Des sculptures entre deux réalités

Snorkeling (2017)

Han Hsu-Tung est un sculpteur sur bois Taïwanais.       

Diplômé à 23 ans en Anthropologie de l’Université Nationale de Taïwan, c’est semble t-il 6 ans plus tard qu’il exposa ses œuvres pour la première fois à Taipei dans l’East Gallery. On peut d’ailleurs voir certaines de ses œuvres sur le site de cette galerie si vous êtes curieux. A juste titre, l’artiste surnomme ses réalisations faites de bois des « sculptures pixelisées ».

C’est ainsi qu’à travers une figuration majoritairement humaine Han s’exprime dans un dédale de pixels où le bois s’assemble bloc par bloc. On observe alors une dynamique particulière où les personnages semblent figés comme mis sur pause au milieu d’un mouvement ou d’une transformation dans un processus numérique.

Where is the « Like » ? (2020)

Portées symboliques

La technique pixelisée de Han est apparue vers la fin des années 2000 où justement les nouvelles technologies telles que les smartphones prirent leur essor. Faisant par ailleurs écho à sa formation d’anthropologue, son travail invite à une introspection sociale vis à vis des changements de notre société face à la découverte d’un monde aux possibilités à ce point multiples qu’on pourrait s’y perdre.

L’arrivée de la numérisation fit drastiquement évoluer notre ère impliquant de nouveaux moyens et visions. Riche de nouveaux outils , l’art connait alors davantage de formes sous lesquelles s’exprimer et tout autant de sujets sociétaux à aborder. L’un des plus emblématiques tourne autour de l’intelligence artificielle et c’est un axe que l’on peut retrouver dans l’ esprit des œuvres de Han. En effet, on pourrait poser l’analogie entre l’intelligence artificielle faite de l’accumulation de données et les pixels dispersés qui tels des atomes s’intègrent et forment le corps d’un être semblant animé d’une âme.

On pourrait tout aussi y observer un phénomène de dispersion et de rassemblement à l’image des échanges sociaux contemporains de plus en plus concentrés sur des réseaux.

Afin d’illustrer le développement humain où la réalité entrelace de plus en plus la virtualité, Hsu-Tung met en parallèle la sculpture de bois avec le monde virtuel où il arrive parfois qu’on observe cet effet de glitch sur un écran alors brouillé de pixels. S’en inspirant, l’artiste donne l’impression que la sculpture subit le même effet qu’une image digitale remettant en cause sa matérialité comme si elle disparaissait tout en questionnant sa réalité même.

Procédés de réalisation

Sunset Clouds (2022) lors de la réalisation

Dans un premier temps, il semble intéressant de connaître le point de vue de Han Hsu-Tung sur l’origine de la créativité. Il est en désaccord avec l’idée que les artistes sont sujets aux caprices de l’inspiration car le processus de création ne fonctionnerait pas ainsi. Selon lui, contrairement à l’inspiration telle que l’on se la représente, créer n’a rien d’instantané. C’est quelque chose auquel les artistes réfléchissent constamment jour et nuit, quand ils travaillent, marchent, conduisent et même lorsqu’ils dorment jusque dans leurs rêves.

C’est ainsi qu’avec une idée de projet qui a pris le temps d’évoluer dans sa tête, l’auteur entreprend une nouvelle sculpture suivant différentes étapes bien précises.

Pour les illustrer, voici une vidéo filmant la réalisation de «Sound of the Wind».                

En résumé ; Il commence par dessiner des croquis à partir de photos puis réalise un modèle en argile. Il en prend des clichés sous différents angles, les imprime puis les découpe en bandelettes et petits carrés qu’il recolle ensuite et dispose à la manière d’un puzzle auquel il manquerait des pièces. Il adapte ensuite son modèle d’argile à l’image obtenue, le quadrillant et retirant des cubes de matière ci et là.

La préparation faite, Han sélectionne ensuite le bois, principalement du noyer, le découpe en des pavés droits et les trie selon différentes longueurs. Il les assemble alors par collage compressé en des plaques qui sont ensuite rabotées. Chacune des plaques formera ainsi une strate de la sculpture.

Par la suite, vissant les strates les unes aux autres, il obtient un bloc de bois à sculpter. Il reproduit dessus son dessin au crayon puis dégrossit le volume à la tronçonneuse. Il affine les formes à l’aide de ciseaux à bois, d’un maillet et de ponceuses.

En dernière étape, il dévisse le tout puis décale les strates les unes aux autres déstructurant volontairement la composition. Il perce et visse de nouveau les strates selon cette nouvelle disposition avant de définitivement les coller entre elles. Enfin, il ajoute des cubes de bois à la sculpture de sorte à donner une dimension de profondeur supplémentaire dans ce qui ressemble à une nuée de pixels.

Si jamais cela vous intéresse, vous trouverez ici le blog du sculpteur où l’on retrouve ses œuvres et commentaires autour de leur fabrication ou ce qu’il voulait y exprimer.

Solveig DUBOIS – DNMADe1HO – Avril 2022

Le covid… Source d’inspiration ?

Souvenez vous ! Pendant les temps forts de la pandémie de coronavirus, la grande majorité du monde fut confinée, les grandes villes se retrouvaient alors désertées. De nombreuses photos troublantes ont circulé, montrant des rues de grandes métropoles totalement vides. Les œuvres de l’artiste dont je vais vous parler aujourd’hui m’évoquent directement cette période. En effet, dans cet article nous allons passer au peigne fin le travail de Rumi Ando.

Cette photographe casse les codes de son domaine en ne s’intéressant pas à la foule ou encore aux couleurs vives. Le principe même de son expression artistique est de représenter les formes géométriques qu’on retrouve dans les rues de Tokyo avec des couleurs très pastels qui rendent la scène plutôt inquiétante. Ici le pastel ne semble étonnement pas nous communiquer une idée d’innocence. Bien au contraire…

Pour renforcer cette idée de photographie angoissante, l’artiste supprime les habitants, les panneaux publicitaires, les pylônes électriques, les portes et les fenêtres. Un décor presque post apocalyptique qui attire notre attention sur la déconnexion sociale présente au sein de cette ville. Le plus beau dans tout ça ? C’est que ces œuvres à la vision dystopique de nos métropoles ont été réalisées AVANT la pandémie. Un coup de génie ? Peut être.

On peut remarquer que cette artiste semble appartenir au surréalisme. Ce mouvement artistique a pour but de redécouvrir une sensibilité perdue, de retrouver les facultés humaines annihilées, réprimées par des siècles de civilisation et d’accéder à un univers régi par le merveilleux, l’imagination, le rêve et l’amour. Quoi de mieux que de supprimer directement à la source le problème ? L’artiste nous fait réfléchir. A-t-elle voulu supprimer toute forme de vie en ne laissant que les créations humaines pour dénoncer un sentiment d’oppression ? Une autre hypothèse plus probable : L’artiste dénonce l’évolution de la société qui tend à être de plus en plus asservie par internet, et qui peut à peu nous isole de nos congénères réels. Faut-il s’inquiéter d’un avenir urbain qui pourrait conduire à une distanciation sociale volontaire, ou ne voir que la dimension sereine, paisible, qui se dégage de ces photographies ? Suite aux récents évènements sanitaires cette question est d’autant plus renforcée.

