L’or de Midas

Midas, métamorphoseur métamorphosé (11, 85-193)

Bacchus, escorté de sa troupe de Satyres et de Bacchantes, passe de Thrace en Phrygie. Des paysans phrygiens capturent le Satyre Silène, qu’ils livrent en état d’ivresse à Midas, leur roi. Celui-ci, heureux de retrouver celui qui l’avait jadis initié aux orgies bacchiques, l’accueille généreusement, puis le reconduit auprès de Bacchus. (11, 85-99)

Pour le remercier, Bacchus propose à Midas de se choisir une récompense. Peu avisé, Midas choisit de pouvoir transformer en or tout ce qu’il touchera. Mais ce pouvoir, qui le ravit dans un premier temps, s’avère très vite catastrophique : même les aliments que Midas porte à sa bouche se transforment en or, l’empêchant ainsi de se nourrir. (11, 100-130)

Midas reconnaît et regrette son erreur, et Bacchus le débarrasse de son pouvoir funeste, en lui recommandant d’aller se baigner dans le Pactole, fleuve dont les flots et les champs voisins ont depuis lors la couleur de l’or. (11, 131-145)

Après cela, Midas vécut dans les bois, près du Tmolus. Un jour, le dieu Pan, avec son simple pipeau, eut l’audace de se mesurer au brillant Apollon dans un concours de chant. Désigné comme arbitre, le mont Tmolus donna la palme à Apollon ; seul Midas prit parti pour Pan. Le dieu de Délos châtia Midas pour sa stupidité, en lui donnant des oreilles d’âne. (11, 146-179)

Son coiffeur surprend l’affreux secret du roi, qui cherche pourtant à le dissimuler. Ne pouvant s’empêcher de révéler ce qu’il a découvert, mais craignant la colère de son maître, le serviteur s’isole, creuse un trou auquel il confie son secret à voix basse, avant de le recouvrir de terre. Mais l’année suivante, des roseaux ont poussé à cet endroit et quand le vent les agite, ils parlent des oreilles d’âne de Midas. (11, 180-193)

Nec satis hoc Baccho est ; ipsos quoque deserit agros

cumque choro meliore sui uineta Timoli

Pactolonque petit, quamuis non aureus illo

tempore nec caris erat inuidiosus harenis.

Hunc adsueta cohors, satyri bacchaeque, frequentant,

Cela ne suffit pas à Bacchus ; il abandonne même son pays

et, suivi d’un choeur meilleur, rejoint les vignes de son Tmolus

et le Pactole, qui pourtant en ce temps-là ne chariait pas d’or

et n’éveillait pas l’envie par des plages de sable précieux.

Son cortège habituel de satyres et de bacchantes l’entoure en foule.

11, 90

at Silenus abest ; titubantem annisque meroque

ruricolae cepere Phryges uinctumque coronis

ad regem duxere Midan, cui Thracius Orpheus

orgia tradiderat cum Cecropio Eumolpo.

Qui simul agnouit socium comitemque sacrorum,

Mais Silène n’est pas présent. Il titubait sous l’effet du vin et des ans

quand des paysans de Phrygie l’ont pris, paré de guirlandes,

et conduit ligoté à Midas, leur roi, qui avait été initié jadis

aux orgies bacchiques par Orphée de Thrace et Eumolpe le Cercopien.

Dès que Midas reconnut un ami, un compagnon des rites sacrés,

11, 95

hospitis aduentu festum genialiter egit

per bis quinque dies et iunctas ordine noctes ;

et iam stellarum sublime coegerat agmen

Lucifer undecimus, Lydos cum laetus in agros

rex uenit et iuueni Silenum reddit alumno.

il célébra joyeusement l’arrivée de son hôte,

par une fête qui dura dix jours et autant de nuits.

Déjà, pour la onzième fois, Lucifer avait rassemblé dans le ciel

l’armée des étoiles, quand le roi satisfait arriva en terre de Lydie

et ramena Silène au jeune dieu qui avait été son nourrisson.

11, 100

Huic deus optandi gratum, sed inutile, fecit

muneris arbitrium, gaudens altore recepto.

Ille male usurus donis ait : « Effice, quicquid

corpore contigero, fuluum uertatur in aurum. »

Annuit optatis nocituraque munera soluit

Le dieu, tout à la joie d’avoir retrouvé son père nourricier, offrit à Midas,

présent agréable mais risqué, le libre choix d’une récompense.

Midas, qui allait faire bien mauvais usage de ce présent, dit :

« Fais que tout ce que touchera mon corps se mue en or fauve. »

Liber exauça son souhait et accorda un présent qui nuirait à Midas,

11, 105 Liber et indoluit, quod non meliora petisset.

Laetus abit gaudetque malo Berecyntius heros

pollicitique fidem tangendo singula temptat ;
;

tout en déplorant qu’il n’ait pas formulé un souhait plus sage.

Le héros du Bérécynthe s’en va content, réjoui du malheur qui l’attend,

et, touchant à tout, il vérifie s’il peut avoir foi en cette promesse.

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