Contexte sanitaire oblige, plus besoin d’avions pour partir en exploration à l’autre bout du monde alors profitons des riches expositions de la Capitale. Elles fascinent et dominent notre domaine de la joaillerie, les « Pierres précieuses » sont mises à l’honneur à la grande galerie de l’évolution à Paris. C’est alors que nous descendons pour la visite dans les profondeurs de la terre, au niveau inférieur du musée, là où entrent en collision les plaques tectoniques qui génèrent les immenses chaînes de montagnes, en dessous : des squelettes, des mammifères et des dinosaures du Rez de chaussée. Première découverte, dans une salle sombre et ronde, l’éclatant clip de la fleur de Fuchsia Van Cleef illuminée de rubis somptueux en serti mystérieux et d’une cascade de diamants.
Celle-ci est accompagnée d’un rubis brut encré dans le marbre qui nous révèle une beauté au naturel qui nous ensorcelle. Et l’histoire de ces rubis se déroule dans nos oreilles où l’on nous raconte les origines de ces pierres de « collision », issues de roches métamorphiques, les différents gisements… Puis des noms tels que « Mogok », « sang de pigeon » me font sourire et retiennent mon attention. En effet ces précieux rubis me fascinent et nourrissent mes folles envies d’aventure et de conquête de connaissance, précisément depuis mars 2020, lorsque j’ai écouté l’épisode #27 « Le Mystère de la Vallée des rubis » du podcast
Reprenons géographiquement : La localité de Mogok est située au cœur d’une vallée cachée dans les montagnes brumeuses du nord de la Birmanie et c’est de ces terres secrètes que sont issus les rubis les plus rouges, les plus rares et les envoûtants du monde. Et c’est en suivant attentivement la voix de Hugo Nazarenko, reporter français bercé par les récits d’aventure deJoseph Kessel que je découvre ce monde Atlantide. Il retourne en 2018 en Birmanie avec une seule idée en tête, suivre les traces de Kessel et c’est depuis le toit de son hôtel qu’il lit le roman « La vallée des Rubis » avec, en vue, la jungle dense et sa vallée dissimulée, là où quelque part sont cachés ces trésors.
Sa détermination pour découvrir la vallée est sans frein et c’est en arpentant Rangoun et le marché de Ningalabar qu’il soutire des contacts auprès des habitants. Tous lui parlent d’une femme, une grande marchande de pierres qui est originaire de la vallée et qui sait comment s’y rendre, on l’appelle « The Queen of Rubis ». Puis c’est lorsqu’il la trouve, cette femme charismatique au doigt orné d’un énorme rubis qu’il retrouve son âme d’enfant rêvant lorsqu’elle lui raconte son enfance et la première fois qu’elle a trouvé un rubis dans une plaque d’égout. Elle le fait passer derrière le comptoir et lui sort une boite avec d’énormes pierres, des Rubis « Sang de pigeon » éclatant d’un rouge franc teinté d’une pointe de bleu. Kessel décrit leur histoire :
» La légende assure qu’aux temps immémoriaux un aigle géant, survolant le monde, trouva dans les environs de Mogok une pierre énorme, qu’il prit d’abord pour un quartier de chair vive tant elle avait la couleur du sang le plus généreux, le plus pur. C’était une sorte de soleil empourpré. L’aigle emporta le premier rubis de l’univers sur la cime la plus aiguë de la vallée.
Ainsi naquit Mogok … »
Les yeux écarquillés, je les imagine et les associe à la vitrine de l’exposition mais il manque cette immersion totale, l’imaginaire ne fait pas tout; et mon âme solitaire fervente d’exotisme, de rencontres et de trésors alimente mon projet d’y aller un jour à mon tour.
Et comme Kessel l’a dit: « Les grands voyages ont ceci de merveilleux que leur enchantement commence avant le départ même. On ouvre les atlas, on rêve sur les cartes. On répète les noms magnifiques des villes inconnues… »
En 1955 à l’époque où Kessel entreprend son voyage, la destination est en dehors des clous, Mogok est nom de légende connu seulement des téméraires, la vallée est prodigieuse et ses entrailles ruissellent de pierres… Ce mythe, ce mystère, dans des terres perdues aux conditions de vie plus que primitives sont sillonnées par les plus dangereux dacoïts, bandits sans foi ni loi, et infestées de rebelles…
Dorénavant, la Région abrite près de 3 quarts des rubis de la planète et fait vivre plus de 100 000 personnes. Lorsque c’est à Hugo de la découvrir, la vallée est jalousement contrôlée par la junte militaire au pouvoir, elle fait face à un phénomène qui pourrait changer son destin ; les pierres se raréfient.
Ces 2 histoires sont pour moi un appel qui résonne entre les montagnes de la vallée qui m’interpelle et réveille mes élans de liberté. Je ressens comme Kessel et Hugo le besoin d’aller à la rencontre de cette culture, d’échanger avec ces birmans plein d’honneur et d’humilité; de voir, d’apprendre l’origine et ces trésors de pierres, de ces mythes; d’arpenter ces dédales de collines sauvages et exotiques pleines de couleurs, de richesses et de vie.
Car, « Voyager, c’est partir à la découverte de l’autre. Et le premier inconnu à découvrir, c’est vous. » -Victor Hugo
Laurie C. – DNMADe2 Jo – oct 2020