Entrevue avec le réalisateur Jimmy Laporal-Trésor

Entrevue avec Jimmy Laporal-Trésor, réalisateur du film « Les Rascals », par Johane Hulin et Camille de Lavergne

Dans le cadre du label CaMéo au cinéma de Mérignac, des élèves du lycée Fernand Daguin ont assisté à une séance, le 27 janvier 2023, du film Les Rascales, de Jimmy Laporal-Trésor, sorti en 2023. Les élèves ont ensuite eu l’occasion de débattre avec le réalisateur et de lui poser des questions.

Photo : Jimmy Laporal-Trésor, Camille de Lavergne et Johane Hulin (tous droits réservés)

Pourquoi s’être lancé dans le cinéma ? 

J’ai toujours aimé raconter des histoires. Au départ je faisais des petites BD, et ensuite je me suis lancé dans le jeu de rôle, surtout comme maître de jeu. J’écrivais des scénarios et je me renseignais sur les univers que je voulais créer. Un autre aspect important du jeu de rôle, est de réussir à tenir en haleine les joueurs. C’est tout cela qui m’a donné le goût pour la narration. La création d’un lien avec le spectateur est essentielle pour moi. Au départ, je me suis lancé dans le cinéma comme scénariste. Après j’ai voulu raconter des histoires autrement, à travers des images.

Dans ce film, justement, qu’avez vous mis en place pour capter l’attention du spectateur ?

J’ai tout de suite cassé le 4e mur. Avec cette première scène qui change soudainement de ton et où la caméra est agressée, malmenée comme Rico l’est : le spectateur est impliqué. Après ce moment, je replace le spectateur dans une situation de confort, pour qu’il baisse sa garde. J’ai besoin qu’il soit désarmé au moment de la scène du disquaire. Mon travail est toujours de placer le spectateur au bon endroit, émotionnellement, par rapport à ce qui se passe. Il y aussi la scène du fourgon de police : le personnage est en impuissance total. La caméra est, elle aussi, coincée dans le van : le spectateur est impuissant. Il ressent donc la même détresse que Mandale.

Le personnage de Rudy attire l’attention, on voit qu’il est différent, il a une sensibilité… Pourquoi avoir choisi de faire un personnage qui casse les codes du dur à cuir ?

Dès le départ, avec mes co-scénaristes, on concevait l’histoire comme une tragédie antique : un personnage est condamné par le sort. On a ici un personnage qui n’a pas sa place dans sa famille, ni dans sa bande de copains, ni dans la société. Il est déjà condamné par essence à ne pas avoir de place dans ce monde. J’ai construit Frédérique et Rudy en miroir : Frédérique, elle, épouse tout de suite la réponse violente mais regrette plus tard et essaie de faire le chemin inverse. Rudy, lui, essaie de rejeter cette violence au maximum mais finalement y succombe. C’est la tragédie sociétale.

Au niveau du casting aviez-vous des attentes particulières ?

Je n’avais pas de critère précis en tête pour trouver des acteurs, à part peut-être l’oralité. Les jeunes des années 80 s’exprimaient différemment des jeunes d’aujourd’hui, il fallait retrouver des personnes en capacité de s’exprimer avec ce ton, qui puisse nous rappeler l’ancien temps. J’avais cette envie de retrouver ce phrasé neutre de l’époque, proche de celui de Souchon, avec des phrases bien construites. Mon but est de dépayser et de faire vivre au spectateur un véritable voyage dans le temps. J’ai écarté de nombreux comédiens talentueux, car ils parlaient trop comme les jeunes d’aujourd’hui. Je cherchais bien sûr, de bons acteurs avec des individualités fortes, mais je cherchais aussi une alchimie naturelle entre eux lorsqu’on les faisait jouer ensemble.

Est-ce qu’il y a un film, un livre, un auteur qui vous à inspiré pour ce film, au niveau des plans par exemple ?

Deux films m’ont vraiment inspiré, surtout pour la direction artistique du film : « Tchao Pantin » de Claude Berri, tourné en 83, qui a été un des rares réalisateurs à montrer Paris différemment de la ville qu’on avait l’habitude de voir à l’écran. Dans les films des années 80, on retrouve un Paris clinquant, brillant, qui nous ramène à des années 80 sur lesquelles on à tendance à fantasmer. Berri montre au contraire une ville sale, sombre, poisseuse, beaucoup plus proche de la réalité de l’époque. Je me suis inspiré des éclairages, de ses lumières rouges et vertes, ainsi que de l’éclairage extérieur. A l’époque, en ville, les lumières étaient plus blanches, nous avons donc du changer les ampoules pour retrouver l’atmosphère et l’ambiance des années 80.

Dans le deuxième film, « Moi Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée » d’Uli Edel, je me suis inspiré de l’image froide et bleutée. Nous avons donc utilisé ce filtre bleu pour refroidir l’image. Les films des années 80 sont généralement haut en couleur, avec des images très chaleureuses, j’avais vraiment envie de casser ce fétichisme.

A l’aide de quoi avez-vous  pu recréer les années 80 ?

Pour les vêtements, c’était le plus simple, il a simplement suffi de retrouver des témoignages photographiques dans des livres, des catalogues de l’époque ou encore des sites qui permettent de retrouver de vieilles photos de classe. Les reportages, ou les images de l’INA nous ont aussi beaucoup aidés, notamment pour les costumes et les coiffures. De même pour les décors, il faut des références qui permettent d’avoir une idée de la topographie des lieux des années 80. Il y a ensuite un gros travail de repérage pour trouver des bâtiments et un travail de crédulité, pour qu’ils paraissent un maximum authentique.

Interview Monsieur Champeaud, professeur au lycée Daguin et à Sciences Po Bordeaux.

Nous avons interrogé Monsieur Champeaud, professeur au lycée Daguin et à Sciences Po Bordeaux.

1°Q: Quelle est votre formation ?

“J’ai fait des études d’histoire qui m’ont permis d’avoir un doctorat, une thèse en BAC +8 et par la suite je suis devenu professeur. En 2014, Sciences Po Bordeaux m’a proposé de faire des cours d’histoire et de culture générale en anglais. Puis peu à peu, je me suis investi dans le programme JPPJV.”

2°Q: Quelles sont vos fonctions à Sciences Po ?

“En 2018 j’ai obtenu une décharge qui me permet de donner des cours au Lycée Daguin pour la section européenne la moitié de mon emploi temps. L’autre moitié, je donne des cours à Sciences Po d’histoire et de culture générale en anglais et où je m’occupe également du centre de ressources qui est dédié aux élèves et aux professeurs de JPPJV. Je suis aussi coordinateur pédagogique des “cordées de la réussite” (tutorats pour préparer le concours à Sciences Po).”

3°Q:  Pourquoi conseilleriez- vous à des élèves d’intégrer Sciences Po Bordeaux ?

