Jules Isaac

Jules ISAAC

(1877-1963)

Jules Isaac n’a fait dans l’Yonne qu’un rapide passage à Sens au gré des nominations. Nous espérons pouvoir bientôt consulter les Annuaires de l’Yonne du début du XXe siècle pour préciser la durée de son passage à Sens (Yonne). Jules Isaac est essentiellement connu des enseignants comme coauteur d’une collection de manuels d’histoire qui furent parmi les plus utilisés. Notons à ce sujet que c’est sur la recommandation de Lavisse qu’il entra chez Hachette ; nous constatons ainsi, une fois de plus, que c’est par recommandation et cooptation que les maisons d’édition recrutent leurs nouveaux auteurs.

Cette notice est la compilation de plusieurs articles de Dominique Borne, de Wikipedia, du site du judaïsme en Alsace-Lorraine, des Amitiés Judéo-chrétiennes de France, du quotidien l’Yonne républicaine,  que nous remercions.

Jules Isaac, historien, né le 18 novembre 1877 à Rennes et décédé le 5 septembre 1963 à Aix-en-Provence, est l’auteur, à la suite d’Albert Malet, de célèbres manuels d’histoire, usuellement appelés « Malet et Isaac ».

Son père, militaire de carrière, juif alsacien qui a opté pour la France en 1871, est issu d’une famille de juifs patriotes : son grand-père paternel Élias Isaac était trompette-major dans un régiment d’artillerie, son père Marx Isaac (1829-1891) accomplit une belle carrière d’officier sorti du rang qui lui permit de devenir lieutenant-colonel d’artillerie et officier de la Légion d’honneur, et son oncle Victor-Marx Isaac (1834-1891), sous-officier d’artillerie décoré de la Médaille militaire, obtint lui aussi la Légion d’honneur en tant que capitaine de l’armée territoriale.

À treize ans, il perd ses deux parents à quelques mois d’intervalle, et devient interne au lycée Lakanal à Sceaux. À l’âge de vingt ans, il fait la connaissance de Charles Péguy ; c’est le début d’une longue amitié, marquée en particulier par la création des Cahiers de la Quinzaine. Avec Péguy, Isaac s’engage dans le camp dreyfusard. Reçu à l’agrégation d’histoire, en 1902, année de son mariage avec Laure Ettinghausen, il enseigne aux lycées de Nice, Sens, Saint Etienne et Lyon. Il est introduit par Ernest Lavisse chez Hachette, qui publie la collection de manuels d’histoire d’Albert Malet. Isaac est d’abord chargé de rédiger des aide-mémoire pour le baccalauréat. Nommé professeur au lycée Louis-le-Grand, puis au lycée Saint-Louis à Paris, il étend sa collaboration à des manuels pour l’enseignement primaire supérieur également issus de la collection Malet. C’est donc comme directeur de la collection fameuse des manuels « Mallet et Isaac » qu’il demeure présent dans la mémoire collective. Or, Mallet et Isaac n’ont jamais collaboré. Mallet rédigeait des manuels scolaires à grande diffusion dès avant la guerre. Il fut tué au combat en 1915. Au lendemain du conflit, Lavisse recommanda Isaac à Hachette qui cherchait un nouveau directeur de collection. Isaac était déjà un auteur de la maison à laquelle il avait donné des chronologies et des aide-mémoire. L’éditeur accepta mais, prudent autant que soucieux de rendre hommage au défunt, il souhaita faire figurer les deux noms sur la couverture. Les différents manuels de la collection connurent de nombreux remaniements au gré des changements de programmes…

Membre de la Ligue des droits de l’homme et du citoyen, puis du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes, Jules Isaac s’engage en faveur d’une meilleure compréhension entre Français et Allemands, et milite en particulier pour une révision des manuels scolaires. En 1936, il est nommé inspecteur général de l’Instruction publique.

