Kit de (se)cours-31: participez à l’inventaire collectif des pratiques

En vue de la prochaine promotion des jeunes enseignants, et eu égard au cadre référentiel du métier d’enseignant spécial “Refondation”, en préparation de ce que seront les modules professionalisants des futurs ESPE, André de Peretti et moi-même vous proposons un “Kit de (se)cours pour l’enseignant“, en 50 épisodes. Ils paraitront sur le présent blog régulièrement jusqu’au printemps.

C’est un complément (Kit) utile au Manuel de survie de l’enseignant même débutant, éd. L’Etudiant, dont la 4ème édition est sortie en septembre dernier. Il présente en 30 chapitres et 500 pages les enjeux, ressources et pratiques contemporaines du métier.

Le Kit a été référencé par “la Toile de l’Education” du Monde, le 28 janvier 2013 (rubrique ressources pédagogiques).

l’innovation, un clip en bandes dessinées autour de cinq mots

A l’occasion des Journée nationales de l’innovation, les 28 et 29 mars 2012, l’équipe du DRDIE (département Recherche et développpement en innovation et en expérimentation) de la DGESCO (Direction générale de l’enseignement scolaire) a produit un clip animé autour de cinq mots qui explicitent ce qu’innovation pourrait signifier en éducation

[dailymotion]
Journées de l’innovation, 28 et 29 mars 2012 par Education_nationale[/dailymotion]

De l’accompagnement personnalisé et d’autres choses, vraisemblablemen

sommaire

  • Doctus cum libro, un guide
  • Mac Mahon  en pédagogie ? contenus ou objectifs ? 40 questions à l’accompagnement
  • Diversification pédagogique au lycée (groupements, variété, autonomie)
  • Quelles sont les « forces » qui travaillent le métier d’enseignant à l’occasion de ces nouveaux dispositifs de l’accompagnement ?
  • Mais aussi, combiner les dispositifs « ACP » et tutorat

Doctus cum libro

Destiné aux collégiens, le guide après la 3ème de l’ONISEP concerne aussi les profs de lycée ! « Ce guide présente le nouveau lycée où vous entrerez l’année prochaine. Car c’est tout le lycée, dans ses différentes voies, qui se transforme pour être à votre portée, plus simple d’accès et plus accueillant ». Le classique guide « Après la 3ème » prend un coup de neuf cette année avec la réforme du lycée. Il présente les changements dans l’organisation du lycée mais aussi les nouvelles options proposées aux lycéens.

Ainsi l’accompagnement est défini :  » de l’aide individualisée et/ou du perfectionnement ainsi que de l’apprentissage de méthodes de travail. De l’apprentissage de l’autonomie par le biais de travaux interdisciplinaires de type TPE , les TPE étant par ailleurs maintenus à l’identique en classe de 1re. Des temps consacrés au suivi du parcours de l’élève et à l’aide à l’orientation avec, par exemple, la découverte de milieux professionnels ».

L’accompagnement personnalisé est conduit de manière privilégiée dans le cadre de groupes à effectifs réduits« .

Sa forme est complexe. Il comprend « des activités coordonnées de soutien, d’approfondissement, d’aide méthodologique et d’aide à l’orientation » mais « il prend notamment la forme de travaux interdisciplinaires ».

Le B.O. énumère ce qui peut être fait : travail sur les compétences de base, parcours d’orientation et bien sur travaux interdisciplinaires. « Il peut, par exemple, prendre la forme d’un suivi plus particulier d’un ou de quelques élèves, via l’usage des technologies de l’information et de la communication » nous dit le B.O. ce qui pourrait amorcer une reconnaissance officielle de nouvelles activités pour les enseignants.

Mac Mahon  en pédagogie ?

Quand le maréchal Mac Mahon a été élu président de la République, presque malgré lui et surtout contre Thiers, en 1873, il entra pour la première fois au Palais de l’Elysée ; sa première question, arrivé au bureau, fut « Où est le règlement ? », tout bon militaire qu’il était. Et tout piteux politique qu’il fut par la suite.

Si nous osions filer la métaphore, notre ami enseignant, tout bien (ou pas) formé qu’il soit, peut arriver dans la pré-rentrée, en posant une question qui s’impose à lui, quand il aperçoit, deux heures d’accompagnement personnalisé inscrites dans son emploi du temps : « Quel contenu ? » .

Ainsi, pour éviter le mac-mahonisme en pédagogie, il sera important, pour soi mais aussi avec le groupe des enseignants concernés, possiblement lui-même accompagné (ce serait encore mieux), de

questionner le concept avant que d’organiser le groupe et les dispositifs[1], ce sera toujours utile.

1. Pourquoi parle-t-on de l’accompagnement ?

2. D’où vient ce mot, nouveau, d’accompagnement ?

3. Qui parle d’accompagnement ?

4. Qui accompagne ? L’accompagnement est-il réservé à une catégorie, à un statut, à une fonction plus particulière ?

5. Comment vient-on à l’accompagnement ? Pour l’accompagnateur ? Pour les « accompagnés » ?

6. Qu’est-ce qu’on accompagne ?

7. Où accompagne-t-on ? Peut-on dire que des lieux sont dédiés ou non à l’accompagnement ?

8. Peut-on repérer et spécifier des modalités propres à l’accompagnement ?

9. Existe-t-il des méthodes ou des techniques de l’accompagnement ?

10. Quelle est la dimension du temps dans l’accompagnement ?

11. Y-a-t-il des domaines qu’on accompagne plus que d’autres ?

12. Peut-on distinguer des niveaux ou degrés dans l’accompagnement ?

13. Peut-t-on préciser des « styles » d’accompagnement ou d’accompagnateurs ?

14. Peut-on se former à l’accompagnement ?

15. Est-ce qu’un formateur est-il le mieux placé pour faire un accompagnement ?

16. Peut-on rapprocher l’accompagnement d’autres pratiques sociales ou professionnelles ?

17. L’Education présente-elle des spécificités dans l’accompagnement ?

18. Comment expliquer que le concept comme la pratique de l’accompagnement puissent poser problème dans l’Education nationale ?

19. Quelle est la finalité de l’accompagnement ?

20. Peut-on assimiler accompagnement et formation ?

21. Est-ce que l’accompagnement est une « intervention » ?

22. Quels sont les domaines ou niveaux différents entre accompagnement et formation ?

23. Quelles images ou représentations viennent plus particulièrement quand on parle d’accompagnement ?

24. Si j’avais à représenter les qualités intrinsèques de l’accompagnement par un animal-totem, à la manière des bestiaires médiévaux, ce serait….

25. Qu’est-ce que l’accompagnateur n’est surtout pas ?

26. Quelles figures peut incarner l’accompagnateur ?

27. Peut-on proposer une sorte de check-list des actes, gestes et postures, possibles, de l’accompagnateur ?

28. Quel est l’intérêt de l’accompagnement ? Pour l’accompagné, pour l’accompagnateur, pour l’organisation, pour les élèves ?

29. Quel est le coût de l’accompagnement ?

30. Quelles sont les difficultés principales dans un accompagnement ?

31. Quelles sont les « balises » de l’accompagnateur ?

32. Sur quelles ressources peut compter l’accompagnateur ?

33. L’accompagnateur est-il lui-même accompagné ?

34. Quels sont les effets de l’accompagnement sur les « accompagnés » ? à court ou moyen terme ?

35. Quand peut-on dire que l’accompagnement se termine ?

36. Quelles peuvent être les dérives de l’accompagnement ?

37. Peut-on proposer une sitographie relative à la problématique de l’accompagnement ?

38. Peut-on repérer quelques ressources efficaces et disponibles, pour nourrir sa pratique d’accompagnateur et sa propre réflexion ?

39. Quel est l’avenir de l’accompagnement ?

40. Pourriez-vous au terme de ce cheminement questionnant et réflexif donner en une phrase ce qu’est l’accompagnement pour vous ?

Certaines questions s’imposent, plus que d’autres, selon les équipes, selon les contextes ; mais déjà, proposer un questionnement riche, et s’engager dans une élaboration collective de la réponse, progressive – il faudra du temps ,et un peu de pratiques, de régulation aussi- , c’est déjà …. une démarche d’accompagnement. La réponse appartient aux acteurs !

C’est  » l’équipe pédagogique (qui) élabore le projet d’accompagnement personnalisé » avant de le transmettre au conseil pédagogique et au conseil des délégués pour la vie lycéenne puis au C.A..  » Sous l’autorité du chef d’établissement, l’équipe pédagogique met en œuvre les choix retenus par le conseil d’administration, et le professeur principal en assure la coordination ». Tous les professeurs peuvent y participer.

Diversification pédagogique au lycée

Ce dispositif n’a de raison d’être qu’à l’échelle d’un établissement, car il s’appuie sur un politique d’évaluation et de gestion des groupes d’élèves ; la coordination ou cohérence des offres de formation relève lui aussi du niveau de l’établissement.