“Tout d’abord c’est une structure à taille humaine contrairement à l’université. Il y a un double système de cours ; en amphithéâtre à 200/250 mais la plupart du temps ce sont des cours à effectif réduit. C’est le cas des conférences de méthode qui représentent plus de la moitié de l’emploi du temps et qui se font dans des classes de 20 étudiants. On reste donc dans un cadre dans lequel on s’occupe personnellement des étudiants et on les reçoit une fois dans l’année individuellement pour les aider sur certains points.

Également, c’est une école pluridisciplinaire qui permet d’être opérationnel dans plusieurs matières et ainsi de se laisser le temps de choisir vers quel domaine on veut s’orienter.

S’ajoute à cela, l’internationalisation qui fait qu’il y a beaucoup d’étudiants étrangers qui viennent étudier à l’institut ce qui crée une grande ouverture d’esprit.  

Enfin, le niveau de l’école permet d’être bien formé et de viser l’excellence. Cela se traduit par un taux d’employabilité élevé à la sortie de l’école.”

4°Q : Que pensez-vous de l’année de mobilité ?

« Personnellement, j’ai eu la chance de faire une année à St Andrews en Ecosse dans l’une des meilleures écoles de Grande Bretagne et cela m’a permis d’être plus autonome et de devenir bilingue qui m’a été utile lors de mon retour pour mes cours d’histoire en anglais. C’est donc fondamentale. Tous les étudiants reviennent changés de leur année de mobilité et parfois il est même dur pour eux de revenir ! 

Sciences Po Bordeaux cadre extrêmement bien cette mobilité, il propose un grand nombre de destinations et fournit des aides et un suivi des étudiants lors de ce voyage.”

Quel conseil pourriez-vous donner à un élève qui souhaite intégrer Sciences Po Bordeaux ?

“ Tout d’abord participer à la préparation JPPJV  (créée en 2005) est une grande chance car cela permet d’optimiser l’entrée à l’Institut. Au-delà de cela, il faut avoir un dossier scolaire solide pour passer l’admissibilité. Ensuite il faut bien se préparer à l’oral et les professeurs de JPPJV vous aideront pour cela. Et ce que vous pouvez faire vous de votre côté c’est de s’ouvrir le plus possible à l’international, à l’actualité (locale, régionale,nationale …).

Cela vous aidera pour vos spécialités au lycée mais aussi pour l’oral d’entrée à l’institut.

Enfin il est important de bien connaître Sciences Po Bordeaux, de bien se renseigner sur les Masters qui peuvent éventuellement vous intéresser.”

Merci pour vos réponses.

Gai Louise.

Interview d’Emilie Mistrot, ancienne élève de la prépa JPPJV de Daguin, et d’AbigaïlChabane, toutes deux élèves de première année à Sciences Po Bordeaux

30 novembre 2022
Visite de la prépa JPPJV à Sciences Po Bordeaux

Question – Quel formation suivez-vous ?
Emilie – Nous sommes en première années à Sciences Po Bordeaux, en cursus général.


Q – Quel master aimeriez-vous faire dans trois ans ?
E – J’ai quelques idées mais ce n’est pas ce qui est demandé pour l’instant. Comme vous
pouvez le voir, aujourd’hui il y a le forum international des destinations parce que l’enjeu
principal en première année est de savoir ce que l’on va faire l’année prochaine (la deuxième
année à SP BDX est réalisée à l’étranger). C’est important dans la mesure où l’université et le pays
que l’on va choisir, et le cursus que l’on va suivre là-bas, déterminent pas mal notre poursuite
d’étude. Pour ce qui est des masters, il nous est demandé de choisir en troisième année. Tout d’abord, il faut savoir qu’en troisième année, nous devons écrire un mémoire, qui est généralement lié au master que l’on veut faire dans la mesure où nous devons choisir nous-
même le sujet.

Abigaïl – Par contre, il faut savoir que pour préparer l’oral d’admission à SP BDX, il faut déjà
avoir une idée du master que vous voulez, vous devez montrer que vous êtes vraiment
intéressés par cette école. Ça ne détermine en aucun cas votre poursuite d’étude et vous
pouvez tout à fait changer d’avis par la suite.
E – Oui, il va vous être demandé d‘avoir une idée de master à l’oral. Pour ma part, j’en ai
présenté plusieurs à l’oral, j’ai dit que je n’étais pas sûre et que j’hésitais, mais que ceux-ci
conduisaient tous plus ou moins au même secteur de métier, car j’aimerai travailler à
l’international.
Q Quels sont vos projets d’avenir après Sciences Po Bordeaux ?
E – Alors pour l’instant, ce serait à l’international, dans les ambassades, mais plutôt côté
culturel, par exemple attachée culturelle dans une ambassade française afin d’organiser des
événements, comme des expositions, qui valorisent la culture française à l’étranger.
A – Pour ma part, je suis plus attirée par le domaine de la politique nationale. Je ne veux pas
exactement faire de la politique mais être dans le milieu : aider les parlementaires ou être
parmi les fonctionnaires qui gèrent en interne.
Q – Que pensez-vous de la charge de travail à Sciences Po Bordeaux ?
E – Honnêtement, c’est plus important que ce à quoi je m’attendais. Le volume horaire est
inférieur à ce à quoi on pourrait s’attendre mais c’est compensé par la charge de travail qui
est quand même assez importante.
A – Après l’année de terminale, qui était assez lourde, j’ai pensé que la première année à SP
BDX serait plus légère, alors que finalement la charge de travail est assez équivalente, voire
même supérieure à celle du lycée. En ce moment, on prépare les partiels, et c’est un peu
comme si on préparait un mini-bac.
E – Ce à quoi il faut s’attendre aussi, c’est que le fonctionnement change beaucoup. Je n’irai
pas jusqu’à dire que c’est comme une prépa parce que c’est différent et moins intense. Par
exemple, on a des examens certains samedis matin, ce qui peut surprendre. Également, il faut
prendre en compte que la notation est totalement différente, mais ça c’est commun à toutes
les études supérieures. On se retrouve tout à coup avec des notes plus basses, ce qui peut
faire un choc parce qu’on avait pour la plupart des excellentes notes au lycée. Mais très vite,
les professeurs nous disent de ne pas nous inquiéter car c’est normal. Ce qui change aussi,
ce sont les cours en amphithéâtre, nous avons également des cours en plus petits groupes de
20, qui ressemblent un peu aux TD à la fac, et dans lesquels la moyenne est annuelle, ce qui
permet d’avoir le temps de se rattraper si on a une mauvaise note.

Q – Et comment est la vie étudiante ?
E – Alors pour ce qui est de l’ambiance, elle est incroyable, comme vous pouvez le voir, même
s’il n’y a pas la fanfare tous les jours. La vie associative surtout est extrêmement diversifiée.
Le nombre d’associations est tellement énormes que l’on peut faire tout ce que l’on veut. Pour
ma part, je fais partie de l’association GoodMorningAsia, où nous valorisons les actualités de
l’Asie et toutes les semaines, nous publions les news.
Merci pour vos réponses.

