autorités définissent une zone rouge interdite  à toute activité humaine.
(Idée secondaire 2 : ) Le bilan humain est sans précédent: 10 millions de morts et de disparus auxquels s’ajoutent 20 millions de blessés. Le poids des morts sur les vivants est considérable. Leur sacrifice s’inscrit dans le paysage et les mémoires.             (Exemples : ) Nécropoles nationales, monuments aux morts, culte du Soldat inconnu participent à la construction d’une mémoire collective de la guerre.

(Réponse à la problématique : ) Sortir de la Grande Guerre est un processus long et complexe qui implique plusieurs étapes : traités de paix, démobilisations et reconstruction des sociétés meurtries par cette guerre totale. Les chemins pour retrouver et établir une paix durable sont difficiles.
(Ouverture : ) L’entrée de l’Allemagne dans la SDN en 1926 laisse espérer une paix durable. Mais à l’échelle des individus et des sociétés, la sortie de guerre semble interminable. Sortir de la guerre est-il alors synonyme de paix retrouvée ?

 

QUESTION PROBLEMATISEE (guidée) – Des mobilités généralisées

Cf. : Leçon sur DES MOBILITES GENERALISEES et fiche de méthode de la QUESTION PROBLEMATISEE

Sujet : (Une question… : ) Pourquoi les mobilités internationales sont-elles un des principaux facteurs de transformation du monde?
(… problématisée : ) Vous décrirez les différents types d’espaces et de flux de personnes dans le monde (y compris le tourisme) ainsi que les transformations territoriales qu’elles entraînent.

CORRECTION :

1. Un travail de préparation du plan est nécessaire, rapidement au brouillon (pas plus de 5 mn).

2. Rédigez l’INTRODUCTION  :

  • La problématique, fournie par le sujet qui est déjà une question. La formule « question problématisée » indique que la problématique n’est pas à construire;
  • La présentation du plan choisi pour la réponse :

Les mobilités internationales sont un des phénomènes géographiques les plus marquants de notre époque : aujourd’hui, plus de 250 millions de personnes sont des migrants : c’est à dire des personnes ayant quitté leur pays d’origine pour une longue durée. Et le nombre de touristes internationaux n’a jamais été aussi important. Nous allons présenter la diversité et la complexité des différents espaces où ces flux de personnes se réalisent ainsi que les transformations territoriales qu’elles entraînent.

3. Rédigez directement au propre votre DEVELOPPEMENT en deux ou trois parties, à partir de votre plan au brouillon.
Appuyez-vos idées générales sur les notions et le vocabulaire spécifique ainsi que des exemples précis (dates, acteurs, lieux…):

Les migrations touchent la plupart des régions du globe. Certaines régions font office de repoussoir : les pays en guerre (Afrique centrale, Moyen-Orient), les zones en crise économique durable (pays enclavés, PMA) constituent les principales régions émettrices. D’autres régions sont réceptrices. Elles se situent généralement à proximité des précédentes : Nigeria ou Afrique du sud en Afrique, Turquie, Liban ou Jordanie au Moyen-Orient. Entre les deux, on trouve des pays de transit tels que le Mexique, le Maroc ou la Turquie. Certains espaces concentrent de fortes mobilités liées au travail, telles que l’Afrique de l’Ouest, l’Amérique du Nord ou l’Europe, qui constituent aussi avec les pétromonarchies du Golfe persique, les destinations les plus prisées.L’espace Schengen constitue un espace unique de libre circulation de ses habitants, qui intéresse aussi beaucoup les voisins d’Europe de l’Est (migrations « Est-Ouest »). Enfin, le réchauffement climatique et la montée des eaux promettent d’engendrer de fortes migrations à partir des littoraux.
On distingue parmi les migrations différents types en fonction des parcours mais aussi des motivations. Les migrations contraintes de pauvres entre les espaces en tension et leurs espaces voisins sont dites « Sud-Sud », nombreuses dans les régions les moins avancées. Les migrations voulues de riches (« Nord-Nord » ou « Nord-Sud ») se distinguent par l’emploi du terme « expatriation ».
A ces changements de résidence, il faut aussi ajouter le tourisme international, constitué de mobilités de moins de un an. Il concerne les populations riches des pays développés et des pays émergents (Chine, Inde, Brésil…) qui se dirigent de préférence vers l’Amérique du Nord et les Caraïbes, L’Europe et la Méditerranée et l’Asie du Sud-Est-Pacifique. Leurs destinations sont le plus souvent les régions balnéaires et les espaces concentrant un grand nombre de sites d’intérêt culturel. La Méditerranée, premier espace touristique mondial, est une excellente synthèse des deux. Elle a aussi la particularité d’être un espace d’intenses migrations, souvent clandestines, d’Afrique et d’Asie vers l’Europe. Elle reflète donc les fortes inégalités entre riches qui se déplacent légalement pour le plaisir et pauvres qui migrent illégalement sous la contrainte.