L’enjeu au lycée, à l’occasion de l’ACP, des modules d’exploration, comme des TPE plus tôt, c’est bien la diversification pédagogique, non plus par des mesures de structures (filières, classes), mais par des pratiques et des dispositifs souples.

Pédagogie des petits groupes

Il importe que la variété des possibilités[2] soit explicitée en vue de soutenir les choix pertinents et d’éliminer les effets de routine ou le manque d’imagination.

GESTION PEDAGOGIQUE VARIEE  DANS UNE CLASSE  POUR UN PROFESSEUR

GESTION PEDAGOGIQUE DIVERSIFIEE ENTRE PLUSIEURS CLASSES

GESTION PEDAGOGIQUE DIFFERENCIEE DANS UN ETABLISSEMENT SCOLAIRE

1- L’enseignement varié en classe plénière 3- L’enseignement diversifié en une variété de groupes de méthodes 5- L’enseignement différencié par l’emploi du temps souple
2- L’enseignement par sous-groupement et regroupements des élèves en classe 4- L’enseignement diversifié en une variété de groupes “ de niveau” ou “d’homogénéité” 6- L’enseignement différencié par organisation générale et projets de l’établissement

Variété requise des offres de formation

Deux  heures par semaine sont consacrées à l’accompagnement personnalisé, forme d’enseignement qui s’adresse à tous les élèves de 2de générale et technologique.

Il vise plusieurs buts :

  • vous aider à surmonter les premières difficultés éventuelles afin de ne pas perdre pied
  • vous aider à aller plus loin en vous donnant du temps pour approfondir ou effectuer des recherches individuelles dans certaines matières
  • vous faire acquérir des méthodes de travail (prise de notes, organisation personnelle, recherche documentaire, travaux interdisciplinaires…), le sens de l’autonomie, et une culture générale suffisante pour décrypter le monde actuel
  • enfin, vous permettre de réfléchir à votre orientation future, y compris en poursuivant votre découverte des formations.

Les temps de l’accompagnement se définissent donc plutôt en termes d’objectifs, de développement de compétences des élèves, qu’en termes de « contenus » programmatiques , riches, variés, puisés dans les programmes des enseignements prodigués par ailleurs.

C’est une réponse à une angoisse exprimée il y a quelques années : « pourvu qu’ils apprennent ?[3] »

Autonomie, coopération et responsabilité des élèves

Cette variété, non tant des contenus, que des objectifs, ajustés aux besoins comme aux vœux des élèves, n’a de sens que si l’équipe engagée dans ce dispositif, prendra d’une manière ou d’une autre, appui sur les élèves :

–          analyse diagnostique (consultation écrite, tests d’évaluation, entretiens etc…) initiale et à mi-parcours pour redistribuer les groupes

–          validation des compétences par co-évaluation

–          possibilité de choix, prise en compte des vœux

–          possibilité de prise de responsabilité et temps d’autonomie dans le travail

Nous retrouvons ici la finalité de toute discipline scolaire et du système éducatif : l’autonomie. Pour parodier un vieil adage : « l’autonomie n’existe que si on s’en sert ».

Quelles sont les « forces » qui travaillent le métier d’enseignant à l’occasion de ces nouveaux dispositifs de l’accompagnement et du tutorat ?

Différencier les pratiques, individualiser les parcours, prendre en compte l’hétérogénéité font travailler fortement l’identité professionnelle.
C’est l’apparition d’une logique plus complexe, plus floue, mais plus pertinente, plus personnalisante du métier.   C’est bien le même métier qui développe ou approfondit, selon les contextes, selon les profils des personnels, selon les niveaux aussi, des compétences, souvent germinatives. Bien des dispositifs apparus dans le cadre des innovations/expérimentations (art.34) depuis des années ont déjà construit ces pratiques.

corrélats: style d’enseignement, guidance, facteurs d’efficacité de l’apprentissage les 6 postures du formateur

Le tableau synoptique ci-dessous[4] tranche en deux colonnes (logique d’enseignement, logique de formation), mais il s’agira bien plus pour chacun d’entre nous de nous interroger sur la place où nous mettons le curseur.

Ces deux approches sont complémentaires ; cependant la validation des compétences, en fonction des indications du socle, nous invite à découvrir bien des aspects d’organisation de la formation, avant que de s’intéresser directement à l’évaluation terminale.

Dans une logique d’enseignement

(phase d’enseignement)

Ce serait plutôt…

u

Dans une logique de formation

(phase d’exploration ou d’accompagnement)

Alors que ce serait plutôt….

partir d’un programme

u

partir des besoins, des pratiques et des problèmes rencontrés
cadres et démarches imposés

u

cadres et démarches négociés
contenu standardisé

u

contenu individualisé
focalisation sur les savoirs à transmettre et leur organisation en un texte cohérent

u

focalisation sur les processus d’apprentissage et leur régulation
évaluation sommative

u

évaluation formative
personnes mises entre parenthèses

u

personnes au centre
apprentissage = assimilation de connaissances

u

apprentissage = transformation de la personne
priorité aux connaissances

u

priorité aux compétences
planification forte

u

navigation à vue
groupe = obstacle

u

groupe = ressource
fiction d’homogénéité au départ

u

bilan de compétences au départ
s’adresse à un élève

u

s’adresse à un sujet « se formant »
travail à flux poussés selon un programme

u

travail à flux tendus en fonction du temps qui reste pour atteindre l’objectif
posture de savant partageant

un savoir

u

posture d’entraîneur prêtant main forte à une autoformation

C’est bien une logique organisée en système, au niveau de l’établissement, dont il faut à présent nous saisir et non d’une simple mesure technico-administrative ou un autre application de « réforme ».

Mais aussi, combiner les dispositifs « ACP » et tutorat

Le tutorat est aussi évoqué et peut se différencier de l’ACP par sa relation inter-individuelle, bilatérale, et volontaire. C’est une modalité de travail très complémentaire du travail en petit groupe. Les objectifs et conditions sont cependant parfois différents.

Vous trouverez plusieurs pages-ressources reprenant les éléments essentiels du tutorat, et aussi sur  http://francois.muller.free.fr/diversifier/le_tutorat.htm et

http://francois.muller.free.fr/diversifier/se_former_au_tutorat.htm

EN AUDIO

On pourra utilement (re)écouter les podcasts des entretiens avec André de Peretti:


[1] Un travail d’écriture collaborative entrepris avec le groupes des formateurs et responsables de formation de l’académie de Montpellier, juin 2007….., conduit par FMuller. Voir pour aller plus loin

http://innovalo.scola.ac-paris.fr/Innovatio/innovatio3/cadres.htm

http://probo.free.fr/accompagnement/accompagnement_et_formation_accompagnante.htm

[2] extrait de fiche 4: ORGANISATION DE L’ENSEIGNEMENT ET GESTION DIFFERENCIEE DES GROUPEMENTS D’ELEVES DANS LES ETABLISSEMENTS SCOLAIRES d’après André de PERETTI, Encyclopédie de l’évaluation en formation et en éducaton, Guide pratique, Paris, ESF, pp.296 sq. (avec l’aimable autorisation de l’auteur)  EXCLUSIF . Voir sur http://francois.muller.free.fr/diversifier/GROUPES.htm

[3] http://www.unige.ch/fapse/life/livres/Davissse_Rochex_R1998_A.html

[4] d’après Extrait de Ph. PERRENOUD, Quelle formation à la professionnalisation pour les enseignants d’aujourd’hui, MAFPEN et IUFM de l’académie de Nice, 15 janvier 1998

Passer la « frontière »: organisation apprenante et ingénierie requise

Dans un précédent article, nous évoquions la « frontière invisible » dans l’établissement; il s’agit bien souvent de (ne pas) toucher à l’organisation du travail, en (ne pas) favorisant l’élaboration collective, la mise en débat du métier, l’analyse partagée de données et de résultats. Ces « petits pas », lents, mais progressifs, sont les conditions d’une organisation qui apprend d’elle-même, sur elle-même, et pour elle-même.  (voir l’intevention d’Alain Bouvier sur ce sujet).

Cette dimension « moderne », quand bien même dans d’autres organisations elle date de plusieurs (dizaines) d’années, concerne à présent le travail d’établissement et d’école; le « travail d’équipe » ou « en équipe », maintes fois invoqué (comme), parfois réalisé, ne peut se produire sans un minimum d’organisation et une part certaine d’ingénierie.

C’est pourquoi il est intéressant de se pencher sur les ressources développées par exemple chez nos collègues de l’Institut Atlantique d’Aménagement des Territoires (IAAT) de la région Poitou-Charentes, à qui j’emprunte ici la page, pour donner envie.

Au moins, faites-vous une idée. Aprés, nous pourrons en reparler, notamment avec les pages développées sur le site de l’Innovation (rubrique « équipe« ).