Juliette Ducros et Flore Chauvin Manca

« La liberté de chosir, l’engagement féministe » par Marine Legrand

La liberté de choisir, l’engagement féministe

  Le 15 novembre dernier, à l’occasion du Festival International du Film d’Histoire de Pessac, nous sommes allés voir deux films en rapport avec le thème “La liberté de choisir, l’engagement féministe” proposé cette année. Nous avons commencé notre journée par le documentaire Gisèle Halimi, la cause des femmes co-écrit par Jean Yves Le Naour et Cédric Condon. Ce documentaire nous a permis, à travers différentes images d’archives, d’en apprendre davantage sur la vie de cette femme engagée, sur ce qu’elle a incarné et défendu.

En effet, aujourd’hui peu connue de notre génération, Gisèle Halimi a pourtant eu un rôle majeur dans la défense des droits des femmes. Née dans une modeste famille juive de Tunis, dès l’âge de 8 ans elle décide d’entreprendre une grève de la faim car elle ne supportait plus les coutumes familiales à travers lesquelles elle était contrainte, en tant que femme, de servir les hommes de la maison, que ce soit son père ou ses frères. Cette injustice l’a poussée à devenir avocate. Dans l’exercice de ses fonctions, elle a notamment aidé beaucoup d’hommes et de femmes, en majorité provenant du FLN (Front de libération nationale), emprisonnés par les Français lors de la guerre d’Algérie qui se retrouvaient dans des situations remettant en cause les droits de l’Homme. 

Gisèle Halimi a, un peu plus tard, œuvré à la défense des femmes, en France, notamment celles victimes de viols et de poursuites pour avoir avorté illégalement car cela était interdit avant la loi Veil de 1975. Elle a travaillé main dans la main avec de nombreuses grandes figures féministes telles que Simone de Beauvoir ou Simone Veil. Ses affaires les plus connues sont les procès de Bobigny (1972) au sujet de l’avortement d’une jeune femme qui avait été violée et le procès d’Aix-en-Provence (1978) concernant un viol collectif sur deux touristes belges. 

En 1981, avec des ambitions féministes, elle se fait élire en tant que députée sous François Mitterrand. Ne pouvant mener aucun de ses projets dans une Assemblée trop patriarcale, elle a démissionné trois ans plus tard. Néanmoins, elle a continué en tant qu’avocate à lutter pour les droits des femmes jusqu’à qu’elle s’éteigne en 2020. 

A la suite de ce documentaire qui a été à la fois enrichissant et inspirant, nous avons eu la chance de pouvoir échanger avec le réalisateur, Cédric Condon. Cet échange nous a notamment permis d’en apprendre davantage sur la motivation à produire ce documentaire, le temps passé à faire des recherches dans les archives ainsi que les modalités des rencontres des proches de Gisèle Halimi comme deux de ses trois fils que nous pouvons voir témoigner à différents passages du documentaire. Cette rencontre s’est terminée par une question adressée au réalisateur à laquelle chacun était impatient de connaître la réponse : comment être féministe en tant qu’homme ?

     Après une matinée enrichissante, nous avons poursuivi, en début d’après-midi par le film L’une chante, l’autre pas d’Agnès Varda. Toujours dans le thème du féminisme, celui-ci nous a plongés cinquante ans en arrière, dans les années 70. Pauline, 17 ans, va à une exposition de photographies représentant des femmes. Elles lui semblent attristées. Sur l’une d’elle se trouve Suzanne, la femme du photographe accompagnée de ses deux enfants. Les deux jeunes femmes vont rapidement se lier d’amitié notamment lorsque Pauline va aider financièrement Suzanne à avorter. Suite au suicide de son mari, Suzanne part vivre chez ses parents à la campagne et les deux jeunes femmes se perdent de vue. Dix ans plus tard, elles se retrouvent par hasard devant le tribunal de Bobigny devant lequel Pauline manifeste pour les droits des femmes. Ce passage marque un lien direct avec le documentaire sur Gisèle Halimi puisque ce procès a été un des plus importants de sa carrière, l’enjeu était de défendre une jeune femme, Marie-Claire Chevalier, qui avait illégalement avorté suite à un viol. Dans ce film, l’engagement féministe est notamment représenté par Pauline qui a elle-même avorté à Amsterdam, et qui, avec son groupe, sillonne la France pour chanter des chansons engagées au nom des droits des femmes. Pauline et Suzanne sont deux femmes qui, à leur manière, se sont engagées pour leurs droits et qui peuvent inspirer bon nombre de femmes et jeunes femmes comme la fille de Pauline qui, à la fin du film, se rapproche de la majorité.

     Ainsi, à travers ces deux films, nous avons pu découvrir des femmes qui se sont engagées toute leur vie de manière différente et qui ont lutté au nom des droits et des libertés afin d’obtenir davantage de parité. Notre rencontre nous a également permis d’échanger sur la manière dont chacun peut être féministe peu importe son genre. 

Marine LEGRAND Terminale G02

Le 6 décembre 2022

Liberté d’expression et de la presse : Rencontre avec Sakher EDRIS

9 juin 2021

Rencontre avec Sakher EDRIS

Dans le classement mondial de la liberté de la presse en 2020, le Syrie figure à la 174ème position (sur 180).
Aujourd’hui au Lycée Fernand Daguin à Mérignac, le journaliste syrien anglophone Sakher EDRIS vient converser avec les élèves de la préparation à Sciences PO Bordeaux JPPJV.
Rencontre.

Avant toute chose, il est primordial de présenter la Syrie. Pays d’Asie de l’Ouest situé sur la côte orientale de la Mer Méditerranée, sa capitale est Damas.

En quelques mots, Sakher EDRIS nous présente son pays…

La Syrie est un pays riche d’histoire. Son sol a été foulé par maintes civilisations : Sumériens, Chaldéens, Assyriens, Cananéens, Babyloniens…

Mais depuis 2011, la guerre civile syrienne cause des ravages. Celle-ci débute dans le contexte du Printemps arabe par des manifestations majoritairement pacifiques en faveur de la démocratie contre le régime baasiste. Ces protestations pacifiques durent 6 à 7 mois, mais elles sont rapidement brutalement réprimées, et le gouvernement libère des extrémistes de prison. Le conflit dégénère alors violemment. Depuis, des milliers de victimes ont été recensées. De nombreux massacres, crimes de guerre et crimes contre l’humanité ont été commis, principalement par le régime syrien et l’État islamique.

Depuis 1970, c’est donc la famille El-Assad qui possède le pouvoir. Le fils de Hafez el-Assad, Bachar el-Assad, lui succède en 2000. Il est encore à ce jour au pouvoir, et a été « réélu » le 26 mai 2021…

Le journaliste rappelle ironiquement en quelque mots l’absurdité de ce vote.

« No one dares put « no » under the eyes of the political police. »

Sakher a vécu de très près la guerre civile. Son père, opposant de Hafez el -Assad, a été emprisonné pendant 18 ans ainsi que son oncle, le père de sa mère.

« Just imagine. How many years you lose just because of your political opinion! »

Comment les journalistes syriens ont fait face à cette situation critique ?

