Parallélisme – It’s a Man’s World

 

Samedi 10 novembre 2018, lors d’une visite au Mahj pour admirer l’exposition consacrée à Sigmund Freud, nous tombons, ma chérie et moi-même sur ces quelques lignes rédigées par Freud:

« Dans le cours des siècles, la science a infligé à l’égoïsme naïf de l’humanité deux graves démentis. La première fois, ce fut lorsqu’elle a montré que la terre, loin d’être le centre de l’univers, ne forme qu’une parcelle insignifiante du système cosmique dont nous pouvons à peine nous représenter la grandeur. Cette première démonstration se rattache pour nous au nom de Copernic, (…). Le second démenti fut infligé à l’humanité par la recherche biologique, lorsqu’elle a réduit à rien les prétentions de l’homme à une place privilégiée dans l’ordre de la création, en établissant sa descendance du règne animal et en montrant l’indestructibilité de sa nature animale. Cette dernière révolution s’est accomplie de nos jours, à la suite des travaux de Ch. Darwin, (…). Un troisième démenti sera infligé à la mégalomanie humaine par la recherche psychologique de nos jours qui se propose de montrer au moi qu’il n’est seulement pas maître dans sa propre maison, qu’il en est réduit à se contenter de renseignements rares et fragmentaires sur ce qui se passe, en dehors de sa conscience, dans sa vie psychique.(…) ».
Sigmund Freud, Introduction à la psychanalyse (1916),
Ile partie, chap. 18, trad. S. Jankélévitch, Payot, colt. «Petite Bibliothèque», 1975, p. 266-267.

Un beau et surprenant parallélisme entre trois révolutions dans des domaines différents.

Mais qu’est-ce que le parallélisme ? Que disons-nous aux élèves de collège ? Bien sûr, nous parlons des rails du train, de l’écartement constant, des droites qui ne se coupent pas – mais une droite se coupe-t-elle, elle même ? – et nous pouvons aussi parler de droites qui ont une même direction.

Tout cela est tout à fait correct mais comment faire le lien entre « ne pas se couper » et « avoir la même direction » ? On trouve une réponse à cette question en formalisant la notion de parallélisme :
On dit que deux droites d et d’ sont parallèles lorsque
On vérifie alors que l’on obtient une relation d’équivalence sur l’ensemble des droites. L’ensemble des classes d’équivalence forme alors une partition de l’ensemble des droites et ainsi, chaque droite appartient alors à une unique classe : cette classe est appelée direction de la droite. Ainsi on peut affirmer avec rigueur que des droites parallèles sont des droites qui ont la même direction.

A ce propos, voici une référence dans le domaine de la géométrie axiomatique :

CHOQUET Gustave L’enseignement de la géométrie Ed.Hermann 1971

Curieux titre. Dans ce livre d’environ 180 pages, il y a environ une dizaine de figures, c’est peu pour un livre de géométrie, destiné à l’enseignement. On imagine qu’il va nous servir tous les jours dans les classes de collège et de lycée. D’ailleurs, l’avertissement précise  » Il [ce livre] pourra aussi être utilisé avec profit par les élèves de 15 à 18 ans sous la direction de leurs maîtres. » En fait, il s’agit d’une axiomatique de la géométrie et c’est précisément cette axiomatique qui sert de repère au professeurs de collège.

Ainsi, les trois révolutions citées par Freud ont une même direction, celle de la décentration de l’Homme vers plus d’humilité. Au sein de l’univers tout entier, sur terre dans le règne animal et enfin chez lui, dans « sa propre maison ». Une quatrième révolution doit avoir lieu, c’est celle de la décentration de l’homme, je veux dire de l’être humain de sexe masculin.

 

Les grandeurs, les unités et le calcul

Au collège, les grandeurs occupent un place importante et permettent d’ancrer les mathématiques dans le quotidien sinon dans le concret.

Un débat, tranché aujourd’hui (sic), est celui de la présence ou non des unités dans les calculs. Ce n’est pas de ce débat qu’il sera question dans cet article mais de deux situations qui montrent la puissance du calcul  sur et avec les grandeurs. On peut néanmoins comparer ce qui est dit aujourd’hui dans les programmes (Bulletin officiel n° 30 du 26-7-2018) :

Mener des calculs impliquant des grandeurs mesurables, notamment des grandeurs composées, exprimer les résultats dans les unités adaptées ;

Et ce qui était dit auparavant :

Mener des calculs impliquant des grandeurs mesurables, notamment des grandeurs composées, en conservant les unités.

