Le 16, soignez les transitions!

9 juin 2011 0 Par Caroline Sarroul

A  7 jours du bac, on n’est plus dans la découverte grossière du cours, on est dans le souci du détail!

Les transitions sont « des détails de taille », dans le sens où ce sont elles qui vont assurer la fluidité , la cohérence dans la progression de vos différentes parties, en particulier I et II.

La transition est le moment du bilan de la partie écoulée et l’annonce ( sous forme de questions c’est préférable) de la partie à venir.

La transition entre le I et le II est particulièrement  le moment où on va justifier que la question peut être prise dans un tout autre sens ( sans pour autant se contredire)

Il faut donc justifieren fin de I ou en début de II, ce changement de sens en montrant qu’il n’est pas arbitraire mais  qu’il est légitime et s’impose!

C’est donc un moment décisifauquel il faut consacrer temps et attention!

 

Pour vous aider à réussir vos transitions , en voici sur quelques  notions:

 

1. La liberté

(A= I) l’indépendance ( ou la licence), c’est donc le fait de faire tout ce qu’on peut faire et qui nous plaît, de manière immédiate sans contrainte, ni limite, ni règles. Il d’agit d’une liberté de l’immédiat, au gré des pulsions et envies, sans la médiation de la réflexion ou du jugement. C’est la liberté que l’on prête au sauvage et même à l’animal qui ne semble contraint par rien : il va où il veut, fait ce qu’il veut, il ne connaît pas ces limites artificielles que sont les lois. Cette liberté  s’étend jusqu’où s’étend la force de l’individu. Elle coïncide avec l’affirmation de la vie dans son dynamisme naturel. Elle consiste à faire tout ce qui plaît, sans autre entrave que celle de la poursuite de la satisfaction. Ainsi si quelque chose « tente », rien ne m’arrête. Cette indépendance est aussi associée à la liberté naturelle, qui , avant toute conventions humaines, lois, contrata social,  n’est donc limitée que par mes  forces et mes envies.

  • Mais  dans l’état de nature, sans lois,  la force fait le droit. Du coup cette liberté est précaire et en réalité limitée, entraînant des rapports de force, car quand on ne fait que ce qui nous plaît, on fait souvent ce qui déplaît aux autres. C’est ce que soulignait par exemple  Hobbes en faisant de l’égalité et de la liberté la cause de cet état de « guerre généralisée » qu’est finalement l’état de nature. Donc cette liberté est précaire et violente
  • Mais on peut  même aller plus loin, non seulement la liberté est précaire mais elle pourrait même être illusoire:  être libre c’est finalement être soumis à  ses inclinations naturelles, d’où  une hétéronomie des pulsions, instincts et même des désirs qui ne sont pas toujours nôtres, en accord avec nous-mêmes mais à l’unisson du désir des autres. C’est par exemple ce qu’illustre René Girard avec sa théorie du désir mimétique ou Spinoza qui associe cette liberté à la servitude,: on est esclave de ses désirs, même si on n’obéit à personne d’autre que soi, on est soumis à ses affactes, passif).

« On pense que l’esclave est celui qui agit par commandement et l’homme libre celui qui agit selon son bon plaisir. Cela cependant n’est pas absolument vrai, car en réalité être captif de son plaisir et incapable de rien voir ni faire qui nous soit vraiment utile, c’est le pire esclavage et la liberté n’est qu’à celui qui, de son entier consentement, vit sous la seule conduite de la Raison. » Spinoza

(B = II ou III)  Etre libre, c’est alors au contraire être  maître de soi au plan individuel et collectif donc autonome, ce qui signifie, non pas ne pas avoir de lois, mais n’avoir pour lois que celles qu’on s’est donné à soi-même ou qu’on aurait pu se donner.