Eve BIELHER – DNMADe1 Ho – Avril 2022

Un nouveau regard pour la création

Très souvent perçu comme une charge en plus pour les personnes atteintes et leur entourage, le handicap est malheureusement encore aujourd’hui associé à quelque chose de négatif. Malgré une volonté d’inclusion des personnes en situation de handicap, celles-ci restent considérées comme moins capables que les personnes valides. Si le handicap nécessite bien souvent la mise en place d’aménagements spécifiques, c’est aussi parce que le fonctionnement de la société est construit autour d’un certain validisme.

La principale différence avec les personnes dites valides, réside dans la répartition des compétences. Chez une personne atteinte de handicap, que ce soit un spectre autistique ou encore une paralysie des membres inférieurs, nous ne retrouverons pas l’équilibre présent chez une personne valide.

Si un individu porteur de spectre autistique aura des difficultés de communication et d’interaction sociale, celui-ci, par ailleurs, excellera lorsqu’il s’agira de se concentrer sur une tâche avec rigueur et assiduité. Chez un individu valide les deux capacités seront équivalentes.

On comprend qu’il existe au travers du handicap une source de capacités hors normes. Plusieurs personnalités tel que Bill Gates ou Mark Zuckerberg nous ont prouvé tout au long de l’histoire, le génie que pouvait amener le handicap.

Le monde de l’art n’a lui aussi pas échappé, à ces hommes et femmes aux regards nouveaux. Frida Kahlo, Henri de Toulouse-Lautrec où encore Van Gogh ont marqué l’histoire de l’art par leur vision de la réalité.

La garde-robe de Frida Kahlo reste cachée pendant 50 ansHenri de Toulouse-Lautrec — Wikipédiahttps://media.vogue.fr/photos/5c8a55363d44a0083ccbef54/2:3/w_2560%2Cc_limit/GettyImages-625257378.jpg

Stephen Wiltshire est un artiste né en 1974 à Londres et est atteint d’autisme doté d’une mémoire eidétique (syndrome du savant). Cette particularité, dès son plus jeune âge, lui a permis de réaliser des représentations graphiques précises de ce qu’il voyait. Étant muet et n’ayant aucun lien avec les autres, Stephen Wiltshire trouva par le dessin, un outil de communication au monde extérieur. Se pencher sur son travail, c’est comprendre la réalisation de panneaux monumentaux réalisés de mémoire après seulement quelques minutes d’observation d’un paysage.

2018-07 Stephen Wiltshire, artiste britannique dessine l'horizon de New-York de mémoire | la-passerelle-des-arts-chaville

En 2001, l’artiste illustrait en trois heures et en détail une zone de quatre mille mètres carrés de Londres après un vol en hélicoptère.

Prints of London City Skyline Drawing - Sketches of London

Enfin en 2005, Stephen Wiltshire entamait le plus grand projet de sa carrière, un dessin panoramique de Tokyo.

Tokyo Panorama drawing - Stephen Wiltshire

« pour être brillant en science ou en art, une touche d’autisme est essentielle ».       Hans Asperger

Le handicap ne rend pas un individu moins compétent, au contraire il peut parfois lui permettre d’accroitre certaines aptitudes jusqu’à même remettre en cause les limites des capacités humaines.

Lily-Rose H. – DNMADE1Jo – Février 2022

Ariane Mnouchkine et le théâtre du soleil

« Le théâtre est un endroit où le monde se revit, se pense et donc d’une certaine façon se transforme, en tout cas où les forces de transformation peuvent être invoquées, partagées et donc peuvent se répandre de façon très modeste, très mystérieuse, d’une façon que je pense, moi, incontestable » 

Ariane Mnouchkine

Ariane Mnouchkine

Et si on parlait théâtre? Que vous soyez connaisseur ou non de ce domaine si riche qui constitue une grande partie du spectacle vivant, qui nous immerge dans un monde complètement différent par ses costumes, ses décors, ses écrits et ses actes.

Je voudrais vous faire découvrir ou redécouvrir l’une de ces troupes que l’on pourrait qualifier de « star »ou bien encore de « référence » de notre siècle dans le milieu du théâtre. Dirigée par Ariane Mnouchkine, grand metteur en scène reconnue, une troupe fantastique qu’elle a fondée il y a quelques années de cela et qui est  devenue incontournable : La troupe du théâtre du soleil.

Théâtre du Soleil, « AGAMEMNON »

J’avais envie de vous en parler suite à un cours de théâtre qui m’a énormément marqué. Encadrée par un membre fort de la troupe du théâtre du soleil, qui nous a guidé comme l’aurait fait Ariane et qui  m’a fait percevoir l’espace scénique et le jeu corporel d’une tout autre manière. Et qui nous a appris ces notions de transmission, de partage,  qui sont les piliers et une chose est essentielle à retenir de cette troupe.

Créée en 1964 par Ariane Mnouchkine, la troupe du théâtre du soleil s’est très vite lancée dans la rénovation en 1970, et s’est installée dans ce qui allait devenir sa demeure, son terrain de jeu, de travail, connu de tous : Les anciennes cartoucheries de Vincennes. 

Assister à une pièce de la troupe du soleil, ce n’est pas seulement assister à un spectacle, c’est vivre une expérience sociale et de partage. (Un repas est fait par la troupe pour les spectateurs avant la représentation, les acteurs discutent avec les spectateurs, il y a vraiment cette notion de partage, ça vaut le coup !). 

Ce sont des pièces engagées que nous présente la troupe au travers de scénographies imposantes, spectaculaires et prenantes ; Un spectacle qui nous plonge entièrement dans un univers si particulier où la patte de la metteur en scène est reconnaissable entre mille. Des pièces qui ont fait le tour de la planète. 

« Le théâtre a charge de représenter les mouvements de l’âme, de l’esprit, du monde, de l’histoire. »

Une mise en scène mettant en valeur un jeu corporel essentiel avec de grands gestes, où les émotions sont transmises au travers du corps. Les pièces du théâtre du soleil sont aussi mêlées de chorégraphies, d’effets sonores, de paroles, de jeu avec des accessoires. (Agamemnon). Ceux-ci guident le jeu, se déplacent, dynamisent les actes, redéfinissent l’espace scénique, amènent aux gestes fluidité, brutalité, délicatesse, intensité… Le plateau tourne, est en mouvance constante, les décors imposants sont animés par les acteurs. Ils parviennent même à jouer comme des marionnettes guidées par d’autres acteurs (tambour sur la digue). Un mode de jeu qui fait réfléchir et qui pousse le corps encore plus loin.  