Et se poser la question des raisons qui ont poussé à ce minuscule changement ? Pas de réponse ici, mais plutôt deux exemples qui plaident en faveur de la conservation des unités dans les calculs, c’est-à-dire du calcul sur les grandeurs.

Les situations
Situation 1 : Les volumes

On trouve fréquemment le type d’exercice suivant en classe de troisième :

Trouver la hauteur d’un cylindre ayant le même volume et le même rayon qu’un demi-sphère de rayon 9 cm.

Après avoir calculé le volume de la demi-sphère (486 cm3), on peut écrire et résoudre une équation :

 

Ainsi, après avoir posé une équation portant sur des grandeurs volumes, l’inconnue, c’est-à-dire la hauteur se voit naturellement associée à son unité, le cm.

Situation 2 : Hauteur d’eau

Sur le site de météo France, on trouve  la définition suivante :

Pluviomètre : Instrument météorologique destiné à mesurer la hauteur de précipitation pendant un intervalle de temps donné (en supposant uniformément répartie et non sujette à évaporation l’eau de précipitation tombée sur la surface terrestre). Cette hauteur de précipitation s’exprime en millimètres ou, de façon équivalente, en litres par mètre carré, que souvent l’on se contente d’appeler pour simplifier des litres. (Le litre, unité de capacité utilisée pour mesurer en décimètres cubes un volume de liquide ou de matière sèche, admet encore à titre provisoire deux symboles légaux : le « L » — majuscule, bien qu’il n’ait pas pour origine un nom propre — et le « l » — utilisé historiquement, mais prêtant à confusion avec le chiffre 1 ; l’unité de hauteur de précipitation s’écrit donc l/ ou L/.)

http://www.meteofrance.fr/publications/glossaire/153188-pluviometre

 

Comment démontrer l’équivalence exprimée ci-dessus en gras ? Voici une réponse possible :

D’où appellation « hauteur » pour une quantité de pluie par unité de surface. Ainsi, le calcul sur les grandeurs a aussi un pouvoir de démonstration.

A lire

http://yves.chevallard.free.fr/spip/spip/IMG/pdf/Les_grandeurs_au_college_I.pdf

A écouter

 

SIKRA, de l’analyse d’un dessin à la construction d’une figure

Victor Vasarely, de son vrai nom Vásárhelyi Gy?z? (Pécs, 9 avril 1906 – Paris, 15 mars 1997), est le plasticien hongrois reconnu comme étant le père de l’art optique ou Op art. Ses œuvres sont autant d’occasions de faire de la géométrie au collège.

Niveau

Fin de cycle 3, sixième

Pré-requis
  • Avoir déjà analysé une figure dans le but de comprendre comment elle peut être construite (nommer, coder, mesurer, etc)
  • Avoir déjà manipulé un logiciel de géométrie dynamique (GeoGebra). Voir par exemple : Geogebra-en-6eme-premiere-utilisation
Objectifs / B.0
  • Comprendre le passage du dessin à la figure ou, comme le dit explicitement le B.O, dans les compétences travaillées :

    (…) passer progressivement de la perception au contrôle par les instruments pour amorcer des raisonnements s’appuyant uniquement sur des propriétés des figures et sur des relations entre objets ;

  • Réaliser un programme de construction
  • Établir un petit raisonnement (pour le motif 6, défi)
  • Croiser les enseignements de Mathématiques et d’Arts Plastiques, comme le précise le B.O :

    Les activités de reconnaissance et de construction de figures et d’objets géométriques peuvent s’appuyer sur des réalisations artistiques (peinture, sculpture, architecture, photographie, etc.).

Déroulement
  • Commencer par présenter l’oeuvre (et l’artiste) à l’aide d’un vidéo-projecteur. Faire commenter cette oeuvre par la classe. Le but est de faire le lien avec la géométrie. Distribuer ensuite les énoncés. Préciser que les deux derniers motifs sont des défis. En effet, leur construction rigoureuse reste très difficile pour des élèves de sixième. Dire que nous allons devoir comprendre comment ont été construits ces motifs pour pouvoir, à notre tour, les reproduire.
  • Mettre ensuite les élèves en situation de recherche, ils devront, à l’aide de leurs instruments de géométrie, prendre des informations sur les dessins fournis. On veillera alors à ce que les points soient nommés, les dessins codés, des traits représentants des alignements tracés, etc.
    Figures n°1 et 2 : les figures sont simples et à la portée de tous.
    Figure n°3 : les élèves devront trouver comment obtenir le centre du cercle ainsi que son rayon. Le milieu du côté comme point de contact du cercle avec le carré fait partie du domaine de la figure géométrique construite. Certains élèves, restant dans le domaine de la perception,  tenteront simplement de faire « toucher » le cercle. Cette question prendra tout son sens lors du passage à la géométrie dynamique, sous GeoGebra. On pourra alors zoomer sur un point « douteux » :

