COURS 8 Pour être heureux faut-il vivre au présent ?

TRAVAIL EN DISTANCIEL

le bonheur cf. dissertation art et bonheur

le temps

PARTIE I :

Vanitas, de Philippe de Champaigne / « Vanité des vanités, tout est vanité » dit l’Ecclésiaste / cf Cours sur l’art

1°) Que signifie l’expression « Carpe diem » ? Que veut dire cette devise quant à la vie que nous devons avoir ? Écoutez la chanson Seize the day de Wax Taylor () dont les paroles reprennent https://www.youtube.com/watch?v=wsUKP8d_8q4 cette devise. Connaissez-vous d’autres œuvres artistiques (musique, peinture…) qui reprennent cette idée du « Carpe diem » ?

2°) En quoi la formule « Memento Mori » (utilisée en poésie comme en peinture, en sculpture, par exemple dans le genre des vanités) rejoint-t-elle l’expression « Carpe Diem » ?

3°) Lisez le texte suivant d’Anacréon et répondez aux questions ci-dessous :

« Soyons joyeux, buvons du vin, chantons Bacchus, Bacchus, l’inventeur des danses, Bacchus l’ami des chansons, Bacchus, le compagnon de l’amour, Bacchus, l’amant de Cythérée, lui qui nous donna la joie, lui qui enfanta les Grâces, lui qui charme la tristesse, lui qui endort tous les chagrins. Enfants, apportez-nous un doux mélange de nectar et de miel, et la triste douleur fuira sur l’aile des vents dans les mers orageuses. Prenons cette coupe et chassons les chagrins. Que te servira-t-il de gémir sur tes soucis ? Tu ne peux connaître l’avenir ; la vie des mortels est incertaine. Hé bien ! Je veux être ivre, je veux danser, je veux être couvert de parfums et jouer avec de belles femmes. Qu’ils s’abreuvent de chagrins ceux qui veulent s’en abreuver ; mais nous, soyons joyeux, buvons du vin, chantons Bacchus » (…). Pareille a la roue d’un char, la vie précipite sa course, et dans la tombe il ne reste de nous qu’un peu de poussière. A quoi bon garder ces parfums pour une pierre insensible ? A quoi bon répandre des dons précieux sur la terre ? Pendant que je vis encore, inondez-moi de douces odeurs, couronnez mon front de roses, appelez mon amie. Avant d’aller me mêler aux danses des morts, Amour, je veux chasser les soucis. » (Anacréon, Odes)

  1. Quel type de vie Anacréon nous ordonne-t-il de vivre et pour quelle raison ?

  2. Anacréon est un hédoniste : faites une recherche et expliquez ce qu’est l’hédonisme et le type de vie recommandé d’après les hédonistes.

4°) Lisez le texte suivant de Marc-Aurèle , écouter une vidéo https://www.youtube.com/watch?v=2qecLXMw1nU répondez aux questions ci-dessous :

« Tu es composé de trois parties : le corps, le souffle, la raison. Les deux premières ne t’appartiennent qu’en ce sens qu’il faut t’en occuper ; la troisième seule est véritablement tienne. Écarte donc de toi-même, je veux dire de ta pensée, tout ce que font ou disent les autres, tout ce que tu as fait ou dit toi-même, tout ce que tu redoutes pour l’avenir, tout ce qui te vient du corps qui t’enveloppe ou du souffle que la nature t’a donné avec le reste, mais non de ton libre arbitre, tout ce que roule le tourbillon extérieur qui t’environne, afin que ta force intelligente, détachée de la fatalité, pure et libre, puisse vivre par elle-même en agissant selon la justice, en voulant les événements qui lui arrivent, en disant la vérité ; écarte, dis-je, de ce principe qui te dirige les passions qui lui viennent de certains attachements, et l’idée du temps futur ou le souvenir du passé (…) ; ne te soucie de vivre que l’instant où tu vis, c’est-à-dire l’instant présent, et tu pourras passer tout le temps qui te reste jusqu’à la mort noblement, dans la paix morale, en souriant à ton génie ». (Marc-Aurèle, Pensées pour moi-même)