Un jeu spectaculaire d’une grande précision, des déplacements millimétrés. Le travail de Mnouckine est palpable derrière ces pièces parfaitement orchestrées. Des indications justes qui nous amènent vers une pièce captivante et intense qui marque les esprits et façonne la réputation de cette si grande troupe. Une troupe qui interroge le théâtre, le redéfinit.

C’est une immersion complète dans un univers décalé, reprenant de grands classiques, Molière, les Atrides et tant d’autres. Des pièces incontournables, pérennes avec cette touche en plus, celle d’Ariane Mnouchkine et sa troupe du théâtre du soleil. 

Travailler dans la troupe du théâtre du soleil, ce n’est pas seulement être dirigé par une seule personne, c’est un travail collaboratif important, une vie en communauté, chaque avis, toute personne est importante. (Une chose importante à savoir aussi, chaque personne touche le même salaire, quelque soit son ancienneté et son statut). C’est là qu’elle fait aussi la différence humainement parlant !

Alors si vous êtes sensible au théâtre, courez à la cartoucherie, prenez vos places, ouvrez grands vos yeux, buvez les vers et appréciez le moment. 

Si cela vous intéresse, je vous conseille de regarder le film :  Ariane Mnouchkine, l’Aventure du Théâtre du soleil.

Je vous mets quelques extraits pour que vous puissiez comprendre ce travail exceptionnel et être curieux. Bon visionnage !

https://www.youtube.com/watch?v=N5RXsjTU34M

Noélie C. – DNMADe1 Jo – Avril 2022

27 décembre 1897 , un départ dans histoire du théâtre français

Replongeons nous dans le Paris du 19ème ; le début de la photographie, de l’automobile, de la mode scientifique, des Jules Vernes, Arthur Rimbaud et Edmond Rostand.

                                   

C’est un film qui a été réalisé par Alexis Michalik  et est sorti le 9 janvier 2019. Il s’agit d’une réadaptation d’une pièce de théâtre qu’il a lui même écrit en 2016. Les scènes principales ont été tournées au théâtre du Palais Royal de Paris, ce qui sublime d’autant plus le film. 

Je vais vous proposer dans cet article de visionner l’histoire d’un petit auteur, Edmond Rostand, ne créant que des fours et n’étant point connu du public, et qui, en trois semaines seulement va écrire l’un des plus grand chef-d’oeuvre du théâtre français, il s’agit, vous le savez j’espère, de Cyrano de Bergerac. 

Cette pièce a été pour la première fois jouée le 27 décembre 1897. Après 40 rappels, on se décidera à laisser le rideau ouvert. Les acteurs seront portés en triomphe dans les rues de Paris, Edmond Rostand recevra la légion d’honneur, et dans le siècle à venir, Cyrano de Bergerac sera joué plus de 20 000 fois et deviendra ainsi le plus grand succès du théâtre français. Quelques dates et acteurs importants : Constant Coquelin le soir du 27 décembre 1997, puis en l’an 1900, puis Pierre Magnier en 1923, Claude Dauphin en 1946, José Ferrer en 1950 ( grand acteur portoricain ! ), Daniel Sorano en 1960, Jean Piat en 1964. Mais encore Jean Marais en 1970, Jacques Weber en 1985, Jean-Claude Drouot en 1985, le grand Gérard Depardieu en 1990, Michel Vuillermoz en 2006 et encore tant d’autres. C’est une pièce omniprésente, universelle et intemporelle. C’est pourquoi ce film Edmond est très intéressant et très prenant. C’est un nouveau tournant pour le théâtre.

Mais revenons en au film voulez-vous ? 

Edmond Rostand est comme tout le monde. C’est un rêveur qui aimerait avoir du succès, mais aussi de douceur et d’aventure dans sa vie. Il a trouvé le moyen de faire tout cela ! C’est en créant des vers et des personnages. Malheureusement, les gens n’apprécient pas vraiment ses tragédies et ses histoires car la mode est à la Comédie. Après avoir parlé avec Constant Coquelin, (un grand acteur de l’époque ), ce dernier va lui commander une pièce pour avant la nouvelle année, c’est-à-dire en trois semaines seulement. Edmond n’a pas écrit depuis deux années, il est perdu. Il n’a qu’une idée, qu’un début, qu’une tirade… Il va écrire oui, mais en plus essayer de régler tous les soucis qui vont le ralentir dans son élan ; de ne pas prêter d’importance aux caprices des actrices, répondre aux exigences de ses producteurs corses, calmer de la jalousie de sa femme, suivre les histoires de cœur de son meilleur ami et essayer d’oublier le manque d’enthousiasme de l’ensemble de son entourage… malgré tout, il sortira une pièce d’exception, de perfection. D’ailleurs le patron du café où il va souvent, Monsieur Honoré, lui dira : 

« Cette pièce est sublime. Vous avez messieurs de l’or entre les mains,  vous avez un bijou que personne ne peut estimer ! Voulez-vous qu’il disparaisse dans l’oubli ou voulez-vous qu’il soit le plus grand triomphe du théâtre français ? 

Donnez tout ce que vous avez pour cette pièce car je vous le prédis ; jamais, de votre vie vous n’en croiserez une plus belle ! « 

                               

Vous trouverez dans des petits rôles l’incarnation de certains excentriques du cinéma français ; comme par exemple Dominique Pinon en régisseur survolté et agité tout au long du film, et Jean-Michel Martial en tenancier de café rêveur et poète victime de discrimination raciale. De grandes figures du théâtre français et même de cette époque sont incarnés par de grands acteurs actuels ! Sarah Bernard par exemple qui est très importante dans cette histoire et qui connaît le petit poète est interprétée par Clémentine Célarié. 

Vous allez découvrir le vieux Paris, les bonnes manières, la mode, le pouvoir, la jalousie, l’amour, et le théâtre bien sûr ! Vous apprécierez ainsi la finesse des dialogues et la capacité du réalisateur à mettre à jour le genre du vaudeville, et ce dans un cadre lié au patrimoine de la culture française. Il est excitant, prenant, Et même si vous n’avez jamais vu la pièce, ou simplement du théâtre, ce film ne vous perdra pas. Au contraire, il vous mettra à l’aise et vous comprendrez tout. Il vous donnera même envie de voir la pièce originale !

