Comment choisir un livre ?

L’équipe du séminaire aux pieds de l’université Jean Jaurès, Toulouse, © NJ 2019

Et voilà une première image de l’équipe du séminaire mercredi dernier lors de la « marche en ville ». Après cette balade, que peut-on se poser comme question ? Par exemple : que connaissons-nous de la ville ? De notre ville ou de la ville ? La ville vue comme une juxtaposition de quartiers, de morceaux de ville, mais qui font ville. Comment appréhender la ville dans ses aspects les plus retranchés, dans ses variations intimes ?

Il faut de l’expérience, du temps passé à observer, à regarder et à voir (ce qui n’est pas la même chose). Pour cela, on va s’équiper d’outils méthodologiques (on y viendra dans une quinzaine), et d’outils théoriques : le livre.

Une question qui peut paraître toute bête, mais qui, en fait, en dit long : comment choisir un livre ?

La dernière fois, j’ai parlé d’éditeur et l’on comprend assez rapidement que si un éditeur en vaut un autre, en revanche, son poids académique n’est pas le même. Mais cela peut paraître être une question secondaire au regard de l’auteur.

L’observation passe parfois par la photographie, jardin de Niel, Toulouse, © NJ 2019

Lorsque l’on ne connaît pas son sujet, et que l’on a une idée très approximative de ce que l’on cherche, le premier réflexe est d’aller à la bibliothèque pour chercher un livre en rapport avec son sujet. Evidemment, il ne faut pas s’attendre trouver l’ouvrage qui va répondre à toutes les questions, mais il faudra plutôt chercher par petites touches.

Il peut exister des cas où l’étudiant croule littéralement sous les informations. Par exemple, dans le domaine de la ville intelligente, smart city, il existe de très nombreuses publications qui font que l’on a du mal à savoir lesquelles lire en premier. Dans ce cas précis, on peut commencer par lire toutes les dernières publications, et remonter à la source. Mais dans les cas les plus fréquents, on commencera par reprendre l’histoire du sujet à travers les premiers livres sur le sujet. On classera donc les textes par ordre chronologique.

L’auteur appartient à un champ scientifique, à un courant scientifique, à une chapelle idéologique, à un courant politique et religieux, à une classe sociale. Il a par conséquent beaucoup de raisons de vouloir influencer par son savoir et ses écrits. La neutralité n’existe pas et c’est en lisant un texte d’un auteur que chacun va se faire un point de vue sur l’argumentation et sur, finalement, l’auteur. De proche en proche, et grâce à la bibliographie que l’on trouve en fin d’ouvrage, on va pouvoir se construire sa propre bibliographie. Mais c’est finalement parce que l’on a beaucoup lu que l’on peut cerner véritablement un sujet.

Voyez que la difficulté se transforme, et qu’à partir de la question de savoir comment choisir un livre, on arrive à celle du choix de l’auteur. Et cela dans chaque discipline. Or, la richesse de l’enseignement de l’architecture tient à la diversité des disciplines convoquées : architecture, bien sûr, mais aussi sciences sociales (sociologie, géographie, ethnologie, démographie), sciences humaines (philosophie, histoire), sciences appliquées (résistances des matériaux, mathématiques, écologie, science des sports), sans oublier les arts plastiques.

Les enseignants sont là pour guider l’étudiant dans ses choix, mais c’est à lui, en définitives, de faire ses propres choix, qui contribueront à construire sa personne.

La bibliographie : l’éternel retour

Sans titre, © NJ 2019

Chaque année c’est pareil, les étudiants ont du mal à comprendre le sens et les objectifs de la bibliographie. Donc, on y revient.

A quoi ça sert ?

