L’euthanasie : le droit à la dignité

©Dan race

« Bonjour à tous. Je m’appelle Paul Pointier, et je suis en classe de seconde générale et technologique.

Si je vous présente ce discours et non pas un autre, c’est car le thème principal de ce discours me tient particulièrement à cœur.

Donc je vous prie, vous tous, d’essayer de lire jusqu’à la fin. Ou au moins, de faire semblant.

Je sais que vous vous dites qu’un gamin de 15 ans n’a rien d’intéressant à vous dire. C’est peut-être vrai, mais je vous demanderai d’essayer de le lire, de lire mon discours. Merci d’avance.

Près de 650 000 personnes meurent chaque année en France, et souvent dans des souffrances indescriptibles. Certaines de mort naturelle (vieillesse), d’autres dans des conditions bien souvent tragiques (accident).

Aujourd’hui, je vais vous parler des autres cas. Ceux qui, par manque de moyens ou de temps, ne peuvent s’offrir une mort qui épargnera à eux et à leurs proches de la souffrance.

Ceux qui, dévorés par la maladie, savent pertinemment que la seule issue reste la mort.

Ceux qui, par la faute du gouvernement, ne peuvent abréger leurs souffrances, malgré le fait qu’ils soient tordus de douleur.

Chers camarades, je vous le demande. pensez-vous qu’il est préférable de laisser une personne humaine souffrir jusqu’à la mort, ou bien est-ce plus « humain » de permettre à cette personne de mourir sans souffrance ?

Aujourd’hui, je vais non pas prendre la défense des médecins, comme cela a souvent été fait durant cette période de trouble que nous avons tous vécus et que nous vivrons encore. Au contraire. J’ai décidé de prendre la défense, non pas seulement des malades, mais également de ce qui permettrait à des milliers de personnes en France de pouvoir partir dans la dignité.

Je vais donc prendre la défense de l’euthanasie.

L’euthanasie… Ce mot vous dit quelque chose, non ? L’euthanasie dite « active », c’est, selon le dictionnaire, la «mort provoquée dans le dessein (= l’objectif) d’abréger les souffrances d’un malade incurable.» (selon le dictionnaire Hachette édition 2017). Cependant, cet acte est condamné par la loi, en France. Certes, l’euthanasie dite « passive » (consistant en l’arrêt des soins du patient) est toujours légale en France, mais ce n’est pas un moyen d’empêcher les patients de souffrir.

En France, l’euthanasie active est interdite depuis la loi Leonetti de 2005. Cependant, d’autres façons de mourir existent, telles que la mort assistée. Je vois votre question venir : « Qu’est-ce que c’est que ce machin ? ».

Tout d’abord, ce n’est pas un machin. Ensuite, la mort assistée, ou suicide médicalement assisté, désigne l’acte de fournir un environnement et des moyens nécessaires à une personne pour qu’elle puisse se suicider. Cet acte est proche de l’euthanasie, si ce n’est que ce n’est pas le corps médical qui administre la mort, mais le patient lui même. Le déroulement est simple : le médecin donne une potion (ou autre) au patient qui se l’administre, puis le patient meurt peu à peu. Cette pratique était autorisée, mais ne l’est plus. Cependant, le rapport Sicard publié en décembre 2012 envisage la possibilité de la légaliser. A suivre, donc…

Ensuite, je vais vous donner un exemple de mise à mort que je trouve particulièrement inhumain. Je vais vous parler de la sédation profonde et vous en expliquer le fonctionnement. La sédation profonde a été reconnue comme un droit des patients le 2 février 2016. Elle peut être utilisée dans trois cas. Dans le premier, le patient a formulé cette volonté, car il est atteint d’une affection grave et incurable et son pronostic vital est engagé à court terme. Le deuxième cas est extrêmement similaire au premier, sauf que dans ce cas le patient a souhaité l’arrêt des traitements et c’est cela qui a engagé son pronostic vital à court terme. Enfin, pour le troisième cas, le patient ne peut pas exprimer sa volonté, le maintenir en vie grâce à son traitement est jugé comme de l’acharnement thérapeutique, le médecin décide donc de l’ arrêter et de mettre en œuvre une sédation profonde.

Maintenant, permettez-moi de vous expliquer en quoi consiste la sédation profonde, et alors, peut-être que vous penserez comme moi que tout ceci n’a rien d’humain.

Avant toute chose, sachez que c’est la loi Leonetti qui encadre cette pratique. Le déroulement d’une sédation profonde est assez complexe : tout d’abord, le médecin suspend la conscience du malade grâce à l’administration d’un médicament, provoquant un effet de détente chez le patient ; en règle générale il s’agit de morphine à forte dose. Ensuite, le médecin continue le traitement censé atténuer la douleur chez le patient. Finalement, le médecin laisse le corps lâcher tout seul, c’est-à-dire que le médecin laisse la maladie achever le patient. Cette opération peut durer peu de temps, tout comme elle peut durer plusieurs jours.