(Phrase de transition : ) Ces mobilités plurielles (résume la partie précédente) entraînent inévitablement des transformations des territoires (partie à venir…) qu’elles concernent. Les migrations clandestines posent de nombreux problèmes économiques, sanitaires ou sécuritaires. Les pays pauvres n’ont souvent pas les moyens de les contrôler. Les pays riches, eux, ont tendance à les criminaliser dans une logique d’immigration « choisie ». Cela conduit à un surveillance accrue de certaines zones de passage : par l’organisme européen Frontex en Méditerranée ou par la construction de murs sensés protéger les Etats-Unis, l’Afrique du Sud ou certains pays d’Europe centrale. Ces aménagements conduisent le plus souvent à accentuer l’insécurité sur ces itinéraires tenus par des groupes criminels (Gibraltar, Cyclades, frontière EUA-Mexique…), et favorisent de nouvelles routes migratoires.
Dans les pays récepteurs, les migrants on tendance à se regrouper en quartiers « ethniques » qui entraînent la ségrégation et la ghettoïsation, l’économie informelle, l’exploitation et l’insécurité. En France, ce phénomène touche en particulier les « cités », grands ensembles architecturaux des années 1960-1970. Certains peuples traditionnellement tournés vers l’émigration constituent de véritables diasporas (50 millions de Chinois hors de Chine, Indiens, Libanais…) qui constituent autant de réseaux favorisant de nouvelles migrations.
Dans les pays émetteurs, les effets de l’émigration se traduisent par le dépeuplement relatif de certaines régions (Sicile touchée par le phénomène depuis plus d’un siècle) mais également par les retombées des rémittences. Cet argent envoyé à leurs familles par les émigrés y constitue une bonne part des revenus et permet de se nourrir, de construire et d’investir.
Le tourisme international connaît une croissance spectaculaire avec le développement des pays émergents et s’est parfois massifié. Les aménagements qu’il suppose (transports, hébergements, services) et des flux de plus en plus importants posent la question de la dégradation des sites (littoraux balnéaires) ou des nuisances (Barcelone, Venise) : on parle désormais de surtourisme.

4. La CONCLUSION doit fournir des éléments de réponse à la question posée : elle doit utiliser les termes de la question :

La croissance démographique rapide et les progrès en matières de transports ont entraîné une généralisation et une accélération des mobilités sous toutes ses formes à l’échelle mondiale : plus ou moins lointaines, plus ou moins durables, plus ou moins désirées. Ces flux de personnes sont l’un de principaux levier des échanges mondiaux, l’une des principales composantes de la mondialisation. Leur croissance rapide marque profondément les territoires et soulève de nombreux débats qu’on peut résumer en une question : les migrations sont-elles une opportunité (Ex.: transfert de main-d’oeuvre vers l’Europe viellissante) ou un fardeau (Ex. surtourisme)?

ANALYSE DE DOCUMENTS – Les espaces ruraux : multifonctionnalité ou fragmentation?

Cf. : Leçon sur LES ESPACES RURAUX : MULTIFONCTIONNALITE OU FRAGMENTATION? et fiche de méthode de l’ANALYSE DE DOCUMENT(S)

CORRECTION :

Les documents que nous allons analyser sont un dessin de presse du Suisse Chappatte publié en 2018 sur son site Internet ainsi qu’un article d’après une publication scientifique de 2012 portant sur les transformations des espaces ruraux québécois. Nous verrons comment ils illustrent les transformations des espaces ruraux et les conflits que cela peut entraîner. Ces documents illustrent davantage la réalité des campagnes dans les pays développés (Suisse, Canada) que dans les pays en développement.