Sakher : « Une association de journalistes syriens a été créée. Ce sont des médias et journalistes libres dont la plupart vivent en exil. C’est ce qu’on appelle la diaspora. En 2017 cette association a intégré la Fédération Internationale des Journalistes (FIJ), dont le siège est a Bruxelles. Ce partenariat a agacé le gouvernement syrien. L’AJS a été exposée à beaucoup de tentatives de corruption pour essayer de contrôler les leaders de cette association, les soudoyer pour avoir le contrôle des médias. »

« The UN stopped counting. Entire families, entire names disappeared. »

Qu’en est-il des journalistes syriens à l’heure actuelle ?

Sakher : « Officiellement, entre 2011 et 2019, 455 professionnels des médias ont été tué, dont 314 par le gouvernement syrien lui-même. Il y a aussi eu 1082 violations contre les journalistes entre 2011 et 2017. Et encore, ce ne sont que les chiffres officiels. En réalité, il y en a encore plus. »

« People are tortured and killed. »
« What we really want ? To enjoy voting, electing. »

Pensez-vous qu’un jour les Syriens pourront bénéficier à nouveau de leur liberté ?

Sakher : « Oui, un jour, ils pourront. Tant qu’il y a des personnes dans la révolution, il y a de l’espoir. Maximilien Robespierre, un des pères de la Révolution Française, est finalement devenu un extrémiste pendant la période de la Terreur. Et que lui est-il arrivé ? Il a été tué. »

Comment peut-on continuer de se battre pour la liberté d’expression depuis l’Europe ?

Sakher : « Par des moyens pacifiques, comme des campagnes de sensibilisation. Le fait d’en parler est déjà une aide conséquente. Avertir les personnes de ce qu’il se passe est primordial. »
Le journaliste Edris est lui-même impliqué dans une campagne de sensibilisation pour la cause des prisonniers politiques syriens.
« We don’t want to fight with weapons. Fight by voices and peace. »

Pouvez-vous nous parler de votre parcours un peu plus en détails ?

Sakher : « Je suis né en Syrie. En 1974, ils ont pris mon père alors que je n’avais que 1 an. Imaginez combien d’années vous perdez jute à cause de votre opinion politique ! Je suis parti juste après mon bac. Partir, ce n’est pas compliqué en soi. C’est le régime qui vous met sous pression et qui rend les choses compliquées. J’ai travaillé à Dubaï, où j’ai écrit contre le régime. Puis j’ai voulu retourner à Damas. Mais un de mes collègues s’est fait emmener à l’aéroport, et on ne l’a jamais revu. Finalement, je me suis rendu en France. »

Pourquoi avoir choisi de venir à Paris ?

Sakher : « J’ai agi vite, en seulement quelques jours. C’était très difficile. Si ce n’était que moi, je serais allé au Royaume-Uni, mais les choix étaient très limités. Je suis donc allé à Paris, la capitale, une ville cosmopolite. C’était plus facile pour moi d’y parler anglais. »

Les fake news est un sujet qui refait souvent surface. Qu’en pensez-vous ?

Sakher : « Il existe plusieurs types de fake news. Il y a l’« appât à clics » des articles avec des titres vendant des informations extraordinaires pour de l’argent. C’est souvent risible, par exemple : « Une vache pleure en se rendant à l’abattoir ». Il y a aussi la propagande : quand on voit une star ou une personnalité qu’on apprécie utiliser un certain produit, on sera tenté de l’acheter. Mais parfois les fake news sont plus sournoises : le journalisme « biaisé » est un danger car les journaux concernés ne s’expriment pas vraiment, ils ne sont pas neutres. Indirectement, ils soutiennent des personnes en concurrence avec d’autres, ce n’est pas objectif. Enfin, certains journaux arborent de gros titres mensongers, et comme les lecteurs ne vont pas forcément plus en profondeur, ils ne retiennent que ça. »

Que conseillez vous pour éviter d’être trompé par les fake news ?

Sakher : « Il faut être attentif aux mails qu’on reçoit, et aux sources. De plus, ce n’est pas parce que des médias ont une certaine renommée qui en principe garantit l’absence de fake news qu’il ne peut pas en avoir. Il existe des sites pour vérifier l’authenticité des informations que l’on consulte, comme factcheck.org. »

How to spot fake news ?

Sakher nous rappelle l’importance de se poser les bonnes questions pour ne pas se laisser piéger et lutter contre la désinformation.

« Fake news cannot be underestimated. They kill, as with Samuel Patty »

Des conseils pour ceux qui envisagent des études de journalisme ?

Sakher : « Lisez beaucoup. Essayez de savoir un peu de tout sur tout, il faut être curieux. »

« People who tell the truth are under attack. »
« In journalism, you have to ask, not to be asked »
« Don’t compromise your values »
« Freedom is a responsibility. You cannot insult people and say : it’s my freedom »

Cette intervention, c’était l’occasion d’ouvrir les yeux sur ce problème majeur et malheureusement croissant dans certains pays : le manque de liberté d’expression, et plus particulièrement le manque de liberté de la presse. Un des grands enjeux contemporains est de sensibiliser les personnes, mais aussi de s’informer sur ce fléau qui est une atteinte à la liberté de milliers de personnes, et pas seulement en Syrie, mais aussi en Iran, en Libye ou au Yémen par exemple. C’était aussi l’occasion de rappeler l’importance de vérifier ses sources pour ne pas croire ou diffuser des informations erronées.

Mais plus que de porter un nouveau regard sur le monde extérieur, Sakher nous a appris à remettre en question notre propre façon de penser, sorte d’écho à l’étude des Essais de Montaigne cette année. En effet, si la Syrie occupe la 174 ème place sur 180 dans classement mondial de la liberté de la presse, la France est en 34 ème position, ce qui peut paraître étrange pour un pays qui a fait de sa devise la liberté. Reporters sans frontières explique cette position dans le classement entre autres par les violences récurrentes contre les journalistes pendant les manifestations. Plusieurs journalistes ont été blessés par des tirs de LBD (lanceurs de balles de défense), de grenades lacrymogènes ou par des coups de matraque. D’autres ont été la cible d’interpellations arbitraires ou ont vu leur matériel de reportage saisi. Une bien mauvaise position pour le soi-disant pays des droits de l’Homme… Voir de tels outrages à la liberté de la presse dans son propre pays nous a donné envie d’agir, de La Liberté de la presse dans le monde en 2018, selon Reporters sans frontières passer à l’action. En libérant la parole et par des actes citoyens réfléchis, nous pouvons
faire avancer les choses.

Un grand merci à Monsieur Sakher EDRIS, mais aussi à Monsieur Panko, à la mairie de Mérignac et plus particulièrement à Monsieur Loïc Farnier, ainsi qu’à La Maison des Journalistes.

Photos : Lican Maëna
Rédaction et mise en page : Moreno Anaëlle

9 juin 2021

Scarface, Brian De Palma

L’intrigue se déroule en 1980, époque durant laquelle le premier ministre de Cuba, Fidel Castro, accorde la liberté d’expatriation à ceux qui en font la demande et autorise ainsi les opposants au régime communiste qui le souhaitent à quitter l’île.  C’est ainsi que anise les Etats Unis offrirent l’asile politique aux immigrés de Cuba opposés au communisme, et environ trois mille bateaux partirent des Etats-Unis pour ramener ces Cubains dépouillés par Castro.