Il est disponible sur toutes les plateformes et j’espère qu’il vous plaira. Je vous mets ci-dessous la bande annonce. Merci de m’avoir lu et bon visionnage ! 

https://www.youtube.com/watch?v=jOgoyxezMoI

Esther Loras__DNMADe14Jo__23 avril 2022

Quand la nature sublime la rouille

L’exploration urbaine, plus communément appelé Urbex, qui se définit comme étant une visite sans autorisation des lieux délaissés ou abandonnés, d’après plusieurs pratiquant.es, l’exploration des lieux abandonnés était, est, et sera toujours quelque chose qui perdurera, le plus longtemps que l’Homme décidera d’abandonner des bâtisses et autres bâtiments.

Grâce ou à cause des réseaux sociaux (à vous de juger), l’engouement autour de cette activité est grandissante, malgré la médiatisation de celle-ci, qui possède ses propres principes, ainsi qu’un code de conduite visant à préserver les lieux et les protéger au maximum, entre photographes, youtubeurs, amoureux d’histoires, et autres adeptes passionnés, la non-diffusion des coordonnées des spots* est une règle d’or dans cette discipline, afin d’éviter d’attirer les voleurs, les casseurs ou même les squatteurs, mais aussi par respect pour les propriétaires.

Alice Van Kempen, FURBEX

Pourquoi apprécier cette discipline?

D’abord il y a l’aspect historique des lieux, qui est étroitement lié à la temporalité, les lieux peuvent être abandonnés depuis des années ou des mois, les urbexeur.ses sont toujours en admiration sur ces lieux dans lesquels le temps semble s’être arrêté. Éprouvant une nostalgie du présent, qui suspend le temps pour celui qui l’observe, un décor actuel mais plongé dans le passé. De plus, nous avons les adeptes de l’aspect esthétique, des lieux chargés d’histoire, de détails, d’objets qui méritent d’être photographiés, ou d’être scénarisés à des fins cinématographiques, et d’autres domaines pour les plus créatifs.

Dominique Hermier, urbexeur et graphiste, nous montre comment il lie ses deux univers pourtant très différents : « En tant que graphiste et directeur de créa, faire se télescoper des univers de pop-culture et photographiques, cela crée des chocs « philoso-graphiques », […], l’urbex est souvent abordée par les photographes, soit sur l’aspect esthétique et historique avec de très belles réalisations photographiques qui montrent le travail du temps et de l’abandon, soit comme support pour des mises en scène avec modèles ravissants et accessoires travaillés. Rarement le volet social et marketing sont mis en avant, et c’est dommage, car c’est l’occasion de montrer notre société sous un angle différent, tout en posant des questions avec un autre vocabulaire graphique. J’ai voulu imaginer la fusion du marketing et de l’urbex… »

L’exploration urbaine à la sauce « Ikea » : que découvriront les urbexeurs de demain ?

Après cette brève information ré-créative, revenons aux différents attraits de cette discipline.

Pour nous, dans cette société, nous avons facilité à imaginer une ville, une usine, un lieu, mais s’y rendre c’est en prendre possession, c’est retrouver un autre rapport à soi par rapport aux objets, se rendre compte à quel point la matérialité des choses est si dérisoire pour l’Homme, du jour au lendemain, un lieu peut être abandonné, pour un manque d’engouement pour celui-ci, un départ en catastrophe, ou seulement parce qu’il ne génère plus d’interactions sociales, ou économiques.

Je ne vais pas vous faire tout un dépliant sur le pourquoi du comment l’Urbex est appréciable, mais n’oublions pas la satisfaction de voir que dans certains lieux abandonnés par l’Homme, la nature reprend ses droits, prenant le contrôle sur les structures, les recouvrant de feuillages, c’est un mélange qui donne place a une magie inédite.

Si vous êtes intéressé.e pour essayer, n’oubliez pas de vous renseigner avant toute chose sur les lieux, de vous faire accompagner de personnes bienveillantes et de confiance, évitez de vous mettre dans de mauvaises situations, s’il n’y a aucun accès vers l’intérieur, admirez l’extérieur. L’adrénaline peut être un sentiment addictif, mais autant positif que négatif, le bon sens et le respect du lieu sont de rigueur, c’est une discipline dangereuse et illégale, c’est quelque chose à prendre en compte dans certaines situations. 

Tiphaine Dausseing, DnMade Jo 14 Avril 2022

 

West Side Story, adaptation d’un mythe

Dans le New York de 1957, deux gangs rivaux, les Jets (immigrés d’origine européenne ) et les Shark d’origine portoricaine s’affrontent pour le contrôle d’un espace à l’abandon voué à disparaître. Cette rivalité tragique rend impossible l’histoire d’amour entre Tony et Maria, chacun membre de ces deux camps…

Le 8 décembre dernier, Spielberg nous proposait une réadaptation de la comédie musicale la plus emblématique de Broadway, West Side Story datée de 1957 et déjà reprise au cinéma en 1961 dans une adaptation de Robert Wise. Ainsi lorsque que 60 ans après, Spielberg entreprend la réalisation d’une comédie musicale, il s’attaque à un monument du genre, encore joué aujourd’hui à guichets fermés à  Broadway et dont l’adaptation cinématographique fut auréolée de 10 oscars. Encensée par la critique avant sa sortie, cette récente adaptation n’a pourtant pas bénéficié du succès attendu en salle. Il était donc nécessaire de rendre ici hommage et de mettre en valeur ce bijou injustement déprécié du public.

Pour la réouverture des cinémas, Spielberg misait sur l’afflux en salle des nostalgiques de la première version. Or cette catégorie d’âge est celle qui privilégie aujourd’hui le visionnaire de films à domicile à cause des risques sanitaires. En outre, le réalisateur s’est attelé à dépoussiérer la version de 1961 non sans dépeindre le New York de 1957. Pour ce faire il s’est aidé du dramaturge Tony Kushner (prix Pulitzer), de Justin Peck, conseiller artistique du New York City Ballet pour les chorégraphies et du compositeur David Newman pour réarranger les compositions musicales. Contrairement à la première version qui met de côté le décor pour se focaliser sur les personnages et l’intrigue, cette version a été tournée à 70% en extérieur.

Par ailleurs, le casting des membres de ces deux gangs est composé non pas d’acteurs trentenaires confirmés mais de nouveaux talents inconnus du public, venant pour la plupart du monde des comédies musicales à l’exception d’Ansel Elgort, l’interprète de Tony (connu notamment pour son rôle dans Nos étoiles contraires en 2014). Ces acteurs sont donc tous capables de jouer, chanter et danser (contrairement aux acteurs de 1961 qui ont été doublés pour les chants) et par leur talent font de l’ombre aux deux acteurs principaux. Leur jeunesse se reflète d’autant plus par l’absence de figures parentale dans cette version, ainsi les personnages semblent livrés à eux-mêmes et dirigés par leurs émotions.

Ansel Elgort et Rachel Zegler qui incarnent un Tony et une Maria touchants et modernes mais peut-être un peu trop lisses à l’image du reste du casting.