  1. Marc-Aurèle est un stoïcien : rappelez rapidement les idées principales du stoïcisme à l’aide de la vidéo.

  2. Pourquoi faut-il, pour Marc-Aurèle, se soucier seulement de l’instant présent ? (Faites le lien avec la question précédente). Pour aller plus loin

5°) Lisez le texte suivant de Rousseau et expliquez en quoi il critique les idées développées lors des étapes 1 à 4

« Tout est dans un flux continuel sur la terre. Rien n’y garde une forme constante et arrêtée, et nos affections qui s’attachent aux choses extérieures passent et changent nécessairement comme elles. Toujours en avant ou en arrière de nous, elles rappellent le passé qui n’est plus ou préviennent l’avenir qui souvent ne doit point être : il n’y a rien là de solide à quoi le cœur se puisse attacher. Aussi n’a-t-on guère ici-bas que du plaisir qui passe ; pour le bonheur qui dure je doute qu’il y soit connu. A peine est-il dans nos plus vives jouissances un instant où le cœur puisse véritablement nous dire : Je voudrais que cet instant durât toujours ; et comment peut-on appeler bonheur un état fugitif qui nous laisse encore le cœur inquiet et vide, qui nous fait regretter quelque chose avant, ou désirer encore quelque chose après ? (Rousseau, Rêveries du promeneur solitaire)

6°) Lisez le texte suivant d’Épicure et répondez aux questions ci-dessous :

« Il est également à considérer que certains d’entre les désirs sont naturels, d’autres vains, et si certains des désirs naturels sont contraignants, d’autres ne sont que naturels. Parmi les désirs contraignants, certains sont nécessaires au bonheur, d’autres à la tranquillité durable du corps, d’autres à la vie même. Or, une réflexion irréprochable à ce propos sait rapporter tout choix et rejet à la santé du corps et à la sérénité de l’âme, puisque tel est le but de la vie bienheureuse. C’est sous son influence que nous faisons toute chose, dans la perspective d’éviter la souffrance et l’angoisse (…). Voilà pourquoi nous disons que le plaisir est le principe et le but de la vie bienheureuse. C’est lui que nous avons reconnu comme bien premier, né avec la vie. C’est de lui que nous recevons le signal de tout choix et rejet. C’est à lui que nous aboutissons comme règle, en jugeant tout bien d’après son impact sur notre sensibilité. Justement parce qu’il est le bien premier et né avec notre nature, nous ne bondissons pas sur n’importe quel plaisir : il existe beaucoup de plaisirs auxquels nous ne nous arrêtons pas, lorsqu’ils impliquent pour nous une avalanche de difficultés. Nous considérons bien des douleurs comme préférables à des plaisirs, dès lors qu’un plaisir pour nous plus grand doit suivre des souffrances longtemps endurées » (Épicure, « Lettre à Ménécée »).

  1. Quels sont les différents types de désirs ?

  2. Pour Épicure, faut-il tous les satisfaire pour atteindre le bonheur (« la vie bienheureuse ») ?

  3. Par conséquent, l’atteinte du bonheur est-elle possible seulement en considérant l’instant présent ?

7°) Lisez ce texte de Sartre et répondez aux questions ci-dessous :

« L’homme, tel que le conçoit l’existentialiste, s’il n’est pas définissable, c’est qu’il n’est d’abord rien. Il ne sera qu’ensuite, et il sera tel qu’il se sera fait. Ainsi, il n’y a pas de nature humaine, puisqu’il n’y a pas de Dieu pour la concevoir. L’homme est seulement, non seulement tel qu’il se conçoit, mais tel qu’il se veut, et comme il se conçoit après l’existence, comme il se veut après cet élan vers l’existence?; l’homme n’est rien d’autre que ce qu’il se fait. Tel est le premier principe de l’existentialisme (…). Nous voulons dire que l’homme existe d’abord, c’est-à-dire que l’homme est d’abord ce qui se jette vers un avenir, et ce qui est conscient de se projeter dans l’avenir. L’homme est d’abord un projet (…); rien n’existe préalablement à ce projet (…) et l’homme sera d’abord ce qu’il aura projeté d’être. (Sartre, « L’existentialisme est un humanisme »).