Ce dernier saisit l’occasion pour obliger les propriétaires des bateaux à ramener avec eux les délinquants devenus indésirables dans l’île. Ainsi, sur les 125 000 réfugiés politiques, 25 000 avaient un casier judiciaire dont Tony Montana et ses complices.

Tony Montana, réfugié cubain en Floride, est parti de rien. Avec son bras droit, Manny Lopez, il gravit les échelons au sein de la mafia et se voit accorder toujours plus de responsabilités. Il n’hésite pas à tuer son propre patron et à se marier avec sa femme devenue veuve, Elvira. Mais son besoin de devoir tout contrôler, y compris ses proches, conduit à leur rupture. Rendu fou par le pouvoir, l’argent et la drogue, il donne la mort à plusieurs de ses proches comme sa sœur et Manny, avant de finir lui-même assassiné.

Habituellement, je n’aime pas trop les films violents mais j’ai trouvé Scarface très bien réalisé. Tony, parti de rien au départ, réalise une ascension fulgurante vers la richesse, mais s’enfonce en même temps au plus profond des ténèbres. Après avoir tué son patron, il a tout ce qu’il voulait et semble être heureux. Il épouse Elvira, entretient de très bonnes relations avec Sosa. Il a de bons contacts sur qui compter, offre un salon de beauté à sa sœur Gina, les affaires sont florissantes. Mais il ne respecte pas une des deux règles principales énoncées au début du film par Franck : ne jamais être  dépendant de sa propre camelote. Quand il a enfin acquis tout ce qu’il voulait : l’argent, le pouvoir, une superbe villa et la femme de ses rêves, c’est comme si ses désirs ne s’étaient pas assouvis. Il est pathétique et vulgaire, si bien qu’Elvira lui dira qu’elle préférait son ancien mari Franck Lopez, personnage pourtant ennuyeux. Il  parle d’argent à longueur de journée, devient repoussant. C’est un tueur et délinquant mégalomane qui détruit tout ce qui lui est cher autour de lui.

Deux moments m’ont particulièrement marqué. Le premier, c’est sa rupture violente au restaurant avec Elvira. Il est méprisant avec elle, il lui manque terriblement de respect, l’insulte de junkie alors que lui même est toxicomane. Il lui reproche de ne pas pouvoir avoir d’enfant avec elle, que c’est de sa faute car elle est « pourrie de  l’intérieur ». Mais Elvira s’indigne : quel père ferait-il ? Un pauvre drogué, qui ne pourrait même pas les emmener à l’école !

Elle est désespérée, ne reconnaît plus en Tony l’homme qu’elle pensait aimer et qui lui avait promis une vie heureuse. Quand elle part en le quittant, raccompagnée par Manny, la nouvelle ne l’atteint même plus. Désabusé, il se met à vociférer contre les riches clients du restaurant luxueux. Il les met face à leurs responsabilités. Au moins, Tony assume : il ne se cache pas devant ce qu’il se sait être. Les gens sont tous aveugles dans ce qu’ils voient, et refusent de croire que Tony est le reflet de leur  nature. Ils préfèrent le pointer du doigt et dire que c’est lui « le méchant ». Les Etats Unis ont besoin d’un bouc émissaire comme lui pour endosser tous les mauvais côtés  du système qu’ils ont adopté.

Sa vie et celle d’Elvira n’ont pas de sens. Avec l’argent, la seule chose qu’il a gagné, c’est l’envie d’en avoir encore plus. Tony est là, riche, puissant… et tout seul. Sans famille, sans amis, sans amour, sans personne.

Le deuxième moment qui m’a marqué, c’est quand Tony tue Manny, celui qui l’avait toujours épaulé. Tony a toujours entretenu une relation ambiguë avec sa soeur, presque incestueuse. Il refuse qu’elle soit avec un homme et devient très violent quand elle se fait séduire. Alors quand il voit son meilleur ami dans la même maison que sa soeur, la rage l’envahit. En effet, Manny venait de se marier avec Ginna et le jeune couple voulaient faire lui faire la surprise. Manny, contrairement à Tony, est resté lui même et lucide tout au long du film. Il aurait peut être même pu se contenter du travail qu’il avaient au début du film, dans le snack. J’ai trouvé cette scène très dure à regarder car Tony détruit tout sur son passage. Ivre de colère, il n’est plus maître de lui même. Le fait que cette scène soit au ralenti accentue la dureté de ce moment. Sa soeur, décomposée, se jette sur le cadavre de Manny. Folle de chagrin, les adjoints de Tony doivent l’obliger à quitter la maison. Ce passage m’a rendue très triste d’autant plus que depuis le début du film, j’avais trouvé attachant le personnage de Manny, et il n’y avait aucun mal à ce qu’il soit tombé amoureux de Ginna. Tony n’a plus personne sur qui compter. Avide de pouvoir, corrompu jusqu’a la moelle, il a ruiné sa vie. Il se pense invincible et protégé par son argent, comme si rien ne pouvait l’atteindre.

A la fin du film, il reçoit un contrat de Sosa qui a pour but d’assassiner un représentant de l’ONU qui veut dénoncer la corruption et les meurtres commis par Sosa et ses complices. Mais Tony ne mène pas à bien le contrat car cela implique la mort d’enfants, et finit par tuer le bras droit d’Alejandro Sosa. Preuve que Tony reste malgré tout encore attaché à certaines valeurs, et n’est pas totalement sans scrupules.  Mais pour lui, c’est la fin. Sosa et ses complices lui déclarent la guerre, un véritable bain de sang a lieu chez lui.

Pendant un instant, il a un moment de lucidité très bref durant lequel il réalise le gouffre qu’il a créé, mais ses délires reprennent le dessus, frénétiques. Les caméras de surveillance qu’il avait fait installer ne servent plus à rien, il ne prête même pas attention aux intrus qui s’immiscent chez lui. C’est une fois qu’il perd ce qu’il aimait qu’il en réalise la valeur. Quand Gina, sa soeur, meurt, il la prend dans les bras, lui parle, lui dit qu’il aime… mais c’est trop tard. Dépassé par la situation, il est à l’apogée de sa folie. Les balles ne semblent même plus l’atteindre. La mitraillette à la main depuis son balcon doré, il hurle, insulte ses ennemis : il se prend pour un Dieu.  Mais pour celui qui prétendait ne jamais se faire enculer, c’est pourtant un coup de mitraillette tiré dans son dos qui achève son règne. Là, il tombe, les bras tendus, et fini sa chute dans sa piscine intérieure, éclaboussant la pièce de l’eau et de son sang.  Une fin à son image, majestueusement dramatique. C’est à ce moment qu’on voit la phrase « Le monde est à vous » (« The world is yours » en anglais), écrite en lettres d’or sur une statue, avec à côté le corps de Tony, gisant inerte. Paroxysme de l’ironie de la situation. La musique de la fin du film renforce l’idée de sa défaite, terrible. Son rêve américain est tombé à l’eau.