Ce film a par ailleurs sûrement hérité de la méfiance de la communauté latine, profondément écœurée par la version de 1961. En effet, cette dernière était ponctuée de clichés racistes sur la communauté et la culture portoricaine et les rôles portoricains étaient tenus par des acteurs blancs grimés pour l’occasion ce qui avait fait scandale à l’époque. Ainsi, pour cette version, les rôles des Shark sont attribués à des acteurs aux origines latino-américaines et le scénario s’immisce plus dans l’intimité de Maria et ses proches: son frère Bernardo et sa compagne Anita, et leur dépeint des rêves et des objectifs. Les personnages portoricains ont plus de temps et d’espace à l’écran et Spielberg a fait le choix de laisser les répliques des Sharks en espagnol sans sous-titres. Comme un clin d’œil au passé, Spielberg a créé un rôle sur mesure pour Rita Moreno, l’interprète d’Anita dans la première adaptation et la seule actrice réellement portoricaine du casting de 1961. Elle incarne Valentina, veuve et gérante d’un drugstore et la seule figure maternelle de ce musical qui protège et conseille Tony et Maria. Spielberg prend le parti engagé de donner le rôle d’Anybody, un personnage trans peu développé dans les autres versions à un/e interprète non-binaire ce qui a valu à son film d’être privé de sortie dans certains pays du Golfe où les LGBT sont stigmatisés.

Rita Moreno, très convaincante dans son interprétation de la vibrante Anita, un des personnages forts et émancipé de cette comédie musicale. Son personnage actif et combatif se dresse face à la violence et à la misogynie du West Side. Elle a reçu avec Rachel Zegler un Golden Globe pour son interprétation. Peut-être la meilleure interprétation de ce film.

Ce film est évidemment le reflet d’une savante et minutieuse mise en scène de Spielberg, une relecture plus sombre et moderne de la comédie musicale doublée d’une «fiction politique». Derrière des plans très sombres et tragiques, une escalade de haine motivée par la peur de l’autre s’orchestre. Pour appuyer cela, le célèbre réalisateur a même fait le choix de présenter des combats physiques réels, et plus seulement en danse comme la comédie musicale ou le film de Robert Wise. Le message de son film peut se voir comme un écho de l’ère Trump, un catalogue de problèmes de sociétés américains: les origines et les appartenances, la violence, la haine, le racisme, la misogynie et les violences faites aux femmes, l’immigration, la pauvreté et tant de sujets qui divisent au pays de l’oncle Sam. Ainsi, le passé trouve son écho dans le présent. A cette situation, Spielberg, présente l’amour et la tolérance comme solution à toute cette haine.

Une figure de style visuelle de Spielberg vient ici suggérer avec ingéniosité la violence et l’issue tragique de cet affrontement entre les deux gangs par le biais de longues ombres portées qui évoquent des lames de couteaux.

Cette adaptation a pour moi toutes les caractéristiques pour être considérée comme un classique, que ce soit pour ces qualités esthétiques et musicales ou pour le message d’espoir qu’elle transmet. Elle est portée par un casting très prometteur et convaincant. Ce musical est très inspirant, moderne et d’actualité à l’inverse de la version de 1961 qui ne serait sûrement plus acceptée aujourd’hui. Evidemment, il n’y a pas besoin de voir la comédie musicale ou le film de 1961 avant d’aller le voir c’est pourquoi je vous le recommande fortement.

Anna E. DNMADe1 Jo – Avril 2022

Quand les femmes parlent du fond de leur cœur, en chœur.

La bande dessinée dont je vais vous parler aujourd’hui, elle me fait de l’œil depuis un moment pourtant j’ai tardé à sauter le pas. Peut-être étais-je intimidée par cette œuvre que j’admirais avant même d’avoir pu dévorer son histoire au travers de ses cases gracieusement illustrées par Aude Mermilliod. Cette histoire, ces histoires de femmes c’est Le Chœur des femmes et c’est ce livre qu’on va découvrir ensemble et je l’espère que vous aussi l’apprécierez.

« Le Choeur des femmes » est l’adaptation du roman éponyme de Martin Winckler, illustré par Aude Mermilliod et paru en avril 2021.

 

Le choeur des femmes c’est l’histoire de Jean, major de promo, elle se retrouve à faire 6 mois en médecine pour son internat. Jean, écouter « des bonnes femmes se plaindre à propos de leur pilule, de leurs seins douloureux ou je ne sais quelle connerie » ca ne l’intéresse pas, mais alors pas du tout, non Jean son truc à elle c’est les scalpels, les ciseaux, du fil et les aiguilles. C’est aussi l’histoire du docteur Karma, lui c’est un soignant il ne « joue pas au docteur« , précurseur il va montrer une face de la gynécologie à Jean auquel elle ne s’attendait pas.

Mais avant tout le Choeur des femmes c’est l’histoire de toutes ses femmes entre contraception, maternité, violences conjugales, avortements, violences gynécologiques… C’est l’histoire de Sabrine, de Catherine, de Madame A, de Geneviève, de Cécile, de Marie… De toutes ces femmes, de tant de femmes, de nous toutes.

J’ai énormément apprécié les personnages notamment Franz Karma, soignant dans l’âme, il apporte une autre vision de la gynécologie, domaine ou des pratiques persistent en dépit du bien-être des femmes. La position gynécologique par exemple, couchées sur le dos, cuisses grandes ouvertes, avec des patientes à qui on demande souvent de se mettre à nue plus que nécessaire ou des examens trop vite demandés sans parler assez à la patiente, bref tant de choses qui pourraient être changées pour le meilleur confort de la patiente sans pour autant gêner le praticien. L’humanité, la douceur et la compréhension du Docteur Karma m’ont touché tout au long de la bande dessinée, ce personnage est la pour nous montrer que d’autres pratiques sont possible, qu’on peut examiner différemment, qu’on peut soigner différemment.

Une autre chose très appréciable est ces histoires de femmes narrées tout au long de l’histoire qui permettent de balayer beaucoup de domaines de la gynécologie, c’est elles qui font que cette œuvre est un chœur, ce sont ces histoires qui nous lient au livre, ces histoires si variées font peut etre écho à des choses qu’on à nous meme subies, on apprend avec elles qu’on peut envisager la gynécologie autrement, avec plus de douceur et d’écoute.

Le livre au delà de son coté éducatif suit un fil rouge qui le relie aussi à la fiction ce qui le rend plaisant à lire, on lit la vie des personnages pas un livre de médecine et pour moi cela renforce l’humanité de cet ouvrage.

Je vous encourage donc vivement à vous procurer « Le Choeur des femmes » que ca soit le roman ou son adaptation en bande dessinée, et si ces sujets vous plaisent je vous conseille « Ecumes » de Ingrid Chabbert et Carole Maurel, récit de deux femmes qui traversent la joie de la grossesse et ses malheureuses complications. Et dans le domaine du soin, l’Homme étoilé, lui aussi soignant malgré tout, qui couche sur le papier sa vie de soignant en soins palliatifs avec humour et beaucoup de délicatesse. Bonne lecture à vous en espérant que vous aussi tomberez amoureux comme moi de ces livres.

