Cette île, aux frontières arbitrairement tracées par les anciens colons, a été autrefois un repaire de pirates, puis a ensuite connu presque 20 coups d’états en 30 ans, réussis ou non. Et ça continue… Retour sur l’histoire d’un des pays les plus pauvres du monde qui fait parler de lui dans les journaux.
1/ Historique
2/ Rétrospective des derniers événements
3/ Situation actuelle
1/ Historique
Anjouan a connu 130 ans de colonisation française.
1975 est l’année la plus importante aux Comores, l’archipel dont fait partie Anjouan : elles deviennent indépendantes de la France et deviennent la nouvelle République Fédérale Islamique des Comores (RFIC). Mayotte, elle, reste fidèle à la France. Cependant, les trois îles de l’archipel sont loin de s’entendre et se déchirent pendant des années, avec l’aide de mercenaires (Bob Denard) et de généraux.
En 1997, Anjouan officialise une déclaration d’indépendance par rapport au Comores ! la RFIC et l’OUA (Organisation de l’Union Africaine) posent un embargo pour protester, qui va faire des ravages dans la population. Bizarrement, Anjouan demande son rattachement politique à la France, mais celle-ci n’en tient pas compte, ne voulant pas se mettre à dos l’UA et la RFIC, ni se retrouver avec une île assistée financièrement, comme Mayotte.
Des militaires y sont envoyés, pour empêcher une sécession, mais ils ne peuvent pas empêcher quatre années de tensions politiques, putshs et contre-putshs. C’est là que le colonel Bacar s’illustre.
La solution fut d’instaurer une nouvelle Constitution, dans laquelle chacune des îles a un président régional, plus d’autonomie, mais qui préserve l’unité de l’archipel, avec un système de rotation pour la présidence de l’Union Comorienne.
Bacar est élu président régional à Anjouan en 2002. Tout se calme.
Définitions
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Sécession : Action de se séparer d’un Etat avec lequel on formait une collectivité : faire sécession
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Putsh : Action militaire destinée à renverses le pouvoir en place. Le militaire à la tête du putsh se proclame généralement dirigeant à la place de celui qu’il a renversé.
2/ Rétrospective des derniers événements
Il y a un an et demi, en juin 2007, le colonel Bacar (45 ans) a imposé la tenue d’une élection qui devait être reportée. Il s’est proclamé vainqueur à 90 % des voix, alors qu’il n’en a évidemment pas le droit.
Pourquoi l’élection avait été reportée par le chef des Comores, Ahmed Sambi ? Soi-disant pour se venger d’un refus d’atterrir sur Anjouan lors de la campagne électorale de Bacar…
Installé lui-même au pouvoir, Bacar ne tient aucun compte de la démocratie et de ses règles.
Ainsi, en février 2008, des troupes de l’Armée Nationale de Développement ( soldats des Comores envoyés par Sambi) prennent position à Mohéli, l’île voisine, pour encercler le colonel et le capturer, pour l’obliger à trouver une solution diplomatique au problème de la légitimité au pouvoir. L’UA (Union Africaine) envoie également des troupes en renfort car elle est contre ces situations sécessionnistes.
Le colonel Bacar est introuvable. En mars, Sambi lance une offensive (300 soldats) sur Anjouan pour le débusquer. La veille, des tracts lâchés par avion avaient conseillé aux 300 000 habitants d’Anjouan de rester chez eux. Bien que les forces armées clament qu’elles maîtrisent la situation, le colonel Bacar leur échappe, déguisé en femme, dans un bateau à destination de Mayotte ! (Il paraît que Bacar jouirait d’une loyauté sans faille de la part des gendarmes anjouanais.)
Se pose alors le problème du rôle de la France dans ce sauvetage d’un tyran…le colonel n’est certes plus au pouvoir à Anjouan, mais il ne peut y être jugé…
3/ Situation actuelle
On peut se demander combien de temps encore resteront les troupes armées de l’UA et des Comores, et les soldats se demandent même s’ils vont être payés (selon un journal malgache). Il y a des réfugiés, sur les autres îles et aussi à Madagascar. Mais elles ne leur offrent pas l’hospitalité.
Depuis quelques mois, à Anjouan, la situation économique est catastrophique. Cette île était déjà très pauvre, mais avec cette débâcle, plus rien ne tourne rond, et le président des Comores, Sambi, n’a pas l’air de se mettre au travail. Des gens meurent à Anjouan à cause de cela. Il n’y a plus de carburant, donc plus de denrées de base suffisantes, on ne peut plus se déplacer et donc aller acheter ou vendre des produits.
Clandestins
Depuis longtemps déjà et encore plus à cause de cette situation, de nombreux anjouanais prennent des kwassas kwassas surchargés pour tenter de rejoindre Mayotte, qui fait figure d’El dorado à côté d’Anjouan. Evidemment, les morts sont nombreux car les 70 km de mer à franchir sont dangereux pour un bateau en surcharge. Ils sont des fois 50 sur un bateau de 15 personnes ! De plus, les autorités mahoraises arrêtent ces embarcations illégales et ramènent les anjouanais sur leur île, emprisonnent les passeurs. Ces gendarmes ont un quota de personnes à expulser de plus en plus élevé, et même sur Mayotte on assiste à des rafles massives dans les quartiers clandestins et même les écoles ! ( les clandestins représentent plus de 80 % de la population de Mayotte)
Cependant, la population clandestine augmente très rapidement sur l’île et pose désormais de gros problèmes démographiques, de logement…
La France souhaite donc un retour à la normale sur Anjouan, afin de faire rentrer rapidement les exilés sur leur terre. Facile à dire.
Lien vers un article du procès du colonel Bacar
( article à venir sur la vie des clandestins à Mayotte)