Les espaces ruraux sont par définition une zone intermédiaire entre les villes et la nature. Moins denses que les villes, ils sont néanmoins largement anthropisés contrairement aux espaces naturels. L’anthropisation est donc la toute première des transformations que connaissent et qui définit les espaces ruraux. Il y a ainsi de fortes chances que cet arbre-là (dessin de Chappatte) ait été planté par l’homme et que la vie de ce rouge-gorge soit intimement liée aux activités agricoles des hommes. Ainsi ne sont-ils pas vraiment naturels, mais largement liés à l’anthropisation.
L’industrialisation récente de l’agriculture (mécanisation, intrants, sélection, OGM) a largement transformé les espaces agricoles traditionnels. Un des effets les plus spectaculaires sont les remembrements : rapidement, les petites exploitations soumises à la pression de grands groupes économiques ont fait faillite et leurs anciennes petites parcelles ont été réorganisées en vastes exploitations ce qui a souvent conduit à la disparition des paysages traditionnels (bocage par exemple) pour faire place à la monotonie des openfield (vastes surfaces uniformément vertes du dessin de Chappatte).
L’industrialisation s’est accompagnée de l’urbanisation conduisant à la transition urbaine, dont l’étalement prévoit la disparition des espaces ruraux aux périphéries des villes. Cela se traduit par une artificialisation rapide (l’équivalent d’un département français chaque année…) par construction de lotissements et d’infrastructures (transports comme sur le dessin par exemple).
Dans de nombreux pays, ces mutations restent incontrôlées et conduisent à un mitage anarchique de l’espace rural par la ville, ce qui conduit à la périurbanisation, un entre-deux mêlant urbanité et ruralité. Le « Clos des champs » (la clé des champs?) de Chappatte, aménagement pourtant typiquement urbain, conçu pour des citadins, veut sans doute railler l’emballage campagnard de nombreux lotissements sensés vendre un cadre privilégié, loin des fureurs de la ville.

Cela reflète une époque où l’écologie et la qualité de la vie sont devenus des enjeux majeurs. On n’est alors pas étonnés de constater des mouvement d‘exode urbain ou de mobilités pendulaires des citadins vers les campagnes. Au début du confinement, les départs des villes vers les campagnes ont été nombreux. Ces populations néo-rurales, souvent plus aisées que les populations rurales traditionnelles, contribuent à un embourgeoisement des campagnes et au développement de nouvelles activités (« massothérapie, herboristerie, restaurants gastronomiques »…).
Toutes ces transformations conduisent à une diversification des activités rurales de plus en plus marquées par la multifonctionnalité (résidence, agriculture, industrie, infrastructures, loisirs, tourisme…) qui induit une fragmentation des espaces.

La multiplication des activités et des fractures a tendance à multiplier les conflits d’usage.
L’urbanisation exerce une forte pression sur les exploitations agricoles périurbaines soumises à la spéculation foncière. Un lotissement en plus, c’est souvent une exploitation agricole en moins, comme le caricature Chappatte. Une autoroute en plus, ce sont des ennuis pour toutes les activités qui se trouvent le long de son tracé, comme nous l’avons vu au travers de Rural! d’Etienne Davodeau, avec l’exemple de l’A87 qui a profondément affecté les riverains agriculteurs ou néo-ruraux entre Le Mans et Angers.
Autre conflit illustré par Laurie Guimond et Myriam Simard, l’embourgeoisement conduit au renchérissement de la vie dans les campagnes et à une autre forme de spéculation qui rend les logements inabordables pour beaucoup de gens, y compris les populations locales. Bref, certains pauvres ne trouvent plus à loger dans le village de leur famille, ce qui crée un « ressentiment des ruraux de longue date se sentant dépossédés de leur milieu de vie sociale et exclus indirectement des nouvelles activités ». C’est un phénomène que le confinement actuel a d’ailleurs permis d’observer en l’exacerbant : de nombreux ruraux se sont plaints de l’arrivée de « Parisiens » présentés comme des indésirables.
Enfin, le problème majeur qu’illustre Chappatte est peut-être le risque majeur que toutes ces transformations et pressions diverses font peser sur notre environnement. Le conflit entre nécessaire protection et indispensables activités économiques est sans doute un des plus prégnant aujourd’hui. Les nuisances et les pollutions que Chappatte réussit presque à nous faire sentir et entendre menacent la biodiversité (un million d’espèces animales menacées ?), souillent l’air, les sols, épuisés par l’agriculture productiviste et l’eau. Schématiquement, ce conflit oppose des écologistes, des décroissants et des scientifiques d’un côté aux climatosceptiques et aux chantres du productivisme carboné de l’autre.