Solène L. DNMADe1 JO – Avril 2022

La carcasse comme Muse ?

La peinture de carcasse animalière est apparue avec la peinture flamande et la peinture hollandaise du XVIIème. A cette époque, elle fait l’éloge de l’abondance et de la richesse car qui pouvait contempler de la viande avait de grands moyens.

Aujourd’hui, c’est à se demander comment se rendre compte de la rareté et de l’impact d’un produit quand une galette de légumes a le même prix qu’une escalope de viande. Mais je m’égare, là n’est pas le sujet de cet article.

Revenons-en à la peinture de carcasse. Aussi morbide soit-elle, elle a ce lyrisme transcendant qui répugne mais séduit par sa véracité.

 "Au fond, personne ne croit à sa propre mort, 

et dans son inconscient, chacun est persuadé de son immortalité." (FREUD)

Rembrandt se servira de la peinture de carcasse comme memento mori . Il peindra Le bœuf écorché et viendra rompre avec la peinture traditionnelle hollandaise en choisissant une représentation plus dramatique et abstraite de la carcasse. Il ne sera plus question de montrer l’opulence mais bien de signifier à l’Homme sa mortalité .Il s’oppose ainsi à la classique nature morte ,douce et insinuée, en choisissant de représenter la putridité dans son aspect le plus évocateur.

Bœuf écorché de Rembrandt daté de 1655

Malgré tout, cette œuvre reste poétique par la présence d’une femme en arrière plan qui semble être actrice mais aussi spectatrice de la scène. Ce jeu de disposition dans l’œuvre donne l’impression que la carcasse, mise en lumière, est en réalité un tableau viscéral exposé qu’il faudrait  admirer pour sa beauté. L’obscure arrière boutique devient théâtre de la crucifixion du bœuf. 

Un spectacle tout de même dérangeant non? Vous n’avez encore rien vu. Pour les âmes sensibles, choquées par cette œuvre, je vous conseille de faire demi-tour et de renoncer à lire la suite car les limites de l’art n’étaient pas encore frôlées. Préparez-vous !

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C’est pratique mais est-ce vraiment utile ?

Aujourd’hui, l’automobile en général est avant tout un moyen de transport qui fait tout pour être aseptisé et confortable.
 Il y a un demi-siècle encore, l’objectif des constructeurs ou des mécaniciens amateurs étaient de faire rugir des moteurs thermiques à tout-va, avec comme seule préoccupation d’avoir une sonorité agréable à l’oreille.

Aujourd’hui, la préoccupation a bien changé puisque la tendance est plutôt de rechercher de nouvelles énergies motrices ayant un impact le plus minime sur l’environnement. L’âme de l’automobile est en train de laisser sa place à la modernité, quitte à ce que nos dirigeants utilisent des termes ou des moyens importants pour convertir les populations.
Ce monde de l’automobile n’a jamais autant été démocratisé qu’aujourd’hui grâce aux réseaux sociaux et Internet.
Nombreuses sont les personnes qui s’engagent sur ces nouvelles plateformes et notamment les artistes qui eux s’en servent en plus des galeries d’art et des expositions pour impacter notamment les nouvelles générations. Je pourrais citer Erwin Würm qui avec ses «fat car» rend l’automobile moche et inutilisable, ce qui supprime tout intérêt d’en posséder une, ou encore Humberto Diaz qui montre que l’automobile est source de sa propre destruction avec certaines de ses œuvres.

Mais l’artiste auquel je vais m’intéresser, c’est Ichwan Noor. Cet artiste indonésien s’est tout simplement attaqué à un monument de la culture automobile, la Volkswagen Beetle, et il l’a en 2013, transformée en une sculpture de forme sphérique de 1m80 de diamètre. La folie de cette œuvre, c’est qu’il a su garder tous les éléments qui rendent la Beetle identifiable au premier regard, et les a dénaturés pour que l’ensemble ne ressemble plus du tout à une voiture.

Outre la modernisation de la sculpture, il a détaché la fonction de base de l’objet pour lui retirer toute autre utilité autre que le visuel et a donc rendu cet objet «inutile». C’est une manière originale de dénoncer le fait que l’on utilise un gros objet, difficile à fabriquer, coûteux à entretenir et à faire fonctionner, polluant pour qu’au final ça n’ait qu’une seule utilité (certes bien pratique) mais unique. Ne serait-ce pas égoïste de mettre tous ces moyens en œuvre et d’avoir tellement de répercussions juste pour se faciliter la vie ? C’est une des premières idées qu’il évoque par son travail. Un second point est le fait qu’une fois sa fonction première retirée, on se retrouve avec un objet, sans vraie utilité, qui est lui aussi coûteux en énergie et impactant pour l’environnement si l’on veut le recycler ou le remettre en fonction.  Est-ce que le bénéfice est-il vraiment existant?
Ichwan Noor n’a ni été le premier à dénoncer l’automobile, et ne sera pas non plus le dernier, alors qu’aujourd’hui, on nous présente de nouveaux moyens énergétiques ayant eux aussi leurs failles et leurs avantages.

Merci de votre lecture, qui je l’espère, vous aura intéressé.

Marc G. – DNMADe1 HO – Avril 2022

Un cauchemar en papier mâché ?

Cristóbal León et Joaquín Cociña, le stop motion réinventé

L’un est formé en animation et l’autre en art, spécialisé dans le portrait géant. Tous deux chiliens, ils ont grandi sous la dictature de Pinochet dans les années 80. Leur coopération commence en 2007 et repose sur une idée de Joaquin Cociña : animer des dessins géants peints directement sur des murs, filmer objets et peintures ensemble, grandeur nature et en stop motion.

D’ordinaire, le stop motion ou animation en volume est réalisée à l’aide de miniatures – pâte à modeler, maquettes, figurines – et permet souvent d’intégrer à des films des scènes de grande ampleur qui demanderaient des moyens trop importants. Cristóbal León et Joaquín Cociña, quant à eux, ont choisi de faire des films intégralement en stop motion, utilisant uniquement de vieux objets au rebus, ou récupérés dans des brocantes, de la peinture, du ruban adhésif et du papier mâché. Ils s’installent dans des pièces prêtées par des musées ou des galeries et font vivre, image par image, des histoires qu’ils racontent. Presque 15 ans après leur premier court métrage commun, Lucia (disponible ici : https://www.youtube.com/watch?v=uAhjcsYn73M), ils ont réalisé une dizaine de films de ce type, récompensés de prix internationaux (Calgari Film Prize, Asifa Austria Award, Grand prix du Jury au festival de San Francisco…) et présentés dans de nombreux festivals.

