- Patère, PORTE-MANTEAU, Trap ou Trébuchet
- Artiste: Marcel Duchamp
- Dimensions: 19 cm x 100 cm x 13 cm.
- Dates:1917 puis 1964.
- Lieux de création: N.Y, 33 West 67th street, uper est side. « ...
- « Un vrai porte-manteau patère que je voulais parfois mettre sur le mur et accrocher mes affaires mais je n’y suis jamais arrivé – donc c’était sur le sol et je le frappais à chaque minute, à chaque fois. Je suis sorti – j’en suis devenu fou et j’ai dit l’enfer avec ça, s’il veut rester là et m’ennuyer, je le clouerai … et puis l’association avec le Readymade est venue et c’est tout. Il n’a pas été acheté pour être un Readymade – c’était une chose naturelle ….. il a été cloué là où il était et puis l’idée est venue ….. « -Marcel DUCHAMP, extrait d’une interview non publiée avec Harriet JANIS.
Version originale, Numéro 0.
« Ceci est de l’art ». Analyse peircienne de l’image de l’art, Dominique CHATEAUX.
Version numéro 2 /8.
SAMMLUNG MARCEL DUCHAMP IN DER MODERNE IM STAATLICHEN MUSEUM SCHWERIN
© VG Bild-Kunst, Bonn 2019, Staatliche Schlösser, Gärten und Kunstsammlungen Mecklenburg-Vorpommern, Foto: Gabriele Bröcker
Version Numéro 7/8 Marcel Duchamp, Trebuchet (Trap), 1917 / 1963 « Marcel Duchamp: The Art of Chess » at Francis M. Naumann Fine Art, New York, through Oct. 30, 2009
Date : entre 1913 et 1964
Dimensions : 32 cm x 127 cm x 64 cm
Matériaux : Métal, Bois peint.
Acquisition : Achat (1986)
« Ernst a pris la vue familière d’un homme et d’un chapeau et, allant sous la surface, l’a rendue inconnue. En revanche, Duchamp a pris un objet prétendument familier et ordinaire et l’a défamiliarisé par un changement de lieu et de statut. (Le changement est ce que Russell et Bradley auraient appelé un changement dans les relations extérieures.) (…) La légende veut qu’en 1917, alors qu’expatrié de la guerre européenne, Marcel Duchamp achète un portemanteau, le cloue au sol de son appartement new-yorkais (fig. 7) puis nomme cette nouvelle œuvre d’art: «Trébuchet «. Les œuvres d’Ernst et de Duchamp ont ceci en commun: tous deux prennent le familier et ensuite le rendent inconnu: c’est la façon dont ils le rendent inconnu qui est différent .Laissant un instant les œuvres d’art de côté, pour illustrer davantage les différences entre les voies de la profondeur et de la surface, revenons à la question de savoir ce qui nous fait mal tourner, qu’est-ce qui nous conduit à l’erreur? De manière familière, un côté répond à la «tromperie» – qu’elle soit psychologique, sociale ou politique: il y a quelque chose de caché qui doit être découvert; nous devons quitter nos repaires habituels de surface pour les inconnus, là où se trouve la vérité. (Parfois, la théorie est que l’identification de la tromperie accomplit la découverte de la vérité.) Comme dans l’œuvre d’Ernst, tout n’est pas ce qu’il apparaît: pour comprendre les hommes sous nos yeux, nous devons descendre à leur structure sous-jacente. Wittgenstein, au contraire, dit dans les Enquêtes «… Car ce qui est caché, par exemple, ne nous intéresse pas» [PI: 126] (17)
« Entretiens avec Marcel Duchamp » par Georges Charbonnier.« Le mélange de goût, dans la définition du mot art, est pour moi une erreur : l’art est une chose beaucoup plus profonde que le goût d’une époque, et l’art d’une époque n’est pas le goût de cette époque. C’est très difficile à expliquer parce que les gens ne pensent pas qu’on puisse faire quelque chose autrement que par goût : on vit par son goût, on choisit son chapeau, on choisit son tableau. »
« Le mot art, d’ailleurs, étymologiquement, veut dire faire, tout simplement. « Faire avec », si vous voulez, et presque « faire avec les mains ». Donc, l’art, c’est tout ce qui est fait avec la main, et généralement par un individu. Ce qui rend la chose bien différente de ce que l’on appelle le goût et l’acquiescement de toute une époque envers certains tableaux, certaines choses, n’est-ce pas… Et ça gêne énormément parce que le goût est une source de plaisir, et l’art n’est pas une source de plaisir. C’est une source qui n’a pas de couleur, qui n’a pas de goût. »
“Le goût est une source de plaisir, l’art n’est pas une source de plaisir, c’est une source qui n’a pas de couleur, pas de goût.” Entretiens avec Marcel Duchamp » par Georges Charbonnier.“Un tableau, même abstrait, est de l’art dès qu’on accepte de le regarder comme un tableau, un readymade est tout simplement de l’art. »“Le spectateur est aussi important que l’artiste dans le phénomène art.”
Entretiens avec Marcel Duchamp » – Georges CHARBONNIER.
« Un mauvais art est quand même de l’art, comme une mauvaise émotion est quand même une émotion. » Duchamp du signe de Marcel Duchamp.
https://www.franceinter.fr/culture/marcel-duchamp-l-anartiste
« Un ready-made, c’est une œuvre d’art sans artiste pour la réaliser, si je peux simplifier la définition” Marcel Duchamp 1961.
La question de l’innattention et de l’attention dans « la praxis readymade« .
Le trébuchet plus que tous les autres readymades questionne de façon humoristique ce phénomène de l’attention, cette stratégie opticale dont l’art pictural fit pendant longtemps l’usage exclusif et de la captation de sa surface d’insciption le moteur propre et vertueux de toute pratique réceptive et esthétique. l’artiste, autrefois, maître de l’illusion, des illusions et de la jouissance trompeuse, des effets et des affectes faisait usage des « ressorts « de la beauté, ou de la laideur, du pouvoir fascinant des signes et des images. Son oeuvre pouvait parfois nous faire de l’oeil, nous happer ou nous repousser, se jouant de notre désir, du « fort-da » qui nous anime.
Qu’est-ce que l’attention ? » Activité de l’esprit », Faculté et processus cognitif, elle est définie comme la capacité pour l’esprit, de s’ouvrir à une connaissance interne (ressentis, sentiments, émotions, ou externe dans un environnement aux sollicitations multiples. Elle ne peut se conjuguer avec l’acte de concentration, c’est une question de focale. De la simultanéité de ces stimulis internes ou externes, il faudra savoir en prendre possession et pouvoir en cultiver l’écoute dans les nombreux flux, forces et sensations qui nous traverses. Par sélection, focalisation, alternée ou divisée, l’homme dans l’espace hostile, multiplie les réflexes de conservations que sa nature et une longue histoire a inscrite en lui. Cela peut être un objet, une œuvre, un son, une image, une odeur ou une suite de pensée. « Substance mentale », depuis l’antiquité grecque jusqu’à Descartes, Hobbes, Malebranche, le phénomène est considéré comme nécessaire, car il permet de discriminer le réel . On parlera dans ce cas « d’attention sélective ». « Prêter son attention, selon Gary HATFIELD, implique que l’on dirige son esprit sur le contenu pertinent, qu’il soit de nature sensible ou purement intellectuel ». Par cette » mise en relief » et « en suspens » des choses et de certaines parties plus que d’autre, la pensée, la perception et l’action peuvent s’organiser et se construire. Bergson nous enseignera la nécessité de cette optimisation adaptative dans nos usages du quotidien. « Le champ perceptif, explique le philosophe, s’illumine et découpe des objets. Surgissent alors de mes actions possibles sur les objets et les actions possibles des objets sur moi. » Pour le philosophe elle est une « Auxiliaire de l’action » car » elle isole, dans l’ensemble de la réalité, ce qui nous intéresse ; elle nous montre moins les choses mêmes que le parti que nous pouvons tirer. Par avance, elle les classe ; par avance, elle les étiquette ; nous regardons à peine l’objet, il nous suffit de savoir à quelle catégorie il appartient. » (Bergson, 1911, p. 1373). Celui qui ne s’adapte pas à cette fluide nécessité du réel sera malheureusement condamné au rire et au comique en devenant par handicap,inadaptation, une simple « mécanique plaqué sur du vivant » .« Ce n’est plus de la vie, souligne Bergson, c’est de l’automatisme installé dans la vie et imitant la vie. C’est du comique. Percevoir, penser, créer, c’est faire des choix » dans ces possibilités qui s’offrent ». Descartes, dans les Méditations, la décrit comme une « activité de la volonté ».
Nous pourrions aussi souligner sa nécessité vitale dans la nature. Facteur nécessaire à l’autoconservation dans un environnement hostile, l’homme comme l’animal doit être vigilent voire hyper-vigilent aux signaux. Dans l’écosystème naturel ou règne la prédation naturelle entre les espèces, l’inattention et la distraction n’est pas concevable. D’un point de vue psychique, Freud enseignera dans son étude du psychisme humain que cette fonction d’autoconservation se retrouve à travers l’affect d’angoisse. Il agit, comme un signal salutaire face au danger.
Attention, d’attention, elle est particulièrement cultivée dans l’acte de création ou de réceptivité esthétique. Pensons aux multiples dispositifs construits et inventés par les peintres mais aussi dans le champs social afin de pouvoir la capitaliser, la maîtriser, la contrôler, la réguler chez un consommateur, un électeur, un travailleur. Synonyme de productivité Charles lhaman parle d’une « économie de l’attention. »
Duchamp dans son activité créative butait contre les objets posés, abandonnés ça et là dans son atelier. A tout le moins c’est ce que raconte la légende à propos de la création de cette oeuvre Hat Rack. Comme si même le ready-made avait besoin de son « berechit », son mythe d’origine avec son tsim tsum, cette mise en retrait du créateur vis à vis de sa création pour que celle-ci d’un simple geste involontaire prenne forme et puisse prendre vie comme concept à partir du langage et du regard posé sur elle.
« L’intelligence, c’est l’attention. » disait J. Rancière dans le maître ignorant.
L’inattention peut comme chez Duchamp être recherchée et former le contre-point rebelle et détaché à la norme disciplinaire et esthétique du contrôle des corps présent également dans le champ de l’art. La modernité avec l’avènement de la pratique et théorie psychanalytique, les nouvelles praxis artistiques, pensons au mouvement surréaliste, dévoilera ce désir d’explorer les potentialités nouvelles ou oubliées de la création par la recherche les activités la recherche d’états limites qui débordent avec son hybris la conception academique de l’acte créatif comme lieu de la conscience éclairée, d’un logos voire phagologocentrique . (Attention flottante pour mieux permettre le jeu des associations libres, élargissement da l’art de du langage au delà ldes genres er des catégories. Les Faux pas, bévues, lapsus.une réalité cachée. Accident, discipline du kairos ou détournement volontaire ? L’utilisation de la fatigue mentale dans l’écriture automatique, par son épuisement, où son trouble par le effets de l’artifice mais peut-on la cultiver sous la serre de l’art
ou involontaire. Trébucher par paresse ?
« Vous pouvez écouter en avant-première un extrait de cette fiction qui sera diffusée dimanche 10 juin 2018 à 21h, et dans laquelle le comédien Gautier About prête sa voix à Marcel Duchamp !
New York, 1915. Marcel Duchamp révolu„ — Marcel Duchamptionne l’art, par Camille AzaÏs »Jeu d’échecs, entretien filmé par Jean-Marie Drot ,En 1963.
« Destruction is also creation.“ Help us translate this quote »M.Duchamp
https://ichi.pro/fr/c-etait-un-nouveau-spin-sur-l-art-148865449433892
Et Duchamp parle de son mariage : « Ce mariage a été à moitié fait par Francis PICABIA qui connaissait la famille. On s’est marié comme on se marie généralement mais cela n’a pas collé : j’étais vraiment beaucoup plus célibataire que je ne le pensais. »Un mariage de Marcel Duchamp le célibataire mis à nu par sa mariée, même, un mariage de Marcel Duchamp le célibataire mis à nu par sa mariée, même François Bon Intervention à Beaubourg, février 2005
Exposer ne rime-t-il pas pour Duchamp avec « épouser? ».
C’est la réponse que donna M.D à sa soeur Suzanne qui lui proposait d’exposer avec elle et son mari, Jean Crotti, ses ready-mades. Épouser vient du bas. lat. sponsare « : promettre en mariage, fiancer ». Au temps des grecs cette promesse aux dieux s’effectuait à travers les rites de la libation. Il est l’acte de contracter officiellement une alliance. Pour M.Duchamp, au delà de l’analogie sonore, l’exposition devient également un dispositif contractuel comparable, une métaphore négative et forclose, un hymen malheureux. l’exposition instituerait plus ou moins tacitement, une relation normative avec ce qu’elle expose et l’instance du regard qu’elle organise et régule, voire assujeti dans le même. Nous sommes bien éloigné des possibilités que permet l’amour libre ou l’éthique du célibat, cet espace des recontres ou de la non-rencontre, de la jouissance Une et multidéployée. Comme la famille, le couple, la scénographie du visible telle que le propose l’espace muséal traditionnel n’est-il pas comme le théorisera G. Deleuze faire de ce lieu une « instance de codage des flux du désir et de protection contre leur puissance.?. « L’exposition serait comme les épousailles une « instance de codage » celle d’une conduite, un mode de vie comme il y a un mode d’exposition . ). Sa scénographie imposée mettrait à mal « la pulsion créatrice » , »ce désordre de l’élan vital » propre au travail hors-cadre du ready-mades. A contrario, l’atelier, espace de liberté, demeurait le vrai lieu conceptuel et d’expérimentation. Vous me direz et l’urinoir, il a pourtant pris place sur le socle muséal? Loin du phénomènes d’imitation et d’assimilation, le ready-made Fontaine s’affirma comme un opérateur de décodage, si l’on comprend le codage comme ce qui fait sens, ce qui fabrique de l’organisé. Dans son apparence muséale, sur son socle, elle dynamite de l’intérieur l’instance instituante. En singeant les codifications, se faisant mascarade et comédie, elle en questionne véritablement le sens, et le genre. Véritable révélateur ou sel d’argent tel est la fonction de Fontaine. Comme la broyeuse de chocolat, elle broie les signes institués, comme le trébuchet, elle catapulte, crève la paroi transparente des us et coutumes, la fluidité naturelle et apparente du langage, policé, des conventions et des lois homosociales et binaires. Elle recode mentalement et propose la multiplicité.
Au XIXèm, le salon des refusées, avait été crée pour contenir toutes les oeuvres nouvelles dont le réalisme trop affirmé et prosaique dénotait face aux canons idéaux du noble académisme agrée .Ce réalisme de « l’art pompier », triomphe « des forces réactives « , « teinté d’idéalisme bien mièvre et gracieux à la Bouguereaux (désir socialisé?) conservait au Salon ,la meilleur place du parnasse de l’art français tandis que la peinture trop franche ou affranchie rejoignait en 1963 les nouveaux espaces annexes de l’art. Ceux-ci, au nom d’un despotisme éclairé étaient seulement tolérés dans une autre partie du Palais de l’industrie. Napoléon III laissait ,face aux réclamations, le publique seul juge de ce type de peinture où la nouveauté moderne et le médiocre pouvait s’y côtoyer.
L’espace du musée, institution sociale comme celle du salon était, par sa scénographie, très éloigné des structures modernes puis contemporaine dont nous faisons l’expérience dont l’architecture toute de transparence et de fluidité est si propice pour la présentation dialectique, égalitaire et démocratique des catégories artistiques . Les salons étaient à leur image, une vitrine du pouvoir, régime instituant, véritables « Machine despotique » dirait Deleuze. Le musée espace étatique et républicain lieu « hétérotopique » d’exposition des collections , « d’archive générale », où tous les temps, toutes les époques, toutes les formes, tous les goûts » s’amoncellent pour Michel Foucault, était au delà d’être le lieu d’expression symbolique de la nation… un lieu officiel, normé, quadrillé de « Surcodages ».-(« surcodage despotique? »). Il dressait , »canalisait les flux du désir » dans une sorte de » lissage des formes, et du discours, « production d’un savoir » sur les figures qui le compose ». Quand est-il du salon? Espace des médailles, de l’actualité et de découverte des génies de son temps et de la nation, manifestation de l’esprit de son temps comme peut l’être l’Exposition universelle pour le monde, n’est-il pas le lieu privilégié d’un « codage » gouvernemental (locus des croyances habituelles de l’establishment bourgeois, des valeurs reçues). Il rendait sous la pompe, visible au publique les oeuvres qu’une autorité reconnue et juridique garantissait et cautionnait. Le Salon des refusées en contre-point serait reprenant les propos de Nietzsche cet espace de « l’inactuel » (Unzeitgemäss) de l’inactualité. « Etrangers au présent » ces artistes devront, paraphrasant le philosophe, loin devant eux, dans l’océan de l’avenir, par-dessus leur tête, lancer leur ligne, sachant qu’à travers ce chemins tortueux ils devront parfois solitaires et incompris entre bohème élégante ou maudite, malgré les tempêtes persévérer dans leur convictions. Ces artistes de la modernité ou (du modernisme devoiement historiciste, triomphe du progrès) comparables à la lumière des étoiles les plus éloignées » « agiront « , à contre-temps, “hors temps”ou contre le temps »donc sur le temps, et, espérons-le, au bénéfice d’un temps à venir ».« Il faut longtemps aux grandes nouvelles pour être comprises, précisait Nietzsche à la vue de sa propre philosophie, tandis que les petites nouveautés du jour ont la voix forte et bénéficient de l’universelle compréhension de l’instant » (FW, 14 [25]). Qu’en est aussi de cet autre espace qui est celui de l’atelier? Lieu d’exposition marchand comme en témoigne certaines représentaion picturales (Fréderic BASILLE), espace de création figuré par l’artiste comme un manifeste de son art (COURBET) , il rejoindra au XXèm l’espace muséal comme témoignage, lieu de mémoire, mémorial consacré de l’acte artistique, son processus. Pensons à celui de BRANCUSI qui a rejoint le Centre Pompidou, pensons à l’importance qu’il prend dans la mise en scène de Duchamp.
L’art a toujours donné forme au naturel pour aboutir à un ordre esthétique à l’image d’une harmonie, d’une hiérarchie sociale, d’un monde dont la plasticité et représentation, le discours la manifestation symbolise son énonciation. On pourrait aussi dire la même chose du pouvoir qu’il soit ou non profane sachant que les deux ont longtemps formés un unité non disjointe dans les théocraties. Dans ses cours de Vincennes sur la Nature des flux le 14/12/1971 Deleuze à travers la comparaison entre la peinture byzantine et la peinture Vénitienne son évolution mais l’on aurait pu le faire à travers le passage de l’art classique au baroque, démontre comment un » christianisme surcodé », à travers son style, mais aussi la façon dont il représente les corps et organes témoigne de cette émancipation de la figure devenue maîtresse et possesseur de ses propres organes.« On a l’impression que leurs organes sont l’objet d’un investissement collectif hiérarchisé » … » tout le christianisme, dit-il, à ce moment là trouve comme sa forme picturale dans les agencements, à la lettre, pyramidaux sur un mode hiérarchique, qui répondent au surcodage despotique. » Dans l’art pictural vénitien, » voilà que la vierge et chaque personnage se mettent, à la lettre, à mener leur propre affaire ; à la lettre le tableau fuit par tous les bouts : la vierge regarde d’un côté, il y a deux types qui regardent le petit Jésus, un troisième regarde par là comme si quelque chose se passait, il y a des scènes à l’arrière plan, le tableau éclate dans toutes sortes de directions. » Le salon au XIXèm est l’héritier de ceux du XVIIèm. A l’époque de Mazarin, ils étaient agréées par l »Académie royale de peinture et de sculpture puis ensuite par l’ Académie des beaux-arts. Le salon était une machinerie, un dispositif de justification et d’authentification de désignation, de discrimination de l’art (prix, médailles avec ces lauréats puis achat par l’état) à une époque où de nouvelles formes contestataires revendiquaient un changement de paradigme esthétique et sociétal (Cf.Courbet:Réalisme et politique). Même la modernité moderniste a répétée, malgré elle, ces dispositifs de désignation et d’exclusion. Le nu descendant l’escalier n’est pas accepter au salon des indépendants par manque de purisme avec la nouvelle orthodoxie cubiste.Le modernisme, aussi ,se construira dans ce tiraillement entre décodage et recodage, entre destruction et parfois reconstruction des nouvelles chapelles (pensons au surréalisme inquisiteur de Breton avec excommunication.) Les nouveaux artistes modernes et les premières avant-garde étaient comme chaque révolution artistique « une force de destruction des «codes». » Comme le schizo théorisé par Deleuze et Guattari, Ils étaient assimilés à la figure de l’artiste, «prophète», « créateur », « chiffonier », « saltinbanque », » flâneur », » bandits » qui « donne à voir sur lui, en lui et par lui le «décodage des flux». Dans un système codé, on le tiendra donc généralement pour «fou», stigmatisation « du normal et du pathologique qui trouvera son expression de barbarie extrême dans la mise au pilori publique de l’art dégénéré. Duchamp avec R.MUTT mettra en avant, comme un pied de nez, cette figure caricaturale du fou, du crétin.
Le risque de l’informe et du chaos effraye toujours l’institution qui y voyait, toujours dans cette perte de la représentation affectée, l’indiscipline des corps (corps créant-corps percevant). Le musée, le salon, le lieu d’exposition, le mode d’exposition, l’ « environnement de présentation des oeuvres devient un enjeu . Contre les salons, institution du voir, ces nouveaux lieux de maîtrise des corps Foucaldiens, ici c’est de l’optique et de l’oeil dont il s’agit. Duchamp proposera sa cécité. Le lieu d’exposition est un contenu qui a une substance – les spectateurs – et une forme, qui concerne l’ordre dans lequel cette substance est organisée : horaires, circulation, répartition dans l’espace des éléments du spectacle. Sur ce sol, cette strate, il y a une expression correspondante, qui a elle-même une forme – les règles du goûts comme le discours esthétique sur l’art – et une substance, à savoir l’artistique lui-même.
Le lieu de culture, lieu de contrôle simultanée par le corps social du goût, de la conduite esthétique, assignait une place, un miroir cloisonné à l’image des autres structures sociales ( l’école, la prison..la caserne ou les grands espaces manufacturiers, fabricant d’objets que Duchamp annexera. ( Dans cette chaine l’objet est conçu à partir de l’ajustement des corps à la production), Duchamp en poursuit la production ironique et iconoclaste.