« Quant à l’action par commandement, c’est-à-dire à l’obéissance, elle ôte bien en quelque manière la liberté, elle ne fait cependant pas sur-le-champ un esclave, c’est la raison déterminante de l’action qui le fait. Si la fin de l’action n’est pas l’utilité de l’agent lui-même, mais de celui qui le commande, alors l’agent est esclave et inutile à soi-même.
     Mais dans un état et sous un pouvoir où la loi suprême n’est pas le salut de celui qui commande, mais le salut du peuple tout entier, celui qui se soumet au pouvoir souverain doit être dit non pas esclave inutile à soi, mais sujet. Ainsi l’Etat le plus libre est celui qui se soumet en tout à la droite raison, car chacun, s’il le veut, peut y être libre, c’est-à-dire y vivre volontairement sous la conduite de la raison. » Spinoza

Mais pour certains, cette autonomie n’est

– au plan collectif, associer la liberté à « l’obéissance à la loi que l’on s’est soi-même prescrite » ( cf : contrat social de Rousseau), c’est réduire la liberté à la liberté politique ( liberté des Anciens selon Benjamain Constant ) en négligeant les libertés individuelles ( liberté des modernes)

– au plan individuel: Nietzsche, avec sa « généalogie », c’est-à-dire une recherche des origines, des discours, ici sur la liberté,  de ce discours associerait cette sage liberté ( raisonnable) à   une déficience vitale. C’est l’impuissance à soi-même éprouver de grandes passions, ou à les assouvir, qui fait que par ressentiment (l’aigreur vengeresse des plus faibles, des frustrés…), les sages veulent interdire aux autres de faire de même et condamnent cela comme intempérance, non maîtrise de soi, servitude. Ce nivellement par le bas de la vie humaine se trouvait aussi chez  Calliclès, ce personnage imaginé par PLaton, dans le Gorgias, qui y  soutenait que la loi est la mise en esclavage des plus forts par les plus faibles, qui s’unissent afin d’empêcher les plus vivants, les plus créatifs, les plus puissants, d’exercer leur vitalité (pour s’en protéger, ou plus simplement par jalousie).

« Ce qui selon la nature est beau et juste, c’est ce que j’ai la franchise de te dire à présent : que celui qui veut vivre droitement sa vie, doit, d’une part, laisser les passions qui sont les siennes être les plus grandes possibles, et ne point les mutiler ; être capable, d’autre part, de mettre au service de ces passions, qui sont aussi grandes que possibles, les forces de son énergie et de son intelligence ; bref, donner à chaque désir qui pourra lui venir la plénitude des satisfactions. Mais c’est, je pense, ce qui n’est pas possible à la plupart des hommes. Voilà pourquoi ils blâment les gens de cette trempe ; la honte les pousse à dissimuler leur propre impuissance. Ils disent donc de la licence, que c’est une vilaine chose, réduisant en esclavage les hommes qui, selon la nature, valent davantage et, impuissants eux-mêmes à procurer à leurs plaisirs un plein assouvissement, ils vantent la sage modération et la justice » Calliclès, Gorgias

2. Le désir

On vient de voir que si le désir est conscience d’un manque, vécu comme un vide, et tension vers ce qui pourrait le combler, alors… mais mais ne peut-on et même ne doit-onpas penser autrement le désir ?

(A= I)On a associé jusqu’ici le désir au manque ( et à la souffrance) mais on peut penser que cette représentation du désir est critiquable