    Figure n°4 : une analyse trop peu précise du dessin mènera certains élèves à prendre comme rayon le quart du côté du carré au lieu du quart de sa diagonale.
    Figure n°5 : une construction approximative peut être acceptée.
    Figure n°6 : certains élèves vont proposer la construction suivante basée sur des milieux :

    Il conviendra, dans un premier temps, de valider cette construction. On pourra néanmoins questionner les élèves sur la nature du triangle obtenu. Leur réponse est unanime, il est équilatéral. Cette affirmation sera mise en défaut sous GeoGebra mais dans un second temps.
    Figure n°7 : Elle reste très difficile et peut n’être proposée qu’en « super défi » comme une façon de montrer aux élèves qu’il reste du chemin à parcourir et que, souvent, en mathématiques, certains problèmes restent partiellement résolus.

  • Dans un second temps, on pourra demander aux élèves de rédiger des programmes de construction correspondants à leurs analyses. On pourra distribuer des fiches à compléter qui pourront être bien pratique pour les  scanner et projeter. Dans ce travail, une attention particulière sera portée sur le vocabulaire utilisé. On pourra alors distribuer un « lexique » des programmes de constructions.
    Voici quelques productions d’élèves qui montrent, au travers du vocabulaire utilisé, le passage de la géométrie perceptive à la géométrie construite (cliquer pour agrandir) :

  • Dans un troisième temps (ou indépendamment de la rédaction des programmes de construction, voire même en faisant des aller-retours entre les deux tâches),  les élèves pourront réaliser leurs constructions sous GeoGebra. On pourra utiliser une version allégée du logiciel avec seulement les menus nécessaires.
    Ce sera alors l’occasion de revenir sur le motif n°6 en utilisant l’outil Distance ou Longueur :

    On relancera les élèves en leur demandant de comparer la mesure du côté du carré et celle du triangle à construire.
  • Pour finir, un bilan sur le motif n°6 permettra à tous d’avoir accès à une construction du triangle équilatéral. Une attention particulière sera lors portée davantage sur le vocabulaire que sur la recherche de la construction. En défi, on pourra proposer d’expliquer comment on peut être certain que le triangle obtenu est équilatéral. ce sera alors l’occasion de revenir sur la définition du cercle.
Prolongements
  • On pourra demander aux élèves, ou à un groupe d’élèves, de se charger de réaliser l’oeuvre toute entière sous GeoGebra.
  • Il existe d’autres œuvres susceptibles d’être travaillées dans le cours de mathématiques. Citons, par exemple Theo van Doesburg avec Arithmetic Composition, très intéressante pour construire des figures « à l’infini » :
Fichiers utiles

Énoncé_analyse.pdf
Énoncé_programme.pdf
Le_sixième_motif.pdf
Bilans_possibles.pdf
Affiche_Sikra_A3.pdf

références / liens
  • A propos de l’analyse de figures géométriques et de la distinction entre dessin géométrique et figure géométrique, il faut citer l’excellent ouvrage de Jean-Philippe Rouquès et Hélène Staïner :  « Des maths Ensemble et Pour Chacun – 6ème » édité par le CRDP des Pays de Loire.
  • Le site de la fondation Vasarely à Aix-en Provence.
  • L’IREM de Paris-Nord propose une série d’activités basée sur la tortue Logo (celle des 80’s) qui peuvent sans doute être adaptées au dessin sous Scratch.
  • Le Petit vert n°132 de l’APMEP région Lorraine, page 37 à 45, propose  un dossier Maths & Arts en classe de sixième assez complet.
Pour finir

La Hongrie, pays d’origine de Vasarely est liée à un bon nombre de célébrités. C’est la remarque que nous nous sommes faîtes mon épouse et moi même en visitant Budapest, il y a quelques jours. Citons, pour la photo, Robert Capa, pour la musique, Franz (Ferenc)  Liszt et Béla Bartók, pour les mathématiques,  Imre Lakatos et son formidable Preuves et Réfutations : essai sur la logique de la découverte mathématique, Paris, Éditions Hermann, 1984, et peut-être Ern? Rubik et son invention infernale des 80’s et puis puisqu’une exposition a lieu actuellement à Budapest sur cette artiste, Frida Kahlo par son père d’origine germano-austro-hongroise !

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