Il meurt au milieu de l’empire qu’il s’était créé. Une mort minable dans un endroit qu’il croyait intouchable, glorieux.

Pour moi, Tony est vraiment la caricature de l’homme corrompu et avide. Les plans sur les liasses innombrables de billets, les sacs de dollars acheminés dans les banques, les montagnes de cocaïne, les longs travellings sur les intérieurs kitchs et les tableaux immondes reflètent bien la décadence dans laquelle il est tombé. C’est un trafiquant à la fois pathétique, mégalomane, mais parfois attachant. Parti de rien, Tony essaie de combler ses frustrations par des modèles trompeurs de réussite de la société  américaine. C’est pour cela qu’à certains moments, il m’a presque inspirée de la pitié.  Finalement, il s’est bercé d’illusions et de mensonges, il est comme le tigre enchaîné dans le zoo privé de la villa : enclavé, esclave et captif de son propre système. Quand il succombe instantanément sous le charme d’Elvira, c’est la même chose : il tombe amoureux d’un physique, cliché de la femme américaine parfaite : icône de magazine, un mannequin blond dans une vitrine. Tout est factice. D’une certaine manière, il est le fruit de deux extrêmes, qu’il incarne aussi bien par son ascension écœurante que par sa défaite, inexorable. D’un autre côté, il faut se garder de jugements à caractère moral sur le personnage parfois, car il est victime d’un ensemble de fils qui forment son destin, et auquel il n’échappe pas.

J’ai trouvé le jeu d’acteur d’Al Pacino vraiment excellent, car il aurait été facile de rendre creux, sans envergure ou ridicule le personnage de Tony, mais il parvient à lui donner une humanité et une psychologie complexe. Différents aspects sont intéressants à étudier, comme la liberté, à laquelle Tony aspirait tant. Au final, quand il a enfin tout ce qu’il voulait et qu’il possède la capacité de faire ce qu’il souhaite, il dépense une fortune en divers engins et systèmes de sécurité et de surveillance. Il l’avouera d’ailleurs à son ami Manny : il a besoin de tout ça « pour dormir tranquille ». Mais est- ce vraiment cela la liberté ? Tony a-t-il « travaillé si dur » (selon ses termes) pour vivre dans la crainte ?

Scarface est donc un film que j’ai beaucoup apprécié. C’est une belle découverte, avec des jeux d’acteurs incroyables et une période historique très bien relatée. Il pourrait être étudié pendant bien plus longtemps, en s’intéressant par exemple aux allusions et références du Scarface de Howard Hawks, ayant inspiré Brian de Palma. Pour finir, ce film a également influencé d’autres œuvres, comme Le parrain de Francis Ford  Coppola.

Par MORENO Anaëlle, TG07

Témoignage de Sarah, élève en quatrième année à Sciences Po Bordeaux !

Il nous semble crucial de présenter le parcours d’un étudiant ayant réussi à rentrer à Sciences Po Bordeaux et pouvant partager son expérience. En effet, cela permettrait à un élève éventuellement intéressé par la formation d’avoir un aperçu à la fois des cours et de la vie étudiante dans cet Institut. De plus, le témoignage suivant est la preuve qu’un projet professionnel est voué à évoluer et que Sciences Po apporte les outils nécessaires à cette évolution.

Ainsi, Sarah, élève en quatrième année à Sciences Po Bordeaux, a accepté de répondre à nos questions.

 

  1. Pourquoi avez-vous souhaité rentrer à Sciences Po Bordeaux ?

Je ne savais pas précisément ce que je voulais faire et Sciences Po ouvre beaucoup de portes dans tous les domaines qui m’intéressaient (culture gé, enjeux géopolitiques, relations internationales, économie internationale, enjeux politiques contemporains). Lors de la journée porte ouverte, j’avais pu découvrir la vie associative de l’école qui était extrêmement riche et cela m’avait donné très envie (beaucoup d’évènements d’intégration, de conférence sur des sujets très variés…).

  1. Quel était votre projet professionnel avant d’intégrer cet institut ?

Comme je l’ai dit plus haut, je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire mais j’étais très intéressée par le domaine des relations internationales et la diplomatie notamment entre les États-Unis et la France (même si je ne connaissais pas vraiment ces matières et que je les ai découverte réellement à Sciences Po, je lisais beaucoup la presse sur ces sujets). J’étais aussi très intéressée par les enjeux humanitaires de la migration. Mon métier de rêve en terminale c’était d’être diplomate ou de travailler à l’ONU.

  1. Comment ce projet a-t-il évolué au cours de votre formation ?

Comme pour beaucoup d’étudiants à Sciences Po (et c’est normal !!!), mon projet professionnel a vite changé au fur et à mesure que je découvrais de nouvelles matières qui confirmaient ou infirmaient mes choix. Aujourd’hui je m’oriente davantage vers une carrière européenne mais pour être totalement honnête, même à l’heure d’aujourd’hui, je ne sais toujours pas précisément ce que je veux faire.

  1. Comment avez-vous fait votre choix de Master ?

Il y a de nombreux choix de master (18) avec 4 majeures : Affaires internationales, Carrières publiques, Management de projets et organisations et Politiques, société, Communication. J’ai choisi le master « Affaires Européennes » qui fait partie de la majeure « Politique, société communication ». Au premier semestre de troisième année, nous avons un cours sur les institutions européennes qui m’a complètement passionnée. Je m’intéressais et lisais de plus en plus la presse sur les questions et les enjeux européens c’est pourquoi j’ai choisi ce master. C’est celui qui semblait le plus correspondre à mes centres d’intérêts.

  1. Que vous a apporté Sciences Po Bordeaux (en termes de connaissance, de méthode, de compétence, de relationnel…) ?

En terme purement pédagogique, les cours donnés sont de très grande qualité avec des chercheurs (centre de recherche de Sciences Po Bdx) très reconnus dans leurs domaines notamment en économie ou en sociologie.  Les conférences de méthodes et les galops (dissertation de 4h les samedi matin) permettent indéniablement d’acquérir des compétences d’analyse, de synthèse et d’écriture. Mais personnellement, c’est sur le plan oral que Sciences Po m’a le plus apporté. Le mode de contrôle via des exposés oraux tout au long de l’année et dans chaque matière ainsi que le petit o en culture gé nous poussent à développer une réelle aisance à l’oral et ce en toutes circonstances, même avec un sujet déstabilisant !

  1. Quelles sont les associations que vous avez rejointes ? Quelles sont celles que vous recommandez ?

La vie associative est extrêmement riche et il y en a vraiment pour tous les goûts (asso politiques, sportives, asso de Master, humanitaire…) ! L’association sportive est la plus active et chaque année au mois d’avril il y a les jeux inter-IEP (nos JO) qui sont vraiment à ne pas manquer avec une super ambiance !! Je recommande et je me suis d’ailleurs mise au Badminton ! En adéquation avec mes centres d’intérêt, j’ai choisi de m’investir dans l’association AIME qui accompagne et facilite l’intégration de jeunes étudiants réfugiés ainsi que « Perspective Europe » : l’asso de mon Master qui organise des conférences sur les enjeux européens d’actualité et réalise des revues de presse européennes. Mais je recommande aussi l’asso d’œnologie qui organise chaque année un gala. L’avantage c’est que même si on ne fait pas partie d’une asso, elles organisent souvent des évènements auxquels on peut participer donc il n’y a jamais de quoi s’ennuyer et on peut un peu toucher à tout.