Je sais comment tout cela se passe. En effet, mon grand père, qui était atteint d’un cancer généralisé, a eu cette « chance » de pouvoir bénéficier de la sédation profonde. Son corps lâchait jour après jour, mais il était lucide, et c’est là que le bât blesse ! Quand la personne malade voit et surtout comprend ce qu’il se passe autour d’elle, qu’elle subit le traitement qui ne fonctionne plus et qu’elle devient un « légume » qui ne peut plus accomplir les gestes de la vie quotidienne comme par exemple celui de se passer la langue sur les lèvres… ou tout simplement aller au toilettes !

Il n’y a plus de dignité.

Alors avec accord des personnes de confiance (terme qui signifie que si la personne ne peut plus dire ce qu’elle veut, une autre prendra la décision à sa place), mon grand-père a été plongé en sédation profonde.

Sa lente agonie a duré quasi 24 heures.

24 heures dans une vie ce n’est rien… juste une poignée d’heures qui s’égrène soit lentement soit vite. 24 heures c’est le temps qu’il a fallu aux organes vitaux de mon grand père pour lâcher les uns après les autres jusqu’à ce que son cœur cesse tout simplement de battre.

Alors oui, bien sûr il ne « sentait » rien, enfin c’est ce qu’on espère et on le souhaite de tout notre cœur car la pensée qu’il ait pu souffrir nous est abominable ! Et sur un plan purement médical c’est fort possible au vu des doses démesurées de morphine qui lui ont étés administrées.

Vous vous demandez sûrement comment je le sais… bien sûr je n’étais pas avec lui pour voir sa déchéance, mais j’ai voulu savoir. Je me suis renseigné par le biais de forums médicaux, de sites internet et puis bien sûr j’ai demandé à ma mère qui a accepté de m’en parler car j’avais besoin de savoir afin d’avancer et de faire mon deuil.

Mon troisième argument est le suivant : en effet, ce n’est pas parce que l’euthanasie active n’est pas autorisée en France qu’elle n’est pas pratiquée, ou que les Français ne cherchent pas à se la faire administrer. En effet, en 2018, 2357 personnes ont étés déclarées s’être fait euthanasier en France. Une euthanasie active, et non pas passive ! Cela m’a surpris aussi, je dois l’avouer.

Cependant, il n’y a pas qu’en France que les français se font euthanasier. En effet, une euthanasie en Belgique coûte à peine 25€, sans compter les frais du médecin. En Suisse aussi, l’euthanasie est légale. Pour le prix de 9000/10000€ (pour l’encadrement total), de plus en plus de personnes choisissent cette option. Elles ont conscience de transgresser la loi, mais elles le font quand même. Car elles souffrent à chaque seconde de plus qu’elles passent à vivre dans l’espoir de mourir bientôt.

Finalement, je finirai avec cet argument, le plus parlant à mon avis. Depuis la nuit des temps, nous donnons à nos animaux de compagnie le droit et nous avons le devoir de les accompagner le temps de leur passage sur Terre, nous leurs offrons bien souvent, comme dernier geste d’amour, l’euthanasie. Dans ces conditions-là, nous qui sommes ni plus ni moins des primates évolués, pourquoi ne pas nous donner ce choix ? Pourquoi nous retirer ce droit que l’on donne à nos animaux ? Je vous pose la question.

Laisser partir un malade dans la dignité et en toute conscience avec un accompagnement médical, cela serait un geste d’amour et de respect pour la vie humaine. Cela serait une chance pour beaucoup de personnes qui souffrent à travers le monde. Attention, je ne dis pas que l’on devrait euthanasier toute personne qui le demande, mais, au moins, il serait humain de permettre à ceux qui souffrent réellement de pouvoir partir avec dignité et sans avoir à souffrir plus que nécessaire.

Peut-être qu’un jour cela changera. Peut-être qu’un jour quelqu’un de haut placé et ayant un semblant de pouvoir politique se lèvera plus haut que les autres pour pouvoir enfin clamer haut et fort « Donnez-nous ce droit ! Le droit de pouvoir partir sans souffrir et sans faire souffrir nos proches ! ». Peut-être que cette personne fera, comme Madame Simone Veil l’a fait avec l’avortement, un discours qui permettra de changer le regard des autres sur ce geste, un discours qui marquera les esprits, un discours comme tant d’autres en ont fait pour de grandes et nobles causes. Alors, ce jour-là, peut-être que l’on nous écoutera. Et qui sait ? Peut-être que cette personne, ce sera… vous.»

Paul Pointier – 2nde 1

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