Guide méthodologique du travail en commun

guide méthodologique du travail en communLe tableau ci-dessous récapitule l’ensemble des méthodes présentées dans le guide méthodologique :
– pour consulter et télécharger une méthode : cliquer sur le nom de la méthode
– pour consulter ou télécharger l’ensemble des méthodes décrites sur un thème : cliquer sur « télécharger le chapitre ».
– la colonne niveau de difficulté indique, sur une échelle de 1 à 3 étoiles, si la méthode est simple à mettre en œuvre (*) ou plus complexe (***).
– la mention « Conseil » précise qu’il ne s’agit pas d’une méthode mais d’un recueil d’astuces.

Besoins Méthodes
(fiches à télécharger)
Poids du pdf Niveau de
difficulté
Pour…
Collecter
de l’information
sur Internet

Télécharger le chapitre
448 ko
Penser sa stratégie
de recherche
38 ko conseils Rechercher
des informations
Les annuaires 86 ko *
Les moteurs de recherche 68 ko *
Les méta-moteurs de recherche 67 ko *
Penser sa stratégie de veille 41 ko conseils Veiller
des thématiques
et des sites
Les listes de diffusion 45 ko *
Les outils de surveillance 49 ko *
Stimuler les idées
Télécharger le chapitre
800 ko
Le brainstorming 286 ko * Produire
des idées
Les 5 pourquoi 43 ko *
Le CIRCEPT 92 ko *
Métaplan 50 ko * Traiter
des idées
La matrice de découverte 44 ko **
La carte conceptuelle 116 ko *
L’analyse sémantique 42 ko * Lever
des freins
La technique du groupe nominal 65 ko *
Analyser l’environnement
Télécharger le chapitre
345 ko
La grille MOFF 43 ko * Analyser
pour anticiper
Le diagramme Causes / Effets 106 ko *
Le benchmarking 89 ko **
Les cercles de qualité 49 ko **
La méthode de résolution de problèmes 49 ko * Analyser
pour résoudre
La méthode de raisonnement ODSA 51 ko **
Elaborer
une stratégie
prospective

Télécharger le chapitre
1 182 ko
L’analyse structurelle 381 ko ** Analyser
l’environnement
Les arbres de compétences 109 ko **
MACTOR 298 ko ***
DELPHI 46 ko **
La grille des enjeux 42 ko * Anticiper
les risques
La technique du risque 48 ko *
MORPHOL 177 ko *** Elaborer
des scénarios
Aider à la décision
Télécharger le chapitre
652 ko
La matrice d’Eisenhower 114 ko * Hiérarchiser
les idées
Le diagramme de Pareto 80 ko **
Les arbres d’objectifs 139 ko *
Le diagramme d’affinités 76 ko **
La méthode Philips 6.6 41 ko *
La matrice de compatibilité 54 ko * Choisir les bonnes solutions
Le vote pondéré 46 ko *
Le tableau multi-critères 57 ko **
Planifier le projet
Télécharger le chapitre
487 ko
Le diagramme de GANTT 103 ko ** Identifier les étapes
Le diagramme de PERT 76 ko *** Organiser le projet
La méthode QQCQCCP 47 ko *
La méthode MOSI 147 ko *
Le cahier des charges fonctionnel 62 ko ***
Animer une réunion
Télécharger le chapitre
443 ko
Préparer la réunion 39 ko conseils Maîtriser les phases
de la réunion
Ouvrir la réunion 38 ko conseils
Maîtriser le déroulement
de la réunion
39 ko conseils
Clore la réunion 37 ko conseils
Les rôles et attitudes
de l’animateur
45 ko conseils Maîtriser le rôle
d’animateur
Les outils de l’animateur 48 ko *
Gérer les principaux problèmes 53 ko conseils
La parole est d’or 48 ko * Maîtriser la diffusion
du message
La technique du voisinage 47 ko *

fichier PDF Guide méthodologique du travail en commun – 4,7 Mo télécharger le document
Nous contacter en cas de problème lors du téléchargement ou de l’impression.

fichier PDF Bibliographie – 41 Ko télécharger le document

« Accompagner », un mot, un concept, des questions (tags et carte heuristique)

A l’occasion de l’accompagnement d’un groupe de nouveaux formateurs « lycée » tout au long de cette année, nous avons développé, expérimenté, analysé et éprouvé l’accompagnement d’équipes en établissement. Découverte pour tous, pourtant issus de milieux et de formations assez différents, le concept et les pratiques se mettent progressivement en place, grâce notamment à l’analyse croisée et partagée, entre eux certes, mais aussi en se mettant en contact avec les travaux d’autres groupes, tels que ceux de Paris (dont la publication en 2002 décrit les « gestes, actes et postures » de l’accompagnateur; mais aussi les travaux de Montpellier (voir ci-dessous les 40 questions de l’accompagnement: où le questionnement permet d’élaborer progressivement ses réponses en la matière.

La dernière reprise a permis de tester deux outils trés « tice » l’un et l’autre: d’une part, le logiciel en ligne, wordle.net que j’avais déjà évoqué à l’occasion d’une formation « diversifier ses pratiques » et de l’innovation, puis le logiciel à télécharger, free mind, qui permet d’élaborer rapidement une carte heuristique.

Une analyse lexicographique en temps réel, l’exemple de WORDLE

Le premier questionnement a porté sur les éléments qui caractérisaient la réussite de la formation pour les équipes sur site. Les interventions orales ont été saisies en direct sur poste, puis immédiatement traitées par Wordle. AInsi, la restitution graphique, avec plusieurs possibilités, a permis d’organiser l’analyse en faisant surgir les maitres-mots, et les champs lexicaux.

Une analyse différée par carte heuristique

Dans la restitution écrite, les mêmes interventions ont été décryptées en une organisation en carte heuristique, dont je vous livre une partie, celle concernant la même question (les réussites pour l’équipe).

Retrouver les principes fondamentaux de l’accompagnement

L’intérêt de ces deux outils, outre leurs facilités d’accès et la qualité graphique, parfois esthétique, de leur restitution, est indéniablement qu’ils retrouvent là des principes fondatementaux de l’accompagnement: une écoute active et bienveillante, une réflexivité pour les acteurs, une possibilité d’analyse partagée, l’engagement dans un processus collaboratif entre un groupe et son accompagnateur, des traces du travail, pas à pas, une médiatisation de la complexité des choses vécues dans l’organisation des savoirs et la conceptualisation de l’expérience professionnelle.

/* Style Definitions */
table.MsoNormalTable
{mso-style-name: »Tableau Normal »;
mso-tstyle-rowband-size:0;
mso-tstyle-colband-size:0;
mso-style-noshow:yes;
mso-style-priority:99;
mso-style-qformat:yes;
mso-style-parent: » »;
mso-padding-alt:0cm 5.4pt 0cm 5.4pt;
mso-para-margin:0cm;
mso-para-margin-bottom:.0001pt;
mso-pagination:widow-orphan;
font-size:10.0pt;
font-family: »Times New Roman », »serif »;}

De l’accompagnement,

Une élaboration du concept par approximations successives

Un travail d’écriture collaborative entrepris avec le groupes des formateurs et responsables de formation de l’académie de Montpellier, juin 2007…..,

1. Pourquoi parle-t-on de l’accompagnement ?

2. D’où vient ce mot, nouveau, d’accompagnement ?

3. Qui parle d’accompagnement ?

4. Qui accompagne ? L’accompagnement est-il réservé à une catégorie, à un statut, à une fonction plus particulière ?

5. Comment vient-on à l’accompagnement ? Pour l’accompagnateur ? Pour les « accompagnés » ?

6. Qu’est-ce qu’on accompagne ?

7. Où accompagne-t-on ? Peut-on dire que des lieux sont dédiés ou non à l’accompagnement ?

8. Peut-on repérer et spécifier des modalités propres à l’accompagnement ?

9. Existe-t-il des méthodes ou des techniques de l’accompagnement ?

10. Quelle est la dimension du temps dans l’accompagnement ?

11. Y-a-t-il des domaines qu’on accompagne plus que d’autres ?

12. Peut-on distinguer des niveaux ou degrés dans l’accompagnement ?

13. Peut-t-on préciser des « styles » d’accompagnement ou d’accompagnateurs ?

14. Peut-on se former à l’accompagnement ?

15. Est-ce qu’un formateur est-il le mieux placé pour faire un accompagnement ?

16. Peut-on rapprocher l’accompagnement d’autres pratiques sociales ou professionnelles ?

17. L’Education présente-elle des spécificités dans l’accompagnement ?

18. Comment expliquer que le concept comme la pratique de l’accompagnement puissent poser problème dans l’Education nationale ?

19. Quelle est la finalité de l’accompagnement ?

20. Peut-on assimiler accompagnement et formation ?

21. Est-ce que l’accompagnement est une « intervention » ?

22. Quels sont les domaines ou niveaux différents entre accompagnement et formation ?

23. Quelles images ou représentations viennent plus particulièrement quand on parle d’accompagnement ?

24. Si j’avais à représenter les qualités intrinsèques de l’accompagnement par un animal-totem, à la manière des bestiaires médiévaux, ce serait….