  1. Sartre est un existentialiste : rappelez ce que vous savez de cette doctrine et expliquez ainsi les idées principales du texte  Larousse

  2. Dans quel temps faut-il vivre pour être heureux selon Sartre ?   Pour aller plus loin

8°) Lisez le texte ci-dessous et expliquez pourquoi, pour Sénèque, le passé est le temps qui peut nous rendre le plus heureux.

« La vie se divise en trois temps : ce qui fut, ce qui est, ce qui sera. Des trois, celui que nous vivons est bref, celui que nous vivrons est aléatoire, celui que nous avons vécu, certain. Le passé en effet est un domaine sur lequel la fortune (le hasard) a perdu ses droits, sur lequel aucun libre arbitre ne peut se ré-exercer. Voilà ce que les gens trop occupés laissent perdre : ils ne prennent pas le temps de se retourner sur le passé, et le prennent-ils, le souvenir de ce qu’ils ont à se reprocher leur est désagréable. Aussi est-ce en rechignant qu’ils se remémorent ces temps où ils ont mal agi (…). Personne (…) ne se retourne volontiers vers le passé (…). Or, la mémoire est ce sanctuaire, cette part sacrée de notre temps de vie soustraite à l’empire de la fortune, où tous les hasards humains ont été dépassés, et que ni la pauvreté, ni la crainte, ni les maladies ne sauraient perturber ; elle ne peut être ni troublée, ni volée ; on la possède sereinement et continuellement (…). C’est le fait d’un esprit assuré et tranquille que de flâner parmi toutes les périodes de son existence ; les esprits des gens absorbés, comme s’ils étaient sous un joug, ne peuvent ni se retourner ni regarder en arrière. Aussi leur vie est-elle une course à l’abîme » (Sénèque, La brièveté de la vie).

9°) Lisez le texte suivant de Kierkegaard puis répondez aux questions ci-dessous :

« Le malheureux est toujours absent de lui-même, jamais présent en lui-même. Mais on peut évidemment être absent dans le passé aussi bien que dans l’avenir (…). Il s’agit là des êtres qui vivent dans l’espoir et dans le souvenir (…). Un individu qui espère une vie éternelle, dans la mesure où il renonce au présent, est bien en ce sens un être malheureux (…). Le souvenir surtout est l’élément véritable des malheureux et c’est tout naturel, parce que le passé possède la particularité curieuse d’être fini (…). Les êtres malheureux par l’espoir ne portent jamais, comme les êtres malheureux par le souvenir, cette empreinte douloureuse. Les êtres qui vivent dans l’espoir ressentent toujours une déception moins cruelle. C’est pourquoi le plus malheureux sera toujours à rechercher parmi les êtres malheureux par souvenir » (Kierkegaard, « Le plus malheureux », Ou bien… Ou bien).

  1. Pourquoi peut-on dire que les êtres plongés dans le passé ou dans le futur peuvent sombrer dans le malheur ?

  2. Quels sont, pour le philosophe Kierkegaard, les êtres les plus malheureux ?

10°) Lisez le texte suivant et répondez aux questions ci-dessous :