  1. Quels conseils donneriez-vous à un élève potentiellement intéressé par cette formation ?

Je ne connais pas de manière très précise les conditions d’entrée sur dossier mais je pense qu’il est important d’avoir un projet professionnel assez défini, cohérent et riche (engagement associatif, stages, activités extrascolaires). Il faut essayer de valoriser ses activités et ses passions. Je pense qu’il est aussi important d’acquérir le plus possible de culture générale avec des sujets qui nous intéressent en lisant la presse. Je pense que le plus important est que le jury ressente la motivation et l’enthousiasme en montrant sa personnalité.

Il faut aussi relativiser, il existe pleins d’autres formations (prépas notamment, année de césure) très similaires à celle qu’offre Sciences po. D’autant plus qu’on peut le retenter en 3ème année et 4ème année !

Par Baptiste Guedon

Rencontre avec “Paroles d’exil” le 2 février 2022

Les élèves de la prépa JPPJV ont rencontré le 02 février 2022 l’association de Sciences Po Bordeaux, “Paroles d’exil”. Celle-ci a pour but de sensibiliser la population à la question de la migration en effectuant notamment des interventions dans les lycées.

Ce fut le cas à cette date, puisque trois membres de l’association ont donné la parole à Shadi Mattar, réfugié syrien de 30 ans. Ce dernier a traversé la guerre civile qui a commencé en 2011 sous Bachar Al-Assad et qui a pour contexte la révolution du Printemps Arabe qui débute en 2010 et qui touche de nombreux pays du Moyen-Orient. Après avoir rappelé le régime politique en place dans le pays et l’arrivée du parti Baas en mars 1963, Shadi Mattar a raconté son histoire et celle de sa ville qui s’est vue ensevelie sous les bombes et soumise à la terreur.

En effet, il est originaire de Daraya, ville située à une dizaine de kilomètres de Damas. En raison de sa proximité avec la capitale, Daraya a été particulièrement touchée et peu de temps après le début du siège effectué par l’armée en 2012, une grande partie de sa population a fui principalement en direction de la frontière turque. Shadi Mattar a de ce fait été une victime directe de ce conflit armé. Alors que près de 90% de la ville est détruite, Shadi Mattar et une partie de ses proches font le choix de rester, et de se battre jusqu’au bout.

Ainsi, M. Mattar qui a suivi une formation de reporter nous a expliqué que sa caméra l’a véritablement sauvé et est devenue pour lui une arme, symbole de son opposition à Bachar Al-Assad. Effectivement, pour lui, filmer les atrocités commises par le régime dictatorial permet de sensibiliser et de constituer une preuve directe des violences faites à l’encontre de milliers de civils. Il nous a dans cette optique projeté certaines de ses séquences qui illustrent l’état de crise de la ville et la grande précarité qui en découlait.

Il précise en plus de cela avoir été contacté en 2012 par la journaliste franco-iranienne, Delphine Minoui à la suite d’un post sur son compte Facebook, celui de la mystérieuse photo d’une bibliothèque souterraine en plein cœur de la guerre civile. Effectivement, M. Mattar et des amis à lui ont eu pour projet de récupérer les ouvrages abandonnés dans les bâtiments bombardés et de les rassembler dans un sous-sol, destiné à tous. Cet acte de résistance exceptionnel a intrigué Delphine Minoui et a marqué le début de longues années d’échanges ayant abouti au livre Les passeurs de livres de Daraya, publié en 2017 ainsi qu’au film documentaire “Daraya, la bibliothèque sous les bombes” sorti en 2018.

Ces deux œuvres ont connu un important succès et ont permis de faire connaître l’histoire incroyable de Shadi Mattar. Lors de cette rencontre, il nous a expliqué que les livres représentaient pour de nombreux habitants de la ville une lueur d’espoir et une ouverture sur le monde à l’heure d’un siège qui les coupaient de tout. Ils lisaient ainsi L’alchimiste de Paulo Coelho mais aussi des ouvrages de développement personnel à l’américaine, et ces lectures leur donnaient du courage, de la force et surtout du rêve.

Cette rencontre a été hautement enrichissante, et les mots de Shadi Mattar étaient particulièrement émouvants. Son histoire et son projet de recueillir les livres dans les ruines, évoqués dans les œuvres de Delphine Minoui sont inspirants. Il nous a par ailleurs raconté son parcours héroïque avec une grande humilité et a mis l’accent sur l’importance de l’amitié et de l’amour en temps de crise. En réponse à nos interrogations respectives, il nous a expliqué travailler aujourd’hui en tant que reporter en France et qu’il s’apprêtait à suivre une formation à Paris.

Ainsi, “Paroles d’exil” qui est né en tant que projet de 3ème année de plusieurs étudiants de l’IEP de Sciences Po Bordeaux donne la voix à des hommes, des femmes aux destins particuliers et qui ont dû fuir leur pays pour diverses raisons. Ce projet est remarquable et permet d’éveiller les consciences et de rappeler que l’immigration n’est jamais un véritable choix et qu’il nous faut avant tout se mettre à la place des migrants afin de mieux les comprendre.

Julie Colliou, TG07, cheffe de la rubrique “on a lu”

 

Témoignage de Martin Chaumont, ancien élève de Daguin, en dernière année de master à Sciences Po Bordeaux !

Le 30 novembre 2021, nous avons eu l’opportunité de rencontrer la délégation de Sciences Po Bordeaux dont faisait partie Martin Chaumon,t un ancien élève de notre Lycée Fernand Daguin ayant fait partie de la prépa JPPJV et étant aujourd’hui en cinquième année dans le master Carrière Administrative de l’IEP de Bordeaux. Suite à cette rencontre, j’ai décidé de lui envoyer un mail pour lui demander un témoignage de son parcours qui pourrait être source d’inspiration pour les élèves ayant la volonté d’intégrer l’institut d’études politiques de Bordeaux. Pour guider son témoignage je lui ai envoyé une série de question telle que :

Pourquoi as-tu participé à la prépa JPPJV ?

Qu’est-ce qu’elle t’as apporté ?

Comment s’est passé ton intégration ?

Est-ce que Sciences po a finalement répondu à tes attentes ?

Au niveau des horaires et de la vie étudiante notamment.

Et voici sa réponse :

« Je m’appelle Martin Chaumont, j’ai 23 ans et j’ai intégré Sciences Po Bordeaux en 2016 après avoir suivi la prépa JPPJV à Daguin pendant ma Terminale.