La mariée, parfois, n’était pas assez belle et trop prosaïque ( vierge noyée du Caravage, Vénus Anadyomène, Olympia, Fontaine, mariée mise à nu par les célibataires, même) au goût éthéré des instances légitimentes et légiférantes . Elle porte par son épousaille à la « lumière et le langage », la loi et son assentiment social). On créait le salon des refusés, « exposition de rejets », par une sorte de compromis.(1863) L’ambiance se faisant électrique. L
, ( , , ), possible .( « ») « » . « , » [ ] .L’Anti-Œdipe, p. 209. Ce nouvel avatar du musée, reconnaissait ses enfants naturels. Tandis que de nouvelles incarnations esthétiques bouleversaient ce même champs, et demandaient la reconnaissance (état-civil et nouvelle filiation) d’autres enfantements…art bâtard, ( sans père ni mère) .Duchamp, art métisse, art hybride art audelà des genres et catégories. (Picasso, Brancusi, Matisse). Introduction de nouvelles esthétiques à New York au temps où Duchamp réside à New York.. En 1886, Albert de LAPPARENT, le géologue utilisait la notion « épouser » dans son propre domaine dans le sens de « s’adapter parfaitement à une forme ». (Lapparent, Abr. géol., p. 9). Il y avait une géographie et une histoire, mais aussi un sol stratigraphique (une géologie) auxquels la modernité ne voudra plus se conformer (Manet, Courbet, Pissarro et les autres…) »les formations historiques, ( la genèse des formations collectives), disait Deleuze se présentent comme des strates, des formations stratifiées… » »Les formations collectives doivent être comprises comme des « stratum », des couche sédimentaire. » Qu’est-ce que la géologie précise sinon une différenciation de strates entre couche inférieure et d’une supérieure, une nappe de passé et une actualité qui s’en démarque, ne l’épouse pas dans sa succession. Premiers dans la décrépitude de leur art, « Vous n’êtes que le premier dans la décrépitude de votre art » c’est le propos de Baudelaire face à la découverte du travail de Manet. Ils marquaient la fin d’un art hors-sol pour épouser paradoxalement le réel jusqu’au« principe souterrain de représentation »J-F Lyotard de « dessaisissement? » H. Maldiney, de » dépaysement », de « déformation » volontaire visible (Cézanne et la lecture phénoménologique d’une pré-réalité).
Jean-François Lyotard, Des dispositifs pulsionnels, op. cit., p. 80. /Henri Maldiney, dans Sainte-Victoire Cézanne 1990, op. cit., 1990, p. 274./ La déformation en tant que principe de déreprésentation. Le Cézanne des philosophes français Mauro Carbone Dans Nouvelle revue d’esthétique 2013/2 (n° 12), pages 201 à 210
|
Duchamp justement dans son refus du mode d’exposition et de la scénographie conteste cette parfaite adaptabilité voire soumission de (ce qui est fait pour) par imitation. Il refuse de s’ « accommoder », de conformer, la forme exposée avec le fonds (au sens de s’ajuster, s’accorder). L’oeuvre ready-made s’affirme comme dialectique et problématique avec l’espace d’exposition-ce fut le cas de Fontaine qui refuse de faire sien l’espace, de s’y identifier. On peut voire la même optique iconoclaste dans la scénographie délirante de l’ Exposition Internationale du Surréalisme en 1938 et 1947.
Il permet ce que Deleuze conceptualisera dans le « processus de décontextualisation d’un ensemble de relations qui permet leur actualisation dans d’autres contextes, ». Cela semblerait bien résumer la pratique Duchampienne du ready-made et du contexte -ce travail avec et autour du texte, d’une nouvelle actualisation du « dispositif » » stratégiques » de présentation des oeuvres (capture, orientation, détermination, interception, contrôle, modélisation des actions du spectateur). Michel Foucault et Giorgio Agamben l’élargissant à tous types de pratiques sociales jusqu’au langage lui-même résumaient très bien ce terme.
« J’ai dit que le dispositif était de nature essentiellement stratégique, ce qui suppose qu’il s’agit là d’une certaine manipulation de rapports de force, d’une intervention rationnelle et concertée dans ces rapports de force, soit pour les développer dans telle direction, soit pour les bloquer, ou pour les stabiliser, les utiliser. Le dispositif, donc, est toujours inscrit dans un jeu de pouvoir, mais toujours lié aussi à une ou à des bornes de savoir qui en naissent, mais, tout autant, le conditionnent. » (Dits et écrits, volume III, p. 299 sq.).
« dispositif tout ce qui a, d’une manière ou d’une autre, la capacité de capturer, d’orienter, de déterminer, d’intercepter, de modeler, de contrôler et d’assurer les gestes, les conduites, les opinions et les discours des êtres vivants Marcel Duchamp ne se laisse pas épouser, saisir dans les différentes « lignes » mouvantes de son territoire. Avec fontaine il « profane » le dispositifs muséal par une désubjectivation, désindividuation, déssujestion. Il invite à la « déterritorialisation ». « Se déterritorialiser, expliquait Deleuze, c’est quitter une habitude, une sédentarité. Plus clairement, c’est échapper à une aliénation, à des processus de subjectivation précise. » (Deleuze et Guattari 1972 p. 162).« Dès son acte de naissance, [l’hominien] déterritorialise sa patte antérieure, il l’arrache à la terre pour en faire une main, et la reterritorialise sur des branches et des outils. Un bâton à son tour est une branche déterritorialisée. » Que fait le Blind Man, ce modèle duchampien, sinon déterritorialisé son oeil caption d’étendue cartésienne immobile et transparente, attaché à la perception optical de l’espace sensible pour faire du mental un nouvel espace de reterritorialisation conceptuel.(Deleuze et Guattari 1991 p. 66)Comment faut-il percevoir ce travail du ready-made sinon un vaste travail de « déclassification » des objets, … des gestes, des signes… — une déclassification qui les libère de leurs usages conventionnels envers d’autres usages. » Deleuze y voit un mouvement créatif et pas seulement destructif. Un territoire se définit, se circonscrit qu’il situe dans cet espace héterotopique entre art , anti-art et le réel…un espace qui à l’épaisseur infra-mince et flou d’une marge indistinct où respirer et vivre peut-être un acte de création absolue…
« processus qui libère un contenu de tout code et le fait filer sur une ligne de fuite » (Zourabichvili 2003 p. 87).C’est peut-être pour cela que depuis plus de 100 ans, son oeuvre ne cesse, en nous, de créer ce « processus »désirant, le désir de penser, plaisir pur du jeu d’échecs, qui pense gagne.
Marcel Duchamp © Getty / Mark Kauffmann
Pourquoi faudrait-il que tout soit jouer?
« Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée « d’Alfred de Musset.
Pourquoi faudrait-il qu’une porte soit ouverte soit fermée…?
« Vous préférez la vie au travail d’artiste ? » « Oui » répondit Marcel.Entretien avec Marcel Duchamp
A contrario de nombreux artistes qui se feront alchimistes de l’ordinaire depuis la modernité, Duchamp n’est ni cette « subjectivité géniale kantienne » et romantique qui se démarque de la collectivité par sa puissance créatrice, ni le magicien forgeront du fer qui subjugue par sa grande maîtrise du feu, ni le prophète (voyant) prêt à plonger dans un monde nouveau, ni l’ « opérateur sociale », « agent des forces sociales » direct de son temps (Deleuze).Il se fait opérateur indirect.
Assit dans son fauteuil, il joue aux échecs, avec une distance affectée et dilettante, un air d’allégresse amusée et mutine. A distance, Il nous regarde. Il préfère faire de sa vie et de son emploi du temps la pratique artistique elle-même. Vivre , c’est déjà faire de l’art. Il place la paresse ( pigritia), le non-mouvement, le non non-agir profane de la vie, ce principe premier de jouissance cet affect de joie (Spinoza), ce bonheur intense de la vie contemplative loin de la « raison utilitaire « (Sahlins), quitte à passer pour un imposteur.
Il est vrai que sa pratique du ready-made se construit dans « une société d’abondance », une société américaine « dont la puissance la plus décisive de notre vie moderne » (le capitalisme-et son éthique, Weber) nimbe l’activité entreprenariale et marchande d’une sacralité nouvelle.
Sa répugnance avec la société du « fer », pourrait passer pour une acédie moderne quitter l’atelier ou l’usine comme l’on quitte la cellule pour la vie. A l’idée de torpeur spirituelle (endormissement de l’âme) forme de repli sur soi teinté de tristesse, d’humeur instable
« La pensée de l’acédie fait rejeter le travail des mains et fait que le corps s’appuie contre le mur pour dormir », Évagre le Pontique, Antirrhétique, VI, 28, cité dans, Traité pratique, op. cit., p. 79, t. 1.
tombent dans l’acédie
. de tous fondement moraux qui faisait par on ne sais qu’elle démon dévier le moine de son devoir et de son chemin. l’homme depuis la génèse devait travailler à la sueur de leur front.
Cette indifférence préconisée est d’un tout ordre0
« Duchamp exprime un refus obstiné du travail, qu’il s’agisse du travail salarié ou du travail artistique. Il refuse de se soumettre aux fonctions, aux rôles et aux normes de la société capitaliste » Maurizio Lazzarato.
Duchamp poursuit à sa façon les divers critiques positives et alternatives de la paresse développé par Lafargue, Stevenson. Ce renoncement à la peinture et à la pratique artistique, entre de longues années sur son projet du Grand Verre et l’apparition des ready-made instantané, ces oeuvres sans passé ni avenir archétypes de l’oeuvre paresseuse pour Maurizio Lazzarato.« Le ready-made est une technique paresseuse, car il n’implique aucune virtuosité, aucun savoir-faire spécialisé, aucune activité de production, aucun travail des mains »
Elle ne doit pas être assimilée avec une forme d’ apathie. Pourrait-on la rapprocher du ce « préférerait ne pas », « j’aimerais autant pas » du clerc de notaire Bartleby ( Bartleby le scribe) de Melville? Est-ce une stratégie de la fuite, un acte de résistance, une forme de l’« anti-pouvoir » face à l’appareil d’État, l’appareil artistique.? Certainement. A la subordination de la vie au capital, il choisit une autre forme de capitalisation non matérielle qui pourrait sembler un luxe bourgeois de rentier / une réappropriation des forces de vie et de son propre corps, (accomplissement personnel) conscience élargie des sensations..une autre forme de subjectivité explique M.Lazzarato.« Ce que Duchamp énonce ici, ce sont aussi les conditions et les effets qui caractérisent une rupture politique, une démobilisation qui à la fois suspend les relations de pouvoir établies et ouvre l’espace du processus de construction d’une nouvelle subjectivité »..Marcel Duchamp aime le mot s’amuser : « J’aurais voulu travailler, mais il y avait en moi un fond de paresse énorme. J’aime mieux vivre, respirer, que travailler. Donc, si vous voulez, mon art serait de vivre. J’ai éprouvé à cette époque-là un petit phénomène d’attirance pour l’optique : j’ai fait une petite chose qui tournait, qui faisait des tire-bouchons comme effet visuel, et cela m’a attiré, pour m’amuser. » Il laisse aux artistes maudits, ce sentiment permanent d’inconfort émotionnel et mental.« La plus belle œuvre de Marcel Duchamp est l’emploi de son temps.« écrivait Henri-Pierre Roché . Duchamp de confirmer: »Mon art serait de vivre ; chaque seconde, chaque respiration est une œuvre qui n’est inscrite nulle part, qui n’est ni visuelle ni cérébrale, une sorte d’euphorie constante. » Peut être était-ce cela la leçon de Duchamp..rendre visible l’impalpable et invisible bonheur de vivre.
Il y a des similitude dans cet abandon progressive de toute pratique, mais sans qu’elle soit une pulsion négative et une forme de fuite vers le néant par impuissance à créer. Dans tout acte d’écrire se manifesterait, se révèlerait une forme d’impuissance…S’ arrêter d’écrire, s’arrêter de peindre..jouer aux échecs Girogio Agamben voyait dans cette devise « I would prefer not to »paradoxalement l’affirmation d’une » puissance pure », « puissance de ne pas être » (dynamis me einai) une « absolue puissance » « du rien ».
.Bartleby ou la création, trad. fr. C. Walter, Circé, 1995.
« jointure
Déjà le fauvisme agissait comme un explosif visuel ensauvageant l’art par la couleur , le cubisme plaçait le spectateur face à l’instabilité d’une place qui ne lui était plus dévolue. Par la désorientation spaciale crée, par ces trompe-l’espri, l’esprit devait se faire mobile. l’abstraction d’un carré rouge et les figures surréalistes devait reformater son propre langage sur les choses. Le dadaïsme mènera la tabula rasa jusqu’au nihilisme. Le spectateur duchampien est privé de son spectacle, comme l’aveugle, il doit marcher à taton, suivre le flaire de son chien et concevoir de voir les choses avec humour et philosophie. Peut-on dire qu’avec ces créations invitro qu’il transforme le corps sociale..son art est-il politique? indirectement oui.
Le portemanteau dans l’atelier faisait sailli sur le sol dans le mauvais sens du terme. Chu de son usage par incapacité, il devenait un objet encombrant et dangereux. Chez Duchamp les ready-mades, comme il l’affirme sont non choisis, ils sont des rendez-vous. Ici c’est l’objet, au sol, qui se rappelle à son bon souvenir, dans cet espace de travail complexifié (Agir, c’est simplifier) dont il gêne la libre circulation, comme un parasite à sa libre entreprise, un objet parmi d’autres (pantoufles, coussins…) posés en désordre sur le passage à la bonne fluidité de sa marche (« la souplesse de l’expérience vivante » empêchée à épouser la vie disait Bergson dans ces conférences de février et mars 1900 rassemblées sous le titre Le rire ). La punition est directe. Contre la chute, il est cloué, stigmatisé.
Il devient dans ce rendez-vous par défaut, un nouveau ready-made après coup. L’oeuvre, chez Duchamp, n’est pas en soi, a priori, ready-made. Mais ce fait, cette fois-ci a posteriori quand du geste impulsif surgit l’idée. Nulle inspiration , transport, enthousiasme, puissance d’élévation, ( impulsion par pénétration du divin) »tout vient du sol , pour le Blind man, nulle faveur céleste ne guide l’homme au chien, seule une cane et un chien pour guide. l’idée puis le geste de l’artiste. l’artiste refuse cette possession divine qui ferait de lui un interprète de la divinité (d’un intellect transcendant, ce « démiurge », mais sous-tend par pour autant qu’ il pourrait être lui-même possesseur de cette force.
Comme Platon, il refuse à l’origine de l’oeuvre le simple talent et l’ aptitude des hommes à pouvoir créer en pleine autonomie. Mais cette force qui lui fait advenir comme une donation chacune des expérience artistique demeure quelque peut énigmatique dans son explication. les surréalistes avaient pour leur part définit leur propre vision de la rencontre, et Breton pouvait inclure la pratique de Duchamp comme un fait surréaliste. kaïros ?
Il lui a cloué le bec, au tac au tac , (Trap), immobilisé puis renommé (car Bergson montrait également que les étiquette utilitaristes ,les « mots-étiquettes » posés sur les choses font également obstacle et nous fait perdre le contact avec les choses mêmes. Dépossession de notre individualité.
MODE D’EXPOSITION DU TREBUCHET
Autrefois, on clouait au pilori un placard exposant les motifs de la condamnation du supplicié. Dans le musée, la patère devenue trébuchet du féminin au masculin , elle est présenté, fixée sur son socle, elle s’expose dans sa boîte dans certaine scénographie. En entrant dans le musée, elle se décharge de son agressivité, de son pouvoir premier. Est-ce pour protéger le spectateur que l’on décide de l’Artialiser ? Celle-ci prend la forme de répliques, ( reliques?). Il est comme policé, dépossédé de sa vie guerrière, parasitaire, qui en faisait son expérience première pour l’artiste. L’oeuvre serait-elle volontairement dénaturée, condamné à ne demeurer que la trace d’une histoire, d’un évènement dont elle ne sera que l’objet partiel?
Le regardeur distrait ne pourra pas en faire l’expérience, celle du faux pas », du piège, de la «perte et du déséquilibre. Le spectateur ne sera plus « trapé », (trap/drop/fall), attrapé malgré lui dans sa marche, ce bouffon Bergsonnien sujet à la mécanique du corps et du rire. Le piège se fait trop visible… Le trébuchet est là, loin de l’atelier comme une archive, un document qui ne fait plus trébucher. Il est comparable aux sculptures sacrées, déchargées désolidarisées de la cathédrale, du tombeau, de la caverne, de son premier rituel . Il passe d’une valeur cultuelle et d’usage » dirait W. Benjamin pour devenir seulement » objet d’exposition », un autre culte profane et démocratique de notre modernité. Paradoxalement l’institution le fait échapper à la mort lui permettant d’accéder à une forme de transcendance, une histoire officielle là où il pu être inactuel -ce fut la nécessité de réalisation et d’actualisation des répliques- mais le musée le dévitalise. Rrose signataire androgyne des ready-mades de 1964, éros, mères des répliques et des multiples. elle nous propose ses rejetons, ces clones, ces redites ( mort?). C’est le double de Duchamp qui prend le relais. Dans le « musée peuplé de fantômes, où l’art appartient à l’art, ne sont-il que des fantômes parmi d’autres fantômes?. Tout autant pour fontaine la chose ne pose pas de problème car le principe du lieu institutionnel de l’art est théorisée dès le départ; pour le porte- manteau ce n’est peut-être pas le cas. Ne pouvons nous pas voir dans la mode d’exposition des ateliers eux-même en annexe des musées pensons à ceux de Brancusi, Bourdelle, Bacon, une pratique similaire de restitution archivée d’un acte artistique d’une démarche focilisés à l’échelle de l’atelier?)
Objet anodin dès qu’ils sont contextualisé et accompagner par le caractère performatif du langage du langage, transformé par l’identité du nom . Il se recharge par les titre « une couleur mentale » d’une qualité immatérielle, conceptuelle ». Là ou les objets son inertes comment ne pas voir dans la poésie des phrases énigmatiques, les « jeux du langage avec ses rythmes, scansions, sonorité cette forme de « puissance » ,une forme de dynamis, une vitesse que Nietzsche attribuait au style et au langage. L’objet est posé le langage le transporte.
l’artiste au XXème siècle voit pourtant la platitude dérisoire des choses une source en puissance. Nous les utilisons souvent dans leur transparence comme peut l’être de façon similaire le langage. leur seul usage, trop commun, les a comme usés…Comme le remarquait justement Husserl nous sommes dans nos perceptions » imprégnées d’habitualité ». »( die habituell geprägten »),(Habitualität). C’est le constat que faisait Bergson dans cette expérience sans relief du monde.« Nous ne voyons pas les choses mêmes nous nous bornons, le plus souvent, dit-il, à lire des étiquettes collées sur elles. »(Le Rire). Il faut un poète, un artiste, un regard pour que ceux-ci acquièrent un nouvel « État de chose », une épaisseur une densité. Par la métamorphose, le déplacement, la métaphore du langage, il deviennent épiphanie, une « lueur circulaire autour d’un foyer lumineux ». la roue de bicyclette ne devient-elle pas dans l’atelier par son cinétisme et jeu d’ombre l’équivalent d’un foyer?Moi et ma roue de bicyclette, moi et ma cheminée disait Melville dans une de ces nouvelles.
Tout ce qui ne vient plus à notre rencontre, l’art les recharge d’une beauté soudaine (travail d’alchimiste Baudelairien). Il faut avoir le regard riche du flâneur pour voir dans les étales des passages parisiens, la magie des intérieurs, dans les brocantes la trouvaille surréaliste qui interpelle. Comme le disait Benjamin, se promener dans la ville est toute une éducation. Dans [Enfance, « Eloge de la poupée » Walter Benjamin parle également de la figure du collectionneur, ces « physiognomonistes du monde chosal » … » les choses sont libérées de la servitude d’être utiles.».Le collectionneur dans la vitrine aime à les manipuler ces objets qui l’inspire, recherche irrationnel du détail de la variation, « avec la protestation obstinée, subversive contre le typique, contre le classifiable. ». Aux yeux du collectionneur, en chacun de ses objets le monde est présent. Et ordonné. Mais ordonné à travers des connexions surprenantes, voire incompréhensibles au profane ». Duchamp à travers ces ready-made ne formet-il pas une collection, collection d’oeuvre dont les répliques réduites seront dans sa valise comme un petit musée portatif..(Picasso a remarqué dans la rue ce guidon et cette selle, Francis Ponge Parti pris des choses-« Parti pris des choses égale compte tenu des mots’ »- dans une posture anti-idéaliste fait un éloge de l’ordinaire, il observe le cageot et le morceau de pain et y découvre un macrocosme. l’artiste poète décolle les étiquettes posées sur les choses .Bergson parle de la capacité de l’art à nous montrer leur vérité. Comme il y a usure du langage, il y a usure du regard .Concurrence des signes « Wettbewerb bemerken ».R. Barthes remarquait la surprésence des signes à laquelle chaque jour chacun d’entre-nous doit faire face…..Aveuglement par accoutumance, mis à plat et équivalent de tous les signes. Duchamp l’extrait, mentalise, expose ce fragment du réel.
Qu’est-ce qui motiverait l’approche de l’oeuvre quand la perception, le voir, la rencontre traditionnelle est congédiés?. Pour la jouissance pur des concepts? Dans un objet qui n’a plus ce facteur d’intensité (cette lumière qui appelle, captive l’attention car il rayonne d’une lumière trop basse) seule sa mise en contraste avec l’arrière-plan (contextuelle et insolite)-l’objet fait scandale car il n’est pas à sa place- ou l’aparté des ornements du langage) peut lui donner un nouvel écla . Il est un fait certains que nous sommes souvent attentifs à la nouveauté, peut être car souvent elle peut interrompre le continuum par le fait d’être un évènement et intervenir face à nos habitudes comme un scandalum ( C’est-à-dire ce qui nous fait trébucher), chuter dans nos certitudes et parfois. Inquiétante étrangeté , c’est dans le familier que se découvre l’estrange. L’urinoir fontaine est une un objet déplacé dans tous les sens du terme. Le ready-made engage au déplacement des horizons, du « champ de l’expérience, habitus et hexis » créant un nouveau « halo » autour de l’objet. Alors vous me direz qu’en est-il « cercle lumineux quand le soleil se fait urinoir, porte bouteille, Pelle à Neige, le vide de toute perception, pur concept, une idée dénudée de tous horizons pratico-esthétique, (facultés charnelles d’un sujet incarné) approche non phénoménologique ou n’intervient plus le « corps propre » (Leib) face aux qualités d’un objet mais le neios du regardeur (dématérialisé, décorporaisé) Pour susciter cette attention sur le dérisoire, il fallut créer toute une mythologie autour de ce type de création…un vaste et large éventail cognitif pour que le spectateur joue et conçoit de poursuivre la partie d’échecs. Sa tradition perceptive, sa préhistoire ne lui sera d’aucune aide dans ce présent présenté de façon brut.
