La fédération française des usagers de la bicyclette (FUB) a lancé à l’automne une grande enquête via les réseaux sociaux et la presse afin de concevoir un tableau de bord des usages cyclistes. Son but est de sensibiliser les pouvoirs publics sur l’impact positif du cyclisme urbain. Les « mobilités actives » selon le terme inventé que sont la marche à pied et la pratique du « vélo musculaire », sont au centre des interrogations des assises sur les mobilités.
La FUB est un organe idéologique dont le but est de promouvoir l’usage du vélo au quotidien. Avec près de 30 000 membres cette association est à l’instar de l’Automobile Club de France, une association tournée sur la promotion de la bicyclette sous tous ses angles.
Cette grande enquête qui devrait être livrée au 16 mars 2018 fournit déjà des données, ce qui est en soit une démarche inhabituelle en statistiques. Le site est une véritable mine d’informations qu’il faut cependant savoir utiliser. Pour les 113 000 répondants, il est possible d’effectuer des tris croisés, par âge, sexe (genre), fréquence de déplacement à vélo, etc. La variable « profession » n’est pas renseignée, ni le niveau de diplôme, ce qui laisse sous-entendre que l’expertise visée à travers l’enquête ne tient pas compte du niveau scolaire ni du métier. Par contre, la variable « niveau de maitrise » indique qu’en fonction de la maitrise estimée du vélo ou de la confiance que l’on a dans le maniement de la machine, l’enquête livre des résultats différents. Par exemple, moins on maîtrise moins on a confiance, ou moins on a confiance dans sa capacité à circuler à vélo, moins on a confiance dans la route. Sorte de tautologie qu’il faut pourtant pouvoir vérifier.
L’insee nous a montrés que la pratique du vélo dépendait du statut socioprofessionnel et notamment du diplôme (insee première, ). Il est par conséquent dommage que cet indicateur soit absent de l’enquête, mais cela n’enlève rien à son intérêt. D’ailleurs, faisons remarquer qu’il s’agit d’Assises, et non d’une enquête sociologique. Par conséquent, c’est sur la base du volontariat que les fiches sont renseignées et non sur la base d’un arbitraire statistique. Les organisateurs en sont bien conscients puisqu’ils livrent leurs résultats sous la forme de tendance ou de sentiment.
J’ai choisi de me pencher sur la réponse à la question : selon vous, les vols de vélos sont-ils rares ?
Quel que soit le niveau d’expertise du cycliste, ils sont entre 75 et 77% à trouver que les vols ne sont pas rares. Ce sentiment d’insécurité exprimé pose évidemment des questions.
Ce sentiment baisse avec l’âge, mais reste tout de même assez fort, puisque 69% des réponses des personnes de plus de 65 ans pensent que les vols de vélos ne sont pas rares. On pourrait également regarder du côté du genre.
Les femmes sont plus nombreuses à penser que les vols de vélos sont fréquents (inverse de rare). et globalement, ils sont cette fois 77% à le penser. Comme nous apprécions les tableaux et que l’enquête permet de croiser avec d’autres indicateurs, voyons du côté de la pratique.
Plus les gens pratiques la bicyclette moins ils pensent que le vol est fréquent, dans une proportion de 8 points entre ceux qui pratiquent régulièrement et ceux qui ont une pratique occasionnelle du vélo. Les « experts » sont presque à 80% persuadés que les vols de vélos sont fréquents.
D’après un article de la Dépêche du midi (du 4 décembre 2017), Toulouse subit en moyenne cinq vols par jour, ce qui correspondait à 1955 déclarations de vol au moment de la rédaction de l’article. Rapporté à la population toulousaine qui passe à 948 000 habitants au 1er janvier 2018 (Insee), cela nous donne 2 vols de vélo pour 1000 habitants. Cela correspond à la moyenne nationale qui est de 1,1 % des ménages, avec 321 000 déclarations de vol en 2016. Même si le nombre de pratiquants demeurent bien plus faible, puisque évalué à 3% de la population mobile, reste que le taux est beaucoup plus élevé que celui des vols de voitures, qui est de 0,2 % des ménages avec 49 000 véhicules volés en 2016, mais beaucoup moins que celui des vols dans les voitures, qui correspond à 2% des ménages. Et comme il n’est pas demandé dans l’enquête si le répondant s’est déjà fait voler un vélo, il est difficile de mesurer l’objectivité des réponses.
Ces chiffres, bien qu’officiels, méritent toutefois une attention particulière car on comprend bien que si la déclaration du vol de sa voiture ou dans sa voiture est quasiment évidente, celui du vélo demeure assujetti à la possibilité de remboursement sur facture, ce qui limite forcément le nombre de déclarations. Quoi qu’il en soit, le sentiment que le vol est fréquent pose question, car faute d’apporter une réponse politique appropriée, la pratique de la bicyclette en ville ne pourra pas croître dans la mesure des espérances de la FUB (qui souhaite porter à 12% le nombre de pratiquants).