Certains projets architecturaux, apparaissant comme futuristes, ne semblent être qu’une idée lointaine, dont on doute qu’elle aboutira un jour. Ce n’est pourtant plus le cas pour The Line, qui a vu ses travaux débuter début octobre 2022.

Vue satellite de l’excavation en cours, octobre 2022.

The line est un projet saoudien de ville écologique, qui se veut atteindre zéro émission de co2 et utiliser uniquement des énergies renouvelables pour son fonctionnement. Prévue pour accueillir près de 9 millions d’habitants, cette ville deviendrait la plus densément peuplée avec près de 260 000 personnes au km2, juste devant Manille aux Philippines, pourtant 6 fois moins élevée en densité. Située dans la region de Tabuk et allant jusqu’au golf d’Aqaba, cette ville en plein désert contiendra végétation luxuriante, logements de luxe, terrains de foot, taxis volants ainsi qu’une station d’altitude destinée à accueillir les Jeux Olympiques asiatiques 2029 pour un montant total minimal estimé à 200 milliards de dollards (les estimations les plus hautes penchant plutôt pour 1000 milliards ¨!). En bref, l’Arabie Saoudite compte bien en mettre plein la vue pour assurer son avenir économique après pétrole.
Cependant ce projet pharaonique qui annonce une multitude d’innovations techniques et écologiques est en réalité tout autre.

En effet, pour réaliser The Line, l’Arabie Saoudite fait face à un problème. Le territoire prévu pour le projet est occupé par des tribus autochtones. Il faut donc impérativement les déplacer et peu importe si les autorités doivent recourir à la violence. C’est d’ailleurs comme cela que les tribunaux d’exception ont condamné à mort trois dirigeants et à 50 ans de prison cinq représentants de Howeitat, l’une de ces tribus. Et pendant que la population pauvre se voit expulser, les grandes fortunes en profitent. Le journal Wall Street a dévoilé les rémunérations faramineuses obtenues par les plus haut cadres du projet. Et ce n’est pas très étonnant que l’on découvre que ceux-ci ne sont pas des grandes fortunes saoudiennes, mais bien des Occidentaux comme Peter Terium ancien carde de RWE (societé allemande d’énergie), Tim Shorrocks ancien d’Amazon, et bien d’autres.
Sur le plan humain et écologique se trouvent bien d’autres problèmes. Un exemple très récent a pu nous mettre en aletre sur les conditions de vie des travailleurs, en effet, il est question de la coupe du monde au Qatar et ses 7 mille employés décedés au cours de la construction des stades. On peut très facilement imaginer qu’il sera de même avec ce projet, voire pire. Le chantier est plus long et en plein désert, ce qui est encore plus difficile qu’au millieu de Doha. Mais bien sur cela ne relève encore que de suppositions.
Du point de vue environnemental, pour un projet qui se veut entièrement écologique nous sommes plus proches du greenwashing. Les moyens mis en oeuvre pour construire ce projet sont si considérables que l’aspect « écologique » affiché pour l’après ne représenterait rien. La faculté d’architecture de l’Université de Nouvelle-Galles du Sud en Australie estime pour la construction un coût écologique à environ 1,8 milliard de tonnes de CO2, soit 4 fois plus que la production du Royaume Uni en un an. Et en plus de l’impact écologique, c’est la faune local qui se verra impactée. Que ce soit pour les oiseaux migrateurs de la Mer Rouge qui ne verront pas cet immense mur de verre de 500 mètres de haut ou pour les animaux au sol qui ne pourront pas le contourner.

Alors certes, ce projet est une réelle prouesse architecturale qui tente de s’immiscer au sein de l’environnement local par des jeux de reflets mais les enjeux humain, écologiques et économiques sont bien trop importants. Et ne semblent pourtant pas alerter les promoteurs saoudiens guidés par la folie de l’avant-gardisme.
Si vous voulez en savoir un peu plus sur ce projet, n’hésitez pas à cliquer ici pour visionner une analyse vidéo.
Sources :
- Neom
- Radio France
- Le Monde
- Siècle Digital
- Numerama
Eve Lacroix – DNMADe1 Jo – octobre 2022