..Est-ce pour cela que l’accrochage propose parfois des objets suspendus?Le halo se fait aussi résonance à travers les diverses couches des commentaires prolixes autour de l’oeuvre. la compréhension est toujours celui d’une scène, une mise en situation.
. Ce sera par exemple l’inquiétante étrangeté et le choc suscité par l’étrange, l’incongrue, la beauté….le punctum découvert sur une photographie chez R. Barthes, cette passante chez Baudelaire, ce point, cette apparition qui vient à nous fasciner et néantiser parfois tout ce qui l’entoure avant de disparaître. Elles peuvent prendre la forme d’effractions soudaines et fugaces dans cet apparent continuum , et provoque un changement de perspective sur la chose. (la photographie aime à nous présenter les objets sous des perspectives inattendues qui mettent en péril l’identité de l’habitus perceptuel sur la chose. le cubisme en fragmentait l’unité de l’objet et en nous proposant une vision dynamique et conceptuel, suscite au-delà de premier sentiment d’aveuglement et de sidération une sur excitation de l’attention, la nécessité d’une acuité maximale dans la lutte de reconstitution de l’uniformité plate impossible. Bergson quand il évoque l’expérience temporelle de la durée évoque bien dans ce flux discontinu de notre expérience réelle ce schématisme devenu réflexe automatique dans sa reconstitution utilitaire du réel. L’expérience de la madeleine de Proust, ce choc de la mémoire involontaire que suscite le goût demande du temps pour être nettement saisie par l’écrivain.Plus de deux pages traduisent cette quête de la source. Comme souvent l’expérience ne peut se renouveler, elle s’édulcore, s’affaiblit.
Pour le porte-chapeau, la démarche part dès le départ d’un déficit d’attention.La chose ne pouvant être à sa place (par incapacité à l’y mettre) devient obstacle transparent et l’objet propice à l’accident, laissé là par négligence par un retour de bâton comme peut l’être celui du râteau pour le distrait revient au centre de la scène… l’atelier en désordre peut vite devenir rapidement entropique…..d’autant plus quand celle-ci devient sujet de l’oeuvre. La disparition des multiples ready-mades semble à fait, un équilibre précaire ou l’indistinction et l’inattention leur font rejoindre leur place initiale, d’objet ordinaire dans une forêt d’objets ordinaires. L’objet au sol contredit l’ « approche ascendante »
tout à fait , sa en face ? Pendant longtemps, chacun, a tenté de contempler-dans une position réceptive soit romantique ,soit objectiviste- à travers la figure et son espace façonné spécialement pour lui, sa propre image et celle d’un monde dont il était l’arpenteur, l’observateur éclairée et le génie cartésien. L’artiste lui proposait -une surface miroitante ou transparente, une place démocratique pour organiser les apparition fictionnelle du réel. Ceux-ci se faisaient désormais chez « ce grand liquidateur » de l’art, opacité, reflet vide, mur, fenêtre fermée voire impasse « N’est-il pas, Duchamp, celui avec qui l’art moderne s’est démis de ses dernières obligations —la représentation des objets, l’expression des sentiments— tout en discréditant par avance l’innovation et en induisant la fin du savoir-faire ? » constate Michel Guerrin .L’art n’était plus de l’ordre du » face à face » cathartique » et ou transcendant, ni dans ce trajet optique et moderne construit dès la renaissance par la virtuosité du spécialiste, spécialement pour un sujet monoculaire avide d’horizon . Le ready-maker désertait la scène et renvoyait chacun à sa responsabilité, à sa solitude, à son désir, lui proposant un nouveau mode d’appréhension de l’art plus heuristique.( Ce sont les regardeurs qui font l’oeuvre).
« Supposez que le plus grand artiste du monde soit dans un désert ou sur une terre sans habitants : il n’y aurait pas d’art, parce qu’il n’y aurait personne pour le regarder. Une œuvre d’art doit être regardée pour être reconnue comme telle. Donc, le regardeur, le spectateur est aussi important que l’artiste dans le phénomène art. »M.Duchamp
Dans la pédagogie, cette pratique proche de la maîeutique consistait, précisément à faire découvrir par l’élève ce qu’on veut lui enseigner. On peut penser à la vision de J.Rancière et son exemple de Télémaque.Valéry parlera de l’art comme « l’art de trouver » .(Valéry, Entretiens [avec F. Lefèvre], 1926, p. 133). L’art désormais soulève le débat, « L’éristique (du grec eris, « dispute », « querelle », « déesse de la Discorde » et techne, « art », « procédé ») est l’art de la dispute et du débat. »,il se cherche, se recherche, se fait obstacle et se trouve souvent là où l’on ne regardait pas, où on ne l’attendait pas.
« Duchamp mettra près de vingt ans d’une désinvolte et artisanale lenteur à produire cette dernière œuvre dans le silence de l’atelier, période qui prolonge le fameux silence de Duchamp dont Beuys dira qu’il est surestimé »
« Lorsque Duchamp privilégie un art du choix (readymade) en complément à l’art du faire (peinture), il désacralise d’un même mouve-ment l’espace de l’atelier, rendu disponible à la vue de tous. Avec le readymade, de la conception classique de la peinture telle que Frenhofer permet de la définir, c’est-à-dire comme une lente élaboration qui culmine dans un élan vital et décisif, Duchamp ne retient que le dernier moment, celui de la détente. L’atelier n’a plus de secrets à couvert ».
« Il est aisément pensable que la nature quelconque des objets retenus par Duchamp ait pu se confondre avec le caractère domestique de l’atelier-appartement de l’environnement premier des readymades.« L’atelier DUCHAMP Duchamp’ô STUDIO BERNARD LAMARCHE
« Pour l’enfant, la cheminée d’usine n’en est pas une : la stabilité du monde visuel, la sécurité des définitions s’effondre. Et c’est pourquoi cette malicieuse ou sauvage façon de voir est une mise à distance critique, une attitude inconvenante qui se joue des savoirs, ne se laisse pas prendre au leurre des pouvoirs et des définitions. Elle désigne, chez celui qui regarde à travers, ou de travers, une insoumission aussi réelle que peu sérieuse (c’est l’image de l’inexplicable museau du chien). »
Patère: de la patère antique à la patère moderne prêt à l’emploi: le Ready made meuble
DUCHAMP LE BRICOLEUR
Une patère est posée là, par négligence, Améléia, là ,obscurement semée, abandonnée, délaissée, tout à coup, soudainement en vacances, comme d’autres objets au sol de l’atelier en désordre soumis à l’entropie. Cette dernière caractérise le degré de désorganisation dans un système, la perte d’énergie consécutive pour l’activité. l’énergie se disperser sans cesse dans ce désordre puis se ressère dans la création, cette remise en ordre originale…l’ énergie non-disponible est remobilisée dans un acte qui ne prend pas la forme d’un faire pratique. Une remobilisation mental qui pour la doxa pourrait passer pour une autre entropie (un désordre mental.) Mutt le crétin.Si l’ on met en vrac des pions blancs et des pions noirs dans une même boîte on dit qu’ils sont en désordre, si on les sépare dans deux boites différentes on dit qu’on met de l’ordre.Pour le système d’information du langage, porte- manteau et trébuchet il y a une forme d’entropie volontaire pour un réinvestissement énergétique dans une autre forme d’ordenancement non conventionel non univoque
Elle est un objet qui a chu, par désintéressement, là, né d’une attitude- l’état d’une personne dont l’esprit ne s’applique pas à ce qu’elle fait ou devrait faire dans la pratique quotidienne, une sorte d’ (apraxia)-« je n’y suis jamais arrivé ». Cette praxis qui échoue, symbolise également la vision de l’oeuvre duchampienne. Elle remet en cause la notion de « Mélété » (Muse de la Méditation et l’exercice) et Polymnie (de l’éloquence.) » On lui attribue la faculté d’inspirer les aèdes et les auteurs des poèmes et des histoires de la plus admirable. », associées traditionnelle à la maîtrise de la technè artistique . Artiste et artisan et désormais l’ingénieur, à l’ère des hélices, apportaient par la maîtrise d’un savoir technique, chacun dans son domaine, le plus grand soin porté à la chose produite, qu’elle soit pour l’esprit ou le corps ou son environnement quotidien . Pour Claude Levis Strauss, « l’artiste tient à la fois du savant et du bricoleur. » (p. 37) Ce qui sera le cas des objet annexé par M.D, même s’ils sont ordinaires. Ils sont le produit accompli d’une ingéniosité, un projet accompli selon une causalité et une finalité d’usage et commercialisable.
Duchamp nous donne sa réponse.
« … un vrai porte-manteau patère que je voulais parfois mettre sur le mur et accrocher mes affaires mais je n’y suis jamais arrivé – donc c’était sur le sol et je le frappais à chaque minute, à chaque fois Je suis sorti – j’en suis devenu fou et j’ai dit l’enfer avec ça, s’il veut rester là et m’ennuyer, je le clouerai … et puis l’association avec le Readymade est venue et c’est tout. Il n’a pas été acheté pour être un Readymade – c’était une chose naturelle ….. il a été cloué là où il était et puis l’idée est venue ….. « -MARCEL DUCHAMP extrait d’une interview non publiée avec Harriet Janis.
Serait-ce par échec, par incompétence qu’il décide de na ne pas clouer cette patère au mur? On aimerait le croire, mais à force de connaître ce zigoto, ce ziozio, si mutin, si « mutt, avec ce faut-semblant de balourdise et d’ hurluberlu (écervelé, évaporé, extravagant, farfelu…)
; on peut imaginer allègrement au-delà d’une coquetterie de Dandy et de dilettante qui confirmerait le mythe, une volonté revendiquer de ne pas s’ ajuster avec le monde, ces infimes particularités des « science du concret » . Il but face au réel par absent-mindedness, l’absence de sképtomai (« observer, regarder » son environnement).M.D cultive les marges du champ. Duchamp ne serait pas bricoleur et même pas artiste, un vrai bras cassé. « Serait-ce plutôt par paresse, indifférence, culture d’une oisiveté souveraine, une forme de détachement contemplatif…une culture du laisser-aller qui aux marges du réel le laisserait dans quelques arrière-mondes mentaux.
C’est Marcel le distrait ( dans l’absorption de son univers). À tout le moins comme l’art de la dissimulation- forme d’art que Nietzsche reconnaissait chez le dernier Socrate, celui du chef-d’oeuvre de l’apologie, ce dernier face au sophisme et la beauté du langage, l’éloquence, la maitrise du style feindrait pour sa défense de ne point utiliser les beaux apparats de la rhétorique langagière ici optique.Il affirme le caractère naturel ,le non- savoir faire comme savoir, une autre forme de puissance à travers la faiblesse et l’impuissance.
Socrate se décrit comme faible, impréparé, non à la hauteur de l’adversaire…Il dissimule son éloquence. La négligence du discours qui se donne l’apparence du discours ordinaire, une absence d’art et de simplicité revendiquée devient sa force auprès des juges. »Il appartient à l’art de se dissimuler comme art. Le trébuchet serait né par un kairós , saisir l’« opportunité, le moment opportun » des évènement ici (l’ impulsion et la colère ). C’est l’occasion qui fait le larron. Cette vacance, laisse toute la disponibilité à l’objet de devenir autre chose. le readymade est trouvé après réflexion sur l’évènement, né d’une action -réaction, d’une formes d’agressivité (s’énerver, se venger, clouer). L’objet intrusif force l’élan créatif advenu d’un « impello » dans le sens d’être poussé à faire quelque chose, une mise en mouvement- à partir de ce qui vous fait tomber( » impulsum »). Comportement spontané, premier moteur rapide qui ne tient pas de la raison. (sans planification mentale) mais qui semble dans un second temps sublimée. L’énergie est réinvestie dans l’idée: la création. » Il a été cloué là où il était et puis l’idée est venue « .
« Avec le ready-made, Duchamp accélère, il fait vite. » « la vitesse d’exécution est similaire à celle de l’instantané photographique »
le « brusque éclair d’un ready-made ».Lebel
Pratiquer la perruque, Il n’est pas comme ses travailleurs qui « font la perruque » (c’est-à-dire utiliser le temps de travail pour fabriquer des objets à base des rebuts de l’atelier) ». En détournant les dispositifs de productions aliénant dont parle Michel de Certaux, dans une volonté de se réapproprier l’estime d’eux même dans la jouissance du faire, « d’un travail libre, créatif et précisément sans profit. » il ruse pour le plaisir d’inventer des produits gratuits destinés seulement à signifier par son oeuvre un savoir faire propre. Michel de Certeau – L’invention du quotidien &. arts de faire – Folio essais page 45
« Dans son sens ancien, le verbe « bricoler » s’applique au jeu de balle et de billard, à la chasse et à l’équitation, mais toujours pour évoquer un mouvement incident: celui de la balle qui rebondit, du chien qui divague, du cheval qui s’écarte de la ligne droite pour éviter un obstacle. Et, de nos jours, le bricoleur reste celui qui œuvre de ses mains, en utilisant des moyens détournés par comparaison avec ceux de l’homme de l’art. /…/ Le bricoleur est apte à exécuter un grand nombre de tâches diversifiées ; mais, à la différence de l’ingénieur, il ne subordonne pas chacune d’elles à l’obtention de matières premières et d’outils conçus et procurés à la mesure de son projet: son univers instrumental est clos, et la règle de son jeu est de toujours s’arranger avec les « moyens du bord », c’est-à-dire un ensemble à chaque instant fini d’outils et de matériaux, hétéroclites au surplus, parce que la composition de l’ensemble n’est pas en rapport avec le projet du moment, ni d’ailleurs avec aucun projet particulier, mais est le résultat contingent de toutes les occasions qui se sont présentées de renouveler ou d’enrichir le stock, ou de l’entretenir avec les résidus de constructions et de destructions antérieures. L’ensemble des moyens du bricoleur n’est donc pas définissable par un projet (ce qui supposerait d’ailleurs, comme chez l’ingénieur, l’existence d’autant d’ensembles instrumentaux que de genres de projets, au moins en théorie… » Claude Levi Strauss (1962) – La pensée sauvage – Agora
Il est intéressant, par les jeux de la rencontre et du hasard (?) qu’étymologiquement, le mot bricolage dérive des termes briccola (terme du Moyen Âge, vers 1360), brigole puis bricole (une catapulte). À la Renaissance, alors que la catapulte devient obsolète comme engin de combat, le mot prend le sens de « moyen détourné, habile », de là le verbe « bricoler ». Nous avons une adaptation plus mentale de la terminologie par obsolescence technique, une récupération dans le champ du langage et plus abstraite de l’attitude.https://fr.wikipedia.org › wiki › Bricolage
» La patère par absence d’habileté dans le bricolage, cette activité manuelle, catapulte Duchamp vers le trébuchet par un autre type de bricolage cette fois-ci qui serait celui du détournement verbal, la récupération , la trouvailles conceptuelle. Si l’on reprend la définition donnée dans la « pensée sauvage » au procédé du bricolage l’on peut dire qu’il bricole. le savant et le bricoleur par les fonctions inverses que, dans l’ordre instrumental et final, ils assignent à l’événement et à la structure, l’un faisant des événements (changer le monde) au moyen de structures, l’autre des structures au moyen d’événements ». Duchamp conçoit de nouvelle structure à partir d’évènement et montre dans sa création des ready-mades une grande souplesse d’esprit. Duchamp utilise, récupère, réorganise les mots comme la poésie, dans ces titres. Comme The blind man guidé par son chien, ce dernier bricole sans cesse allant d’une piste à l’autre, de-ci de-là, il piste comme chez Nietzsche les vaches ruminent. Bricoler pour un cheval, c’est celui qui passe adroitement, avec souplesse, dextérité les obstacles, Duchamp qui n’a pas su bricoler propose une autre forme d’intelligence qui volontairement affirme aptitude à faire résonner les choses dans ce monde construit au moyen de structures, d’un son différent. Il travaille à partir de matière dont on a imposé à fixer la forme et et l’usage. Une inventivité sans adresse à tout le moins est possible, une autre adresse de poète qui fait « ricocher » par zigzague et faux rebond comme les trajectoires d’un échiquier. Là-dessus , il a toujours un coup d’avance. Peut- être est-ce à rapprocher avec la fin de l’optique rétinienne, cette perspective unique, cette arme de guerre artistique désormais aussi désuète que la thérébantine , que mettront à mal les soupçons d’une vision perspectiviste et les nombreux chemins de traverse de la pensée moderne ? Duchamp bricole mais dans le sens de la « ruse » antique à la Ulysse. Ce fut le cas de l’installation de Fontaine et tout le jeu de manoeuvre.
.
Tête de taureau- Picasso – Paris, printemps 1942 – Musée national Picasso
Trébuchet n’est bel et en bien plus un patère, un » être en-soi, » cette « chose »- Das Ding (Heidegger). Sa réalité n’est plus massive, univoque et incontestable. On l’a privé « de son lieu », de son moment, de » sa durée » propre, de son « nom » tout cet » arrière- monde » qui le constituait. Il est un objet sans génie qu’un malin génie par » ire, folie de l’instant, agacement, hybris enfantin produit sa dématuration) Il la cloué au sol, créant a posteriori et involontairement une nouvelle dimension. Le geste invonltaire crée un nouvel état auquel le regard esthétisant et poétique annexera un nouveau langage, statut . Là où l’enfant dans le jeu transforme aisément un balai en cheval, laissant libre cours aux métamorphoses de l’imagination, Duchamp assigne aussi à l’objet qui lui faisait la guerre un autre imaginaire. Il lui a cloué bec avec une autre étiquette.La cruche est une chose, la patère est une chose, trébuchet est une chose. la patère, » la cruche se distingue d’un objet (Gegenstand).Une chose autonome peut devenir un objet, si nous la plaçons devant nous, soit dans une perception immédiate, soit dans un souvenir qui la rend présente .La patère est un objet par sa présentation.« Le vase contient l’eau, tout le monde le sait. Mais le sage sait que c’est l’eau qui contient le vase. » la patère contient le vêtement, est-ce le vêtement qui contient la patère? « Ce qui fait de la cruche une cruche pour Heidegger c’est la possibilité pleine et entière de pouvoir déployer son être dans le versement », son offrande, » dans le don de boisson du vin ou de l’ eau ». Ce qui faisait reprenant la démonstration de Heidegger de la patère, une patère c’est le déploiement de son être (ouverture de sa porte vers l’unité), dans l’accroche du tissu, comme réceptacle d’une peau du corps que l’on y pose.(Selbstständigkeit) indépendance, autonomie de l’objet dans son travail.(Selbststand). « La production fait sans doute entrer la cruche dans ce qui lui est propre « le déplacement et renversemment de la patère en trébuchet retire à l’objet produit ce qui lui était propre, en l’annexant, il le fait sortir de son identité propre pour le faire entrer dans une nouvelle identité impropre. Il va suspendre son identité. Avant dès son apparition en XVIème siècle (1507), c’était un officier qui était chargé de porter le manteau d’un grand personnage. Homme objet, homme chose être le portemanteau de la reine, c’était par extention la protéger, être le garde de son corps. C’est un dispositif, tout comme l’est le mot valise, une soudure verbale. Au départ «valise », à deux compartiment contenant pourt transporter le voyageur, le cavalier, il se fixe plus tard au XVIIème (1640) Hanger
bloconymes:L.Carrol l(Mot valise) Through the looking-glass (À Travers le miroir), 1872,il définit ce type de mots valise, portmanteau word . »das Kofferwort » Deux mots par télescopage en un seul permet d’ exprimer deux idées en un mot.Empaquetés. » You see it’s like a portmanteau, there are two meanings packed up into one word »…there are two meanings packed up into one word « ,
Le langage se fait soudure, accroche de plusieurs termes. Le readymade n’est ce pas en lui-même un portemanteau, par soudure, charnière .(d’où l’intérêt des surréalistes). Duchamp se situe à la soudure, à la charnière des choses.il descellées les « gonds » (hinge),dégonder cette porte de l’art ce qui portait l’art. Faire grincer les charnières.(ce qui est « chevillé »gómphos). Etre au point de jonction entre art et anti-art
«Vous voyez, c’est comme un portemanteau – il y a deux significations réunies en un seul mot. ]Le rady- made est une technique proche de celle porte manteau linguistique par troncation et fusion, par homophonie et jeu. collage, oeuvre centaure propice à son accroche les stratégies combinatoireset langagières.
Bien avant la redécouverte structuraliste, Duchamp porte et met en lumière la littérature de Raymond Roussel, ce voyageur en marge des chapelles de son époque. les surréaliste (leiris, Breton ) y décoderont son automatisme langagier « les mécanisme de contamination sémantique, les procédés de répétition et la différence, .«cosmologie du Même» ÇRR, p. 187). Clivage, juxtaposer les mots les plus aléatoires :hasard inducteur ll l’organise. « le chant du langage double»? « l’analyse foucaldienne va chercher l’enjeu de l’écriture roussellienne du côté du renversement. Au sens du texte, la métamorphose a pour fonction de joindre les incompatibles, comme le labyrinthe a pour fonction de retrouver le passé aboli. Foucault montre que les métamorphoses rousselliennes sont des figures inverses des métamorphoses des récits traditionnels. »
« Une première série regroupe les ouvrages le Concert, la Source et la Vue, qui décrivent minutieusement la petite vignette d’un papier à en-tête, l’étiquette d’une bouteille d’eau d’Évian et la lentille d’un porte-plume souvenir. Au sens de l’analyse foucaldienne, l’écriture de Roussel est passée, de cette description attentive d’un monde (invisiblement visible)
‘une esthétique du double?La taxinomie nomme inscrit dans un espace conceptuel savoir taxinomique, désignation des classes, identifie des essences décrit et analyse les signes selon le modèle de l’analyse le discours de l’archive, chronologie, esquisse des liens récrit l’histoire en ordre syntaxique et chronologique ce récit
Le trébuchet ne sera pas réellement un vrai trébuchet, comme la fontaine ou le hérisson. »Nous percevons la qualité du contenant du vase lorsque nous remplissons la cruche. »comme nous percevons la qualité du dispositif portant de la patère lorsque nous accrochons, suspendons notre chapeau ou vêtement. »… je voulais parfois mettre sur le mur et accrocher mes affaires … » un accrochant, le menuisier » le produit comme une accroche et lui donne la forme d’une patère. L’accrochage de la patère détermine tous les gestes de la production. Comme pour le vide pour la cruche , ce qui fait de la patère une chose ne réside aucunement dans la matière (le bois et le fer) qui le constitue, mais dans l’accroche.(« attacher, lier »)Junon comme présidant aux unions,(« mettre sous le joug »). « subjuguer, soumettre »)Exercer un fort pouvoir de séduction.ne pouvait détacher de lui ses regards ; touchaient et subjuguaient le cœur,enthrall /thrall esclave Retenir prisonnier. sous une loi ,assujetti, absorbieren ,avaler, boire »)Qui est pénétré d’une idée, d’un sentiment. buô (« bourrer, remplir »),Remplir, pénétrer de, inculquer; façonner, former, instruire.
imbu
- imbutus admiratione, Live. 21, 39, 7
- rempli d’admiration.
