Pouvons-nous dire tout ce que nous voulons dire?

17 mai 2012 0 Par Caroline Sarroul

Peut-on dire tout ce que nous voulons dire ?

Peut-on

dire

tout ce que   nous voulons dire ?

A-t-on la possibilité

Mettre dans des mots

Vouloir= désirer ( impulsion qui se moque du réel et   du possible) dc « tout » illimité

A-t-on la capacité

Transmettre avec réussite ( parole en l’air)

Vouloir (volonté)= désir d’abord inhibé, confronté à   nos autres désirs, expériences, valeurs et fins puis conscient et   volontairement choisi.= « tout » limité au conçu comme possible et   bon (# agréable, = utile propre)

A-t-on le droit

Signifier : produire du sens

Présupposés : qu’on puisse ou pas dire tout ce qu’on veut dire, on ne dit que ce que l’on veut. L’acte de dire relèverait de la volonté et nous serions maître de nos paroles.

I. il semblerait qu’il ne soit pas « possible » de mettre dans les mots et transmettre avec réussite tout ce qu’on désirerait mettre dans des mots

  • limites des mots :

-langue = découpage utilitaire du réel qui gomme les différences inutiles et accentue les ressemblances et dissemblances utiles = mots parfaits pour dire le commun, l’ordinaire, mais inadéquats pour dire le particulier l’intime ( thèse de Bergson) : les mots manquent ou dénaturent.

-langue « imparfaite » = termes polysémiques, équivocités syntaxiques = incompréhensions, malentendus (d’où idée d’une langue artificielle univoque urement logique) (Ex. Marthe Robert, « MOKYSATSU », 1945, premier ministre japonais)

– chaque langue serait à la fois « trop riche » car les mots ont une histoire ou s’inscrivent dans l’histoire de chacun, dès lors le sens dépasse le concept, et « trop pauvre » car chaque mot a une signification figée : thèse de Sartre

  • • limites de la maîtrise de l’échange : tout ne dépend pas de l’émetteur, cela dépend aussi du récepteur, de sa manière d’interpréter : si le signifiant est commun, le signifié n’est pas nécessairement identique, même si nous parlons la même langue.
  • • limites de la pensée : l’infini ( Dieu) = Wittgenstein « il y a assurément de l’inexprimable, celui-ci se montre, il est l’élément mystique. Ce dont on ne peut parler, il faut le taire » et ce qui se montre n’est pas toujours ce qui peut se démontrer ; l’inhumain = Walter Benjamin , dans Expérience et pauvreté, « les gens  sont revenus muets de la guerre » (1914,1918) . Le journaliste A. Rémond « le silence est l’exacte mesure du silence de l’homme », face aux massacres serbes, alors que les victimes aurait voulu se libérer par la parole ;  l’expérience esthétique ( idée esthétique qui « donne beaucoup à penser » sans que l’on puisse le ramener à un concept) , expérience de la beauté ( non un jugement déterminant, mais réfléchissant face à « la finalité sans fin » : Kant)

Transition : 1. Conclusion partielle : Nous avons donc vu que nous ne pouvons pas mettre dans des mots tout ce que nous souhaiterions exprimer et partager, même si nous en disons parfois plus que nous le souhaiterions ( lapsus, association d’idées selon la psychanalyse) 2. MAIS dire cela , n’est-ce pas confondre ce dont nous sommes de fait capables de mettre en mots et ce qui est possible et de signifier?

II. on peut penser qu’il est en réalité possible  de dire et signifier davantage et peut-être presque tout

 justification du « renversement »

  • confusion entre « être  possible » et « être capable de » = nous accusons parfois hâtivement et à tort

– notre langue et les mots : souvent ce ne sont pas les mots qui manquent, mais nous qui les ignorons = on pourrait donc en dire plus si nous avions une meilleure maîtrise de notre langue.

– la polysémie peut ne pas être un obstacle : en travaillant le contexte ou en maîtrisant les règles de la conversation, on peut en grande partie réduire les malentendus et on peut même  jouer avec cette polysémie pour dire davantage que ce que nous aurions pu dire avec un langage univoque ( ex. mathématique).

– l’avantage de l’oral sur l’écrit, c’est qu’on peut redire ce qu’on a dit, expliciter et vérifier que l’autre a bien compris, dimension dialogique de la parole humaine. ( Platon dans Phèdre, si on peut penser que l’écriture a été donnée aux hommes comme « remède à l’oubli et l’ignorance », qu’elle oblige à préciser la pensée et laisse la possibilité de raturer et reprendre, l’écrit est orphelin : on peut lire ce que l’on veut, avoir l’illusion de comprendre et s’abstenir de l’effort de mémoriser )

= principe  « d’exprimabilité absolue » (Searle)

  • réduction de dire « à mettre en mots », or on peut parler pour ne rien dire donc dire, c’est essentiellement signifier et accidentellement user des mots pour cela. Dès lors il y a bien d‘autres moyens que les mots pour signifier ce qu’on veut exprimer : geste, dessin, œuvres d’art ( on peut en un sens parler du langage de l’art , même si cela réduit l’œuvre d’art  à un moyen), le silence qui s’il ne parle pas , ne dit pas pour autant rien ( impossibilité, inutilité…) et est la condition d’un dire ( silence de l’écoute, de la réflexion, pauses dans le discours qui le rendent possible)

Le « on » masque une hétérogénéité d’individus : l’artiste qui a un « coin » du voile levé peut dire plus, car il perçoit plus clairement ce que les autres ne perçoivent que confusément

  • « vouloir » peut être distingué de « désirer » car on peut ne pas vouloir ce qu’on désire , dès lors

– vouloir, ce n’est pas simplement être dans un vœu pieux ( le souhait qui attend passivement de se voir réalisé), donc on va s’efforcer de se donner les moyens de parvenir à ses fins 

– on ne veut que ce qu’on considère comme possible, dc si on veut dire quelque chose, c’est qu’on se l’est déjà dit, donc déjà mis en mots ( thèse de Hegel)

Transition : on peut  donc signifier bien plus que ce qu’on aurait pu penser, si on ne confond pas les possibilités du langage avec les limites de notre maîtrise et si on remplace l’illimité de nos désirs par les limites d’une volonté déterminée et clairvoyante. MAIS encore faut-il que nous ayons le droit de dire ce que nous voulons dire ?

III. Droit coutumier ( règles de civilité et de la conversation), droit politique et droit moral : exemple du mensonge.