La bibliographie permet d’évaluer vos capacités de lecture, d’apprécier vos lectures et les supports théoriques que vous avez utilisé dans votre mémoire. C’est pourquoi elle est importante, mais il ne faut ni tricher ni en ajouter. La bibliographie doit refléter votre pensée. Elle s’organise à partir de vos lectures qui ont un rapport plus ou moins évidant avec le sujet de votre mémoire. Mais comme ces lectures servent à alimenter votre réflexion, et que par analogie vous pouvez aller chercher des idées assez loin du sujet, plus vous en avez mieux c’est. Ça c’est un principe théorique.

Ensuite, vous devez trouver du sens à votre bibliographie, mais le lecteur aussi. Pour cette raison, il faut l’organiser de manière conventionnelle, et c’est là que ça devient drôle. D’abord parce que la plupart des revues ou des éditeurs ont leur propre critères de classement, d’autre part, parce que ces critères évoluent, notamment à cause ou grâce à l’Internet.

Classer votre bibliographie par ordre alphabétique des auteurs.

A,

B,

C

Le nom propre est indispensable si l’on veut savoir qui a écrit l’article ou le livre. Par exemple :

HERODOTE, 1964, Œuvres complètes, Paris : Gallimard, 1876 p.

HERODOTE : Nom de l’auteur en majuscule. Ici, il n’a pas de prénom, sinon on écrit soit la première lettre de son prénom, soit son prénom en entier. Cas particulier lorsque le prénom commence par la même lettre, pour le distinguer on écrit les deux premières lettres si il s’agit de consonnes, comme par exemple Patrick et Philippe. Sinon comment distinguer Patrick GABORIAU et Philippe GABORIAU ? Lorsqu’il s’agit d’un ouvrage collectif, on note les auteurs s’ils ne sont pas plus de quatre ou cinq, après ça devient long. Alors on note et alii pour signifier qu’il y en a d’autres.

1964 : L’année d’édition, parce qu’Hérodote ça date d’avant Jésus Christ. Mais là il s’agit d’une traduction, et d’une édition française. On pourrait ajouter le traducteur et la collection, mais ici on devrait pouvoir s’en sortir. Lorsque l’ouvrage est réédité, on notera quelque part l’année de la première édition, soit après l’année, soit après le titre.

Œuvres complètes : Le titre est en italiques, parce qu’il s’agit d’un ouvrage entier de l’auteur. S’il s’agissait d’un article, il serait écrit entre guillemets, et le titre de l’ouvrage serait porté plus loin. Le nom de la revue est en italiques.

Paris : Ville d’édition. Dans certains vieux livres, on ne trouve que la ville, d’éditeur était alors un imprimeur. Aujourd’hui, les villes ont leur importance car chaque éditeur est lié à une ville. Gallimard, Flammarion, L’Harmattan pour Paris, Actes Sud pour Arles, Agone et Parenthèses pour Marseille, etc. Pour les éditions universitaires c’est pareil, PUF pour Presses Universitaires de France à Paris, PUR pour Presses Universitaires de Rennes, PUL pour Presses Universitaires de Lyon, ou PUM Presses Universitaires du Mirail pour Toulouse, etc. Ça peut être aussi Londres, New-York, Berlin… pour les éditions étrangères.

Gallimard : C’est l’éditeur, qui donne une indication sur l’idéologie véhiculée. Je m’explique. On peut rapidement classer les éditeurs selon leur couleur ou leur tendance politique. Certains auteurs cherchent à augmenter leur capital symbolique (voir Bourdieu) et se retournent vers des éditeurs « prestigieux ». Mais c’est aussi une affaire de réseaux… Des maisons d’éditions il y en a des dizaines.

1876 p. : Ce n’est pas l’année d’édition mais le nombre de pages. Pourquoi indiquer le nombre de pages, pour faire sérieux. On peut s’en passer, sauf lorsqu’il s’agit d’un article, car il faut indiquer à quel endroit il se trouve dans une revue ou dans un livre collectif.

Voyons maintenant un article :

HASSOUN, Jean-Pierre (2005), « Dernières séances au palais Brongniart (1988 et 1998) Événement et contre-événement« , Ethnologie française, tome XXXV, Vol. 4, pp. 627-642

=> Munissez-vous de patience et commencez à rédiger votre bibliographie.