Il cloue cette patère au sol suite à l’incapacité ( adynamía) de lui donner les conditions de son déploiement, cette donation que permettait sa fonctionnalité, l’accomplissement de son être de sa qualité -La civilité. Au sol , il est déficient.
« –je voulais parfois mettre sur le mur et accrocher mes affaires mais je n’y suis jamais arrivé-« Si l’on reprend la lecture du dialogue platonicien de l’Hippias Majeur « sur la question du beau et de la fameuse cuillère de la cuillère. Une cuillère de figuier plus apte à tourner la soupe qu’une cuiller d’or serait plus belle « . la patère au sol n’en est pas une. Elle serait selon la critique de Socrate laide car elle ne serait pas To Prepon (convenable), C’est-à-dire dans le désajustement de l’objet avec sa fonction. L’objet au sol n’aide pas, il ne rend pas service, le bénéfice devient méfait pour celui qui ne l’utilise pas et n’est pas avantageux To Ôphelimon car il n’apporte ni le bon ni le bien le bon et le bien. Comme pour l’organe déficient et peu vertueux au sens aristotélicien, il ne produit que du désordre Diatarachí.Là ou son incapacité à se normer dans un geste tout simple de clouer sa porte manteau, cette adynamía devient puissance d sa capacité à transformer de façon « naturelle » cet objet et lui donner un nouvel État, nature inattendue qui est celle du ready-made. Lui faire advenir un autre être. Une patère est désormais un trébuchet. Cette chose comme une anomalie anomalie au « chaque fois ceci » , au ceci car elle dévoile un nouvel ordre. Son contour sur le sol ne se fait plus aussi familier, il n’est plus tout à fait reconnaissable, mais la trace de ce qu’il était et toujours présent. Comme l’urinoir, il demeure dans cet entre-deux, ce déséquilibre cette situation amphibienne propre à toute métamorphose: ceci était mais ceci n’est plus; ceci est encore une patère mais c’est désormais un trébuchet, un urinoir et une fontaine. Sa forme et sa fonction, sa « déterminations métaphysiques » traditionnelles avec substance et prédicats, ne lui sont plus assignables en totalité vienne s’y greffer une autre par ce passage, ce renversement de la verticalité à l’horizontalité. Il ne peut plus « se tenir en soi-même » car l’artiste l’a fait vascillé.Peut-être comme d’autres ready-mades une main, un oeil non artiste plus patient et bricoleuse, plus profane, lui » réassigneront son lieu initial ou le jettera tout simplement par désintérêt à la poubelle. Ce fut le cas de ce ready- made qui comme beaucoup d’autres fus perdus . Il nécessita une réédition ultérieure à multiples exemplaires. Ce trébuchet, sous le marteau ne sera en lui-même plus ce qu’il était et c’est aussi bien pour l’art… Avec le clou et le titre, l’idée et l’espace artistique, il devient une oeuvre. Comme toutes les choses prosaïques, en cette modernité ceux-ci depuis Duchamp se prête facilement à l’emploi, ils sont désormais chargés d’un immense potentiel anesthétique et esthétiques et ne demandent que le regard de tout regardeur avide de curiosité pour que l’alchimie se face… Pensons aux cubistes, surréalistes, nouveaux- réalistes…minimalistes. Le cageot poétisé devient poésie chez (F. Ponges), ce guidon et cette scelle assemblés, détournés par Picasso, tête de taureau…cette large porte ouverte par Duchamp à tous les possibles, même le grincement de la porte, comme musique continue de faire grincer des dents.
« . Nous pouvons effectuer la lecture de l’imaginaire de Sartre en découvrant le readymade de Duchamp.
Le mot patère, au tout départ ne trouve pas son origine dans la catégorie des portemanteaux, objets communs à usage privé. Elle vient du mot latin « patera« – cette coupe antique peu profonde servait lors des libations sacrificielles dédiées aux rites dionysiaques. Elle était » parfois munie d’un manche.
. : »*1.les patères antiques, signes de piété, étaient utilisées lors des repas publics ou donnés par les prêtres pendant les saturnales sont pour notre modernité de véritables « trésors » archéologiques et artistiques. La patère moderne du bazar, n’est pas conçue en tant que telle. Celle de l’Esquilin en argent exposé au petit Palais, l’une parmi les 22 mises à jour, redécouvertes par les opportunités du hasard en 1793 ou celle de Rennes magnifique et précieuse toute en or a quitté l’espace ritualisé pour rejoindre l’espace d’exposition du musée imaginaire, celui d’ A. Malraux , M. Butor ou W .Benjamin). Après Duchamp la patère-trébuchet, comme fontaine la rejoindra dans une confusion volontaire des valeurs. La patère est parfois dans l’iconographie tenue dans la main des dieux en signe de leçon pour les hommes du sacrifice exercé envers eux , décorées d’une riche iconographie. Les patères sont décorées de scènes d’ordre mythologiques, comme la naissance d’aphrodite, les amours homériques de Jupiter et Junon au mon Ida. la déesse par la séduction, dans ses atours vestimentaires, tente de détourner le dieu des combats que se livrent Troyen et Grecs. Artifices de la toilette, ceintures (ceste de Vénus), la parure est source de transport, comment détourner, faire trébucher, tomber en amour la divinité polygame aux 12 femmes, éviter la guerre ?« O calice loyal mais vide – Qui jouais à me rester clos! »
Les Complaintes (1885) de Jules Laforgue .Patère avec une représentation figurant la scène de Vénus à sa toilette. « Le corps du vase est traité comme la coquille d’où émergea la déesse de la Beauté. »http://www.petitpalais.paris.fr/oeuvre/la-patere-de-l-esquilin Patère de Rennes
XIXèm. , . . 1829 Pierre-Claude-Victor. , « » *11 « « , « « , , . . . Lorsque Hadrien laisse tomber sa tunique dans le début du roman philosophico-historique de M. Yourcenar, ce geste vient témoigner du drame qui se passe et d’une résolution soudaine. Hadrien malade, désormais seul face à sa précarité de mortel, doit laisser cet ornement du pouvoir devenu trop lourd et vain au sol. L’empereur est désormais nu face à la médecine qui le scrute. Ce dévoilement du corps a aussi une dimension symbolique. Il décide en tant qu’homme, en tant que mortel de se livrer à coeur ouvert, se mettre à nu, dans une longue lettre à son petit-fils adoptif de 17 ans Marc-Aurèle..Il se dévêt du présent pour l’exercice philosophique de la méditation et de l’anamnèse- avec une profonde honnêteté et lucidité-« là Patientia » stoïque d’un homme de 60 ans. Dans les scènes galantes du XVIIIèm, le vêtement, posé, çà et là, à l’allée, raconte un autre désir, celui de la passion soudaine. Pensons à ces peintures de Fragonard tel le verrou et tant d’autres où l’oeil indiscret découvre, avec la complicité du peintre, cette liberté du corps qui dans l’alcôve ou la chambre vont pouvoir s’ébattre à l’abri des regards.
, , ,Dans l’atelier de l’artiste, parfois règne un désordre incommensurable, un fouillis en forme de bordel général, un incroyable capharnaüm à la Diogène, pensons à celui de 7 Reece Mews où travailla plus de trente ans le peintre Francis Bacon. Dans ce lieu de création, les choses s’entassent, çà et là, des journaux, des esquisses, des revues, photos, documents, pinceaux encrassés, tubes écrasés, objets et ordures de toutes sortes recouverts d’une épaisse couche de poussière ; Bacon a besoin, paradoxalement, de ce désordre pour pouvoir peindre et créer.Elles témoignent, dans ce désastre, du processus inconscient et créatif qui anime l’artiste. « Ce bazar autour de nous est plutôt comme mon esprit ; cela peut être une bonne image de ce qui se passe à l’intérieur de moi. C’est comme ça, ma vie est comme ça.« explique l’artiste non conformiste. Il n’est pas ici question de la « logique du sens » constructiviste cultivée par Mondrian, tout se construit à travers cette force vitale et instinctive et sa traduction pulsionnelle et vivante à travers le pinceau du peintre... » C’est comme ça », constat qu’il ne peut pas en être autrement, déterminisme d’un fonctionnement dominé par la logique des forces vitales, cet espace d’avant la pensée – (le narratif, le figuratif, l’histoire, cette pensée discursive est toujours accrochée à cadre, un système dont la patère et tout ameublement pourraient être un des symboles. Le figuratif est cérébral, Bacon fait appel plutôt au système nerveux. C’est un autre ordre des choses … Là où la patère régie, assigne, le sol reçoit ce qui chu, l’espace lui et le lieu du débordement, des flux dynamiques.). Seule la figure inerte apparaît accroché, c’est celle de la viande des étales. « Tout homme qui souffre est de la viande ». Deleuze parle dans sa peinture des signes d’un « devenir viande ».l’artiste devient « critique clinique » « des forces » qui anime ses modèles.
De la patère au crochet de l’abattoir ou du boucher, comme il n’y a qu’un pas de l’homme à la bête, le XXème en sera une sinistre expérience. Chez Duchamp, la patère devient après un détournement ironique, trébuchet, objet guerrier, un objet de désordre. Dans son atelier Bacon a accumulé tout ce que l’artiste a pu glaner, c’est son butin, il vient y butiner et de cette boue, cette absorption, il y fera de l’or, son miel à lui . « Moi-même, j’ai tout regardé et j’ai tout absorbé. Je suis une sorte de butineuse. » explique Bacon l’alchimiste. Une étude quasi archéologique de ce bric-à-brac, permet de suivre les méandres stratigraphiques de cette logique des sensations. Comment peindre ces corps sans organes, si ce n’est guidé par ce mauvais astre en entrant dans l’antre du chaos intérieur celui de l’artiste et du modèle. Comment aller chercher le “moi” enfoui » dans l’épaisseur des apparences instables? l’art se féconde ici sous les auspices d’une mauvaise étoile, sur un champ de ruines. « Un tableau ne peut pas être aussi violent que la vie elle-même, et la vie est tellement violente… »Le fléau qui traditionnellement ravage les moissons, devient, ici, pour Francis bacon source d’une nouvelle semence créative marquée sous le signe du funeste, de la mauvaise fortune. Pour Bacon lecteur de Nietzsche la création doit se nourrir, comme il est dit dans la Naissance de la tragédie et des poètes antiques des forces complémentaires d’Apollon et de Dionysos, de l’harmonie et du difforme.
« Il n’y a qu’ici que je peux peindre, dans mon atelier. J’en ai eu beaucoup d’autres, mais je suis ici depuis presque trente ans et il est idéal pour moi. Je ne peux pas travailler où tout est trop rangé. Il est plus facile pour moi de peindre dans un endroit comme celui-ci, qui est un vrai désastre. J’ignore pourquoi, mais ça m’aide ».
Francis Bacon
Studio de Francis Bacon au7 Reece Mews, South Kensington (Londres)
https://www.erudit.org/fr/revues/espace/2001-n57-espace1049440/9362ac.pdf
, Marcel Duchamp introduit dans le champ de l’art des œuvres « instantanées », produites en moins de temps qu’il n’en faut pour exercer un choix, pour prendre une décision — les readymades.(…) Avec ces deux vitesses se jouent deux figures opposées de l’atelier.(…)Le premier atelier de Duchamp à New York est situé au 1947 Broadway. En 1959, Robert Lebel décrira cette grande pièce au centre de laquelle une baignoire était installée, comme en proie à un encom-brement « tel qu’on se frayait avec peine un chemin et qu’il [Duchamp] avait dû suspendre au plafond les tableaux dont la plupart n’étaient pas de lui ‘ »
» L’ATELIER en q u e s t i o n, L’atelier, DUCHAMP Duchamp ‘ô STUDIO BERNARD LAMARCHE
Pour résumer, je dirai qu’au paradigme du readymade correspond une « désinvolture », voire, pour reprendre les mots de Duchamp à propos du readymade, une « indifférence » envers la fonction de l’atelier
L’atelier de Duchamp est lui aussi un espace d’expérimentation, un laboratoire , un autoportrait ou l’artiste se met en scène, un espace à l’image de son travail, de sa publicité.
absent-minded à la distraction, à la « Zerstreutheit »
«J’ai eu l’heureuse idée de fixer une roue de vélo à un tabouret de cuisine et de la regarder tourner. Voir cette roue tourner était très apaisant, très réconfortant… J’ai aimé la regarder, tout comme j’aime regarder les flammes danser dans une cheminée. »M.D
. Il ne fut dans l’art des peintures de genres peut fréquent et sa naissance de cette invention plutôt obscure. C’est avec le triomphe tardif de la peinture de genre, la représentation des intérieurs domestiques et intimistes vers le milieu du XVIIèm, la représentation des lieu du spectacle ordinaire que l’objet d’ameublement fait son apparition de façon discrète comme un élément du décor.Il est caché dans d’un coin ou parfois derrière un rideau . C’est plutôt un objet exclu de toute visibilité peut être à cause de son caractère commun et inesthétique. Il ne vient se placer parmi les décorations au XVIII ème , seulement si sa présence est vraiment signifiante. On lui préfère la pendule et le tableau. Attribut du chasseur, il contraste avec l’intérieur douillet du foyer, Elle note l’absence de son propriétaire, un hors-champ de sa présence, son retour prochain. Dans la période contemporaine, elle pourra devenir le sujet principal. Pensons aux monuments de Boltanski comme son installation » Réserve ». L’artiste met en lumière les atrocités de la Shoa à travers cette exposition de la civilité, ces traces accrochés d’une disparition. Les cimiaises moderne de l’après Shoa ne peuvent désormais qu’être cette exposition ce seuil vers l’innomable, l’invisible, l’inmontrable. le spectateur ne peut accéder à ce hors -lieu de l’horreur, il ne reste que ce pas de porte, cette pièce close.
Souvent dans les scènes de salon ou de cuisine , il n’a pas lieu d’être là , réservé aux entrées ou aux lieux de véritables intimité. Dans le portrait de SR. EPICURE ,elle permet entre la pendule et l’autoportrait ,da positionner la coiffe symbolique . Pourquoi chez William Hogarth – The Lady’s Death from Marriage , la patére couronne t-elle ces deux personnages du fond près d’une pendule ou d’un tableau ?
- A la toilette du matin – Louis-Léopold Boilly,46 x 60 cm
- 18th century women in art | It’s About Time: 18th-century Women’s Work by Dutch artist Wybrand .
- William Hogarth – The Lady’s Death from Marriage a la Mode (c1743-1745)
- SR. EPICURE GUZZLE ENJOYING his BOTTLE after DINNER, 1773
-
Titre de l’œuvre :« Réserve »Nature de l’œuvre :Installation,Genre de L’œuvre :Mythologie personnelle Artiste / Auteur :Christian Boltanski (1944- …),Date de création :1990.
Trébuchet est au départ une patère avec 12 crochets, parodie d’une machine de guerre pour un art de guérilla mobile, d’embuscades, de coups de main , coup de force. Le non -art est sans ligne de front, art infra mince du jeu de la limite . De la patère hiérogamique, nous passons avec l’avènement de la raison platonicienne puis la mort des dieux, cet apophtegme moderne « Gott ist tot » Nietzschéen à la patère moderne, objet du dévêtissement, et de la perte du voile (mystère?) pour Neuf moules mâliques. Ces célibataires broyeurs de chocolat sont avides art-deur de plis ,sous les jupes des filles , (underwood) de sous- bois pour déniaiser sur l’herbe*. Ils effeuillent du regard cette nymphe moderne, ce passage de la marié la tête dans les nuages. Porte-manteau, Porte-chapeau, ce sont les prothèses pour un prêtre, un livreur, un gendarme, un cuirassier, un agent de police, un croque-mort, un laquais, un serveur de restaurant et un chef de gare dans nos intérieurs démocratiques et égalitaires. Ne sommes-nous pas aussi des accessoires de mobilier en société . Le serveur « joue à être garçon de café. »(Sartres). le vêtement c’est l’intériorisation parfaite par l’individu de la structure familiale et sociale (?) Nous sommes à l’âge du goût moyen pourrait nous dire Alexis de Tocqueville en découvrant l’Amérique. Juin 1915 , départ de Duchamp en Amérique, découverte de New York ville célinienne verticale,* ville horizontale de la chaîne de montage égalitaire: à chacun sa Ford Model T et sa bouteille de Coca. Comment protéger la société des dérives de l’Etat paternaliste, l’art de l’opinion, de la tyrannie de la majorité comfortriste, con fort triste, qu’on fort triste, du goût bien-pensant, prête à porter PATERnaliste. Il faudra tuer la père d’un art sans mère.- Art orphelin ou bâtard. Patère, porte chapeaux, pelle à neige , égouttoire et compagnie, ce sont des marchandises de bazar, série au (B.H.V) (bas -art de l’hotel vile ?) dans un atelier en bazar (bas- art) . Le public pas encore regardeur porte le goût, supporte le goût et les conventions uniformes, supporte la mode, autre ombre portée de l’ hat trak -tion uniformisée qu’il faudra déporter. Faire tomber l’ombre sur les choses, n’est-ce pas une autre définition de la vérité.(de platon à Heidegger). La marchandise avec le marchand du sel devient ready made. Faire son sel. Pour Jean Fabre , artiste d’art total, plasticien, homme de théatre, influencé par les peintres (Marcel Duchamp et Marcel Broodthaers en tête dans sa pièce Le Marchand de Sel et la Mouche, le marchand vend le sel produit par son corps comme une marchandise ultime mais inutile…
Marchandise :« L’œuvre est le masque mortuaire de sa conception »), écrivait Benjamin dans Einbahnstraße. Prête à porter issue de la quincaillerie…. »le transformateur du champ « , lui donne une autre identité, un autre champ d’action, prête à poser dans la valise, prête à poster dans la boîte alerte pour cet artiste « saltinbanque »* . Duchamp naît, n’est pas seul , il fait partie de cette nouvelle figure de la modernité selon Jean starobinski entre le chiffonier et le peintre de la vie moderne. » «Depuis le romantisme, le bouffon, le saltimbanque et le clown, ont été les images hyberboliques et volontairement déformantes que les artistes se sont plu à donner d’eux-mêmes et de la condition même de l’art. Il s’agit là d’un autoportrait travesti « *. Duchamp n’est pas seul, après le cas Flaubert, Baudelaire, le cas Duchamp dans le cas du champ des retardataire. « Baudelaire était un cas isolé ; son isolement était, d’un certain point de vue, celui d’un retardataire » Expliquait Walter Benjamin. (B 667). Duchamp tente comme un danseur en équilibre de se tenir sur le trait infra-mince de la marge au risque parfois de passer pour un charlot*ou de trébucher d’un côté ou d’un autre entre art et anti-art… sa disparition. Duchamp il a la témérité d’un funambule- Tout est une question d’épaisseur du trait. Zarathoustra?, Duchamp est un artiste nomades, dans le monde de l’art, un voyageur entre deux océans. Il faudra faire trébucher la marchandise au-delà de sa sphère d’influence vers celles de l’art et du non-art, art sans uniforme par l’infra mince. Duchamp est comme cet insensé: Also sprach Duchamp, Ainsi parla Duchamp par delà le beau et le laid, dans cette période de l’industrialisation narcissique, de L’homo œconomicus, consumérus , aesthéticus , érectus. Comment comme Nietzsche crée une oeuvre inactuelle pour tous et pour personne? Duchamp est le premier à instruire poétiquement le dépassement esthétique. le premier, a avoir vu dans la lutte du beau et du laid « la roue motrice du cours des choses ». Il faudra faire tourner la roue des choses sur le socle tabou raie du monde. la roue est voilée ,par le goût? « l ‘art est une chose beaucoup plus profonde que le goût d’une époque.« *2 répondait M. Duchamp à Georges Charbonnier . Comment de pas voir dans ces accessoires pour uniforme, ces support intérieurs de notre civilité transformé en fantasmagories une nouvelle civilité par incivilité poétique?