25. Qu’est-ce que l’accompagnateur n’est surtout pas ?

26. Quelles figures peut incarner l’accompagnateur ?

27. Peut-on proposer une sorte de check-list des actes, gestes et postures, possibles, de l’accompagnateur ?

28. Quel est l’intérêt de l’accompagnement ? Pour l’accompagné, pour l’accompagnateur, pour l’organisation, pour les élèves ?

29. Quel est le coût de l’accompagnement ?

30. Quelles sont les difficultés principales dans un accompagnement ?

31. Quelles sont les « balises » de l’accompagnateur ?

32. Sur quelles ressources peut compter l’accompagnateur ?

33. L’accompagnateur est-il lui-même accompagné ?

34. Quels sont les effets de l’accompagnement sur les « accompagnés » ? à court ou moyen terme ?

35. Quand peut-on dire que l’accompagnement se termine ?

36. Quelles peuvent être les dérives de l’accompagnement ?

37. Peut-on proposer une sitographie relative à la problématique de l’accompagnement ?

38. Peut-on repérer quelques ressources efficaces et disponibles, pour nourrir sa pratique d’accompagnateur et sa propre réflexion ?

39. Quel est l’avenir de l’accompagnement ?

40. Pourriez-vous au terme de ce cheminement questionnant et réflexif donner en une phrase ce qu’est l’accompagnement pour vous ?

Apprendra-t-on de l’expérience ? L’exemple du D-DAY en éducation et en formation

Parfois, il est quand même intéressant de jeter des brefs coups d’oeil dans la presse nationale, si, si. Un trés récent article, de fin de journal, dans Libération (30 mars 2009) nous embarque dans une expédition de hauts stratéges de l’Armée, en vadrouille sur le terrain normand, là où le D-Day a marqué le Monde.

Quelques extraits:

/* Style Definitions */
table.MsoNormalTable
{mso-style-name: »Tableau Normal »;
mso-tstyle-rowband-size:0;
mso-tstyle-colband-size:0;
mso-style-noshow:yes;
mso-style-parent: » »;
mso-padding-alt:0cm 5.4pt 0cm 5.4pt;
mso-para-margin:0cm;
mso-para-margin-bottom:.0001pt;
mso-pagination:widow-orphan;
font-size:10.0pt;
font-family: »Times New Roman »;
mso-fareast-font-family: »Times New Roman »;}

PLAGES DE NORMANDIE, envoyé spécial JEAN-DOMINIQUE MERCHET

Le brouillard était bien là, mais celui dont nous parlait le colonel était celui de la guerre, le « Nebel des Krieges», du grand stratège Carl von Clausewitz. Ce flou permanent qui empêche le chef militaire de connaître précisément la situation sur le terrain.

Le staff ride ou apprendre de l’expérience, ensemble.

Sur le terrain du débarquement de Normandie, ce jour-là, la troupe était composée uniquement de chefs. Un groupe d’officiers supérieurs, tous colonels ou capitaines de vaisseau, cadres au Collège interarmées de défense (CID), l’ancienne Ecole de guerre. Plus deux généraux, un amiral et trois historiens. Ajoutez un journaliste embedded, vous avez un staff ride. Un staff ride, c’est donc un voyage d’état-major sur les lieux d’une bataille. Il ne s’agit pas de la rejouer avec des troupes ou sur un simulateur, mais de l’analyser, les pieds dans la boue, pour en tirer des leçons générales de stratégie. C’est une école de chefs militaires, avec une pédagogie très éloignée des habitudes françaises, qui privilégient l’exposé théorique dans un amphi, en deux parties et deux sous-parties.

Le staff ride est une habitude très américaine que les Français redécouvrent. Il s’agit d’une invention prussienne de la Kriegsakademie, au XIXe siècle, dont les pratiques militaires américaines sont largement inspirées. Avant la guerre de 1914, Ferdinand Foch, qui enseignait à l’Ecole de guerre, ne manquait pas d’emmener ses élèves sur les champs de bataille de 1870. Mais l’habitude s’en était perdue et, aujourd’hui, il faut faire appel au savoir-faire américain.(…)

Apprendre de l’expérience et de son « genre » professionnel, et d’abord pour les cadres

Pour les officiers qui doivent planifier les opérations actuelles, le Débarquement offre un autre avantage : c’est l’une des rares batailles à être totalement «interarmées», «joint», disent les Américains, une combinaison d’opérations navales, aériennes et terrestres. Rien n’est plus difficile à organiser. «Je veux que l’histoire militaire et l’étude des grands principes de la stratégie reprennent toute leur place dans notre enseignement», nous confie le général Vincent Desportes, qui commande le CID. Chaque année, 380 officiers, dont un tiers d’étrangers, en suivent les cours pendant un an. Lorsqu’ils en sortent, on dit qu’ils sont «brevetés» (….)

Le général Desportes est un personnage, l’une des têtes pensantes de l’armée. Ancien officier dans les chars, ce descendant d’un lieutenant de Du Guesclin écrit des livres très lus dans la communauté militaire, comme la Guerre probable en 2007. Directeur de collection chez Economica, il tente de faire revivre la pensée militaire française, telle qu’elle existait dans les années 30, lorsque le colonel de Gaulle publiait Vers l’armée de métier, une critique de la doctrine militaire d’alors. Vincent Desportes a été détaché pendant cinq ans aux Etats-Unis. A l’US Army War College, il a découvert les staff rides, qui se font là-bas sur les sites des grandes batailles de la guerre de Sécession. «Cela permet à chacun de s’élever : le capitaine réfléchit comme un colonel et le colonel comme un général», dit le général. Il essaie aujourd’hui d’acclimater la pratique à la France.

Improviser ou l’art de la guerre

Ce matin de mars, il n’y a pas que le «brouillard de la guerre». Il y en a aussi la «friction». Clausewitz, toujours lui, nomme ainsi les petits détails qui font que les choses ne se déroulent jamais comme prévu. Alors que notre troupe a réembarqué dans son car pour rejoindre Utah Beach, le chauffeur nous apprend que la route est coupée par les inondations habituelles en cette saison dans les marais de Carentan. Il faut faire un détour, donc perdre du temps, alors que tout est soigneusement minuté durant ces deux jours. (…)

«Que faire ?» demande le colonel Peter H. Herrly aux officiers français. Tous les plans sont chamboulés et il faut «im-pro-vi-ser». L’anecdote vaut d’être contée : cette division était commandée par le général Theodore Roosevelt Jr, fils du président Theodore Roosevelt et petit-neveu du président alors en exercice Franklin Roosevelt. Il fut le seul général à débarquer avec la première vague. C’était un grand malade qui ne pouvait marcher qu’avec une canne ; dans le Jour le plus long, il est incarné par Henry Fonda. Que fait-il ? Il s’adapte : «We’ll start the war from right here !» («On va commencer la guerre à partir d’ici»). Les officiers français hochent la tête, réalisant que la «planification opérationnelle» sur laquelle ils travaillent à longueur d’années doit, à la guerre, souvent céder le pas au simple bon sens.

Commandement unique et commandement divisé

En Normandie, les Allemands étaient aussi de la partie. Il y avait même parmi eux «des gars venus de Géorgie», comme disait Michel Sardou, engagés dans les Ostbataillonen recrutés dans le Caucase.(…). Tout le monde a pourtant ses cartes d’état-major à la main. Au débriefing du soir, qu’a-t-on retenu ? Que l’armée allemande ne respectait pas l’un des principes essentiels de la guerre : l’unité de commandement. En clair, il n’y avait pas un chef, mais plusieurs (Rommel, Von Rundstedt, etc.) n’ayant pas les mêmes idées sur la manière de repousser l’ennemi. Seul Hitler pouvait trancher. Et comme chacun sait, au moment du Débarquement, il dormait…

Question de point de vue

Reste un problème : comment faire travailler ensemble des terriens, des marins et des aviateurs. La question se posait en 1944, il n’est toujours pas vraiment réglée. Dans notre staff ride, il y a des pilotes de chasse, des commandants de frégates, des fantassins et même des gendarmes. Chacun réfléchit à sa manière. Vu de la mer, de la tourelle d’un char ou du cockpit d’un avion, le monde n’est pas le même.

Léger mouvement d’humeur, lorsqu’un représentant de l’armée de l’air Jérôme de Lespinois revient sur les cafouillages des bombardiers lourds, utilisés à contre-emploi, à la demande des terriens. «Il ne faut jamais dire à la personne dont on attend l’appui comment faire, mais quel effet on attend de lui», conclut un cadre. Chacun son job et les vaches seront bien gardées. (…) »

Transposition méthodologique à nos domaines de l’éducation, de la formation et de l’innovation

Nous pouvons trés librement et sans doute trop rapidement tirer quelques principes de réflexion et d’action pour notre domaine, tellement spécifique (en est-on si sûr ?):

  • une action de formation sur l’encadrement est nécessaire, et doit être intercatégorielle, variée, et continue, en veillant à la diversité des domaines et des compétences et des statuts (on retrouve le staff ride), là où dans notre éducation, nous allons trop souvent sur l’identité et la parité.
  • L’enquête sur le terrain, le déplacement vers l’ailleurs, la rencontre, et l’histoire sont des sources et des ressources pour apprendre sur soi et sur notre avenir.
  • Le décalage, le changement de point de vue, le jeu de rôle pour apprécier les complémentarités et permettre la constitution des équipes
  • Brouillard et friction: créer des situations de flou et d’inattendu en formation pour permettre de travailler les compétences d’ajustement, d’improvisation et de conduite du changement. C’est un des marqueurs de l’innovation, précisément.
  • Unicité du commandement:  comment encore exercer dans notre système à deux têtes, entre administration et pédagogie, à hue et à dia ?
  • Concentrer les énergies sur les objectifs, et s’appuyer en confiance dans les processus (et l’organisation du travail notamment) sur la responsabilisation des acteurs. Le « droit à l’expérimentation » est une entrée intéressante.