On vient de le voir au travers de ces deux documents, entre caricature et recherche scientifique, les espaces ruraux sont soumis à de profondes et rapides transformations liées à l’industrialisation et à l’urbanisation, qui conduisent à leur fragmentation et à la multiplication des conflits d’usage. Ces compétitions ne doivent pas cacher l’enjeu majeur de la protection de notre environnement, d’autant plus sensible dans les campagnes, qui illustrent pour beaucoup un idéal d’aménagement raisonnable, entre nature et culture.

ANALYSE DE DOCUMENT – Le modèle britannique et son influence (XVIIe-XVIIIe siècles)

Cf. : Leçon sur LE MODELE BRITANNIQUE ET SON INFLUENCE (XVIIe-XVIIIe siècles et fiche de méthode de l’ANALYSE DE DOCUMENT(S)

CONSIGNE : A partir des documents et de vos connaissances, montrez que ces auteurs, en prenant exemple sur l’Angleterre, critiquent implicitement le régime politique français.

Documents :

CORRECTION :

Les textes soumis à notre analyse sont deux brefs extraits tirés des Lettres philosophiques (1734) de Voltaire et de L’esprit des lois de Montesquieu (1748). Ces deux auteurs sont considérés comme faisant partie des chefs de file de la philosophie des Lumières, un mouvement intellectuel avant-gardiste européen qui donnera son nom au XVIIIe siècle. Ce siècle est d’ailleurs une période d’opposition entre la France et l’Angleterre, tant géopolitique que politique. Les deux puissances européennes incarnent en effet deux modèles diamétralement opposés.
Nous montrerons qu’en prenant résolument exemple sur l’Angleterre, ces auteurs formulent une critique acérée du système français.

L’Angleterre exerce une attraction sur les philosophes français. Les écrits de Thomas More (L’utopie) ou de John Locke ont connu une diffusion internationale et les événements du XVIIe siècle (régicide de Charles 1er et Glorious Revolution) ont eu un immense retentissement en Europe. Son développement économique rapide fait leur admiration. Voltaire a même séjourné plusieurs années à Londres.
Il insiste sur le rôle de la Chambre des Communes (document 1, ligne 3). Moins prestigieuse que celle des Lords qui forme avec elle le Parlement, elle a davantage de légitimité selon lui (doc. 1, l. 4), car ses représentants sont élus (au suffrage censitaire). Cela exprime le principe politique de la délégation et du parlementarisme (parlementer pour trouver un consensus par des décisions collégiales, généralement par le vote).
En effet, depuis la Glorieuse Révolution et le Bill of Rights (1689), sorte de constitution, les rois d’Angleterre voient leur pouvoir politique limité. Le Parlement détient en fait le pouvoir législatif et vote le budget de l’Etat (dont l’impôt (doc. 1, l. 4), les rois conservant néanmoins le pouvoir exécutif permettant d’appliquer les lois.
Selon nos philosophes, ce système permet l’adoption de lois justes car précises (doc. 2, l. 2 et 3), un impôt pour tous (principe d’égalité fiscale) mais réparti progressivement en fonction de la richesse (doc. 1, l. 5 à 7). Le système judiciaire qui fait appel à des jurés fait lui aussi l’admiration de Montesquieu (l. 4 à 6). Depuis l’Habeas Corpus de 1679, les sujets anglais bénéficient de la sûreté qui les protège contre les jugements arbitraires.
Un roi qui gouverne, des représentants qui légifèrent, des jugements indépendants : la monarchie constitutionnelle et parlementaire anglaise incarne le principe de la séparation des pouvoirs, cher à Montesquieu (L’esprit des lois).

Derrière cette description favorable de l’Angleterre, on devine une critique implicite de la France. Sans jamais la citer, on l’entrevoit derrière la référence aux « Etats despotiques » (doc. 2, l.1) et à l’absolutisme de la monarchie française, qui sert alors de modèle à de nombreux Etats européens, où les rois depuis le XVIe siècle ont conquis et accaparés la plus grande partie des pouvoirs, politique, judiciaire, militaire et économique.
AU XVIIIe siècle, ils ont définitivement domestiqué les grands seigneurs, réduits à faire la cour et dont le conseil féodal a perdu ses attributions au profit de conseils nommés par le souverain. Par l’administration, l’impôt et la guerre, les rois de France imposent leurs prérogatives au Royaume, mises en scène de façon grandiloquente à Versailles.
Le pouvoir des rois, «  de droit divin », sans partage, autorise le souverain à exercer lui-même la justice, de façon la plus « arbitraire » (doc.1, l. 7) grâce aux lettre de cachet qui lui permettent de faire incarcérer n’importe-qui sans motif précis, de rendre et de faire appliquer des jugements à discrétion. Ce système judiciaire injuste se reflète dans la plupart des tribunaux où les juges en dehors de tout cadre légal peuvent laisser libre cours à leurs interprétations personnelles.
Si les philosophes prennent la précaution de ne pas citer explicitement le Royaume de France, c’est précisément parce-que, la liberté d’expression n’y existant pas vraiment (au contraire de l’Angleterre depuis 1695…), toute attaque directe peut y conduire au cachot et à l’échafaud, sur simple lettre de cachet signée par le roi.