1916 : … Pliant… de voyage : housse de machine à écrire de la marque « Underwood »
- * »Figurez-vous qu’elle était debout leur ville, absolument droite.New York c’est une ville debout. (…)Ça fait drôle forcément, une ville bâtie en raideur. « Louis-Ferdinand CELINE (1894-1961), Voyage au bout de la nuit
Ce mot patère est dérivé de l’infinitif « pateo, patere, qui signifie parfait, mais également usité dans la sémantique pour caractériser le fait d’ « Être ouvert, être découvert, être libre, être praticable, être accessible, c’est également: »Être à découvert, être exposé. (nn« Du latin patens (patent, évident, étendu), participe présent de patere (« être découvert », « être exposé » »), il y a l’idée de la vulnérabilité , être visible, être manifeste, être patent, être évident, Qui apparaît clairement. paten Brevet, certificat que le gouvernement délivre à un inventeur. ..C’est aussi »être à la disposition de » définition du ready made.* 3 .Ses origines de l’usage sont intéressante car même si l’artiste ne l’a peut-être pas pris en compte dans son non-choix électif, le mot le porte en latence dans son étymologie- il habille la patère devenue trébuchet par des jeux d’inférences, d’interférences contradictoires et infra minces. Le nom commun devenu titre n’était-il pas pour Duchamp une couleur ajoutée à l’oeuvre avec la richesse de ses nuances, un « incrementum » permettant, un accroissement, une croissance, un développement mental? Avec le concept de ready made, une porte manteau, dispositif qui sert à suspendre, est réemployé dans le cadre du « champ artistique », confidentiel et limité de l’atelier.Il faudra attendre Fontaine et son installation progressive dans le monde de l’art, l’histoire tardive de sa mise en lumière puis sa restitution archéo-muséale, sa mise en images sous forme de répliques, pour que viennent s’adjoindre dans le temps du nouveau réalisme, du pop art et du post-dadaïsme, la société de consommation triomphante, ces choses prosaïques et si peu communes. Dominique Chateau dans son ouvrage Duchamp et Duchamp démontre parfaitement que la naissance des ready made est celui d’une mise en acte retardée, un échec à toute première visibilité qui dans les premiers temps de son élaboration balbutiante ne trouva pas ses regardeurs. Il faudra attendre les années 50 pour qu’il trouve son public et une véritable assise théorique de la part de l’anartiste. Ces objets profanes font partie désormais des espèces courantes de l’univers des arts, avec ou malgré lui , sachant que l’oeuvre échappe toujours à son créateur. Duchamp avec une certaine nonchalance se montre plutôt détaché des mondanités qui entourent son oeuvre. Dans les années 60, dans cette seconde création à rebours, elles deviennent visibilité, événement, qui peut enfin s’archiver avec un léger différé. Elle devient à l’ère, « à l’air » à « l’r » , à l’art Warholien, spectacle médiatique, véritable machinerie publicitaire de l’art. Pensons à l’exposition de Passadéna où et tous ces tirages photographiques où l’artiste s’expose avec ses enfants. Il fait le service aprés -vente d’un art qui se presse d’être pressé à l’ère des médias, du média comme médium:Pour (Herbert Marshall McLuhan) »« le média est le message »*. Ready made, art caméléon? art opportuniste des événements ready made? Un art toujours en retard car toujours en avance…donc toujours d’actualité par son inactualité. Le ready made se fut un pari sur le possible explique Francis Cohen * dans son étude passionnante sur les enjeux du ready made, celle d’un public, d’une époque, une « table de résonance », capable d’accueillir sa fréquence de résonance ». » Lorsque la fréquence de variation d’une telle force devient très proche de la fréquence de résonance propre du système physique, celui-ci se met à effectuer un mouvement en réponse à la force d’excitation » à sa vibration par sympathie infra mince. Rencontre « sympathique » entre une oeuvre et son temps:Cf :le concept loi de Sympathie universelle depuis le XVIIIèm ,Hume:…Le ready made est un trébuchet, une balançoire, un pendule, une force d’excitation en quête de sa force de résonance: le ready made est un rendez-vous, en un temps et un espace donné, un hic et nunc spectaculaire infra mince tel le mouvement orbital et les vibrations d’une étoile. Le ready made est comme cette « viole d’amour » soigneusement accordées, mais que l’exécutant ne touche jamais entrant seules en vibration le moment venu en renforçant la corde réelle. Le ready made est résonance et résonance. Résonance au sens figuré la création écho celle qui fait vibrer l’esprit du regardeur, accéder à une autre dimension par ses jeux verbaux attribués à l’objet devenu objet d’une attribution.
Le Cirque, 1928,Charles Chaplin.
De la Démocratie en Amérique
« L’aspirant habite Javel, J’avais la bite en tricorne. »
« J’en ai assez de l’expression « bête comme un peintre ». »
« L’expression intellectuelle plutôt que l’expression animale »,
Un peu de légèreté encore : quelques dessins de presse, faits entre 1907 et 1909. C’est mi-carême. Deux femmes devant un mannequin couvert d’une robe. L’une est debout, l’autre accroupie. Légende : « Naturellement qu’on va sans chapeau au bal. » C’est l’annonce, sous forme divertissante, anecdotique, populaire, de la Mariée mise à nue par ses célibataires, même, sa dernière œuvre, faite de tout ce qu’elle n’est et ne peut pas être. Avec Duchamp, on enlève la perruque et on va sans chapeau à ce qui n’est plus qu’une peau de bal.
» C’est très difficile à expliquer parce que les gens ne pensent pas qu’on puisse faire quelque chose autrement que par goût : on vit par son goût, on choisit son chapeau » et son manteau: porte manteau comme porte mental, port mental, porte mentalité, on porte haut la mentalité de son époque, le porte ment haut comme l’on porte cha peau, porte sa peau. Il faudra donc se dénuder, se mettre à nu. « Sais-tu bien, folle pure, où sans châle tu vas ? » Jules Laforgues, mariée mis à nu.
“Esquivons les ecchymoses des esquimaux aux mots exquis.” le travail de Duchamp sera donc du domaine de l’esquive, de la séduction, du charme de mots et des objets exquis…..de son temps.
Dis, veux-tu te vêtir de mon Etre éperdu ? Les Complaintes (1885) de Jules Laforgue
….Cf.Patère antique en argent représentant Les amours de Jupiter De J. De Witte (patère antique de charvet).
pater noster
Hume et l’idée de la sympathie universelle ,Cornelius Crowley,XVII-XVIII. Revue de la Société d’études anglo-américaines des XVIIe et XVIIIe siècles Année 2003 56 pp. 75-87
L’oeuvre de Duchamp est réceptive aux recherches physiques de son temps: Résonance nucléaire à l’ère de la physique quantique, Potentiels d’ionisation et de résonance (M. de Broglie, Rayons X): Duchamp avec son infra mince entre dans les questions de non-époque celle de la 4èm dimension, les dimensions de Planck, la nano -dimension pour un nano -temps. la résonance optique le Cas limite de fluorescence, où la radiation du spectre électronique émise par les atomes excités d’un gaz ou d’une vapeur en revenant à l’état fondamental à la même fréquence que la radiation excitatrice« (Mathieu-Kastler Phys. 1983). On pensera correspondance avec la machinerie érotique du grand Verre.
Le grand verre, oeuvre majeure de l’an artiste ne fut pas pendant sa carrière accessible au public expliquait Marcel Duchamp dans son entretien en 1966 avec Pierre Cabanne . »Au vrai sens du mot, je n’ai pas eu de vie publique puisque je n’ai jamais exposé le verre. Il est resté dans des garages tout le temps*4 .Certaines versions et exemplaires des ready made seront réalisés à quatre mains, de père et de mère, par Marcel et Rrose Selavy (éros c’st ma vie sans mère) son alter ego érotique ou par son pseudo histrion Richard Mutt, la mère leure de substitution, pour ce qui concerne l’oeuvre phare Fontaine.
Duchamp du champagne? « Un feu latent qui se fait deviner, qui pourrait mais qui ne veut pas rayonner*.5 » ?
Les premiers ready mades, égoutoire à bouteille, porte-manteau, port-chapeaux, urinoir ont été perdus. Oeuvres perdues? Inconstance entre un auteur et les fruits de son oeuvre? Détachement d’un non-esthète cultivant l’art éthéré des seules idées à partir des articles de quincaillerie paresseuse . Dilettantisme, détachement, lâcher prise né du coup de dé d’un dandy face à la « vita activa »* . Les premières photos ,des années 20 ,le présentent ainsi.
*Article « Ready Made », Dictionnaire abrégé du surréalisme, cité dans Duchamp du Signe, p. 55, note 3.
* André Breton, « Crise de l’objet » (1936), le surréalisme et la peinture, Paris, Folio, 1965, p. 353-361 (359)
- The Little Galleries of the Photo-Secession ,photographer,Stieglitz, Alfred(American, 1864-1946)Key Figurepublication,Camera Work XIV,date,1906,medium,Halftone atelier
Manhattan Photogravure Company, NY
Comme Rodin, Duchamp passera dans son champ photographique des grands hommes. Mais comme le précise justement Baudelaire dans son article, contre le préjugé que l’on a sur Le dandysme, ce » n’est même pas, comme beaucoup de personnes peu réfléchies paraissent le croire, un goût immodéré de la toilette et de l’élégance matérielle. Ces choses ne sont pour le parfait dandy qu’un symbole de la supériorité aristocratique de son esprit. » la description baudelairienne correspond tout à fait avec la posture Duchampienne comme symbole, jeu avec les symboles : « C’est le plaisir d’étonner et la satisfaction orgueilleuse de ne jamais être étonné. »*9 « distinction par simplicité », jeu d’écart infra mince entre le bellâtre et le véritable dandy: l’infra mince de la simplicité. Plus tardivement, à l’époque de la théorisation du ready made, il adoptera une attitude plus décalée et bouffonne, plus adapté au message du ready made. Ce portrait autoportrait photographique présent le jeune Duchamp dans l’attitude du désespéré de Courbet, une folie prête à bondir comme cette figure ambivalente : un vautour et ou une chouette, fossoyeur amusé ou sadique de l’art avec un projet d’avance en retard ou fondateur phoenix. Deux figures Janus infra mince. Il faudra attendre son agonie progressive pour que l’art renaisse.
Duchamp cultivait comme Paul Fargue ou Bertrand Russell les vertus de la paresse, L’Éloge de l’oisiveté, faisant de sa vie et son emploi du temps son magnum opus. Culture de la » vita contemplative « *10 (Ana Arendt), l’important, c’est de respirer… et d’être heureux: «J’aime mieux respirer que travailler » M.D* 11. Duchamp cultive une éthique de vie, la quête du » souverain bien » *12 aristotéicien?, du bonheur stoïcien à la Sénèque, du souci de soi » (foucaldien)? sculpter sa vie (plotinienne) comme une oeuvre d’art? . La vie comme oeuvre d’art? vivre la vie d’homme libre loin de ce que Russel nommera la » morale du travail, » une morale d’esclave ». *13 le monde moderne n’a nul besoin de l’esclavage. »*14 Sénèque dans la brièveté de la vie, incite avant le temps des bilans, à mieux gérer le choix de ses occupations et de son emploi du temps, Duchamp fait de même. Duchamp dandy Stoïcien? héroïsme nouveau en période de décadence? » le dandysme confine au spiritualisme et au stoïcisme pour Baudelaire. » gravité dans le frivole »*15, « frivole dans la gravité » trébuchet de l’un à l’autre..la position oscillante de l’artiste.
« Dans le trouble de ces époques quelques hommes déclassés, dégoûtés, désœuvrés, mais tous riches de force native, peuvent concevoir le projet de fonder une espèce nouvelle d’aristocratie, d’autant plus difficile à rompre qu’elle sera basée sur les facultés les plus précieuses, les plus indestructibles, et sur les dons célestes que le travail et l’argent ne peuvent conférer. Le dandysme est le dernier éclat d’héroïsme dans les décadences « Charles Baudelaire, Le dandyLe Peintre de la vie moderne, Calmann Lévy, 1885, Œuvres complètes de Charles Baudelaire, tome III (p. 91-96).
Paul Lafargue, Le Droit a la paresse. Éloge de l’oisiveté (Français) Poche – 16 septembre 2015
https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01957097/document, L’éloge de la paresse Stanislaw Fiszer
https://www.habiter-autrement.org/01_tendances/contributions-01/Eloge-de-l-oisivete-Culte-du-travail.pdf
La paresse comme vérité effective de l’homme (1921) « la plus haute forme d’humanité », qui conduit à cet état de félicité absolue du type paradisiaque, alors que toute la philosophie du travail ne sert qu’à « libérer la paresse »non « la mère des vices », mais « la mère de la vie »*16 .Kazimir Malévitch, la paresse comme vérité effective de l’homme, Paris, Éditions Allia, 2010, p. 37.
L’oisiveté, c’est pour philosophe romain le lieu de « l’otium »*17, un espace de pleine disponibilité pour le champ de la création et la contemplation contrepoint nécessaire au » negotium »*18: A l’ère , (R) (ART), moderne c’est devenu une véritable politique à contre-temps de la théorie l’industrielle et tayloriste: valeur absolue et Jdanoviste du travail : »Faut-il réagir contre la paresse des voies ferrées entre deux passages dus train? »« Étrange folie » de notre époque que le travail, vie laborieuse » de « l’animal laborant » *19. “Jouis”, “jouis”*19 dit Lafargue, “jouis de ta vie.
Les ready made ont été jetés pour rejoindre leur cycle quotidien, leur écosystème artificiel et anonyme, « le système des objets » *20 dirait Jean Baudrillard en 1966. Face au regard peu initié à l’infra mince et cette création pas encore iconoclaste, leur potentialité de questionnement esthétique n’avait pu être perçue. La première occurrence du terme ready made remonte à 1916, dans une lettre adressée par l’artiste depuis New York à sa sœur Suzanne, peintre elle-même, restée à Paris. Dans celle-ci l’artiste lui demande de récupérer un sèche-bouteilles acheté en 1914 au Grand bazar de l’hôtel de Ville et remisé depuis lors dans son studio. L’histoire est connue : Marcel, deux ans après son idée, enjoint a sa sœur d’écrire une inscription sur l’objet puis de le signer mais sa requête n’est pas suivie d’effets et l’œuvre avortée demeure seulement au stade du concept. Un baptême post-natal n’aura pas eu lieu, rendez-vous manqué. Déjà bien avant l’art minimal et un certain Sol Lewitte l’exposition mythique de 1969 «Arts by Téléphone» au Museum of Contemporary Art de Chicago, conçoivent une oeuvre dont la mise en « acte » peut être réalisée à distance, « exister » de façon performative grâce aux moyens de communication modernes d’Hermès. Vous pouvez parcourir l’article Art by téléphone… Recalled * 21 ou écouter l’émission de France culture https://www.franceculture.fr/emissions/pas-la-peine-de-crier/art-telephone-1969-2012 cette reprise lors d’une exposition, du geste et protocole conceptuel duchampien. Elle questionne la place du contexte institutionnel dans la création de l’oeuvre. Cette réflexion avait déjà été « exemplarifiée » et initiée par l’artiste en 1917. Elle se retrouve à la fin des années cinquante avec un opportunisme du bon rendez-vous abordée comme une répétition de l’histoire avec l’installation muséale des nouveaux exemplaires. L’action directe du créateur sur l’oeuvre devient désormais contingente et ne cessera de s’amplifier avec l’art conceptuel. L’histoire de leur disparition reste obscure mais, on a cependant une trace écrite qui donne des indices, une explication sur la raison de leur non-effectivité initiale. Ils demeuraient seulement en l’état , « état de choses »*22, en « puissance » (Heidegger); ce qu’Aristote nommait dans son ouvrage de physique « potentialité », « un indéterminé- c’est-à-dire une virtualité du possible par sa faculté d’être changée ou mise en mouvement comme le bloc de marbre deviendra statuaire. « L’acte est donc le fait pour une chose d’exister en réalité et non de la façon dont nous disons qu’elle existe en puissance, quand nous disons, par exemple, qu’Hermès est en puissance dans le bois … eh bien! l’autre façon d’exister est l’existence en acte. » Aristote.*24
*Le ready-made : à quel titre ?Francis Cohen ,Dans Cahiers philosophiques 2012/4 (n° 131), pages 37 à 48
https://www.lespressesdureel.com/file/ouvrage/1220/extrait_pdf_1220.pdf
« Ceci est de l’art ». Analyse peircienne de l’image de l’art Dominique Chateau.
Une oeuvre ouverte infra mind, l’infra mince: de leibnitz au quantique une quête de l’infinitésimal perceptif?
Pourrait-on parler d’ « Oeuvre ouverte »*5? Umberto éco en 1962, théorisait et forgeait pendant la période des premières répliques duchampiennes, ce nouveau concept pour comparer l’art moderne et la conception classique de l’art. Selon ce dernier « Toute oeuvre d’art alors même qu’elle est une forme achevée et close dans sa perfection d’organisme exactement calibré, est ouverte au moins en ce qu’elle peut être interprétée de différentes façons, sans que son irréductible singularité soit altérée. » pour « ...la faire revivre dans une perspective originale.« *26 L’oeuvre permet « une profondeur renouvelée », nous dirions des perspectives multiples voire cubistes comme peut l’être son travail de langage hérité de la poésie insolite et folle de Jean-Pierre Brisset, créateur « du langage des grenouilles ». Le sémiologue conçoit, à l’instar de Duchamp, la lecture des oeuvres comme active. Il bannit de tout caractère passif et consumériste de l’oeuvre d’art. Duchamp cultivait le mutisme dandy, des propos volontairement évasifs quand il fallait donner des explications. N’expliquait t -il pas que« Tout l’effort de l’avenir sera d’inventer le silence, la lenteur et la solitude.»? Serait-ce là le véritable éthos an artistique et éthique d’un anartiste capable à travers sa vie anartistique de conserver le désir vital à l’état brut?« J’ai eu une vie absolument merveilleuse… »*27 expliquait-il . Il conservait un petit sourire d’infans, infantis mutin, farceur et amusé, d’autant plus l’âge venant. Face à ses oeuvres sous l’oeil du photographe Henri Cartier Bresson , dans son atelier en 1968 entouré des ready made, il prend parfois la posture d’un histrion: le fou du roi peut tourner la roue de la fortune et mettre le hasard en conserve. Tout cela ne serait-il pas sérieux? Oui dans le sens de la définition de Jankelevitch, ce réel lieu de l’ennui, vécu au présent demande les joies aventureuse et légère de l’instant, » cet instant contracté proche de l’infra mince: Redevenir sérieux, n’est-ce pas quitter pour la prose amorphe de la vie quotidienne ces épisodes intenses, ces condensations de durée qui forment le laps de temps aventureux ?« *28 Jankélévitch, L’Aventure, l’ennui, le sérieux, [1963] Duchamp se joue du sérieux avec sérieux. Aristote ne disait-il pas « joue et tu deviendras sérieux » tandis que Michel Montaigne reprenant la pensée antique remarquait dans les essais que « les enfants n’ont point d’affaires plus sérieuses que leurs jeux.« C’était un homme sérieux, il passait son temps à jouer.« 29 Lewis Caroll, se pourrait être un bon résumé de la vie de Duchamp.
HENRI CARTIER-BRESSON (1908-2004) Marcel Duchamp dans son atelier, Neuilly-sur-Seine, France, 1968
Jankélévitch, L’Aventure, l’ennui, le sérieux, [1963] Présentation par Laure Barillas, Pierre-Alban Guinfolleau et Frédéric Worms, Champs Essai, 2017. P.7
Silence fondateur: Mutisme constitutif. Les nombreuses photographies de l’artiste en présentation devant l’espace muséal dévoilent autant de postures choisies et métaphoriques de sa vision artistique mise en scène. Y a-t-il nécessité pour un artiste dans une société déjà saturée par les commentaires, les verbiages, les explications et discours « bavaradages » (Heidegger) tous azimuts sur l’art d’expliquer le fond de sa pensée. Les autres le feront bien à sa place ! Les oeuvres parlent d’elle-même! Duchamp c’est l’oeuvre d’un paresseux qui donne à travailler, travailler ses méninges dans une oeuvre qui laisse sa place au désir et à l’énigme non plus raisonnante mais résonnante. Énigme du sphinx pour certains au point que certaines oeuvres comme le grand verre, puis « étant donné » travail de longue haleine pour belle Hélène lui demanda plus de vingt ans d’une réflexion rigoureuse. Duchamp, c’est l’intuition fulgurante du ready made puis, en contrepoint, la longue maturation d’une oeuvre majeur et complexe, nourrie de notes et de boîtes à consulter, à décrypter selon le sens du hasard-Contiguïté d’un dialogue qui comme le langage Duchampien est en mouvement rotatif… l’espace tore duchampien . Un Duchamp ça se mérite, ça se cherche, se découvre, ce n’est pas du mystère en conserve. Elle doit rester à bruit secret . L’oeuvre saturée de bruits ne risquait-elle pas au fur et à mesure comme un bon vin, trop souvent bu de saturer la langue et et provoquer à la longue qu’une sensation obtuse? (Brillat-Savarin) .Intelligence et perception obtuse sont préjudiciables surtout quand il faut percevoir « l’infra mince » cet insaisissable pour spectateur distrait: le regardeur c’est celui qui cherche à voir, observe, qui garde vers soi deux-fois. « Le haut-allemand a un verbe, warten, qui est entré dans le français sous la forme de garder: mais également signifie aussi « faire attention, prendre garde », être armé, comme la boîte alerte à toute missive: lascive: esgarder », jeter l’oeil sûr » en direction de, esgard (égard), avoir de l’égard pour ne pas s’égarer dans cette oeuvre si labyrinthique et si stimulante pour toute épigraphe. Warten signifie également prendre soin de l’oeuvre pour un amateur éclairé, un célibataire attentionné et alerte. À ce « caelibatus, « abstinent attentif peut-être à la mariée retrouvera t-il au final la « vie céleste », l’expression jouissive d’une voie lactée. (le mot célibataire est dérivé de caelum (« ciel »). Peut-être devra-t-il, comme le dit Breton pour l’érotisme, braver à la fois, sans sourciller, le préjugé et l’interdit . »
« l’oeil fixe phénoméne infra-mince, infime mouvement dela paupière quand il regarde fixement. »Duchamp
Le spectateur doit conserver un regard neuf, aiguisé sur « les petits riens « comme ces deux experts cités en exemple dans l’anecdote célèbre de Sancho du don quichotte. Hume dans son essai sur la théorie du goût parle de « délicatesse d’imagination »: Deux de mes parents explique Sancho, furent une fois appelés à donner leur opinion au sujet d’un fût de vin, supposé excellent parce que vieux et de bonnes vinées. L’un d’eux le goûte, le juge, et après mûre réflexion, énonce que le vin serait bon, n’était ce petit goût de cuir qu’il perçoit en lui. L’autre, après avoir pris les mêmes précautions, rend aussi un verdict favorable au vin, mais sous la réserve d’un goût de fer, qu’il pouvait aisément distinguer. Vous ne pouvez imaginer à quel point tous deux furent tournés en ridicule pour leur jugement. Mais qui rit à la fin ? En vidant le tonneau, on trouva en son fond une vieille clé, attachée à une courroie de cuir »*31. La « délicatesse de goût » doit selon Hume permettre dans l’art de distinguer les valeurs esthétiques particulières dans des « degrés faibles » ou les « mélanges confondus ». Même si Duchamp ne se place pas dans l’art au niveau de l’évaluation gustative, on pourra parler de délicatesse du regard dans sa stratégie de sa captation qui permet de distinguer, au-delà des l’apparence, la mêmeté des ready-made (chacun avec son empreinte digitale) et leur ipséité (ce qui fait que chaque réplique est unique et absolument distincte des autres). Tout est une question d’intensité et de perception des seuils et de l’indécidable. Duchamp joue sur les jeux infimes de l’écart, comme l’expliquent ses notes griffonnées sur un bout de papier: « l’écart est une opération », opération de l’écart « pour écarter du tout fait en série et du tout trouvé »: culture de l’imperceptible qui font de chaque ready made une création unique dans le jeu des objets produits en réplique ou ceux trouvés, nés du« hasard objectif »*32 et d’un choix « électif »: lors d’une promenade au marché aux puces avec Giacometti en 1934, André Breton dans L’Amour fou, (1934) raconte la découverte bouleversante par le jeu inconscient de l’improbable et des coïncidences de « trouvailles » extraordinaires qui se mettent à leur parler : Un rendez-vous surréaliste .Un « objet rêvé pour l’un, une réponse à l’oeuvre inachevée pour l’autre sous la forme d’un masque-: » précipité de désir », ils étaient des catalyseurs riches en associations libres et automatiques de la pensée. Le surréalisme fera de la vertu de l’imagination « l’organon »*33 de leur révolution. Attention en puissance aux choses dans la symbiose avec une réceptivité totale et amplifiée. Véritable révolution copernicienne face au triomphe de la raison raisonnante, désormais le monde se perçoit non sous le dickta, mais la dictée de l’imagination créatrice, la part non solaire de la sainte raison. De même, Yves Klein dans les années 60, à travers la sensibilité picturale immatérielle de ses monochromes, l’exposition du vide dans la galerie d’Iris Clert ou la vente au collectionneur face à la Seine de zones immatérielles de sensibilités pousseront par l’imagination dans un monde de plus en plus matérialiste à développer les facultés de leurs sensibilités à l’état latent pour accéder à « l’espace sensible pur « . Le tableau devenait « plaque sensible » et le corps réceptacle.privilégié de cette sensibilité offerte, cet « événement sensible »: qu’est -ce que la sensibilité? Nouvelle Expérience « auratique »? (Benjamin) Pour Y. Klein l’expérience sensible » C’est ce qui existe au-delà de notre être et qui pourtant nous appartient toujours. La Vie elle-même ne nous appartient pas, c’est avec la sensibilité qui, elle, nous appartient que nous pouvons l’acheter. La sensibilité est la monnaie de l’univers, de l’espace, de la grande nature qui nous permet d’acheter de la vie à l’état matière première ! L’imagination est le véhicule de la sensibilité ! Transportés par l’imagination, nous atteignons la « Vie », la vie elle-même qui est l’art absolu. »*34 Désormais dans ces nouvelles pratiques depuis le dadaïsme duchampien jusqu’au nouveau réalisme kleinien en passant par l’expérience surréaliste, le spectateur doit aborder les oeuvres d’art en adoptent une posture nouvelle parfois déroutante, qui condamne le spectateur pour Antje Kramer-Mallordy « A une lenteur et à un réapprentissage du regard: » « les œuvres presque invisibles remettent en question la logique des sens pour « ouvrir le Sensible à un devenir labile et subtil par la détermination d’un seuil de perceptibilité qui est aussi un seuil possible de disparition du donné » (p. 20)*35, au risque de tomber dans l’avenir sur des artistes sans œuvres, des oeuvres sans artistes. L’infra mince duchampien a « une dimension à la fois intellectuelle et sensible ». Elle se »définit comme une sorte de 4e dimension ». Pour Duchamp, est comme le délai qui sépare, dans un tir de foire, « le bruit de détonation d’un fusil (très proche) et l’apparition de la marque de la balle sur la cible à la vitesse du son, c’est un écart infime du temps, « passage du possible au devenir, intervalle. Une note de Duchamp la définit ainsi: « le possible est infra mince. »*36 Un art de résonance? de fréquence?