Ainsi, en décodant les facteurs d’efficacité de la formation de notre commandement militaire, nous pouvons utilement transposer à notre système de formation. Mais le voulons-nous ?

Innovation, c’est quoi au juste, l’exemple du « Tertiaire »

v:* {behavior:url(#default#VML);}
o:* {behavior:url(#default#VML);}
w:* {behavior:url(#default#VML);}
.shape {behavior:url(#default#VML);}

st1:*{behavior:url(#ieooui) }

/* Style Definitions */
table.MsoNormalTable
{mso-style-name: »Tableau Normal »;
mso-tstyle-rowband-size:0;
mso-tstyle-colband-size:0;
mso-style-noshow:yes;
mso-style-parent: » »;
mso-padding-alt:0cm 5.4pt 0cm 5.4pt;
mso-para-margin:0cm;
mso-para-margin-bottom:.0001pt;
mso-pagination:widow-orphan;
font-size:10.0pt;
font-family: »Times New Roman »;}

Le Tertiaire est-il soluble dans l’innovation ?

Le Tertiaire serait-il plus innovant que les autres formations et domaines de l’enseignement ? Et puis, au fond, c’est quoi, l’innovation pédagogique ? Comment cela prend forme dans une académie ? Petites études de cas sur l’académie de Paris.

1

Le labyrinthe de l’innovation

Trouvez votre chemin dans le labyrinthe de l’innovation.

Les cheminements sont pluriels et les étapes nombreuses, alternatives ou successives, par exemple :

Pratiques, valorisation, action, contractualisation, formation, conseil, intervention, analyse de pratiques, séminaires, incertitude, ressources, compétences, productions, évaluation.

2

Le labyrinthe de l’innovation : Thésée, Elisa, Maurice, Charles et les autres.

à retenir :

implication des élèves dans leur parcours par l’auto-évaluation et la co-évaluation

une approche compétences, mais encore dissociée de l’évaluation des acquis scolaires

la difficulté d’élargir l’action dans un grand établissement à d’autres équipes, d’autres types de personnels

Zone de Texte: à retenir : implication des élèves dans leur parcours par l’auto-évaluation et la co-évaluation une approche compétences, mais encore dissociée de l’évaluation des acquis scolaires la difficulté d’élargir l’action dans un grand établissement à d’autres équipes, d’autres types de personnelsElisa : développer un dispositif de co-évaluation et de construction de compétences pour remobiliser les élèves en LP

Au lycée professionnel Elisa Lemonnier, dans le 12ème arrondissement de Paris, deux enseignantes du secteur, fatiguées de lutter contre des attitudes négatives qui empêchent les apprentissages, ont mis au point il y a deux ans différents outils d’évaluation du comportement. Ces outils sont fournis à tous les collègues qui le souhaitent. L’équipe agrandie, a décidé alors de mener son action sur trois niveaux : BEP, STT et BTS, et entrepris une réflexion sur les compétences[1].

A retenir :

l’origine du projet semble périphérique, voire anecdotique (site web) mais sur une question de fond (concurrence scolaire, gestion des flux des inscriptions au BTS trilingues)

la démarche d’élaboration progressive sur plusieurs années

la co-évaluation par les élèves du projet

le dynamisme enrôlant et la constitution en équipe de productions de ressources

les interactions fortes et la plus grande cohérence de la formation

Zone de Texte: A retenir : l’origine du projet semble périphérique, voire anecdotique (site web) mais sur une question de fond (concurrence scolaire, gestion des flux des inscriptions au BTS trilingues) la démarche d’élaboration progressive sur plusieurs années la co-évaluation par les élèves du projet le dynamisme enrôlant et la constitution en équipe de productions de ressources les interactions fortes et la plus grande cohérence de la formation

Maurice et le « vol des bourdons » : un travail d’équipe autour des formations BTS trilingues

Au lycée Maurice Ravel, une grosse structure de l’est parisien, toute une équipe pluridisciplinaire et intercatégorielle s’est engagée dans une réflexion et une production en ligne collective autour de la nécessaire amélioration du recrutement des élèves en BTS trilingue. Analyser puis formaliser la pratique initiée autour du thème de la communication d’une filière puis d’un établissement, en portant son regard plus spécifiquement sur les modes d’entraînement des individus dans un processus de création collective et de mise en ligne.[2]

Charles : faire du lycée professionnel un espace d’échanges et de démocratie

A retenir :

la grande variété des travaux et des supports réalisés par les élèves, qui ont redonné corps au travail d’équipe des enseignants

la communication à l’extérieur comme mobilisation des énergies

travailler sur une finalité de l’éducation au-delà des objectifs plus spécifiques des enseignements

Zone de Texte: A retenir : la grande variété des travaux et des supports réalisés par les élèves, qui ont redonné corps au travail d’équipe des enseignants la communication à l’extérieur comme mobilisation des énergies travailler sur une finalité de l’éducation au-delà des objectifs plus spécifiques des enseignementsAU lycée professionnel Charles de Gaulle (20ème arrondissement), L’analyse des populations d’élèves révèle un public hétérogène, souvent en situation d’échec, d’orientation par contrainte, de rejet du système scolaire et confronté à faire un choix entre la culture de la famille et celle de l’école ; d’où des attitudes de révolte, des références à des systèmes de valeurs parfois incompatibles avec la vie en communauté scolaire.

Face à ces difficultés, les enseignants perdent leurs repères, ne trouvent pas de réponse, et cette situation conduit à des conflits, de l’incompréhension, voire à une crise de communication interne.

Pour améliorer la communication et le travail en commun, l’ensemble de la communauté éducative a décidé en 2000 une action susceptible de répondre à ses préoccupations.

« 2000, année de la culture de la Paix », est le pivot de cette action, qui se fonde sur la reconnaissance du droit à l’expression des jeunes comme un des fondements de la paix. Le jeune, dont la parole reconnue, peut devenir création artistique, accède à son tour à la reconnaissance de la parole des autres, dont celle de ses enseignants.[3]

A retenir :

Un pilotage pédagogique partagé fort et nouveau

Une politique d’établissement nouvelle associant tous les corps représentés

Un projet ambitieux et centré sur la formation et les apprentissages

Zone de Texte: A retenir : Un pilotage pédagogique partagé fort et nouveau Une politique d’établissement nouvelle associant tous les corps représentés Un projet ambitieux et centré sur la formation et les apprentissagesTruffault : Organiser un parcours individualisé et modulaire en tertiaire pour répondre aux différents publics d’élèves accueillis

Passer d’une innovation pédagogique à une innnovation structurelle

Sur la base d’un rapport de l’inspection sur les structures de l’enseignement tertiaire et sa nécessaire adaptation au public mixte, le proviseur passe commande à la mission pour faire évoluer un ensemble cohérent mais complexe, tout à la fois

Les pratiques de son équipe

L’organisation des groupements des élèves

La souplesse de son emploi du temps

Les modes d’évaluation des acquis

Les modalités du travail pédagogique dans l’établissement.

L’accompagnement se fait sur 18 mois par deux personnes-ressources, chefs de projets d’une des structures expérimentales de Paris (lycée Jean Lurçat)

Jean : accompagner les sortants de bac pro

A retenir :

Partir du besoin des élèves

Travailler sur l’insertion professionnelle

Agir sur l’organisation des variables de l’Ecole, souvent peu investies

Zone de Texte: A retenir : Partir du besoin des élèves Travailler sur l’insertion professionnelle Agir sur l’organisation des variables de l’Ecole, souvent peu investiesAu lycée Jean Lurçat (13ème arrondissement), le projet initial partait de la constatation de la difficulté des jeunes titulaires de BAC PRO tertiaire à s’insérer en BTS, a fortiori en faculté. Et par ailleurs, beaucoup de ceux qui choisissent d’entrer sur le marché du travail ont du mal à décrocher un emploi durable.

Il est apparu à l’équipe la nécessité de mettre en place une “ passerelle ”, pour les aider soit à poursuivre leurs études, soit à mieux s’insérer sur le marché du travail.

