Cours 4 La connaissance scientifique

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« [Des penseurs] conçoivent l’homme dans la nature comme un empire dans un empire. Car ils croient que l’homme perturbe l’ordre de la nature plutôt qu’il ne le suit, qu’il a sur ses actions une puissance absolue et n’est déterminé par ailleurs que par lui-même. (…) Mais voici ma raison (…) la nature est toujours la même et a partout une seule et même vertu et puissance d’agir ; c’est-à-dire, les lois et règles de la nature (…), et par suite il ne doit y avoir également qu’une seule et même raison qui permette de comprendre la nature des choses (…). »
Spinoza, Éthique (1677), III, Préface.

 

I) Origine ou commencement de la science cf texte A.Comte

 

TEXTE BAC :

Dans l’état théologique, l’esprit humain dirigeant essentiellement ses recherches vers la nature intime des êtres, les causes premières et finales de tous les effets qui le frappent, en un mot, vers les connaissances absolues, se représente les phénomènes comme produits par l’action directe et continue d’agents surnaturels plus ou moins nombreux, dont l’intervention arbitraire explique toutes les anomalies apparentes de l’univers.

Dans l’état métaphysique, qui n’est au fond qu’une simple modification générale du premier, les agents surnaturels sont remplacés par des forces abstraites, véritables entités (abstractions personnifiées) inhérentes aux divers êtres du monde, et conçues comme capables d’engendrer par elles-mêmes tous les phénomènes observés, dont l’explication consiste alors à assigner pour chacun l’entité correspondante.

Enfin, dans l’état positif, l’esprit humain reconnaissant l’impossibilité d’obtenir des notions absolues, renonce à chercher l’origine et la destination de l’univers, et à connaître les causes intimes des phénomènes, pour s’attacher uniquement à découvrir, par l’usage bien combiné du raisonnement et de l’observation, leurs lois effectives, c’est-à-dire leurs relations invariables de succession et de similitude. L’explication des faits, réduite alors à ses termes réels, n’est plus désormais que la liaison établie entre les divers phénomènes particuliers et quelques faits généraux, dont les progrès de la science tendent de plus en plus à diminuer le nombre

AUGUSTE COMTE COURS DE PHILOSOPHIE POLITIQUE (Cours, 1ère Leçon = Œuvres choisies, p.59-61).

Critique du texte en 3 points

– loi nécessaire

– loi universelle  individu / collectif cf. ethnocentrisme de Lévi-Strauss

– cumul des 3 états chez un même homme comme un peuple

La difficulté d’affirmer trois états successifs pour comprendre la science et son origine est double : d’une part la science n’a pas aujourd’hui su planté la théologie et la métaphysique , d’autre part ces deux disciplines ne correspondent pas à l’idée qu’en donne l’auteur . Ni la théologie ni la métaphysique n’ont pour but d’expliquer de manière rationnelle les phénomènes naturels .

A.Comte fonde le Scientisme (mouvement de pensée) qui suppose la fin de la théologie et de la métaphysique au profit de la seule connaissance scientifique .

Peut-on demander aujourd’hui à la science d’être le modèle :

– de toute connaissance

– mais aussi de toute morale ?

II. La méthode expérimentale

1/ méthode  = raisonnement l’usage bien combiné (théorie) et (expérience) cf méthode de C.Bernard TEXTE 2

Introduction à l’étude de la médecine expérimentale

Observation, hypothèse et vérification

Tout le reste est le raisonnement

Premièrement l’observation n’est pas passive dans la mesure où dès cette étape nous observons le monde , nous construisons un fait scientifique . deuxièmement, l’expérience n’est pas fondatrice de la vérité scientifique.

2/ Théorie et expérience Kant

« si toute notre connaissance débute avec l’expérience, cela ne prouve pas qu’elle dérive toute de l’expérience » Critique de la Raison Pure, Introduction (seconde édition)

TEXTE 1 KANT

3/ La falsifiabilité d’une hypothèse texte 3 de Karl Popper

cf Karl Popper concept de falsifiabilité, TEXTE 3

K.Popper « Seules sont scientifiques les hypothèses ou les théories à qui l’expérience peut donner un démenti indirect ou partiel »

L’objet de la science n’est pas tant les phénomènes de la nature que leurs lois ( Auguste Comte TEXTE 5). Les lois des phénomènes sont des rapports constants et nécessaire par lesquels on peut affirmer le déterminisme de la nature .