« L’homme ne s’en tient jamais au temps présent. L’incapacité de l’homme à vivre au présent, ne tient pas tant à une incapacité de vivre l’instant qu’à une attitude de fuite : l’homme se noie dans le souci du lendemain, dans les projets, pour n’avoir pas à regarder le caractère misérable de son existence. Nous ne nous tenons jamais au temps présent. Nous anticipons l’avenir comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours ; ou nous rappelons le passé, pour l’arrêter comme trop prompt : si imprudents, que nous errons dans les temps qui ne sont pas nôtres, et ne pensons point au seul qui nous appartient (…). C’est que le présent, d’ordinaire, nous blesse. Nous le cachons à notre vue, parce qu’il nous afflige ; et s’il nous est agréable, nous regrettons de le voir échapper. Nous tâchons de le soutenir par l’avenir, et pensons à disposer les choses qui ne sont pas en notre puissance, pour un temps où nous n’avons aucune assurance d’arriver. Que chacun examine ses pensées, il les trouvera toutes occupées au passé et à l’avenir. Nous ne pensons presque point au présent ; et, si nous y pensons, ce n’est que pour en prendre la lumière pour disposer de l’avenir. Le présent n’est jamais notre fin : le passé et le présent sont nos moyens ; le seul avenir est notre fin. Ainsi nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre ; et, nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais. » (Pascal, Pensée)

  1. Quelles idées de Pascal, vues au chapitre 1, vous rappelez-vous ? Quel est le lien avec le texte suivant ?

  2. Pourquoi ne vivons-nous pas dans le présent pour Pascal et pourquoi est-ce paradoxal ?

  3. Est-il vraiment possible d’être heureux pour Pascal ?

11°) Lisez le texte ci-dessous de Nietzsche et regardez la vidéo suivante jusqu’à la minute 7,25 (https://www.youtube.com/watch?v=iGLbCkCF8_0&t=29s&fbclid=IwAR0HXuzMiBXxegdTLt_1zz2cNtKu_tCIydL1V_zwjZNZG-FApo7XqeGKjdQ), puis répondez aux questions :

« Que dirais-tu si un jour, si une nuit, un démon se glissait jusque dans ta solitude la plus reculée et te dise : « Cette vie, telle que tu la vis maintenant et que tu l’as vécue, tu devras la vivre encore une fois et d’innombrables fois ; et il n’y aura rien de nouveau en elle si ce n’est que chaque douleur et chaque plaisir, chaque pensée et chaque gémissement, et tout ce qu’il y a d’indiciblement petit et grand dans ta vie, devront revenir pour toi et le tout dans le même ordre et la même succession – cette araignée-là également, et ce clair de lune entre les arbres, et cet instant-ci et moi-même. L’éternel sablier de l’existence ne cesse d’être renversé à nouveau – et toi avec lui ô grain de poussière de la poussière ! (…). Si cette pensée exerçait sur toi son empire, elle te transformerait, faisant de toi, tel que tu es, un autre, te broyant peut-être : la question posée à propos de tout et de chaque chose : « Voudrais-tu ceci encore une fois et d’innombrables fois ? » pèserait comme le poids le plus lourd sur ton agir ! Ou bien ne te faudrait-il pas témoigner de bienveillance envers toi-même, et la vie, pour ne désirer plus rien que cette dernière, éternelle confirmation, cette dernière éternelle sanction ? » (Nietzsche, Le Gai Savoir)

  1. Quelle est la signification traditionnelle de la formule « l’éternel retour » et que signifie-t-elle pour Nietzsche ?

  2. Quel rapport devons-nous avoir au temps, selon Nietzsche, pour être heureux ?

  3. En quoi le film « Un jour sans fin » illustre-t-il la doctrine de l’éternel retour de Nietzsche ?

PARTIE II :

Les différents supports proposés plus haut pourraient être utilisés, dans l’ordre, dans un plan répondant au sujet « Pour être heureux, faut-il vivre au présent ? » ; redonnez l’idée principale de chaque référence, en répondant directement à ce sujet (chaque support peut indiquer un titre de sous-partie ou une objection entre deux grandes parties) :

Support

Idée centrale répondant au sujet (titre de la sous-partie ou argument)

« Carpe Diem » (1°)

« Memento Mori » (2°)

Texte d’Anacréon (3°)

Texte de Marc-Aurèle (4°)

Texte de Rousseau (5°)

Texte d’Épicure (6°)

Texte de Sartre (7°)

Texte de Sénèque (8°)

Texte de Kierkegaard

Texte de Pascal (10°)

Texte de Nietzsche + vidéo (11°)