L’idée initiale était de monter un projet de formation complémentaire à destination de ces jeunes titulaires du BAC PRO : un système de modules – à la carte – permettant de combler le déficit relatif en culture générale de ces bacheliers.[4]

3

Le fil d’Ariane

En mai de l’année A, la mission Innovations pédagogique envoie dans les établissements et les écoles de l’académie de Paris un dépliant qui invite les équipes inscrites dans une dynamique de projet, de recherche et d’expérimentation à se manifester et à envoyer un dossier. Les remontées se font aussi plus directement par le chef d’établissement ou le signalement de l’inspection.

Courant septembre, les dossiers sont examinés par une commission inter-catégorielle et classés. Toutes les équipes reçoivent une réponse qui, en fonction de leur projet et de leur attente, peut aller d’une simple liste de ressources sur l’internet à une proposition de contractualisation dans le cadre du dispositif.

Cette proposition est précédée d’une rencontre sur site avec le coordonnateur de la mission, elle permet de préciser en concertation les termes du contrat.

Par celui-ci, dans sa forme la plus courante, la mission Innovations s’engage à accompagner l’équipe dans sa démarche en lui proposant un accompagnateur extérieur, offrir à l’équipe des temps de rencontre, d’échange, de réflexion à plusieurs reprises au cours de l’année, diffuser les pratiques de l’équipe et les réflexions sur ces pratiques. De son côté, l’équipe contractualisée s’engage à fournir un bilan intermédiaire de son action, ainsi qu’un bilan final sous forme de monographie ; participer aux rencontres et aux séminaires de travail et, le cas échéant, y intervenir sous une forme définie en concertation.

Une fois le contrat établi, un accompagnateur est proposé à l’équipe, une première rencontre a lieu, et des rendez-vous de travail sont fixés.

L’équipe conduit son projet, sa réflexion est rythmée par les rencontres avec l’accompagnateur, ainsi que par les séminaires organisés par la mission.

Au terme de la première année, un bilan d’étape de l’action est attendu. Les bilans des différentes équipes sont rassemblés et diffusés auprès de l’ensemble des équipes afin de faire connaître aux uns et aux autres les actions.

Au cours de la seconde année, l’action est poursuivie. Si elle a été planifiée sur deux ans, une aide spécifique à l’écriture de la monographie finale, sous forme de séminaire de travail, est mise en place.

Ce dispositif d’accompagnement est générique, mais s’adapte considérablement selon chaque cas, notamment sur la gestion des calendriers. ; de plus en plus, la mission prend les initiatives en amont en portant le conseil sur le montage de projet en établissement, en sollicitant tel service comme par exemple la DARIC (relations internationales), ou encore en s’appuyant sur le dispositif de soutien aux projets innovants mis en place par la Région Île de France auquel la mission est associée ; l’aide au financement va jusqu’à 10 000 euros. L’Europe s’engage aussi dans cette voie avec un dispositif plus lourd tel que le FSE pour soutenir des projets d’aide à l’insertion ; ici encore, le conseil est sollicité.

L’intervention peut se faire en aval d’une action, par une aide à son évaluation, voire comme cela est le cas pour les structures expérimentales, une évaluation des dispositifs innovants mis en place, avec le concours de l’inspection et de partenaires académiques.

4

Qu’est-ce qu’on dit quand on dit innovation?

Innovalo, c’est quoi ?

Il y a dix ans à présent, le ministère a vu apparaître un bureau «innovations pédagogiques et valorisation des réussites», dans chaque académie, s’est monté très rapidement une mission «Innovalo»[5]; repérer, compiler, produire de la ressource, informer, drainer le système, faciliter l’initiative, valoriser les actions et les acteurs. Vaste programme, petitesse des moyens. Il s’agit de créer plus une synergie et une coordination qu’une nouvelle filière, dans une administration très «à la française»; autant dire que les résultats suivant les académies sont très contrastés en ampleur et dans le temps. Mais le réseau très nouveau à l’époque a tenu par les services qu’il a pu rendre et rend encore à bien des égards.

Jusqu’à une période encore très récente, nombre de séminaires, de journées, de rencontres et de productions écrites se sont centrés sur l’objet lui-même, objet de débat et de confrontation, moment de rencontres entre vieux militants de l’action pédagogique, institutionnels pur jus et tous les autres. Ce fut une phase longue mais nécessaire.

Nous sommes entrés dans l’époque de la succession accélérée des systèmes sociaux temporaires. Il faut le vivre, ce qui suppose des enseignants qui ne soient pas ritualisés, rigides, compassés (…)

Cette souplesse évolutive, cette rapidité n’est pas constituée chez les jeunes, ils sont très «popotes», conditionnés par les manières de travailler, et les routines qui s’établissent.

Pour vivre cette époque de changements accélérés, il faut de l’activité, du dynamisme, de la joie d’être, d’apprendre, d’enseigner…

André de Peretti

Un « attracteur étrange »

L’innovation est comme quelques autres mots magiques, «attracteur étrange», qui jouissent d’une positivité de prime abord, qui parlent à tous, sans qu’on puisse en stabiliser une définition; et finalement peut aboutir à des effets en contradiction avec l’intention première. En astronomie, on cerne bien le concept de «trou noir», pourquoi pas l’innovation en éducation et en formation?

En 2000, le Salon de l’éducation à Paris y était tout entier consacré; le ministre avait créé quelques mois plus tôt un Conseil national de l’innovation pour la réussite scolaire, on allait voir ce qu’on allait voir; l’innovation était au centre du système, il fallait même piloter par l’innovation. 2003: il faut mettre le savoir au centre du système, on lance un grand débat national pour une nouvelle loi d’orientation. Les académies et chaque établissement doivent rendre des moyens; on soumet tout le système à l’aune de l’efficacité.

Mouvement de bascule, alternance cyclique, révolution copernicienne, ou soubresaut d’une arrière-garde? Il est difficile pour les enseignants de trouver les repères suffisamment pertinents pour comprendre ce qui se passe et dans quoi ils sont pris; à l’interpréter comme un simple effet de mode, on ne peut trouver en retour qu’au mieux scepticisme, au pire une indifférence agacée, quand les «vrais problèmes» sont ailleurs. Il y a bien un problème de «sens» dans les trois acceptions: signification des concepts, direction en orientation, appréhension des réalités contemporaines.

Un processus dans un contexte

On reprend la définition de l’innovation d’après la banque NOVA de l’INRP: L’innovation est un processus qui a pour intention une action de changement et pour moyen l’introduction d’un élément ou d’un système dans un contexte déjà structuré.[6]

Les équipes sont parvenues à dépasser les limites conceptuelles d’une bonne idée et à s’engager dans une réflexion plus professionnelle, on dirait même plus «professionnalisante».

S’impliquer dans l’innovation, d’après les expériences analysées ces dernières années, c’est plutôt:

S’interroger et s’impliquer dans le domaine de l’efficacité des pratiques enseignantes.
Accepter de se confronter à la pertinence et au conflit des valeurs.
Oser porter un regard intéressé sur les pratiques collatérales et envisager quelques transpositions méthodologiques mêmes minimes.
Rendre à la fois plus ferme son socle métier et plus adaptable sa conduite de classe.
Elargir son cadre de référence et de pratiques à son école, son établissement.

Identifier les pratiques, analyser les actes professionnels, enrichir les parcours professionnels, créer de la compétence, évaluer les dispositifs ne relèvent donc pas d’un phénomène de mode, comme d’aucuns ont pu le croire; l’innovation ainsi conçue relève d’une problématique au contraire très actuelle, celui de la formation des personnels enseignants et des cadres du système.

L’innovation, un levier de changement par les pratiques, parmi d’autres leviers, pas toujours utilisés

Il ne s’agit pas cependant de faire de l’innovation pédagogique un principe d’explication du monde, solution à tous les maux de l’Ecole, très loin de là. Mais, dans une approche plus systémique du changement dans les organisations, il importe de redonner une juste place aux pratiques professionnelles et à leur efficience parmi d’autres leviers plus connus mais pas toujours utilisés tels que, par exemple : la formation professionnelle, la gestion des carrières, le travail sur le temps et l’espace.

Chacun de ces facteurs pèse lourd dans le fonctionnement de l’Ecole, certains sont plus organisationnels et locaux, d’autres relèvent de logique institutionnelle ou statutaire. Les pratiques, elles, rend un pouvoir d’action, « empowerment », dirait-on de l’autre côté de la Manche, aux acteurs. Toutes conditions égales, ce sont elles qui font la différence entre deux équipes, deux établissements, deux projets. C’est un phénomène déjà bien répertorié en matière d’effet-établissement.[7]

<!–[if mso & !supportInlineShapes & supportFields]> SHAPE * MERGEFORMAT < ![endif]–>

Formation professionnelle (initiale et continue)

Gestion des carrières

Espaces et temps de travail

innovation

Professionnalisation

évolution des pratiques professionnelles

 

<!–[if mso & !supportInlineShapes & supportFields]> < ![endif]–>

5

Reliance, une veille sur l’internet

L’internet permet aujourd’hui de combiner ressources individuelles et collectives, mises en lien avec des initiatives institutionnelles et des expériences professionnelles, plus qu’aucun autre media ne l’avait pu le faire. Véritable ingénierie pédagogique, le réseau pédagogique devient réalité. Vous pourrez retrouver tous les liens actifs sur le site Innovations

http://innovalo.scola.ac-paris.fr

Autour du concept de processus et des dynamiques de changement en établissement

Travail d’équipe, travail en équipe

L’émergence du concept de compétence collective, modalités et formes possibles, relevant d’un processus d’innovation

http://parcours-diversifies.scola.ac-paris.fr/PERETTI/mes4.htm

Peut-on apprendre de l’expérience d’autrui ?