« c’est jouer à « produire des intensités par soustraction »*37. Ce peut-être aussi précisaient l’artiste dans un entretien avec Pierre Cabane « . L’ombre et son origine, l’odeur de la fumée de tabac et de la bouche qui s’exhale,, la caresse et le caressent. le creux dans le papier entre le recto et le verso d’une feuille mince, le bruit et la musique que fait un pantalon de velours côtelé comme celui quand on bouge… Comme l’oreille, le toucher ou l’oeil averti, les organes avec leur haute qualité « vertueuse » réalisée aristotéliciens et duchampiens peuvent détecter du jeu dans une machinerie apparemment bien huilée, jeu entre l’art et non art, entre deux répliques.::: Dans une autre note Duchamp affine son propos entre idées posées sur un papier dans la frénésie d’une pensée en mouvement que la rature ajuste : »la différence (dimensionnelle) entre deux objets faits en série (sortie du même moule) est infra mince quand le maximum de précision est obtenu. » Duchamp barré « a été » préférant le présent est tandis que sa proposition de définition est ponctuée d’un point d’interrogation sur le mot maximum. Comme un horloger Duchamp est très rigoureux dans sa pensée, elle prendra la forme dactylographique d’une théorie retranscrite sous les arrangements de Paul Matisse le petit -fils du célèbre peintre, et fils du marchand d’art Pierre Matisse et d’Alexina « Teeny » Duchamp qui épousera en secondes noces Marcel Duchamp. De quel organe s’agit-il chez lui? Tous c’est le corps poussé à son intensité maximum. Multisensorielle, S’agit -il de l’histoire d’une expérience nouvelle proposée aux regardeurs dans les ready made . Oui affinait sa sensation. Vous pouvez consulter l’ouvrage de Davila Thierry conservateur au Musée d’art moderne et contemporain de Genève sur l’exposition consacrée à cette thématique par le Macval et lecture contemporaine historiographique et problématique de cette découverte: construction des intensités par soustraction et de la manifestation par disparition.
« Concept esthétique créé par Marcel Duchamp désignant une différence ou un intervalle imperceptible, parfois seulement imaginable, entre deux phénomènes: »https://fr.wiktionary.org/wiki/inframince
« Idée conceptualisée par Marcel Duchamp pour désigner une différence invisible entre deux choses. »
L’OBJET INVISIBLE ,Date de création 1934 – 1935,Technique Plâtre recouvert de produit démoulant
Dimensions 153 x 32 x 29 cm ,Fondeur Susse Fondeur, Date de fonte 1954,Collection Fondation Giacometti, Paris:A.Breton ,la grande cuillère. Yves Klein, Monochrome bleu sans titre (IKB 181), 1956
Pigment pur et résine synthétique sur gaze montée sur panneau,73 x 56 cm, Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia
.
*1Dictionnaire universel des sciences, des lettres et des arts …De Marie Nicolas Bouillet.
- *HUME D., « De la norme du goût », in Essais esthétiques II, Vrin,
- http://doc.macval.fr/Default/doc/SYRACUSE/36127/de-l-inframince-breve-histoire-de-l-imperceptible-de-marcel-duchamp-a-nos-jours?_lg=fr-FR
- lemonde.fr/livres/article/2010/12/17/de-l-inframince-breve-histoire-de-l-imperceptible-de-marcel-duchamp-a-nos-jours-de-thierry-davila-et-esthetique-de-la-vie-ordinaire-de-barbara-formis_1454702_3260.html
- https://www.echosciences-grenoble.fr/articles/les-poussieres-des-nanos-a-l-inframince-de-marcel-duchamp
- Yves Klein, extrait de « Discours prononcé à l’occasion de l’exposition Tinguely à Du?sseldorf », janvier 1959, Le dépassement de la problématique de l’art et autres écrits, Beaux-Arts de Paris, 2003, p. 103.
- Antje Kramer-Mallordy, « Disséquer l’imperceptible », Critique d’art [En ligne], 37 | Printemps 2011, mis en ligne le 14 février 2012, consulté le 25 décembre 2019. URL : http://journals.openedition.org/critiquedart/1258 ; DOI : 10.4000/critiquedart.1258
- De l’inframince, brève histoire de l’imperceptible, de Marcel Duchamp à nos jours
- DAVILA, Thierry, 2010, Éditions du Regard, Paris, 309 p.
.
Il désirait construire un travail poétique volontairement sibyllin. Toutes ses notes de travail mises en boîtes témoignent d’un travail d’une ample discursivité dans l’élaboration du processus créatif . Ne sont-ils pas justement la possibilité de concevoir chaque regardeur comme détective d’une oeuvre en creux , un champ élargi, un réceptacle de tous les possibles à exploiter, une jouissance intellectuelle offerte et parfois quasi masturbatoire. Les ready made sont en libre-service comme « des petit outils ouvert sur un dehors » à construire et l’ensemble de l’oeuvre un jeu, une partie d’échecs, une machinerie qui donne à faire, à penser, à jouer? Cette oeuvre inclut ses hors champs et contrechamps permettant d’inclure même l’impensée à venir, les débordements inhérents en toute cartographie artistique. Saâdane Afif 2009 conçoit comme point de départ de son travail artistique la pratique compulsive de compulser, consulter, examiner toutes la bibliographie existant autour de l’oeuvre fontaine pour concevoir à partir de ce ready made discursif, une bibliothèque exégétique la plus exhaustive possible: L’archivage comme travail ready madique du ready made. Pour chaque ouvrage une photo de fontaine, clichés est encadrée avant d’être exposés… Peut-on embrasser l’oeuvre à l’ ère d’internet? Je participe moi-même de ce vaste chaînon herméneutique.
The Fountain Archives, Centre Pompidou, Paris (2017)
« Dans un livre, expliquent Deleuze et Guattari dans les derniers paragraphes de Rhizome, il n’y a rien à comprendre, mais beaucoup à se servir »*1. Peut-on entendre la même chose dans ces ready made en libre service, chacun comme » un petit outil ouvert sur un dehors » et l’ensemble de l’oeuvre comme un jeu, une partie d’échec avec le regardeurs, une machinerie qui donne à comprendre, à faire, à penser, à jouer?
Umberto Eco – « L’oeuvre ouverte« , Ed : Seuil – Points, 1965, p59
Marcel Duchamp – La Boîte verte | Collection Morel
Tel l’interprète les regardeurs tout au long de ces 100 ans réactualisent la chaîne interprétative ,une réserve inépuisable de significations: L’exégèse particulièrement foisonnante, et le dialogue toujours d’actualité:
.
Marcel Duchamp, Bottle Rack (Egouttoir),
1964 (original version of 1914, lost). Ready-
made: galvanized iron, height 25 in. Objet originale
Marcel Duchamp, Hat rack 1964 replica of 1917 original) National Gallery of Australia, Canberra; Fountain 1950 (replica of 1917 original) Philadelphia Museum of Art; Bicycle wheel 1964 (replica of 1913 original) Philadelphia Museum of Art; Bottlerack 1961 (replica of 1914 original) Philadelphia Museum of Art © Association Marcel Duchamp/ADAGP. Copyright
Marcel Duchamp
Bicycle wheel, 1964 (replica of 1913 original)
© Association Marcel Duchamp/ADAGP. Copyright Agency, 2019
Galerie nationale d’Australie‘‘Porte-bouteilles’’ (1959), one of five surviving variants of Marcel Duchamp’s first pure ‘‘ready-made.’’Crédit…Succession Marcel Duchamp/ADAGP, Paris, via Artists Rights Society (ARS),
Version 7/8
Courtesy of The Philadelphia Museum of Art.
Etude de foetus Léonard de Vinci/Le vagin de la reine à Versailles d’Anish Kapoor.
Cette nature de la création moderne est très révélatrice de la grande capacité d’inclusion, cette grande porosité des frontière établit de l’art avec le système des objets et des signes et de la marchandise à l’ère de l’industrie culturelle. Marre du celle du champ! du champ décele l’art clot. l’artiste cultive un élargissement de l’intelligence » étirée, étendue, enflée . « *7 En 1914 ,le porte bouteille, période embryonnaire, devient en 1916 hérisson« petit mammifère » dans ce baptême et sa signature à distance. Hérisson, ce petit animal porte avec lui depuis le moyen âge une mauvaise réputation. La forme vaginale et organique de l’objet ne peut nous empêcher d’y voir à l’instar de Courbet ou de l’urinoir, un objet emblématique de la naissance d’un monde. Un porte bouteille en 1680 « égouttoir à vaisselle » devient sèche- bouteille bottle dryer, (bottle holder), par analogie de forme un hérisson dont le dos est couvert de longs piquants, mais également au sens figuré,un personnage d’un abord difficile, « revêche ».Comme G.Deleuze compare la création d’un concept à celui à d’un « personnage conceptuel », ne peut-on voir dans ce nouveau concept de ready made un personnage conceptuel du monde de l’art au caractère parfois répulsif pour véhiculer une ou des idées ?
« Dire, c’est poser, faire acte de monstration. « Sagen » (dire) vient de « sagan » (montrer). Dire signifie donc faire paraître, faire advenir, laisser être, montrer »https://la-philosophie.com/loeuvre-dart-selon-heidegger
le porte bouteille et portemanteau patère sont la catégorie des choses imparfaites et invisibles du « monde de l’art » jusqu’au XXèm par leur caractère peu noble, banal et inesthétique relégués à l’espace profane du quotidien, les coins de l’ordinaire, si on les compare aux sculptures ou à la patère antique qui est un arrachement à ce quotidien et rattachement à l’histoire instituée de l’art par la qualité esthétique reconnue ? Devenu oeuvres anastistiques, ils sont dépossédés de leur perfection utilitaire, leur vertu d’origine dans le sens où la chose avait été conçue dans plein achèvement, « objectivation de l’objet »*8 (Heidegger) vers son mode utilitaire, recherche juste d’une adéquation de la forme avec sa fonction (optimisation de ses potentialités d’usage par la forme). Les deux créations sont reliée par une transformation, un passage entre l’artisan ou l’ouvrier créateur de l’artefact initial , produit de l’art et de l’industrie , et son appropriation conceptuelle par une « matière grise » dégrisante. Dans cette polyphonie du contradictoire, elle questionne en contrepoint, comme une part d’ombre, la « choséité »10 , le statut ontologique des objets , l’objets d’art et objets de l’art. L’expérience de l’urinoir devenue fontaine et de la plus part des ready made inexposables, inexposés n’étaient pas pour le spectateur lambda obligatoirement vécu sous le signe de l’ouvert, du praticable, de l’accessibilité immédiate, sa manifestation sensible devant être dépassée. Duchamp conçoit un travail pour aveugles et une musique pour sourd. Approche plutôt déroutante. La question de la bonne disposition, le jeu de position, des positions était en question. le travail d’avant-garde est proche de celui de la guerre, de l’escouade, du travail de trancher et des machines de guerre qui doivent faire trébuchet la est pièces du jeu d’origine arabe et persane. Une bataille militaire s’engage avec ses pièces de l’art au rôle martiale. Qui est le fou? dans cette histoire de l’art , cet approche de l’art en diagonale? (Il y a glissement de langage al-fil (?????) fîl (???) devenant le fol, (fou en ancien français) nous sommes loin de l’éléphant persan. Urinoir-fontaine ou la patère moderne ne sont nullement objet de libation et d’admiration, de sacrifice rituels, choses transitionnelle avec le divin païen, ils nous engagent à rejoindre l’espace du sol, à art penter.
Le patère a perdu sa fonction et sa verticalité. Il occupe désormais l’espace plan du sol, cloué, il lui à cloué le bec, comme celui du spectateur. Son titre de baptême indique Trébuchet: une nouvelle désignation, assignation à (con paraître, à com paraître, à comparer l’être, celui de la chose dirait Heidegger pour dévoiler une nouvelle vérité au delà de son « étiquette » posée sur elles, celles de leur utilité dans une société de l’économie capitaliste. Bergson expliquait justement dans son ouvrage sur le rire que « Nous ne voyons pas les choses mêmes ; nous nous bornons, le plus souvent, à lire des étiquettes collées sur elles »*12, tendance, issue du besoin et de l’influence accrue du langage. Le mot devient comme un voile abstrait et conceptuel parfois inadéquate et réducteur , posée sur la réalité immédiate. Avec Duchamp il faut se méfier des étiquettes, seul le hasard peut se mettre en conserve disait Duchamp dans son goût pour l’absurde et la contradiction: il ne faut pas demeurer dans les borne, être borné. Duchamp par son travail sur le signe linguistique devenu trop plat, abstrait et surtout impersonnel, joue avec cette tendance sociétale qui touche l’ » animal politique »* doué de langage aristotéicien, consommateur percevant et interprétant mais aussi comme le montrera Lacan dans ses néologisme « parlêtre »* et les effets de lalangue du sujet. Pour Marcel « Le mot est un galet usé, qui s’applique à trente-six nuances d’affectivité.*13″ Convention vide de sens, il faut comme le feront les poètes symbolistes de son époque ressourcer en retrouver la source, l’origine, l’indicible et l’invisible, ce qui est insondable dans l’âme. « Nommer un objet, affirmait, c’est supprimer les trois quarts de la jouissance du poème, qui est faite du bonheur de deviner peu à peu : le suggérer, voilà le rêve »*12. Duchamp dans son travail se place dans une esthétique de l’indifférence et non de la jouissance, recherchant tout de même les possibilités suggestives et mentales du langage au delà des indétermination sensibles et relativistes :Son mentor est plutôt J-P Brisset .
Cf: Jean-Pierre Brisset et « la folie de l’insolite » considérée du point de vue de Marcel Duchamp, d’André Breton, de Raymond Queneau, de Michel Foucault et de quelques autres de Marc Décimo Dans Topique 2012/2 (n° 119), pages 71 à 86
*Aristote, Les Politiques [environ 325-323 av. J.C.], Livre I, chapitre 2, 1253 a 8 – 1253 a 19, trad. par P. Pellegrin, GF, 1990, p. 91 – 92
J. Lacan, « Joyce le symptôme II ».
Dans son ouvrage Duchamp du signe, pensée de l’artiste sur cette pratique, il joue dans son titre « couleur » sur l’idée qu’il devait avec son nouveau ballet des objets créer un chant du signe, pratiquer une tabula rasa dans le champ du signe, une mort du signe, la mort du cygne: On peut faire un rapprochement avec le Ballet de Michel fokine créé en 1907 pour Anna Pavlova, caractéristique pour l’histoire de la danse comme l’oeuvre canonique depuis l’époque du roi soleil celle l’envole de la danseuse et des 5 règles classiques, d’une danse pure que viendra avec de nouveaux paradigmes rompre la danse moderne puis postmoderne . En contiguïté avec la modernité et le modernisme des arts plastiques, elle exploitera par inversion – la conquête du sol, le danseur pieds nus utilisant la gravité en 1920 puis du geste prosaïque ou de la composition avec le hasard ( J.Cage et Merce Cunningham ou les propositions musicales du Duchamp) le choix de l’épuration minimaliste entre pratique de la « performance » et culture de l’anti-art (postmoderne 1970). L’oeuvre de Marcel Duchamp peut-être source d’inspiration pour la danse.
© Ann Ray / OnP/Walkaround Time (Chaillot 2019) reprend les oeuvres du grand verre et sa question du corps:
*1Deleuze et Guattari, article Rhizome,p. 73 de l’édition de 1976 aux Éditions de Minuit).
*2L’œuvre ouverte, de Umberto Eco, 1962, (Point Seuil n°107 ‘ ISBN : 2020053276).
*3 https://fr.wiktionary.org/wiki/pateo# et patère.
*4 M. Duchamp, Ingénieur du temps perdu. Entretiens avec Pierre Cabanne, 1967, Belfond, 1976
*5https://www.paris-art.com/art-by-telephon-recalled/
*6 Aristote, Métaphysique, IV, 6, 1048 a
*7 M. Duchamp, Ingénieur du temps perdu. Entretiens avec Pierre Cabanne, 1967, Belfond, 1976 https://www.editions-allia.com/files/pdf_633_file.pdf Entretiens de Duchamp avec Pierre Cabanne:Entretiens avec Pierre Cabanne – Editions Allia
Sophie Stévance, « Les opérations musicales mentales de Duchamp. De la « musique en creux » », Images Re-vues [Online], 7 | 2009, document 2, Online since 20 April 2011, connection on 21 December 2019. URL : http://journals.openedition.org/imagesrevues/375
- https://slash-paris.com/fr/evenements/marcel-duchamp-porte-bouteilles
*9,10 Qu’est-ce qu’une chose ? (Français) Poche – 24 novembre 1988 de
*11 Dictionnaire universel de la langue françoise: avec le latin …De Pierre Claude Victoire Boiste
*12 Bergson, Le Rire ,Collection : GF ,Format : Broché, 270 pages« Le mot, qui ne note de la chose que sa fonction la plus commune et son aspect banal, s’insinue entre elle et nous, et en masquerait la forme à nos yeux si cette forme ne se dissimulait déjà derrière les besoins qui ont créé le mot lui-même. »Bergson
*13Duchamp du signe (Français) Poche – 25 mai 2013 de
La thèse de Heidegger sur l’art | Cairn.infohttps://www.cairn.info › revue-nouvelle-revue-d-esthetique-2010-1-page-1.
Selon la définition du Littré: Le trébuchet « au moyen Âge, était une machine de guerre qui lançait des boulets. Elle servait à faire trébucher les murailles des fortifications.*14″En acquérant sa nouvelle fonctionnalité, il entre dans le monde décalé de l’étrangeté et des objets agressifs avec ses crochets en fer, celui des machines de guerre anartistiques à l’âge de fer dont Hésiode à l’antiquité décrivait de façon apocalyptique la décadence. L’âge du faire, Quel est l’âge d ‘or? âge dort… de la paresse ? et guerrière..La première guerre mondiale, puissance machinique de destruction et le trébuchet dialoguent contrepoint, contre poids de l’absurde.
.C’est une vision bien sure ironique dans le sens que lui donne en 1964 Vladimir Jankélévitch dans son ouvrage L’ironie. « L’ironiste dit autre chose que ce qu’il pense, mais, à la différence du menteur et de l’hypocrite, il fait comprendre autre chose que ce qu’il dit. L’ironie est donc une feinte » Feinte Du champ, duchamp dit autre chose que ce qu’il montre, montre autre chose que ce qu’il dit, il « morcelle » « brise » le discours esthétique institué sur l’art dominant et sa « délicatesse » du goût (hume) Comme l’urinoir madone, Duchamp joue ses étiquettes inopportunes posées sur un objet si dérisoire et trivial en comparaison de la taille et l’inventivité, le génie mécanique, technique esthétique de cette ingénierie .On peut y voire une citation non dissimulé avec ce génie Renaissant constamment présent explicitement ou implicitement dans l’oeuvre de Duchamp, cet indépassable avec lequel il collabore indirectement en contre-point nécessaire. Le Dessin du projet de Trébuchet, dans le Codex Atlanticus de Léonard de Vinci est véritablement l’incarnation de l’arme la plus puissante de l’époque médiévale. Dessinée pour le duc de Milan en l’an 1482, l’artiste de l’impressionner grâce à ses compétences en tant qu’ingénieur militaire. Il sera dans ce domaine des machinerie de guerre très inventif par les nombreux prototypes imaginés. C’était plutôt un modèle fictionnel propre à enflammer, impressionner l’imagination, ce qui n’est pas le cas du Trébuchet, la fontaine Duchampienne qui ne pourrait pas au premier abord sembler susciter la « force imageante » bachelardienne pour la nouveauté, l’inattendu et le pittoresque. Mais a y regarder de plus près ces expérience poétiques comme la roue de bicyclette devenu âtre dans l’atelier par le jeu des lumière, l’urinoir fontaine spectre photographique par sa perte ou égouttoire et Hat Rack avec ses jeux d’ombres par le choix des scénographies ne sont-il pas au delà de leur caractère commun propre à faire découvrir la fantasmagorie dans le prosaïque . Bachelard dans ces différentes poétiques montre justement la puissance que possède l’eau (fontaine) ou le feu pour stimuler les force de l’imagination, de l’imaginaire. l’homme selon lui« imagine d’abord et voit ensuite ».Roue de bicyclette devient sculpture hypnotique et spectacle lumineux des premiers feux dans l’atelier de Marcel. le Feu devient support de rêverie?