Nous avons donc vu comment l’Angleterre s’impose comme un modèle de bon gouvernement aux yeux des philosophes français du XVIIIe siècle, au travers de la délégation, du parlementarisme ou de la justice. La France absolutiste des Bourbons, « despotique » et « arbitraire » fait figure de repoussoir. En 1734, Voltaire publie ses Lettres anglaises popularisant un modèle anglais qui influencera profondément les revendications de la Révolution française (1789-1799).

ANALYSE DE DOCUMENT – La mise en œuvre du projet républicain

Cf. : Leçon sur LA MISE EN OEUVRE DU PROJET REPUBLICAIN et fiche de méthode de l’ANALYSE DE DOCUMENT(S)

CORRECTION façon plan détaillé :

Introduction :
Le document que nous allons analyser est un tableau peint par Alfred-Henry Bramtot en 1890, intitulé Le suffrage universel. Les dernières décennies du XIXe siècle en France sont marquées par l’affirmation durable de la IIIe République, mais aussi par des mouvements de contestation boulangiste et anarchiste. Ce tableau est une commande devant servir à décorer la Mairie des Lilas à Paris.

Nous allons voir comment il met en évidence les valeurs républicaines ainsi que les moyens de leur diffusion dans une société qui s’unifie progressivement.

1. Les valeurs républicaines
  • La souveraineté de la nation/du peuple :
    • Titre de l’œuvre : Le suffrage universel, expression de la volonté populaire
    • Variété des tenues, professions, classes sociales : bourgeois, boucher, ouvrier/paysan, professeur…
    • MAIS CRITIQUE : exclusion des femmes, mineures politiques (jeune fille et Marianne tronquées)
  • L’égalité : ouvrier, paysan, artisan et bourgeois égaux en droits MAIS CRITIQUE : pas d’isoloir, qui garantit l’indépendance du vote
  • Le parlementarisme, la délégation : le bulletin transmis de l’« instituteur » au « maire » (le scrutateur)
  • Les libertés fondamentales : bonnet phrygien de Marianne

Transition : Le tableau de Bramtot illustre le déroulement, les gestes et les valeurs politiques héritées de la Révolution française (drapeau tricolore présent deux fois sur le tableau) mais qu’il reste à faire adopter par tous les Français.

2. Les moyens de diffusion des valeurs républicaines
  • Le maire, représentant et intermédiaire de proximité du peuple et de l’Etat, élu au suffrage universel masculin et son administration (plusieurs assesseurs)
  • L’école républicaine, souvent associée au bâtiment de la mairie : lois Ferry 1881-1885 –> Ecole gratuite, obligatoire jusqu’à 13 ans et laïque (égalitaire MAIS CRITIQUE garçons et filles séparés avec programmes différents, genrés) –> Instruction et langue française pour tous : importance de l’écriture, très présente dans le tableau
  • Le patriotisme revanchard contre l’Allemagne, le service militaire obligatoire pour tous (1889), les bataillons scolaires, la colonisation
  • Les symboles : Marianne, le drapeau…

Conclusion :
Les valeurs républicaines inspirées de la Révolution française s’enracinent durablement dans les premiers temps de la IIIe République, grâce aux élus locaux, courroies de transmission entre l’Etat et les citoyens, mais aussi grâce à l’école de la République et à l’armée, devenues obligatoires, véritables creuset de la nation française. La tableau de Bramtot, exposé dans une mairie est conçu comme une œuvre de propagande  exaltant les valeurs républicaines. Les adversaires de la République perdent alors rapidement leur influence (monarchistes, anarchistes persécutés) et en 1914, c’est une France pratiquement unanime qui entrera en guerre.