Contribution de Philippe PERRENOUD (université de Genève) en février 1999 lors d’un séminaire innovation à Paris : un texte éclairant sur la représentation trop simple de l’idée de transfert, le rapport au savoir, le rapport au pouvoir des enseignants et les nécessaires collaborations professionnelles à tout niveau. Toujours à méditer.

http://innovalo.scola.ac-paris.fr/Seminaire_transferer/eclairageA.htm


[1] Descriptif complet:

http://innovalo.scola.ac-paris.fr/Telechargements/PNI3/1/12/Monographie.doc

voir notamment les nombreux documents produits de grande qualité.

[4] Descriptif complet :

http://innovalo.scola.ac-paris.fr/PNI3/2/23/monographie.htm

De manière plus générale, sur les dispositifs alternatifs expérimentaux mis en place dans la structure tertiaire au lycée Jean Lurçat, voir notamment :

http://innovalo.scola.ac-paris.fr/PAI4/1/17/monographie.htm

http://innovalo.scola.ac-paris.fr/structures_innovantes/page_speciale_lycee_integral.htm

http://lvpe-li.scola.ac-paris.fr/ notamment sur la « boutique de formation »

[5] Le réseau Valorisation des innovations pédagogiques en France

Travaux des équipes depuis dix ans, séminaires et colloques autour de l’innovation, de l’écriture professionnelle, de nombreuses expériences décrites dans la plupart des domaines

Liens actifs à la page

http://innovalo.scola.ac-paris.fr/innovalos_en_franceinnovalo_en_france.htm

http://www.eduscol.education.fr/D0092/

[6] Questions à l’innovation, actes du colloque interacadémique, Paris, novembre 2000

La conférence introductive de Françoise Cros est un bon complément au sujet traité dans ce volume : « Innovation et institution ». Elle replace le concept et les approches de l’innovation dans une perspective historique et européenne. Suivent quatre thèmes : place des innovateurs dans l’institution, démarche innovante et projets collectifs, facteurs déclencheurs de l’engagement et conditions de développement, pratiques innovantes et réussites des élèves. Dans chacune de ces contributions collectives, l’approche du processus d’innovation est envisagé.

Consultable en ligne sur le site de Paris Les actes sont téléchargeables sur le site de l’académie d’Orléans-Tours

http://www.ac-orleans-tours.fr/innovalo/telechat/inter-acad.pdf

[7] Diaporama : processus et conditions de transfert de l’innovation

A partir des relevés de conclusions de Françoise Cros, une animation conçue pour la formation des cadres, en ligne sur

http://parcours-diversifies.scola.ac-paris.fr/PERETTI/innovati.htm

Evaluer un dispositif: un tableau de synthèse pratique

Le mois de mai, c’est le mois des évaluations pour les élèves, mais aussi des évaluations d’actions, de projets, de dispositifs de toutes natures pour les équipes. Evaluations régulières, régulées, de premier niveau pour poursuivre, de second niveau pour requestionner les objectifs, nous y reviendrons.

Je voudrai ici vous proposer un tableau de synthèse que nous avions élaboré lors de l’accompagnement d’équipes impliquées dans des dispositifs interdisciplinaires au collège (IDD, Quito 2004); il nous semble utile de le parcourir dans sa durée, attestant que l’évaluation se conçoit comme processus durable (on retrouve ce trait dans l’approche E3D), mais aussi se conjugue à plusieurs niveaux d’observation; elle est en outre le fait de plusieurs acteurs.  Le professeur est loin d’être seul dans l’opération !

Tout cela plaide donc pour des dispositifs d’évaluation construits ad hoc, collectifs, régulés, pragmatiques, élargis, durables et..intéressants pour tout le monde. Si tout cela doit se terminer en une vaste compilation de chiffres sans commentaires, et sans communication, mieux vaudra passer à autre chose: ainsi, à la manière de Weiss, évaluer, c’est « d’abord communiquer ».

EVALUER, une mise en système des champs et des pratiques

 

Type d’approche par

Objet ou dispositif

Finalités

Personnels

Institution

Société civile

Domaines de l’évaluation

 

Conduite de projet

compétences des élèves

 

Travail en équipe

Projet de l’établissement

Impacts sur les partenaires

AVANT

 

Identifier les conditions de la réussite

Degré d’opérationnalisation (objectifs, échéances)

Conditions locales et importance du contexte (histoire, expériences, volontaires)

Moyens mobilisés (compétences, formations programmées, concertation prévue, ressources disponibles)

Analyse des compétences des élèves (points forts/faibles, réussites antérieures, diagnostic en début d’année)

Prise d’indices sur les centres d’intérêt (élèves, familles)

Connaissance des styles d’apprentissage (individus/collectif, centration/…)

Adéquation avec son projet sa pratique prof.

Mobilisation de compétences (expériences réussies, formation)

Avantages escomptés (meilleur contact, effectif réduit, moins de correction, plus efficace)

Expériences antérieures (projets innovants)

Ressources disponibles

Avantages et changements escomptés (image, activités, résultats)

Analyse des caractéristiques de la pop.scolaire

Ambition scolaire des familles

Association des parents

PENDANT

 

Réguler son action et la conduite du projet

Communication et organisation (binôme, inter-binôme, équipe)

Ajustements nécessaires (dans les conseils de classe, changement de groupes, variation des lieux)

Changements souhaitables (révision d’un projet, réduction d’un contenu)

Indice de participation (absentéisme)

Degré de satisfaction pers. et implication dans les activités

Observation des démarches d’apprentissages plus efficaces

Degré de satisfaction et de motivation

Participation à l’équipe

Régulation des pratiques et adaptation des projets aux élèves

Fonctionnement des équipes (communication, évolution)

Marge d’initiative et de souplesse

Régulation des problèmes (emploi du temps, entre individus, moyens)

Implication des parents

Rôle des associations locales

Position des autorités locales (freins, accompagnement)

APRES

 

Mesurer les changements et proposer des évolutions

Impacts du projet (mobilisation des pers , emploi du temps)

Amélioration ou reconduction de l’organisation (emploi du temps, nombre de pers.impliquées, organisation des groupes)

Indice de satisfaction et enquête

Mesure des acquis scolaires (dans les ID et dans les cours)

Réussites constatées à T+1

Enquête sur les bénéfices du projet

Proposition de modification individuelle et collective

Décision de reconduction

Bénéfices institutionnels (image)

Changements méthodologiques (organisation, évaluation)

Impact sur les équipes

Manifestation d’encouragement

Changement de l’image des enseignants

Désir des parents de s’impliquer

Parabole des porcs-épics ou la non-défensivité en éducation et dans nos équipes

 

Interrogeant sur  la maîtrise sociale des énergies individuelles                      

Amis enseignants, que pensez-vous, personnellement ou professionnellement, des porcs-épics ? Que vous en semble de leurs brillants piquants ?

Ils intéressèrent naguère le philosophe Schopenhauer, pessimiste : ce qui plût à Freud qui s’empressa d’y faire écho ; il fit un conte qui nous interroge sur la question de savoir si les porcs-épics ont quelque chose à nous dire, dans leurs propres démêlés, à propos de nos relations entre personnes humaines, notamment aux plans scolaires !

Ne sommes-nous pas dotés, à leur ressemblance, d’énergies toutes prêtes, à tous âges, à se manifester au bout de nos personnes, en pointes possibles pour des contacts ou des meurtrissures ? Lisons ou relisons Freud !

 

 

« Un jour d’hiver glacial, les porcs-épics d’un troupeau se serrèrent les uns contre les autres afin de se protéger contre le froid par la chaleur réciproque. Mais, douloureusement gênés par les piquants, ils ne tardèrent pas à s’écarter de nouveau les uns des autres. Obligés de se rapprocher de nouveau en raison du froid persistant, ils éprouvèrent une fois de plus l’action désagréable des piquants, et ces alternatives de rapprochement et d’éloignement durèrent jusqu’à ce qu’ils aient trouvé une distance convenable où ils se sentirent à l’abri des maux. »[1]

Ils cherchaient une « distance convenable » pour se mettre à l’abri  du froid en persistant à se piquer ? Pour Freud, la conclusion est typiquement pessimiste : il ne peut y avoir de bonne présence, les gens comme nous continueront à se piquer. En conséquence, il n’a pas voulu imaginer que chacun puisse peut être replier ses piquants de défensivité : au  point d’avoir vraiment bien chaud et d’être proche des autres sans se piquer, utopiquement.