On peut relire Les Fragments d’une Poétique du Feu ,Poétique du Phénix le livre posthume du philosophe ou la psychanalyse du feu,la flamme d’une chandelle.
Gaston Bachelard (préf. Suzanne Bachelard), Fragments d’une Poétique du Feu, Paris, PUF, 1988
Photo Christophe Ducamp –
-made par Marcel Duchamp, 1913/1964. crée par Duchamp, l’institution et le regardeur (Marie France Dubromelle ou Christophe Ducamp).(le coeur invention de hasard et de l’opportunité d’un pont de vue:rendez-vous anartistique.
Roue de bicyclette et son ombre, en forme de coeur..Exposition Duchamp. Paris, Centre Pompidou, octobre 2014:https://mercerieambulante.typepad.com/mercerieambulante/marcel-addict/
Le philosophe définit l’ironie comme une conscience de la conscience, une « conscience joyeuse*15, » un travail de lucidité qui comme une claire-voyance joue le jeu de la bêtise. L’ironie peut prend ici la forme sociale car « l’accent porte sur le jeu ». Est-ce celui du maître sur le disciple? Ce n’est pas le cas de Duchamp qui montre vis à vis de « l’auctoritas » artistique devenu fatuité autoritaire une certaine irrévérence et préfère à cette « violence symbolique »* de la verticalité l’approche beaucoup plus horizontal et collaborative avec le regardeur .Comme l’enseignant de Rancière duchamp se fait-il maître ignorant?. 1917 la guerre frappe toujours la France, le mouvement Dada réagira vivement avec son nihilisme très critique et absurde contre cette société tombée dans la barbarie. Duchamp comme ses confrères du mouvement cultivera avec son ready made et son jeu sur le langage ce que Deleuze puis Derrida ou clément Rosset nommeront la salubrité de « l’idiotie de la dissidence » contre l’idéologie de la raison raisonnante cette connaissance au cœur de l’histoire rationnalisée et exercant par les voies de la communication rationnelle les voix de la déraisson .Dada puis le surréalisme dynamiteront tout ce champ du savoir politico esthétique.
Vladimir Jankélévitch – L’ironie, coll. « Champs », Flammarion, 1964
Duchamp cultive le jeu de rôle dont celui de l’idiotie au sens de « singularis », « homo singularis », c’est à dire un personnage unique, solitaire marchand, isolément, dans la voie qu’il trace tel Socrate, Galilée ou Copernic, pour crèer nouvelle révolution du monde. Il crée Richard mutt » (1917) et Rrose sélavy en 1920 personnages fictifs conceptuels » « hétéronyme » , « pseudonymes ». le travesti son double érotique,« veuve fraîche »ou il faut mettre la moelle de l’épée dans le poil de l’aimée. »et l’artiste crétin , aveugle du blind art signent désormais certaines oeuvres. « Duchamp signe Rrose Sélavy au moins trois ready-made et un court-métrage: »https://fr.wikipedia.org/wiki/Rrose_S%C3%A9lavy
.Marcel Duchamp en Rrose Sélavy. Photographie de Man Ray.
Il se sert d’un Je comme troisième personne. » Descartes « devraient signer « L’Idiot « » expliquait Gilles Deleuze cultivant cette valeur positive de l’idiotie. Descartes dans son poil révolutionne la pensée philosophique replaçant le sujet pensant au centre de la connaissance, Duchamp dans son atelier révolution l’art en le repensant au delà des marges l’ « instances situationnelles et institutionnelle» Dans son sens grec d »idios », qui a donné idiome, idiosynchrasie, comme le montre Clément Rosset dans son traité de l’idiotie, doit être rapproché de simple, particulier, « sans duplication », sans double »:-« toute réalité est donc idiote et indéfinissable dit-il: » le concept d’idiot est à repenser avec celui de bêtise, stupidité confirmait Jacques Derrida: Qui est imbécile? l’artiste? le spectateur? Celui qui est sans béquille, le pas distrait ou hésitant, au risque de vaciller, trébucher? l’idiot est l’ignorant, nais n’est pas ignorant celui qui le sait aurait enseignait le cas Socrate au cas Duchamp.« Indestructible Object is a Dadaist, photography photographic print created by Man Ray between 1923 and 1958. It lives at the Tate Modern in London. »
Duchamp se veut peu au diapason, au rythme métronomique de son temps avec son principe d’indifférence et de non-art. Sa vision si particulière est contrariante et source de frustration, de dépit- (dépit amoureux pour un spectateur célibataire, un public avide de plaisirs esthétiques, de jouissance et d’identification cathartiques, »d’effets esthétiques » . Ne sont-ils pas comme autant de « stade du miroir » répété pour une identité sidiffragmentaire et confuse ? Le stade du miroir se poursuit t-il dans le miroir de l’art?. l’art contemporain questionnera bien après Duchamp et ces célibataires, ces libidos à terre, ces bites à terre ou à l’aire, en l’aire devant la mariée même. la problématique du regardeur pénis non » chatrée », cette « histoire de l’oeil » ( bataille) d’un oeil érotique avide d’une chaire si peu fade et triste, ou d’une sexualité plus pornographique seront le lieu de création artistiques et de perception esthétiques :L’odalisque courtisane n’est plus seule dans son alcove de peinture, la partouze a succèdée au déjeuner sur l’herbe . Ils feront de la question de l’acte sexuel, le médium lui-même de l’art tout comme Diogène se masturbant sur la place publique, construisait autour de ces Skandalon, des fondements politiques et philosophiques. Oeuvre à ne pas toucher… oeuvre à toucher…oeuvre pour s’astiquer à regarder d’un coin de l’oeil la main sur le pantalon…oeuvre à caresser… oeuvre enfin à coïter ?. A ne pas toucher le « noli me tangere du sacré christique, (« ne me touche pas ») de saint Jérôme dans l’Évangile selon Jean (Jn 20,17), en passant par l’odalisque, la naissance du monde avec poils , puis « étant donnée » au pubis rasé . De Jeff Koons et la Ciccolina a Clayton Pettet c’est désormais le corps même de l’artiste exhibitionniste sur la scène de l’art qui est devenue l’oeuvre On n assiste à la disparition des frontières voire l’ infraction, le viole des espaces communs organisés. L’artiste se fait modèle à embrasser chez Orlan ou agresser chez Marine Abramovic dans ce dépassement des limites du pensable. Star de la performance , elle travaille sur les limites de son corps de façon extrême et radiale: En 1974 ,elle laissera le spectateur publique l’agresser sexuellement. Fontaine d’un seul coup semble très soft avec sa simple madone de la salle de bain un scandale de jeune pubère dirions-nous , comparé à la performance Los Penetrados de L’Espagnol Santiago Sierra ou de « l’artiste Andrea Fraser, dans sa performance Untitled datant de 2008 . Elle décide de coucher avec un collectionneur contre la somme de 20 000 dollars (environ 18 000 euros)… en précisant bien qu’il ne s’agissait pas d’un acte sexuel mais de la réalisation d’une œuvre d’art . » A chaque époque ses moeurs.
Déjà Duchamp entérine se passage de l’art vers ce touché, inaugurant avec son oeuvre « prière de toucher » une nouvelle pratique muséale purement tactile et plus seulement optique . Il réalise à partir du moulage du sein de sa maîtresse.en 1947 une oeuvre étonnante.
Orlan, le baiser de l’artiste .Le Baiser de l’artiste, 1977 @ ORLAN OFFICIAL WEBSITE / SITE ...
Marina Abramovi? « Rhythm 0 » 1974.« Une expo porno chic et vraiment choc, « Made in Heaven » — « Fait au paradis », comme on fait l’amour — »http://www.leparisien.fr/culture-loisirs/et-koons-epousa-la-cicciolina-20-08-2016-6054787.php
Los Penetrados
Sites pour un observateur majeur et averti
- https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2019/05/26/la-sexualite-de-l-art-et-du-cochon_5467365_4497916.html La sexualité, de l’art ET du cochon – Le Monde https://www.lemonde.fr › L’époque › Le sexe selon Maïa
- http://www.teamgal.com/artworks/708
https://youtu.be/0uO1R90B5KA
Comme trébuchet » « skandalon » n’est-il un bâton mobile ou détente d’un piège, trappee, un piège? Ne définit-il pas un obstacle placé sur le chemin et faisant tomber comme le ready made quelqu’un ( l’art comme scandale ,pierre d’achoppement, occasion de chute) . On l’attribut également à la figure christique par son anti conformisme, si contraire et à contre-courant des autorités religieuses du temps. De quel ordre était le skandalon Duchampien? Est-il le même que Manet avec son skandalon du réel? l’art se définit selon le Larousse comme la « création d’objets ou de mises en scène spécifiques destinées à produire chez l’homme un état particulier de sensibilité, plus ou moins lié au plaisir esthétique »: Comme pour la science la première approche de l’art traditionnellement ne s’effectue t-elle pas de façon naturelle comme partie de son propre moi? Comme Bachelard pour la démarche scientifique, Duchamp par son travail de distanciation problématique ne tente t-il pas de questionner cet « attachement de l’esprit au narcissisme primaire et secondaire freudien entre auto-érotisme à l’oeuvre et objet investi même dans notre rapport à l’art. Comme le trébuchet, il questionne ce balancement , ces jeux de transferts ossillant inhérents à toute perception artistique. l’art comme relation avec l’objets devient « relation d’objet » avec ou sans objets? Jauss dans son ouvrage de 1988 pour une esthétique de la réception replace l’émotion et la jouissance au centre de l’expérience artistique fondamentale, le spectateur, lecteur se trouvant dans l’instance de « l’ergo-textuelle » face au texte ou à l’oeuvre l’abordant dans « un horizon d’attente »(W. Iser et sa théorie de« théorie de l’effet » )*. Duchamp ne répond pas à cet horizon, cette attente, il ne fait plus dans une société hédoniste et narcissique du plaisir la source de l’art. Art ascétique sans jouissance et identification , le rapport sujet-objet n’est plus le même. Adorno préconisera également dans sa théorie négative, théorie esthétique en 1971 dans une société triomphante de la kultur industrie et de la totalité cette non jouissance à l’oeuvre dans une quête plus authentique .
Pour Clément Rosset l’idiot est celui qui n’est pas comparable, mesurable: Duchamp n’est pas du domaine du comparable, incomparable, non mesurable avec les repères de l’époque, se réclamant au delà des clivages et de la questions du goût de son propre goût, d’une expérience sensible, du beau et du laid. Il propose un nouvel étalon, étalonnage du monde de l’art comme dans son ready made 3 stoppages-étalon de 1913 emblème d’un dépassement des lois métriques de l’art (?????? / métron), jusqu’à sa géographie, géodésie nouvelle: La première unité de mesure du système métrique initial, ce fameux mètres-étalon crée en 1889 servait de définition au mètre jusqu’en 1960).
3 stoppages-étalon 1913 / 1964Fil, toile, cuir, verre, bois, métal 28 x 129 x 23 cm Inscriptions :S.D.T. sur une plaque de cuivre gravée et clouée sur le couvercle du coffre en bois : Marcel Duchamp 1964 Ex./ Rrose/ 3 STOPPAGES-ETALON, 1913-14 / EDITION GALERIE SCHWARZ, MILAN -au dos de la bande de toile, inscription bleue et visible à travers le verre : Un mètre de fil droit, horizontal, tombe d’un mêtre de haut (3 stoppages-étalon; appartenant à Marcel Duchamp) / 1913-14 -Imprimé en lettres d’or sur une étiquette en cuir au bout de chaque bande de toile : 3 STOPPAGES ETALON / 1913-14D’après la première réalisation à Paris en 1913-1914, cette réplique a été réalisée sous la direction de Marcel Duchamp en 1964 par la Galerie Schwarz à Milan, et datée 1913-1914/19643 fils d’un mètre collés sur 3 bandes de toile peinte Bleu de Prusse, collées sur verre, règles à fixer, le tout dans un coffre en bois
Mais, ce pas de côté constant, cette volonté de voté en touche avec toutes ses contradictions inhérente est-il tenable? Etre hors du cosmos de l’art ? Créer un univers parallèle, n’est ce pas comme en physique être dans le jeu des hypothèses. Le chat d’Heisenberg mourra t-il? Duchamp célibataire sans mariée aura des suiveurs mais pas de réels disciples, bat- art pour un art de célibataire, un art sans mère qui comme dans son histoire personnel n’en a que le nom: tels ces ready made nés sans mères d’une mère porteuse dont le père Duchamp attribut performativement le nom, nom- propre,nom-sale. Ces derniers poursuivront sa voie dans la ligné plutôt anti-artistique du dadaïsme. Cette dernier demeurait pour Duchamp un écueil, un rocher, banc de sable à fleur d’eau contre lequel un navire risque de se briser ou de s’échouer car elle était par son élargissement, une autre façon de faire de l’art qui l’intègre dans son giron, un obstacle qui n’en a plus que la forme: Alliance des contraires beauté et laideur, bon goût et mauvais goût, bas et haut, Duchamp n’était pas dupe de l’ambivalence de sa position, mais il a toujours la réponse, comme un pied de nez amusé : faut-il se prendre au sérieux. « Je me suis forcé à me contredire pour éviter de me conformer à mon propre goût.« Duchamp du signe de Marcel Duchamp.
« un soir, dit Rimbaud le poète du bateau ivre-dans Une saison en enfer en 1873″ J’ai assis la Beauté sur mes genoux. – Et je l’ai trouvée amère. – Et je l’ai injuriée. » Urinoir fontaine prend les devant de la scène, la vénus Androméde sort désormais d’un d’un cercueil vert en fer blanc loin des graces renaissantes d’un botticcelli , d’une Fresque murale
Château de Fontainebleau -ou d’une patère antique. Venus comme Marcelle descend les escalier devenue Odalisque, jeune femme déjeunant dans un jardin, demoiselle d’Avignon.La question du topos de la beauté avec la modernité se pose.chez Rimbaud « l’idole sonnet du trou du cul » ce tube ou descend la céleste praline quand Nona lisa a chaud au cul, au culte. Duchamp est au delà: utopos? Duchamp construit une nouvelle autochratie ou anarchochratie dans un autre système artistique sans ni dieu ni maître? mais peut-on échapper au vortexe de la récupération dans cette société moderne? Quand est-il encore de Fontaine 100 ans après?
Une idiotie contre la bêtise: l’objet ready made au publique non-avisé ne pouvait que sembler barbare, barbarisme faute grossière de langage par emploi de mots-objets forgés ou déformés. Une autre barbarie, folie salutaire, dans le sens de la création d’un art autre, « estranger » qui défit le logos en faisant trébucher les murs de la langue tel Brisset :le prince des penseurs . Duchamp fait trébucher les constructions hégéliennes de l’histoire civilisationnelle de l’art comme développement de l’esprit et des dominants dirait w. Benjamine, ce » rationalisme instrumental », nouvelle « dialectique de la raison » .( Adorno et Horkheimer). la sauvagerie n’est pas là ou le croit. C’est toute la pensée qu’il faut faire trébucher. l’artiste tend la perche à celui qui s’égare. Contrairement à l’humour, l’ironie a un but: » Elle a toujours quelque chose derrière la tête » explique Raphaël Enthoven » Trébucher c’est aussi la fonction du langage qui en psychanalyse glisse à travers les actes manqués, et lapsus pour faire surgir cette part d ‘inconscient , le refoulé. Duchamp ne fait-il pas glisser les signifiants? le spectateur ne trébuche t-il pas à tous ready made, suscitant incrédulité…téflon les regards semblent glisser sur l’ oeuvre pour y revenir ou s’en aller .
La tête de Marcel DUCHAMP, Tonsure en étoile et ligne Photographie de Man RAY . l’artiste inspiré…dans cette performance,apparaît dans l’atelier avec son étoile filante sur la tête ,pied de tête à la tonsure monacale qui permettait une communication plus immédiate avec la divinité.
Ironie vient du grec eirônia, interrogation. La proposition de Duchamp se veut derrière son caractère faussement ignorant très socratique. Il engage le spectateur à faire avec tous les Ready mades l’académie buissonnière, de mener vers les chemins de traverse de l’interprétation, Il avance, on avance? en diagonale comme le fou sur un jeux d’échecs, quitte à passer pour un insensé :(pensons à fontaine et toute la densité du commentaire, des explications, ces circonvolutions qui foisonnent. « Ce sont les regardeurs qui font l’oeuvre » devenu lietmotif à force de répétition. En a t-il a pour son argent ce voyeur impénitent de beautés et de « délectation « scopiques devenu amateur de peep show et de divertissement.. On peut repenser au dispositif du voyeur repris par Duchamp dans « étant donné », ultime pied de nez de l’artiste qui dans l’histoire scandaleuse de notre modernité poursuit et réfléchit la nouvelle place inaugurée proposée depuis Manet avec sa fameuse odalisque et son spectateur moderne avide d’images et de chromos érotiques. En contre champ, hors champ, Le spectateur devenait client malgré lui, sujet désirant de la perspective, oeil monofocale renaissant est devenu polyfocale, oeil désirant,oeil jouissant. Pour chaque courtisane, et mona c’est bite à l’aire offre désormais un bouquet à celle qui L.H.O.O.Q
Michael Fried , Gilles Deleuze, Michel Foucault, Jean-François Lyotard, Marie-José Mondzain et Jacques Rancière théoriseront sur ce principe de la place attribué au spectateur avec l’avènement de la modernité, la question du spectateur et de la spectatorielle. « citoyen-spectateur », regardeur voyeur « émancipée » ou dissipé chez Duchamp dans cette culture légitime » et dévolue au spectateur .Duchamp: monnaie de singe dirait certains. Duchamp, c’est comme un parie, un pari pascalien sans dieux ni maître? Comme la roulette lancée par un petit diable au casino du Mont Carlo? l’artiste devient agent de change, il a des obligations dans les deux sens du terme à nous vendre comme des bons du trésor, il est amené à financer lors de sa période à Monaco les recherches de l’artiste aux tables du casino.Yves Klein le nouveau réaliste fait visiter le vide immatériel ou vend des zones de sensibilité au prix d’un petit lingot d’or jeté dans la seine .Ne reprend-il pas à contre-pied cette problématique de l’argent et de la valeur assignée de plus en plus à l’oeuvre d’art. Un juste retour des choses à la nature. Une oeuvre au poids sur le trébuchet dans une société matérialiste avec un de plus en plus évanescent,
2003 « ».Un peigne à chien du blind man?
« Peigne (Comb )1916 / 1964
Acier 1,6 x 18,5 x 5,4 cmInscriptions :S.D. sur le peigne : Marcel Duchamp 1964 Sur le boîtier, une plaquette en cuivre gravée : Marcel Duchamp 1964 / ex. Rrose/ peigne 1916 / édition Galerie Schwarz, Milan Sur la tranche, en blanc : 3 OU 4 GOUTTES DE HAUTEUR N’ONT RIEN A FAIRE AVEC LA SAUVAGERIE Sur le peigne : CHAS F. BINGLER 166-6th AVE N.Y.L’original a été réalisé en février 1916 à New York. La réplique réalisée sous la direction de Marcel Duchamp en 1964 par la Galerie Schwarz constitue la 3e version.Peigne à chien en acier gris dans un boîtier Achat, 1986
Cf:Clément RossetLe Réel. Traité de l’idiotie 1978. et sa bêtise des doubles dans son onthologie tautologique et Jacques Derrida avec ses conceptes équivoques et leurs usages idiomatiques de bêtise (catégorie indéterminée), bête,bêteté, bestialité,sottise, stupidité, idiotie, : ou Deleuze.
Qui est bête juge mal, Sur la scène de la bêtise
- L’art (d’être) idiot – France Culture https://www.franceculture.fr › Émissions › Le Journal de la phil
- La Conscience idiote ou la bêtise comme phénomène (Acta …https://www.fabula.org › revue › document10101
- Deleuze : éthique de Spinoza — Faire l’idiot (2/5) – Paris4- Philo paris4philo.over-blog.org › article-4840187
- L’impossible pensée. Deleuze et la question de la bêtise – Cairn https://www.cairn.info › revue-rue-descartes-2008-1-page-104
- Eloge de l’idiotie / Alain Naze / Chimères n°81 / Bêt(is)es | Le …lesilencequiparle.unblog.fr › 2014/03/13 › eloge-de-lidiotie-alain-naze-chim..
PHILIPPE PHILOSOPHIE GERMINA – 2013/L’IDIOT (VOLUME II),DOSTOIEVSKI FEDOR,ACTES SUD – 2001
L’IDIOTIE JOUANNAIS JEAN-YVES BEAUX ARTS – 2003
« culture de masse » » en 1917 puis en 1964, 2020 doit-on toujours parle de fracture du spectateur face à l’oeuvre de Duchamp. Il y a ceux qui se targuent ne savoir. Peut-on aborder l’oeuvre sous la forme d’une découverte impromptu, d’un regard neuf sans tous ces scories et scolies du commentaire au détour d’un musée: une oeuvre sans le ?.
La toilette, 1742, François Boucher, (Madrid, Museo Thyssen-Bornemisza).