 

La connaissance scientifique laisse particulièrement ouverte la question anthropologique et existentielle du sens de la vie :

Il n’y a qu’un problème philosophique vraiment sérieux : c’est le suicide. Juger que la vie vaut ou ne vaut pas la peine d’être vécue, c’est répondre à la question fondamentale de la philosophie. Si je me demande à quoi juger que telle question est plus pressante que telle autre, je réponds que c’est aux actions qu’elle engage. Je n’ai jamais vu personne mourir pour l’argument ontologique. Galilée, qui tenait une vérité scientifique d’importance, l’abjura le plus aisément du monde dès qu’elle mit sa vie en péril. Dans un certain sens, il fit bien. Cette vérité ne valait pas le bûcher. Qui de la Terre ou du Soleil tourne autour de l’autre, cela est profondément indifférent. Pour tout dire, c’est une question futile. En revanche, je vois que beaucoup de gens meurent parce qu’ils estiment que la vie ne vaut pas la peine d’être vécue. J’en vois d’autres qui se font paradoxalement tuer pour les idées ou les illusions qui leur donnent une raison de vivre (ce qu’on appelle une raison de vivre est en même temps une excellente raison de mourir). Je juge donc que le sens de la vie est la plus pressante des questions.

Camus, Le mythe de Sisyphe

 

Notes

1.L’argument ontologique

Argument ontologique, preuve ontologique de l’existence de Dieu. Argument formulé pour la première fois par Saint Anselme, repris par Descartes, puis réfuté par Kant selon lequel du concept d’être parfait, la raison conclut à l’existence de cet être.

2.Vérité de Galilée

La parution du De revolutionibus de Copernic, en 1543, avait bouleversé la cosmologie traditionnelle en substituant l’héliocentrisme au géocentrisme traditionnel. Les théologiens catholiques, mais aussi protestants, rejetèrent la doctrine copernicienne au nom des affirmations bibliques sur le Soleil qui se lève et se couche. La reprise des arguments de Copernic est l’un des motifs du procès qui vaut à Giordano Bruno la mort sur le bûcher le 17 février 1600. L’hypothèse est pourtant à nouveau soutenue dix ans plus tard par Galilée, qui s’appuie pour la première fois sur des observations réalisées avec des lunettes de sa fabrication. En 1616, la condamnation de l’héliocentrisme de Copernic par l’inquisition romaine vise indirectement Galilée, qui est sommé de ne plus aborder le sujet. La publication du Dialogue sur les deux plus grands systèmes du monde où Galilée se risque à démontrer la supériorité du système copernicien entraîne sa condamnation publique en 1633 pour avoir professé une doctrine hérétique, contraire aux Écritures. Galilée est condamné à abjurer ses thèses lors d’une cérémonie humiliante et à vivre en résidence surveillée jusqu’à la fin de sa vie où il pourra cependant poursuivre ses travaux. L’héliocentrisme ne sera officiellement reconnu qu’en 1757 par l’Eglise catholique et il faudra attendre le 31 octobre 1992 pour que Galilée soit réhabilité par le pape Jean-Paul II.  (Source Encyclopédia Universalis, article « Procès de Galilée », J.U. Comby

 

Le progrès de la rationalité scientifique et technique, comme le montre l’engouement vulgaire pour la science ou le positivisme, n’empêche pas de se poser la question des limites de la connaissance. Ces limites sont celles de l’esprit humain, plus exactement de la raison pure, de cette faculté qui nous permet d’atteindre la vérité.

Les limites sont aussi les enjeux techniques et tous les dangers inhérents au développement des pratiques humaines.

Enfin ces limites sont celles du désir de connaissance proprement humain qui n’épuise pas les autres valeurs auxquelles l’homme peut se consacrer : la morale et l’esthétique.