J’étais dans ce qui s’appelait à l’époque la filière Scientifique, en section européenne. Je n’avais pas réellement d’idée précise quant à mon projet professionnel. La seule intuition que j’avais était que le droit m’attirait, alors que je ne l’avais jamais pratiqué. Je ressentais vraiment l’inconfort de cette période où on a l’impression que chacun de nos choix sont décisifs et définitifs et qu’on n’a pas encore assez vécu pour les faire sereinement. Quoi qu’il en soit, j’ai décidé par imitation de camarades en filières Economique et Sociale d’intégrer la prépa JPPJV « au moins pour voir », sans savoir précisément ce qu’était un IEP.

A partir de là, j’ai pu bénéficier des cours bien spécifiques dispensés par la prépa, et de la motivation supplémentaire qui va avec pour être plus performant dans la scolarité à court terme, le Bac bien en tête. Pour la petite anecdote, le sujet d’Histoire qui est tombé le jour du concours était quasiment au mot près un sujet que l’on avait travaillé un mercredi après-midi. Même si ce ne sont aujourd’hui plus les mêmes procédures, les prépas JPPJV (et celle de Daguin en particulier) sont pour moi avant tout l’opportunité de s’entourer de professeurs qui ont à cœur que l’on réussisse.

Les courts instants passés les mercredi après-midi sont de réels courts particuliers qui donnent des avantages considérables par rapport à ceux qui ne les suivent pas, que ce soit pour le concours de Sciences Po Bordeaux ou pour toute autre filière que vous suivrez à la suite de votre Bac. C’est encore plus vrai maintenant grâce au Centre de Ressources Numériques.

Lorsque j’ai été admis, j’avais déjà mis de côté mes ambitions de droit à la suite de discussions concernant mon orientation avec un professeur d’Histoire du dispositif.

Le soulagement a vite cédé la place à de nombreux doutes : est-ce que j’aurai le niveau nécessaire ? Saurai-je m’intégrer dans la vie étudiante ? Trouverai-je ma place à Sciences Po Bordeaux ?

Rétrospectivement, force est de constater que ces doutes n’avaient pas réellement lieu d’être. Dès les premiers jours de la première année, l’intégration s’est faite sereinement et facilement. Tout est mis en place du côté de l’IEP, étudiants comme administration, pour qu’elle se passe sans encombre et créer un véritable corps de promo.

J’ai dû m’adapter à ces disciplines nouvelles qu’étaient l’économie, la sociologie, le droit, tout en composant avec les modalités bien spécifiques des IEP : les conférences de méthode et les cours magistraux. Les cours d’introduction couplés aux travaux de groupe m’ont permis de rattraper le retard que je pensais infini dans les sciences sociales et j’ai pu rapidement m’impliquer dans des associations comme le Bureau des Elèves, ou de nombreuses associations sportives. L’autonomie que permet le volume horaire de cours (entre 20 et 25 heures de cours par semaine, le gros du travail se faisant à la BU ou chez soi) autorise une vie étudiante riche et stimulante, au-delà du scolaire.

Pour la faire brève, j’ai pu par le biais de l’école rencontrer des camarades que je n’aurais jamais croisés ailleurs, dans des conditions de travail que l’université nous envie littéralement. J’ai pu réaliser une année d’étude à Istanbul, accompagné d’anciens étudiants et de l’administration qui a fait en sorte que nous ne soyons pas lâchés dans la nature. J’ai pu affiner mon projet durant ma troisième année, et m’orienter vers une année de césure dans l’armée avant ma quatrième année.

Aujourd’hui en cinquième année dans le master Carrière Administrative, je sais que je suis outillé pour réussir les concours qui m’attirent, et que mon profil, dont le diplôme de Sciences Po Bordeaux est l’illustration mais dont mes compétences acquises sont le fond, ouvre un nombre faramineux de portes et d’opportunités.

Si j’avais un conseil à donner à des lycéens, ce serait d’oser se donner les moyens. Le Baccalauréat et son contrôle continu rend la période du lycée certainement plus stressante que jamais. Il ne faut pour autant pas perdre en tête qu’il ne s’agit que d’un point de passage vers d’autres perspectives plus personnelles. Profitez de l’environnement que vous avez autour de vous, notamment des professeurs volontaires, pour vous questionner et saisir les opportunités. Les seules opportunités qu’on rate sont celles qu’on ne saisit pas. »

 

Merci à Martin Chaumont pour ce témoignage très enrichissant se terminant sur une magnifique phrase philosophique emplie d’espoir.

Si vous avez certaines questions à lui soumettre vous pouvez le contacter à l’adresse suivante : martin.chaumont33@gmail.com

 

Maëna Lican,

Rédactrice en chef du site JPPJV

« Herculine Babin : archéologie d’une révolution », Catherine Marnas, 2022

 

Dans la salle Jean Vauthier du TnBA, c’est le destin d’une jeune fille qui se joue. Un homme est assis, il lave ses mains, doucement. Il se lève, se dirige vers un lit, le découvre de ses draps blancs. Là, la jeune reprend son souffle, elle renaît : Herculine Barbin.  Catherine Marnas, metteure en scène et directrice du TnBA, questionne le genre à travers le destin tragique de la première hermaphrodite, s’appuyant sur les mémoires de cette dernière écrites par Jean-Michel Foucault.

« J’ai beaucoup souffert et j’ai souffert seul. Seul, abandonné de tous. » Que fait-on lorsque l’on a à peine vingt ans et que la vie nous pousse dans le monde des hommes… alors que l’on est née fille ? Herculine Barbin s’est battu contre lui-même, contre la société entière, contre une vie qui l’a laissé. Ce destin tragique devient plus qu’une réflexion du XIXème siècle, se transposant à notre monde contemporain. Catherine Marnas bouleversée par cette histoire se lance dans une adaptation où le combat pour le droit à la différence se poursuit, aujourd’hui plus que jamais. Elle confie : « Je n’avais jamais réalisé l’ampleur du sujet avant de voir de plus en plus de jeunes confier leurs troubles à notre jury. Je me suis demandée ce que cela racontait de notre monde. »

Comment ne pas saluer la performance des deux comédiens ? Herculine est un rôle sur mesure pour Yuming Hey. Il nous transporte dans son interprétation tantôt émouvante, tantôt transcendante. Il nous captive dans son regard, dans ses gestes, dans son individualité toute entière. Yuming Hey vit dans le corps d’Herculine Barbin. A ses côtés, Nicolas Martel interprète différents personnages faisant éruption dans la pièce. Lui aussi, nous captive. Son jeu polyvalent, ses chants et sa sensibilité nous convainquent dès les premières minutes de la pièce.

Avoir vu Herculine Barbin : archéologie d’une révolution c’était faire face à un véritable touchant et plus que marquant.

 

Metteuse en scène : Catherine Marnas

Avec Yuming Hey et Nicolas Martel

Avec la complicité de Vanasay Khamphommala et Arnaud Alessandrin

Conseil Artistique : Procuste Oblomov

Assistanat à la mise en scène : Lucas Chemel

Scénographie : Carlos Calvo

Son : Madame Miniature

Lumière : Michel Theuil

Costumes : Kam Derbali

Production : TnBA

Coproduction : La Comédie de Caen – CDN de Normandie

Par Orakoch SRIJUMNONG