«L’art n’est plus la manifestation de l’esprit mais quelque chose comme l’ornement ou la parure de l’époque. De l’oeuvre autonome et organique ayant sa vie propre, on est passé au style, du style à l’ornement et de l’ornement à la parure. Un pas de plus, juste un pas, et il ne reste qu’un parfum, une atmosphère, un gaz : de l’air de Paris, dirait Duchamp. L’art se réfugie alors dans une expérience (…) qui est celle d’une aura qui ne se rattache à rien ou quasiment rien. Cette aura, cette auréole, ce parfum, ce gaz, comme on voudra l’appeler, dit à travers la mode l’identité de l’époque.» Yves Michaud L’Art à l’état gazeux Hachette Littératures «Pluriel», 208 pp.
Marcel Duchamp (1887-1968) | Monte Carlo Bond (No. 1)
Air de Paris(50cc de Paris) 1919 / 1964 Verre, bois,14,5 x 8,5 x 8,5 cm
Inscriptions :S.D.T. sur l’ampoule : 50 cc air de Paris / Marcel Duchamp1964 / Exempl. RroseL’original a été réalisé à Paris en décembre 1919. La réplique a été réalisée sous la direction de Marcel Duchamp par la Galerie Schwarz à Milan, en 1964 et constitue la 4e version de ce Ready-made.Ampoule de verre de 50 cm3 dans un boitier en bois,Achat, 1986Numéro d’inventaire : AM 1986-296
Son travail qui ne se veut pas travail du faire (fer) propose un mouvement de renversement des opposés, le bas devient le haut, l’ordure sacrée, une transmutation des valeurs. L’artiste défit dans son espace d’atelier, la gravité, la chute des corps comme cet urinoir dans l’atelier en lévitation ou cette porte qui s’ouvre et se ferme des deux côtés d’un coin. En éducation nous avons le maître ignorant (J. Rancière)comme avec socrate le philosophe ignorant: par son art des antipodes, Duchamp, contre la figure du maître symbole de l’art traditionnel, cultive la figure Moderne de l’idiotie, « personnage conceptuel » dirait Gilles Deleuze, de notre modernité: Il s’amuse à brouiller les repères en faisant basculer le spectateur de son axe, de sa latitude.Le trébuchet c’est aussi la balance qui soupait la monnaie: le spectateur devenu regardeur face aux oeuvres de Duchamp se trouve constamment dans ce balancement, une pensée de l’oscillation entre l’objet, l’art dans cette révolution des planètes et du cosmos artistique. l’art c’est par le goût, l’échange, cette circulation capitaliste de bien culturel, des valeurs au risque de la fausse monnaie, on parle de faussaire.Duchamp a pu sembler pour le public et peut-être encore aujourd’hui pour un regardeur non avertit un marché de dupes: la naissance de la notion d’art comme économie symbolique peut être à rapprocher du « un pouvoir symbolique » de Bourdieux développé dans la distinction, celle du pouvoir légitimant des élites en terme de goût: l’art que tente de court-circuiter Duchamp est celui des valeurs que l’on soupait Il crée une oeuvre comme un hiatus qui qui met au défi , la logique, les associations, les jugements trop immédiats et pétrifiés par un oeil monofocal et les idées reçues qui parfois enckylose injustement par ses constructions de la vérité artistique avec ces certitudes folles. Mais nous savons très bien que la certitude, et la vraisemblance n’est pas la vérité au sens de « vérités comme réalité » comme le vrai: cette correspondance instituée entre l’objet et le réel comme juste représentation, de mimésis, de mimes thèque, lieu de l’ADAEQUATIO qu’on retrouve dans livre ? de La métaphysique d’Aristote et sa relecture par la scolastique médiévale. Comme pour urinoir- fontaine DUCHAMP joue avec l’inadéquation et le principe d’identité et de non-contradiction.
Ce porte manteau ou cet urinoir, ce porte bouteille… »cette chose-ci » dirait Heidegger n’est plus ce que l’on croit dans ce nouvel espace-temps c’est une nouvelle vérité de la chose, elle est un rendez-vous ou la chose n’est plus le mot et le mot la chose. Un présurrealisme avant l’heure. Un jeu avec les choses, les situations, avec le sens dans son équivocité au sens où Derrida voit derrière les mots un rhizome de sens à exploiter. Ici dans les ready mades on découvre des jeux avec l’esprit, avec les mots comme le feront R. Roussel et Brisset dans la poésie, ce lieu qui permet de trouver comme une expansion du monde et de soi, la vérité du langage ( Mallarmé) et des choses : Aletheia heideggérienne au sens de manifestation, faire advenir contre l’oubli, oubli de l’être, des choses, la choséité . Comme Bachelard pour la science parle d’erreur épistémologique, Duchamp joue en art avec cette épistémè de son temps quitte à susciter les mal entendu et vu, la réprobation, l’indifférence, l’incompréhension. Cela explique le caractère justement différé de son oeuvre, mais également être à contre -temps :N’écrivait-il pas que « L’art est une chose beaucoup plus profonde que le goût d’une époque ».Dans du Duchamp du signe . Contre les apparences et le goût des surfaces de notre époque ,il propose un art des profondeurs:. Dans ce travail ironique et ludique sur le sens Jankélévitch montrera toujours que dans le jeu, il faut toujours une part de sérieux, une sorte de pacte tacite. Faut-il encore que le spectateur interloqué veuille jouer. Trébuchet est un clin-d’oeil à un autre. Duchamp ne cesse implicitement ou explicitement d’interroger l’oeuvre. Le trébuchet permettait de faire vaciller la muraille institutionnelle des certitudes, mais ce mur illusionniste, cette virtuosité créée à la grandeur d’un mur ou d’un plafond dans lequel tel un boulet l’artiste et le spectateur seront projetés, quitte à s’écraser au sol, où se prendre le mur:. Il passer à la trappe, s’il regard le porte-chapeau, hat rack, suspendu comme une attraction (à traction) de fête foraine dans son manège d’objets, avec son attrape regard de lanterne magique, la magie de son ombre cinématique de caverne platonicienne .Même chose pour la pelle ou la scie. On advance à broker ne pas arm…objet à regarder avant la chute, en avance de la chute dans un art du déséquilibre et d’équilibriste .
Porte-bouteilles
(Egouttoir ; Séchoir à bouteilles ; Hérisson)
1914 / 1964
Fer galvanisé
64 cm Diamètre : 42 cm
Inscriptions :S.D. en bas : Marcel Duchamp 1964 / exempl. / Rrose
L’original, perdu, a été réalisé à Paris en 1914. La réplique a été réalisée sous la direction de Marcel Duchamp en 1964 par la Galerie Schwarz, Milan
Porte-bouteilles
Nous ne sommes plus dans l’illusion : Celui de La » perspective légitima » projection construite. N’étaient- elle pas une machine de guerre et politique, nouvelle la relation entre le sujet et le monde, celui de sa conquête de la place publique, forme symbolique d’un univers déthéologisé disait Panofsky, et du futur monde économique capitaliste commensurable à l’homme, un monde ouvert à leur actionet à leurs intérêts précisait Pierre Francastel dans Peinture et société ou Daniel Arasse dans son histoire du concept. Tyrannie du regard, monoculture, monoculaire, vase clot pour une tyrannie du langage et de la représentation. Il fait trébucher de sa verticalité inaugurale et bipédique » le spectateur fixe, devenu avec la modernité également spectator », »operator »* pour reprendre les concepts de R. Barthes*
. la généalogie de la peinture depuis la Renaissance jusqu’à l’invention de l’appareil optique et photographique montrera une continuité des habitus institués de façon hégémonique . »L’hégémonie culturelle » expliquait le penseur italien Gramcsi était une emprise dominatrice, une vision du monde des dominants » que viendra bouleverser l’art moderne en démontrant depuis les impressionnistes que cet » allant de soi » n’allait pas de soi . Elle contraint désormais à ne plus voir le monde seulement à travers cette machine à voir artificielle, pseudonaturelle. Nous étions avant ces révolutions esthétiques condamné comme Thalès regardant les étoiles dans le Théétète de Platon (428-346 av. J. -C.) repris par Heidegger dans son cours de 1935 (Qu’est-ce qu’une chose)* amener à chuter dans le puit du réel: Duchamp nous incite à scruter, percevoir le sol, changer de « spectrum » au risque de la chute et subir le rire de la servante de thrace. Se mettre au niveau de l’ordinaire des choses avec un regard plus pragmatique:« Sans son désir de connaître ce qu’il y a dans le ciel, il ignorait ce qu’il y avait devant lui et sous ses pieds» *si l’espace est cette étendue que l’on embrasse du regard en s’y projetant, la coexistence d’un ordre des choses (Leibniz), c’est aussi « un corps imaginaire »*6 (Paul Valéry) avec lequel notre propre corps est confronté .Il tisse une relation de réciprocité (la phénoménologie, Merleau-Ponty nous engagera à nous repositionner dans notre rapport avec le monde. « vivre c’est passer d’un espace à un autre en essayant le plus possible de ne pas se cogner » expliquait Georges Perec ou tomber j’ajouterais*5 « le réel c’est quand on se cogne » de confirmer Jacques Lacan . L’artiste et spectateur est un corps qui arpente l’espace et pas seulement un oeil: le réel n’est ce pas quand on chute? au sens icarien du terme où biblique: Vivre c’est passer aussi d’un espace à un autre en essayant le plus possible de se cogner? » L’espace artistique est désormais « substance étendue »à parcourir. Trébucher pour Duchamp, c’est une façon de déconnecter le spectateur rétinien de ses habitudes, de sa fixité, des schèmes spatiaux, des projections abstraites, des reconstructions mathésis du réel et des « res »à partir du sujet échappant dans l’empyrée romantique et idéaliste, les absolus métaphysiques :Le jeu d’échecs rejoint l’espace du mur, celui de la peinture, il devient tableau espacé de jeu, dispositif tactile : Duchamp aime jouer avec l’inversement des espaces, des supports le porte-chapeau perd son pied et devient suspension dans l’espace avec son ombre projetée et mobile: Duchamp a-t-il une araignée au plafond sous la caboche?
Le trébuchet définit aussi » un traquenard », un piège pour quadrupèdes, ici devenu piège à ce bipèdes optique avide de pièges visuels à la Zeuxis et Parrhasios. le mot « Trap » ( piège en anglais) version à l’objet pour un artiste travaillant dans deux univers de langues, le français et Anglo-saxon est aussi intéressant dans le caractère plurivoque et bilingue :Barbara Cassin démontre justement la richesse du bilinguisme pour la réflexion et la conception des conceptes , elle permet de prendre en compte ces deux « génies » culturels différents que sépare l’Atlantique.Les « climats »et moeurs qui peuvent enrichir l’interprétation. Gilles Deleuze ne montrait-il pas pour la philosophie les différences de génie entre les Allemands français ou anglais dans la pratique philosophique tout comme Montesquieux requestionne l’universalité de l’esprit des lois. Comment ne pas voire l’oeuvre comme trappe, mot qui signifie ouverture mais aussi piège, trapper, attraper le spectateur :Ce « piège constitué d’un trou recouvert de branchage ou d’une bascule », chausse- trape (dissimuler) fosse: Chasser au moyen de trappes cette façon de problématiser l’oeuvre. La question de l’art comme leurre, camouflage n’intéressera t-il pas l’armée dans l’utilisation des motifs destructurant du cubisme pour les bateaux et engins furtifs de la première guerre mondiale.
« Gertrude Stein rapporte que, devant le premier canon camouflé qu’il vit, Picasso s’écria : « C’est nous qui avons fait cela. »Guirand de Scevola donna lui-même les premiers éléments d’explication : « J’avais, pour déformer totalement l’objet, employé les moyens que les cubistes utilisent pour le représenter, ce qui me permit par la suite d’engager dans ma section quelques peintres aptes à dénaturer n’importe quelle forme. » Les cubistes et le camouflage poursuivaient un but similaire : intégrer la figure au fond, l’objet à son environnement »
D’un point de vue figuré, trébuchetsignifie »prendre quelqu’un au trébuchet, l’amener par adresse à faire une chose qui lui est désavantageuse ou désagréable.*7.Faut-il voir le ready-made comme un piège, comme il y eut le trompe l’oeil puis le trompe l’esprit avec le cubisme et sa réflexion nouvelle sur la perception instituée? »l’art doit sortir le spectateur du confort intellectuel et de la fausse monnaie: Pour Florence Jaillet, docteur en histoire de l’art, il est une façon d’apprivoiser l’accident, de faire à travers « ce pense-bête » un « appel à la vigilance »en reconnaissant les « vertus du déraillement. Avec cet acte, la production de »l’accident fait son entrée officielle dans le champ des arts visuels. *8 Duchamp raconte la naissance de cette installation en 1917 en 1953 à Harriet Jannis « une patère était là, sur le plancher, un vrai portemanteau que j’avais envie, parfois d’accrocher au mur ; mais je ne suis jamais arrivé à le faire, si bien qu’il restait là sur le plancher et que toujours je me butais sur lui ; ça me rendait fou et je me suis dit : ça suffit avec ça ; s’il veut rester sur le plancher et continuer à m’ennuyer, d’accord, je vais le clouer et il restera simplement là…*L’atelier n’est plus cet espace fluide et familier » du cours naturel des choses » et de la création comme un potager qu’il faut arroser dirait R. Miro ou construit comme un Mondrian impeccable et sans poussière ou grains de sable à l’image d’un art total prolongement du tableau dans l’espace de l’atelier puis hors de celui-ci comme une excroissance qui se poursuit hors du lieu de création pour concevoir un monde : architecture, urbanisme. Dans l’atelier de Duchamp le réel peut intervenir de façon intempestif, inattendu, impromptu, interrompre comme une effraction de la pensée où l’acte ordinaire, la démarche et le cours de la création en devenir:Il intérompt ce que Jankélevitch nomme « le sérieux » c’est à dire le « temps continue » vécu, aspect de la vie qui ne remet rien en question toile de fond privilégié pour la naissance de l’ironie ou de l’aventure :le Geste opportun voire opportuniste de création se greffe de façon impromptu:Francis Ponge insistait sur la nécessité pour l’artiste dans l’espace de l’atelier de prendre « le monde en réparation, par fragments comme il lui vient ». L’art est partout et peut-être par là où vous le croyez même dans le faux- pas, le déséquilibre. Il faut montrer une acuité à l’événement et le prendre comme il vient. Parfois, on n’a pas le temps de regarder et il frappe, il faut donc être vigilant contre la cécité et savoir le percevoir là où on ne l’attend pas, comme cet « élevage de poussière » de 1920 coproduit avec Man Ray. Dans son atelier new-yorkais: Marcel Duchamp pendant des mois a laissé la poussière s’accumuler sur une plaque de sa fameuse création le grand verre. Il a cultivé et montré dans cette production éphémère la photographie de l’ordinaire celui qu’on efface, la saleté et l’impure si souvent exclue d’un art sans parasite et bactérie qui par tradition cultive le beau idéal si pur et hygiénique (à l’image de cet hygiénisme biopolitique qui gagne la société depuis le XIXèm: probité, propreté de l’art, de la fenêtre transparente albertienne et du paysage de la ville nouvelle historia de l’hygiène loin de « l’immondicité » (V.Hugo) urbaine de l’époque comme le montre le colloque du collège de France sur la figure du chiffonier ou « le poète de la voirie parisienne.Dans l’espace de l’atelier, la genèse de l’objet vient d’une expérience vécue de l’artiste avec cet objet (trouvé?qui traîne, obstacle, il occupe le passage comme un encombrant,un danger, qui ne trouve pas sa place habituelle et perturbe le bon déroulement du quotidien de l’atelier: Il prend la forme d’un récit de création non artistique absurde voire burlesque : L’artiste dans une reaction enfantine le fixe au sol comme un tableau au mur mais sans une intention esthétique. Mais cela l’empêchera pas de trébucher sur l’obstacle, de déplacer le problème?(boutades, il insiste bien pour montrer comment ce geste n’a pas en premier une vocation esthétique, récit- fiction? peu importe: Elle pourrait entrer tout comme l’expérience du puits dans le champ des exemples examinés par Bergson dans son ouvrage sur la mécanique du rire en 1900. Phénomène intempestif il » n’a pas le temps de regarder où il frappe”, le corps de l’artiste comique dans son univers de création ressemble à « de la mécanique plaquée sur du vivant », ce comique qui intervient quand l’homme ne se conforme pas à l’adaptation du lieu,la circulation fluide:
- .CF:https://www.histoire-image.org/fr/etudes/cubisme-camouflage
- Marcel Duchamp, Door: 11 rue Larrey, 1927
« le sérieux de l’intention » » Les choses respectables sont relatives et contradictoires, mais le fait de respecter ne l’est pas:Vladimir Jankélévitch Champ-Flammarion,
- L’atelier du Duchamp est ce laboratoire d’expérimentations, lieu d’exposition-réflexion, dans la mises en place, en scène des oeuvres dans le lieu, sous le médiat du regard photographique, comme se sera le cas dans la céation du sculpreur Brancusi : elles fusionnent avec lui dans une réciprocité constitutive:Il assemble espace mental ,de création comme semble le montrer cette photographie retouchée ou l’atelier et l’artiste,les oeuvres et la vision ne font plus qu’un: l’artiste et l’atelier ne font plus qu’un,véritable projection,espace mental.
- dans son univers de création ressemble à « de la mécanique plaquée sur du vivant ».
- HENRI CARTIER-BRESSON (1908-2004) Marcel Duchamp dans son atelier, Neuilly-sur-Seine, France, 1968
- Fig. 1. A. Schelcher et A. Omer-Décugis, « La bourse », publié dans Paris vu en ballon et ses environs, 1909.
Depuis la fin du XIXèm il y a basculment du regard et le triomphe de la photographie aèrienne qui se pourauivra chez les futitistes par l’aéro peinture.CF.https://journals.openedition.org/etudesphotographiques/916Un basculement du regardLes débuts de la photographie aérienne 1855-1914 Thierry Gervais
- élevage de poussière devient ici balade entre l’infiniment grand et l’infiniment petit, vue du ciel, vu de loin. Il faut faire un décrassage de l’art..par encrassage changer le mal par le mal et faire entrer l’oeuvre dans le terrain vague de l’art, dans « l’art impur » dirait Baudelaire, dans ce qui pourrait être considéré comme sa ruine. Le merveilleux peut justement surgir de ce regard :La roue de bicyclette sculpture cinétique tournant sur son socle tabouret devient sous le mouvement et la lumière de l’atelier cheminé au coin du feu,divertissement.
- Il y a également ce jeu ce sur grossissement du réel ,son prélèvement fragmentaire comme le montre Ponge dans le parti pris des choses où Brassail posant son regard sur « les choses de rien »* comme dirait le poète par exemple les graffiti. Dans les années 70, Irving PENN avec ses mégots qu’il photographie à la chambre grand format, leur donnera bien après l’urinoir le statut d’oeuvre d’art !..Jacques-André Boiffard surréaliste choisira en 1929 le « Gros orteil » devenu complètement surréaliste avec cette captation en série par de ce fragment insolite et troublant du morceau de corps devenu motif ou cette bouche orifice comme l’urinoir-fontaine polyvalente :Elle peut selon Aristote être source du politique du langage et de la civilité tout comme redevenir selon Artaud naissance du cri, d’une corporéité sauvage retrouvé, d’un primat de la langue longtemps oubliée, Abcd primaire retrouvée chez dada! comme le montrera R: Hausmann: et la poésie dadaïste. Lieu du logos, elle peut être aussi été celui du pathos et de l’éros d’où jaillit l’eau, ou le regard, celle qui castre et qui mange, qui blesse ou procure du plaisir celle qui jouit et fait jouir (Voir les extases de Dali): Saisit isolément et sortant de l’ombre le morceau devient parfois monstrueuse altérité, « inquiétante étrangeté « (heimlich) freudienne, terme découvert en 1919 : ce sentiment effrayant dans ds situations pourtant familières le mouvement d’André Breton en sera très friand Fontaine n’est-il pas à l’instar du Courbet aussi un gros plan Duchamp multiplira les jeux avec les morceaux du corps machine désirante, tuyauterie sous forme de moulages :
le centre de gravité s’en trouve donc désormais changer et c’est peut-être cela ce que nous montre l’expérience du trébuchet: la création envisage le sol ,le plafond puis le coin (malevitch et et les constructivistes russes) comme nouveau lieu , support de création ,exploration déjà entrevu avec Brancusi:Cf:https://www.konbini.com/fr/arts/expo-avec-a-pied-doeuvres-la-monnaie-de-paris-fete-les-40-ans-du-centre-pompidou/ - Cet espace du sol est conçu également comme trésor alchimique d’autant plus dans la rue ainsi déjà le dadaïste K. Schwitters recherchant sa matière artistique dans les débris de la rue nous révélait cette nouvelle figure de la modernité : l’artiste glaneur ou plus tôt encore dans la Paris du XIXèm le chiffonier baudelairien et Benjamin : l’artiste n’est plus seulement celui qui scrute le ciel en pur esprit mais également le voyant qui plonge dans l’inconnu , le voyeur également qui scrute explore les territoires érogènes, « hétérogènes » dirait Georges Bataille du bas, du sombre et du mal, cette part maudite longtemps taboue et scandaleuse refoulée dans le tréfonds de notre psyché
« Ces parties secrètement s’ouvrent à l’ordure nouvelle à la honte liée à leur emploi: »* la psychanalyse influencera beaucoup les pratiques plastiques et littéraires dans l’exploration de la part d’ombre et latente de son monde phénoménologique et existentiel et psychanalytique si longtemps demeuré en négatif: « Tu dois savoir, enseignait l’écrivain sulfureux, en premier lieu que chaque chose ayant une figure manifeste en possède encore une cachée, ton visage est noble, il a la vérité des yeux dans lequel il saisit le monde: Mais tes parties velues sous la robe, n’ont pas moins de vérité que ta bouche » G:Bataille invitait à savoir apercevoir l’envers des choses une autre vérité. Tout comme dans l’urinoir-fontaine -madone tout n’est que » mouvement de va-et-vient de l’idéal à l’ordure de l’ordure à l’idéal »: Comme le cochon au risque du blasphème l’artiste regarde vers le sol ignorant Dieu, vers le fond de la conscience, vers le mal…il retrouve dans le merveilleux une certaine sacralité nouvelle et peut-être oubliée de la terre mer, source chtonienne : petite révolution copernicienne à sa façon: remonter à la source la fontaine mère terre qui veillait en eux.
:cf.histoire de l’oeil: G.Bataille
(Porte-chapeaux)1917 / 1964,Bois
46 x 46 x 29 cm
Inscriptions :Sur une plaque en cuivre gravée : Marcel Duchamp 1964 / Ex / Rrose/ PORTE-CHAPEAU, 1917 / EDITION GALERIE SCHWARZ, MILAN
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.