Aborder la ville à son rythme

La Garonne, la prairie des filtres, le Pont Neuf, quelles légendes adopter ? Toulouse, © NJ 2019

Découvrir une ville c’est s’y perdre disait l’autre, c’est s’y perdre en marchant.  Ce texte de Pascal Amphoux nous aidera à parcourir la ville à la recherche de traces, d’indices, de limites et de données qui font la ville, en l’abordant par la marche. Cette activité motrice retrouvée sera aussi l’occasion de se questionner sur les fonctions de la marche en ville, alors que l’accélération du temps social pousse les urbains à recourir à d’autres outils de la mobilité comme les « engins mobiles individuels ».

Dans ce texte, l’auteur propose de découvrir trois notions qui s’attachent à la mobilité : la motricité, la mouvance et l’émotion. Que reste-t-il de ces notions aujourd’hui, compte tenu des évolutions techniques de ces dernières années ?

La motricité, vers un retour à la marche ; longtemps ignorée par les études portant sur la mobilité, la marche à pied est aujourd’hui de retour, portée par un discours et des valeurs lui étant favorable. Peut-être pouvons-nous développer cette idée que l’on peut accoler aux mouvements écolos, aux injonctions pour retrouver un corps sain (marcher, bouger, manger moins, etc.).

La mouvance s’accorde avec l’espace social et socialisé. La marche devient par conséquent une pratique sociale qui tend à urbaniser la nature, surtout lorsque la marche s’effectue sur les pourtours des villes. On se reportera à l’article complémentaire de Philippe Sahuc sur les Chemins périurbains et des aménités qu’ils procurent, notamment dans les formes de sociabilité et les nouvelles pratiques face à l’environnement. Par exemple, la diminution de la tolérance vis-à-vis des pratiques anciennement « normales » dans la nature, comme la coupe d’une branche, ou la progression hors des sentiers battus, etc. qui se caractérise aujourd’hui par des rappels à l’ordre…

L’émotion est enfin le moteur de cette composante. L’étymologie elle même renvoie à la notion de mouvement (motio), et participe à sa manière au rêve. Pour reprendre l’anthropologue Pierre Sansot, « ce n’est pas moi qui rêve la ville, c’est la ville qui rêve en moi ». Là encore, on pourra rapprocher ce texte de celui de Sahuc et de la notion d’aménités. Par aménités, on entend les formes d’attrait du paysage, tout ce qui procure du bien être, de l’affabilité, du charme. Cette notion relève sans doute d’une subjectivité qu’il faut objectiver. Cependant, en termes de patrimoine, par exemple, nous avons des appuis solides. Le texte de Philippe Sahuc est en cela remarquable car il est à la fois concret, informatif et formatif.

Une lecture comparée restera enrichissante. Nous irons par conséquent en ville, à la recherche de traces, et, pourquoi pas, d’aménités.

=> Pascal Amphoux, (2004), « Marcher en ville », Annales de la recherche urbaine, 97, pp. 137-140

=> Philippe Sahuc, (2010), « Chemins périurbains: aménités vécues et enjeux réels », Natures Sciences Sociétés, 18, pp. 147-157

=> Pierre Sansot, (1971), Poétique de la ville, Paris, Klindsieck

Le Programme du séminaire

PROG2019VFVoici le pdf du programme dans sa trame flexible. Les cinq premières matinées, à partir du 25 septembre, seront consacrées à la rédaction du mémoire. Ces séances sont construites pour les étudiants en retour de mobilité, mais intéresseront également les étudiants de la promotion car elles leur permettront d’anticiper sur les objectifs à atteindre. (Je devais être fatigué quand j’ai écrit la première version !)