Agé de 63 ans, en 1940, il est révoqué en vertu du statut discriminatoire des Juifs pris par le gouvernement de Vichy. « Il n’était pas admissible, déclare le ministre de l’éducation et académicien Abel Bonnard le 13 novembre 1942 dans le journal Gringoire, que l’histoire de France soit enseignée aux jeunes Français par un Isaac. » Il se réfugia en zone libre d’abord à Aix-en-Provence, puis lorsque les Allemands envahirent le Midi en 1942, il s’établit au Chambon-sur-Lignon chez son fils aîné Daniel, professeur au Collège Cévenol, et qui ne tarda pas à partir pour l’Espagne. Il s’installa alors à Riom, près de sa fille et de son gendre qui travaillait au Central de l’Agence Havas à Vichy. Impliqués dans un réseau de résistance, ces derniers furent arrêtés, ainsi que sa femme et son fils cadet Jean-Claude, par la Gestapo à Riom le 7 octobre 1943, puis déportés par les Allemands à Drancy puis à Auschwitz où ils furent tous tués, excepté son fils qui réussit à s’échapper d’un camp en Allemagne. En 1945, Jules Isaac est rétabli dans ses droits comme inspecteur général honoraire.

Jules Isaac consacre alors une grande partie de ses efforts à la recherche des causes de l’antisémitisme. Il publie Jésus et Israël, rédigé pendant la guerre, puis inspire la Charte de Seelisberg. Cofondateur, avec entre autres Edmond Fleg, et actif animateur des Amitiés judéo-chrétiennes en 1947, il s’emploie à combattre en particulier les racines chrétiennes du mal qui, si elles ne sont pas les seules, lui paraissent les plus profondes et encore vivaces dans la seconde moitié du xxe siècle. Son idée essentielle est de mettre en valeur la nature profondément juive du christianisme primitif. Il participe à la conférence judéo-chrétienne de Seelisberg où il propose avec le grand rabbin Kaplan dix-huit points de redressement de l’enseignement chrétien concernant Israël.

Jules Isaac ne cesse de lutter contre ce qu’il appelle : l’enseignement du mépris. Il dénonce les siècles de catéchèse qui ont persuadé les chrétiens de la perfidie juive et de son caractère satanique, soulignant le lien entre les pratiques de l’antisémitisme chrétien et le système hitlérien. En 1949, il intervient auprès du pape Pie XII pour que l’on révise la prière du Vendredi saint, pro perfidis judaeis, mentions offensantes pour les Juifs. Ce sera fait en 1959 par Jean XXIII, avant même que le concile Vatican II ne soit convoqué. Ce geste fut le point de départ d’une amitié avec Jean XXIII qui eut de l’influence dans la rédaction de la déclaration sur les religions non-chrétiennes Nostra Ætate, approuvée en 1965 par le concile Vatican II.

« Le 6 janvier 1956, à l’hôtel Lutetia, là où quelques années auparavant les survivants des camps d’extermination achevaient leur sinistre voyage, où les familles guettaient la moindre nouvelle des déportés, le Mouvement contre l’antisémitisme, le racisme et pour la paix (MRAP) décerne à Jules Isaac le prix de la fraternité. […] Le MRAP reconnaît ainsi le grand retentissement de Jésus et Israël et de Genèse de l’antisémitisme. »

Il s’éteint à Aix-en-Provence en 1963.

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Malet et Isaac est une célèbre collection de manuels historiques français de la première moitié du XXe siècle, dont les auteurs étaient Albert Malet et Jules Isaac.

Voici ce que dit la couverture des manuels Malet & Isaac édités par Hachette : « Un manuel classique, qui a formé des générations successives de lycéens: le Malet-Isaac occupe une place de choix dans la mémoire scolaire française. Son succès fut aussi la confirmation de ses qualités: un récit chronologique bien construit, écrit dans une langue claire, qui constitue un aide-mémoire de choix pour tous les publics. Pour les historiens, c’est aussi le témoignage de ce que fut la vulgarisation historique à l’intention des classes secondaires pendant près d’un demi-siècle. On sera alors étonné de voir à quel point cette entreprise a su s’ouvrir aux dimensions sociale et culturelle, à une vision qui dépasse le cadre national, loin des clichés d’une histoire trop exclusivement politique, nationaliste et attentive aux seules élites. »

About cm1

R. Timon, né en 1944 a été instituteur, maître formateur, auteur de manuels pédagogiques avant d’écrire pour le Webpédagogique des articles traitant de mathématiques et destinés aux élèves de CM1, CM2 et sixième.

Category(s): biographie

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