  • car influencéepar la tradition judéo-chrétienne qui , dans la lignée de Platon , associe le désir au corps et le corps, quand il s’éloigne du strict besoin naturel, à la chair, au péché. Le désir est alors synonyme de  concupiscence, ce penchant jugé mauvais à jouir des plaisirs terrestres et sensuels. Ce penchant, c’est le triomphe de l’épithumia de l’allégorie du Sac de peau ou la libido chez Freud. Mais on peut trouver que cette condamnation du désir est abusive et dangereuse.
  • Abusive, c’est ce que pensait Spinozaqui considérer comme « une triste et sauvage superstition » que d’interdire de prendre du plaisir, quand celui-ci est modéré et ne nuit pas à autrui. Comment un Dieu pourrait se réjouir de notre déplaisir et de nos frustrations, sans être lui-même frustré et jaloux?
  • Excessive et dangereuse, c’est aussi ce que soulignait  aussi Nietzsche dans Le crépuscule des idoles , où il reconnaît que même si « toutes les passions ont une période où elles sont seulement néfastes, ou elles rabaissent leur victime de tout le poids de la bêtise », rejeter tout désir au nom de cette « bêtise des passions » est tout aussi bête: « anéantir les passions et les désirs à seule fin de prévenir leur bêtise et les conséquences désagréables de leur bêtise, voilà qui ne nous paraît aujourd’hui qu’une forme aiguë de bêtise. Nous n’admirons plus les dentistes qui arrachent les dents pour qu’elles cessent de faire mal.. » Il considère que L’Eglise n’a toujours combattu  la passion que « par l’excision », » le castratisme » alors qu’ « attaquer les passions à la racine, c’est attaquer la vie à la racine ». On peut en effet associer le désir à la vie, à « l’effort pour persévérer dans son être » selon Spinoza, pour augmenter sa puissance, selon Nietzsche et le plaisir qui accompagne la satisfaction du désir n’est que le joie d’affirmer son existence et de se sentir plus vivant, plus grand. Le désir reste manque que si on ignore son objetparce que prisonniers d’un désir mimétique ( René Girard), du « courant social » de Bergson, ou restés au bas de l’échelle des Beautés de Platon, qui associe certes le désir au manque  mais aussi à l’aspiration à l’absolu. Au lieu de rejeter le désir on pourrait plutôt se demander, comme Nietzsche, « comment spiritualiser, embellir, diviniser, un désir ? » et comment savoir ce que nous désirons, quels sont les désirs qui s’accordent avec notre nature en tant qu’homme et individu. C
  • condamner le désir pour ses errances et les souffrances qui s’en découlent , c’est aussi négliger que le désir est, comme la raison, une caractéristique essentielle( et non accidentelle)  de l’homme, l’animal ne connaît que le besoin. Ne pas désirer, c’est se contenter de ce qui est, et sans désir, pas de négation, pas de progrés, pas d’humanité!

( B= II ou III) Donc le désir est plutôt une puissance,promesse de joie et de progrés, s’il n’est pas que pulsion, caprice, envie mais vraiment profonde et propre aspiration.

? cette remarque peut aussi servir pour une transition pour un plan construit sur la dualité de l’homme: être de raison en I mais aussi être de désir en II! Cela marche sur les sujets sans mot d’articulation clair ( mot à double sens sur lequel on peut jouer pour mettre en relief une tension entre 2 conceptions des choses, 2 réponses possibles) surtout ceux qui interrogent sur ce qu’il faut, sur ce qu’on doit… donc commençant par Faut-il ou doit-on

N’oubliez pas aussi ici le double aspect de ces verbes : il souligne aussi bien la nécessité ( ce qui ne peut ne pas être pour différentes raisons) que l’obligation ( légale ou le devoir moral ou naturel – en tant qu’être de raison, en tant qu’homme, on se doit de…)

3. le juste

On vient de voir que si le juste  est le légal, ce qui est en accord avec le droit positif, alors… mais mais ne peut-on et même ne doit-onpas penser autrement le juste?

 (A) Nous avons associé jusqu’ici le juste au légal, la loi étant sensée incarner la volonté générale

  • mais le l’Etat et le droit ne sont pas toujours ce qu’ils devraient être, comme le souligne Marx qui n’y voit que la prise du pouvoir par la classe dominante et dans le droit que la légitimation du fait et de leur intérêt général présenté comme étant celui de tous ou comme le souligne aussi Pascal, « ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on n’a fait que ce qui est fort fut juste ».
  • De plus on peut ajouter que réduire le juste au légal peut être dangereux, car cela signifierait que seule la loi établie par l’Etat serait l’étalon du juste, que le juste se réduit à ne pas nuire à autrui et ne peut être pensé que dans une réciprocité des droits et des devoirs. Alors que le juste dépend aussi de considérations morales, de la conformité avec un droit naturel et qu’être juste,  c’est souvent faire davantage que ne pas nuire et même renoncer parfois à ses droits ou agir sans qu’il y ait un droit à honorer chez l’autre ( on peut ici penser au devoir de bienveillance envers un mendiant alors que celui-ci n’a pas de droit sur ma bourse).
  •  Enfin réduire le juste au légal, ce serait réduire le juste à la forme de l’action, sans prendre en compte les intentions.

 Le juste, c’est donc plutôt le légitime et le légitime peut s’accorder avec le légal, mais ne saurait s’y réduire.

 ( article inachevé!!)