Les séances démarrent le matin à 9h, et seront l’occasion de commencer par un tour de table, et aussi de présenter un livre. Petit à petit les étudiants, à leur tour, présenteront un livre (en lien avec les activités du séminaire).

=> Les séances auront lieu en atelier H

Le jeu du décalage

Alessandro Pignocchi, Petit traité d’écologie sauvage, Steinkis éditions, 2017

Clémentine m’a fait découvrir ce livre d’Alessandro Pignocchi, intitulé Petit traité d’écologie sauvage, Steinkis éditions, 2017. Titulaire d’une thèse de doctorat en philosophie de l’EHESS en 2008, son travail consiste à aborder les choses à partir de dessins. Dans l’ouvrage, il opère par retournement en mettant en scène un ethnologue d’Amazonie devant des scènes Occidentales. Cet exercice n’est pas original en soit, car depuis Hérodote, la méthode a été plusieurs fois employée pour faire prendre consciences de l’écart entre les cultures. Mais elle mérite de poser le doigt sur des problèmes souvent liés à nos modes de compréhension du monde. Un tome 2 est sortie en 2018. Un autre suivra…

« Ancien chercheur en sciences cognitives et en philosophie, Alessandro Pignocchi s’est lancé dans la bande dessinée avec son blog, Puntish. » Je dirais qu’il n’a pas vraiment eu le temps (ou qu’il ne s’est pas donné le temps) de faire carrière. Avec beaucoup d’humour, l’auteur reprend des scènes de la vie quotidienne vues sous l’angle d’un décalage culturel grâce à une influence descolienne (de Philippe Descola) certaine.

L’anthropologue canadien, Horace Miner, est connu à travers le monde des anthropologues pour son fameux texte portant sur la tribu des Nacirema. Des traductions en français circulaient dans les années 1980 lorsque j’étais à Paris 8. Et nous étions surpris par la découverte des rituels et des formes d’interprétation du monde, tout en découvrant la forme de supercherie initiée de manière scientifique. Cette peuplade aux coutumes étranges n’est autre que celle des Américains (Nacirema à l’envers). Mais alors, l’écriture anthropologique est elle-même porteuse d’interprétations et de biais !

Cela nous rappelle également les Lettres persanes (1721) de Montesquieu. Cela fait également écho à un colloque à venir à Liège, le 25 septembre prochain, sur le thème  » Écriture et dessin ethnographiques : bousculons nos pratiques ! « , étonnant non ?

 

 

 

Liste des étudiants et des destinations Erasmus

Les animaux fantastiques, Lycée Saint Sernin, © NJ 2019

 

Voici la liste des étudiants en mobilité pour cette nouvelle année, et leur destination.

Je ne présente que par les prénoms, ils ou elles se reconnaitront, et les autres les reconnaitront également. De Munich à Chicago, de Lima à Grenade, en passant par Barcelone, Madrid ou Rio, voilà de belles destinations qui vont suivre ce séminaire. Comment les intégrer un peu mieux que l’année dernière ? Voilà une question que nous allons développer tout au long du premier semestre. Bien sûr, en demandant une « participation active », comme par exemple rédiger un billet, envoyer une photographie… Mais nous aurons d’autres rendez-vous avec ces « sentinelles » autour du monde.

Comme vous le savez, cette année, nous proposons de réfléchir autour de la question du rêve. Le rêve est à la fois l’espérance et l’utopie. Mais où se trouve la limite entre ces deux notions ? Chacun d’entre vous peut se saisir de cette question et essayer de rédiger une dizaine de ligne…

Anna  (Munich, Allemagne)

Anaëlle  (Chicago, USA)

Margaux  (Lima, Pérou)

Medhi  (Barcelone, Espagne)

Léa  (Grenade, Espagne)

Aurélie  (Madrid, Espagne)

Justine  (Lima, Pérou)

Jacques  (Rio, Brésil)

Pauline  (Madrid, Espagne)

Nous souhaitons une bonne installation et un bon séjour à toutes et à tous.

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