Si leurs créations restent de l’ordre du film d’animation, l’utilisation de meubles et d’objets réels donnent un aspect étrangement réaliste aux décors. Ce sentiment d’étrangeté est amplifié par le mouvement volontairement saccadé permis par le stop motion ; les personnages apparaissent et disparaissent, se construisent sous les yeux du spectateur puis se déconstruisent, laissant voir le papier et le ruban adhésif qui les tient en place, mettant en valeur le côté profondément plastique de ces films. Tantôt peintures sur le mur, tantôt modelage en papier mâché ou moulage en plâtre, les héros ont une consistance et une existence insaisissable. L’enfance est au cœur de ces films en papier mâché – il faut y voir une référence au jeu d’enfant – qui se donnent des airs de contes… mais qu’on ne s’y trompe pas, ils sont souvent bien plus de l’ordre du film d’horreur que de celui du dessin animé.

Expressionnisme et cauchemar dans La casa Lobo (2018)

Leur long-métrage le plus important, filmé durant cinq ans en Amérique du Sud, est disponible en entier sur Youtube : https://www.youtube.com/watch?v=e_YA-4TIwqw. Intitulé La Casa Lobo, « la maison loup » en français, il raconte l’histoire d’une petite fille, Maria, échappée d’une colonie allemande au Chili et pourchassée par « le Loup ». Elle se réfugie dans une maison visiblement abandonnée dans la forêt, où seuls deux cochons lui tiennent compagnie. Mais la maison n’est pas un refuge, puisqu’elle se confond avec le loup lui-même, qui observe chacun de ses gestes, depuis chaque recoin, des années durant. Le film se présente comme un huis clos, dont on ne sort à aucun moment : impossible de passer la porte, car la forêt est trop dangereuse, et parce que le loup l’interdit… mais l’intérieur de la maison est un cauchemar. En effet, si les références au conte pour enfant sont explicites (Le petit chaperon rouge, Les trois petits cochons), le film semble calquer ses limites sur celles du rêve et de l’imagination : les cochons se transforment en enfants, les personnages apparaissent par morceaux à partir des objets, les murs et les meubles bougent. Cette ambiance constamment oppressante fait du film entier une expression du sentiment d’angoisse. La Casa Lobo est bien un film « profondément expressionniste », comme l’indique la présentation du Festival international de cinéma de Marseille, car il donne à voir non pas une réalité physique mais mentale et psychologique, celle de l’enfermement, de l’oppression et de la manipulation.

La colonie Dignidad

Mais qui est donc le Loup ? Une courte introduction fait mine de présenter le film comme une vieille publicité pour une colonie allemande au sud du Chili, morale et heureuse. Il s’agit en réalité d’une secte religieuse constituée de descendants d’immigrés allemands, la Colonie Dignidad, fondée en 1961, où règnent le travail forcé, la manipulation psychologique et l’isolement total avec le reste du monde. A sa tête, un ancien dignitaire nazi, Paul Schäfer, accusé d’abus sexuels sur les enfants de la colonie, de rapts et de tortures ; en effet, sous la dictature d’Augusto Pinochet, la colonie tint lieu de centre de détention pour les opposants politiques, qui étaient torturés et enfermés dans des conditions sordides. La colonie parvint à exister jusqu’à la fin des années 1990, et Paul Schäfer ne fut jugé que dans les années 2000. Si le loup est le symbole du prédateur sexuel dans les contes pour enfants, celui de Cristóbal León et Joaquín Cociña s’inscrit bien dans cette tradition, et représente en même temps l’autorité omnisciente qui oblige et manipule l’esprit, pouvant même inciter les deux cochons-enfants, Pedro et Anna, à dévorer Maria qui les a élevés. Enfin, la critique porte plus généralement sur le régime dictatorial de Pinochet, décennies que nombre de Chiliens ont vécu comme un long cauchemar…

Merci pour votre lecture.

Bibliographie

https://fidmarseille.org/film/la-casa-lobo/

https://fr.wikipedia.org/wiki/Colonie_Dignidad

 

Lucille GILBERT, DNMADe Jo 1, Avril 2022.

 

The Poison Squad ou La brigade des empoisonnés volontaires …

          Ces derniers jours, nos médias nous alertaient sur les nombreux scandales alimentaires liés aux industriels du secteur qui ne respectent pas si bien les normes d’hygiène établies pour la sécurité des consommateurs, mais ces scandales sont-ils le reflet de notre époque ou ont-ils toujours existé ?…

          C’est alors que je me suis rappelé le visionnage d’un très bon documentaire Arte il y a quelques années sur une mystérieuse brigade menée par Harvey Willey, chimiste américain (1844-1930). Nous sommes alors à la fin du XIXème siècle, certains pays comme la France, l’Allemagne ou la Grande Bretagne possèdent déjà quelques législations alimentaires permettant de contrôler l’origine et la qualité d’un produit industrialisé. Harvey se trouve justement en France et celui-ci est frappé par le contrôle exercé, il est vrai qu’aux États-Unis l’état ne s’intéresse pas aux pratiques des industriels, par désintérêt mais aussi par intérêt et pourtant la vérité n’est pas si flatteuse …

Harvey Washington Wiley 

        De retour dans son pays, Harvey n’a plus qu’une obsession, découvrir cette vérité. Le moins que l’on puisse dire c’est qu’il ne sera pas déçu, et bien qu’il fasse découverte sur découverte l’état américain rejette ces demandes et craint le scandale. C’est alors qu’Harvey émet l’idée brillante d’associer les journalistes du Washington Post à son combat, avec eux pas moyen que les américains continuent de manger en ignorant ce qu’ils ont dans l’assiette.

        1902, Harvey Wiley passe une annonce bien particulière dans les journaux, il cherche 12 volontaires pour expérimentations alimentaires en échange de repas gratuit (après la guerre de Sécession bon nombre d’américains n’ont plus les moyens de s’alimenter il y aura plusieurs centaines de candidats). Les 12 volontaires sont vite trouvés, le chimiste les choisit de bonne condition physique, robuste et jeune pour ne pas influencer les résultats. Le groupe est divisé en deux, ceux qui recevront de la nourriture empoisonnée et ceux qui recevront une nourriture saine, aucun des hommes ne sachant dans quel groupe il se trouve. Les résultats apparaissent très vite : douleurs digestives, nausées, troubles neurologiques,…

        Journalistes et lecteurs se passionnent pour le Poison Squad et bientôt l’opinion publique manifeste pour que des mesures soient prises. Ils seront rejoints par les groupes hygiénistes féminins et les femmes activistes comme sa femme, Anne Kelton Wiley (1877-1964) qui distribueront prospectus, feront des campagnes de sensibilisation dans les milieux sociaux défavorisés. Nous sommes maintenant en 1906, le congrès adopte le Pure Food and Drug Act après le soutien du président Roosevelt. Grâce aux efforts et à l’acharnement d’Harvey Washington Wiley, les industriels sont désormais contraint à la transparence auprès du grand public. 

The Poison Squad presque au complet entouré par Harvey W. Wiley

           Alors maintenant je peux vous révéler quelques découvertes d’Harvey mais je vous préviens, ayez l’estomac bien accroché ! Vous aimez les petits-pois ? Ceux-ci étaient bien verts grâce au sulfate de cuivre (qui sert désormais à nettoyer nos piscines). Le miel et le sirop d’érable du Vermont ?.. du sirop de maïs. La plupart des alcools étaient coupés au bitume, le lait était blanc comme neige à l’aide de craie et de conservateurs servant à l’embaumement des corps… et l’une des affaires les plus tragiques concerne un produit très apprécié des enfants depuis son invention : le bonbon.

        Au XIXe siècle la mode est aux bonbons colorés qui attirent l’œil des enfants sur le comptoir des épiceries. Pour obtenir un vert bien éclatant les industriels utilisaient un pigment vert inventé par un chimiste, Wihelm Scheele composé de potassium, arsenic blanc et cuivre. Vous voyez déjà l’absurdité ? Bientôt des enfants ressentiront de violentes nausées et certains ne survivront pas. Une ordonnance parisienne en 1830 interdit l’usage de ses substances, les stocks sont nombreux et les industriels envoient les bonbons en province (les contrôles ayant rarement lieu en Province) où ils feront encore des victimes. 

Les scandales alimentaires lié aux industriels sont donc nés avec ceux-ci qui encore aujourd’hui doivent répondre de leurs agissements souvent à déplorer. Pourrons-nous un jour faire totalement confiance à l’agro-alimentaire ou à nos services de sécurité sanitaire ? L’état est-il vraiment transparent avec nous ? Des questions auxquelles je compte mener une enquête… à suivre !

Pour poursuivre le débat :

– France Culture, Le Journal de l’Histoire : « Poison Squad ou l’avènement d’une conscience face à l’industrie agro-alimentaire »

– Arte, « La brigade des empoisonnés volontaires », John Maggio, 2019

Je vous conseille aussi le blog d’Amusidora et son article « Histoire macabre de la couleur verte » pour comprendre l’ampleur de l’usage d’un vert arsenic dès le début du XIXe siècle.

Diane C. – DNMADe1 JO – Avril 2022

L’art vu par un chat !

Le Chat est une série de dessins humoristiques de presse et de bandes dessinées paru la première fois le 22 mars 1983 dans un supplément du journal belge « Le soir ». Ce personnage, le chat, a été imaginé par Philippe Geluck : un artiste belge né a Bruxelles.

L’inspiration de ce personnage s’est faite après son mariage : « Un jour, sur la couverture de remerciements de mon mariage, j’ai dessiné une madame chat tout sourire, et à l’intérieur, on voyait monsieur chat qui était monté dessus ! C’est comme ça que tout a commencé : Plus tard quand « Le soir » m’a demandé d’inventer un personnage, je me suis souvenu du carton. La bestiole est devenue mon interprète, comme un acteur pour qui j’écris des sketchs ! En fait, c’est un autre moi-même. A travers lui, je me libère. Je joue parfois avec le feu, mais c’est le rôle de l’humoriste. »
Le 2 novembre 2016, comme chaque année, Philippe Geluck a sorti une nouvelle édition du Chat. C’est de cette édition dont je vais vous parler. « L’art et le Chat ». Le chat nous emmène dans une visite humoristique de son panthéon artistique. Cette bande dessinée revisite les chefs d’œuvres sélectionnés par Philippe Geluck. Le chat caricature, reprend à sa manière chaque œuvre, 80 pages de dessins humoristiques et culturels nous faisant découvrir ou redécouvrir des œuvres emblématiques.

Le début de la BD commence par une sorte d’auto-interview, l’auteur explique « que Le Chat s’est intéressé à l’art depuis ses premières apparitions ». L’artiste s’intéresse à l’art depuis petit et a voulu partager ses pensées, une trentaine d’oeuvres d’art sont reprises par le Chat. Il y a l’explication du Chat avec son ironie et l’explication, le petit point d’art écrit par Sylvie Girardet. Par exemple pour le Discobole, Philippe Geluck /Le Chat décrit l’œuvre avec humour et ironie, c’est presque « Border Line » quelquefois . « A toutes époques, des imbéciles ont saccagé des merveilles de beauté, pour le plaisir de dominer par la destruction. Aujourd’hui encore, c’est le grand bonheur des abrutis de Daesh que d’anéantir des trésors archéologiques bâtis par leurs propres aïeux dans le seul but de nier l’existence de tout ce qui n’est pas eux-mêmes. Pauvres tarés, va ! ». Le Chat réalise une description de la statue compréhensible de tous. De l’autre côté, il y a Sylvie Girardet qui remet en place le contexte historique réel de l’œuvre et sa description.

 

 

 

 

 

Un autre exemple, Pierre Soulage, il l’illustre, crée une métaphore de son travail avec un dessin raté qu’il a raturé et recouvert de noir.

Cette bande dessinée découle en fait d’une exposition au musée en Herbe à Paris. L’exposition met en confrontation les œuvres de Philippe Geluck et les œuvres originales telles que celles de Picasso, Rodin, Warhol et quelques autres.
Grâce à cette édition Philippe Geluck a pu s’exprimer d’une façon libre sur les œuvres d’arts les plus connues de notre ère. L’artiste expose dans cette bande dessinée une mise en abime, il fait de l’art avec de l’art. Le Chat, n’est pas un simple personnage de BD, c’est le porte parole de Philippe Geluck, une image emblématique du monde du dessin.

J’espère que cet article vous donnera envie de lire d’autre édition du Chat tel que Le Chat déambule illustré en 2021.

Mathilde P. – DmadeJo1 – Avril 2022

Manipulation ou information ?

Vous connaissez cette chose qui nous suit partout où on va ? Mais si vous savez… ce truc qui nous énerve tellement avant de regarder une vidéo sur YouTube. C’est bon vous l’avez ? LA PUBLICITÉ !!!!! Absolument où que l’on aille elle est là, sur le bord d’une route, dans une boîte aux lettres, et même dans le magazine que vous lisez sur vos toilettes. 

On la trouve à la radio, à la télévision, sur les sites web (internet), dans le journal, sur les panneaux/affiches publicitaires, sur la vitrine chez le boulanger, sur les voitures, dans les airs… 

Il faut savoir qu’en moyenne, une personne voit environ 5000 PUB par jour. Ce n’est pas un chiffre adapté pour tout le monde évidemment, mais ça fait tout de même réfléchir!

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