Non-défensivité pour mieux communiquer

 

Cette parabole désenchantée sur les relations « énergétiques » ne vaudrait donc pas que pour les porcs-épics ; elle concernerait aussi ce genre particulier de « porc » même « épique » que peut être tout être humain au travers de ses expériences et surtout dans la mise en œuvre de l’énergie motrice et informationnelle qui lui est donnée et qu’il a besoin de développer, de dépenser, de « brancher », autant que possible, sans en perdre le contrôle !

 

Cependant, pour nous,  cette parabole peut être corrigée : des biologistes peuvent en effet nous dire qu’il eût été possible que les porcs-épics s’approchent plus près les uns des autres en repliant leurs piquants. Et ce possible est à tenter, en sage économie de nos énergies ! Non ?

 

Ceci voudrait dire peut-être que nous pouvons être plus près nous aussi les uns des autres à condition de ne pas être continuellement enclins à nous protéger à coup de défenses piquantes. Il faudrait parier pour une « non-défensivité », pour une « non-réactionnalité », croissantes dans les rapports humains, pour l’acceptation de l’énergie d’autrui, non plus ressentie comme dangereuse, mais, avec certaines précautions, conçue en tant que neutre ou chaleureuse. N’est-ce pas le projet de toute éducation, de toute culture ?

 

Nous pouvons affirmer notre énergie sans qu’elle soit nécessairement surdramatisée, c’est-à-dire sans qu’elle soit rendue impulsive en cédant à une inertie qui la gaspillerait pour tenir rigidement à distance les autres personnes. Nous allons certainement vers des temps de mondialisation au cours desquels la proximité de l’être à l’être deviendra de plus en plus forte : il faut donc, bon gré mal gré, que nous nous habituions à être moins défensifs vis-à-vis des autres personnes, si nous voulons bénéficier de nos énergies réciproques au lien de passer notre temps à nous détruire ou  à nous neutraliser réciproquement à coup d’émotions.[2]

 

Ce commentaire écrit il y a plus de trente ans pourrait conserver aujourd’hui son « piquant », en particulier dans notre petit monde de l’éducation, où il est question, plus que besoin, de défense, de distance vis-à-vis  de violences, d’agressions et d’incivilités. On pense aux rapports entre élèves, mais cela peut s’appliquer aussi à la collaboration entre enseignants, non ?

 

Cela ne dirait-il rien, en effet,  à propos de nos rapports entre collègues dans l’enseignement ? Et cela n’interrogerait-il pas nos relations avec les élèves et, leur usage,  notre habileté, nos ruses, pour replier nos piquants et faire se replier en groupe et en classe leurs piquants respectifs ? A coup de responsabilités construites et d’humour : le « colibri[3] sur l’épaule ».

 

Autorité, Pouvoir et « Piquants »

 

L’enseignant est-il « piquant » par son histoire, par sa formation, par « habitus » ? Oui, mais au fait, quels sont ses propres piquants ? Nos susceptibilités et nos défauts, ou nos préventions et nos critiques à l’égard de nos collègues, ou de nos élèves, peuvent-elles être relativisées, retenues, déconstruites selon l’esprit et l’encouragement de Derrida ?

 

Il faut d’abord déjouer l’aspect désolant de l’isolationnisme qui nous menace. L’enseignant a une mission selon laquelle il  doit imposer des choses aux élèves, un travail, c’est à dire la  mise en œuvre d’énergie : ensemble, en attention à ce qui est dit par les uns et les autres. Les piquants sont alors liés à son rôle d’autorité mais surtout de pouvoir : fermer la porte de la classe, faire se taire, mettre un élève dehors, donner des colles, sanctionner, faire venir au tableau, en déclencheurs d’actions. Comment replier, avec simplicité et pertinence, les piquants dans la relation scolaire ? Faut-il agir farouchement seul ?

Car les piquants sont encore plus forts entre enseignants eux mêmes : celui là se croit plus fort, il est agressif ; les bisbilles de la vie sociale qu’on retrouve en salle des professeurs en font foi !

On peut comprendre cette situation en se rappelant l’Histoire des enseignants : en milieu rural, comme en milieu bourgeois, s’imposer comme enseignant n’a jamais été évident.

Sans doute tous  les rôles institutionnels depuis le début du siècle se sont fortement dégagés du statut hiératique qu’ils avaient : les évêques, les officiers, les enseignants, spécialement eux qui n’ont pas forcément été respectés et vénérés. Vichy a bien accusé les instituteurs de la défaite de 1940. Les «  hussards noirs » relatés par Péguy[4] étaient seulement des lycéens qui avaient pris leur tenue d’école normale dans les classes annexes. Pour les enseignants du Primaire, la vie dans les communes était bien plus rude qu’aujourd’hui. Le mot signifiant d’instituteur a été même un mot de mépris dans le monde enseignant. Il était important de nos jours, en le reléguant, de montrer que la qualité et la difficulté de l’enseignement ne sont pas dépendantes de l’âge de l’enfant. C’est bien d’être professeur,  pour tous, solidairement et c’est bien de respecter tous les collègues

 

 Mais, la fonction met le professeur dans des situations contraignantes qui peuvent parfois être « piquantes » pour faire apprendre, pour faire  faire des devoirs, pour placer en surveillance chaque élève dans sa famille, toutes injonctions qui créent des regards de méfiance par rapport à l’enfant, à la famille. Ainsi,  ce rôle est à la fois indispensable à l’humanisation mais il se présente dans une apparence comminatoire rappelant le besoin d’obéir, de faire, de travailler, il interfère sur le libre emploi de l’énergie par chacun.  Peut-il être tenu avec bonne humeur, sans piquer ! Mais oui !

 

Malencontreusement, la manière de préparer encore  les enseignants par l’idée de la méritocratie et non d’une professionnalisation les place en tentation d’un élitisme et d’une mise en concurrence des personnes, adultes ou jeunes. Cela conditionne alors une attitude défensive, susceptible, par la suite, en étant conformée par la crainte et l’hostilité. La pression vécue de façon masochiste est renversée dans une attitude d’orgueil, sinon  « sadique », du moins piquante !. C’est tout à fait contraire à l’esprit de la culture, qui vise bien plutôt la qualité éthique et la convergence des énergies.

 

Communication et variété

Comme dans tout système, les échanges sont instables, les risques à la relation sont grands mais sont tout autant des chances de rencontres (cf. la théorie du clinamen, développée dans un autre chapitre).  Dans quelle mesure la relation à l’autre est-elle utile ? Nécessaire ? Impossible ?

 La communication est forcément variée ; il ne peut y avoir de simple et pure transmission. En s’essayant à la communication, une personne va essayer de mettre dans un choix de mots, de concepts, de structures, un certain nombre d’actions intégrées dans des idées et elle va le faire par rapport à un certain but et à un cadre de références propres en s’adressant à une ou à une autre personne. Mais les autres personnes vont-elles avoir le même projet, la même attention ? En général, non ; les codes linguistiques, techniques sont rarement les mêmes entre des interlocuteurs, comme en témoigne n’importe quel dictionnaire ouvert pour envisager les usages multiples des mots. La transmission se fait par la médiation nécessaire de mots, déjà équivoque, mais par transfert affectif, il y a bruit dans la transmission, des pertes, des brouillages entre les objectifs poursuivis.

 

 

Ce qui arrive à l’interlocuteur est déjà troublé, et celui-ci devrait-il  immédiatement repérer ce qui est dit ? Difficile ! Et cependant, la communication se fait mais par une suite de rectifications, une modification progressive d’échanges et de mises au point ; et à condition de bonne humeur.

 

L’enseignant est au maximum dans cette situation. Le professeur doit reprendre, répéter, par d’autres voies, ce qu’il dit pour que son message passe. C’est exactement le même cas dans les messages de passion amoureuse. Rien n’est simple, avec la meilleure volonté du monde. Il faut cependant prendre garde de ne pas inconsidérément piquer !

 

La non-réactivité au « signal »

Pour reprendre la problématique « animalière », comment apprivoise-t-on  nos interlocuteurs ? Quelles sont les médiations qui permettent de construire une relation entre individus, et en particulier, entre enseignant et élèves ?

Rabattre les piquants n’est pas baisser la garde. La défensivité et l’agressivité sont des dérives dangereuses et vicieuses. Vouloir se défendre,  c’est en effet entrer dans le jeu de l’autre ; alors que  résister, c’est précisément conserver son énergie pour l’utiliser quand il le faut (minimax).  L’humour aide à prendre la bonne distance pour ne pas répondre impulsivement ; car il faut agir quand il le faut et non pas réagir impulsivement.

Réagir au signal engage à la perte.  La non-défensivité et la non-réactivité sont de bons recours. Car agir, c’est ne pas se laisser désemparer pour s’imposer quand il le faut. (et non pas s’engager dans un processus action-réaction,  repris dans le film des « choristes », en 2003). Dans la parabole du taureau dans l’arène, selon Montherlant[5], le taureau en croyant au signal rouge de la muleta engage sa perte : « l’erreur du taureau, c’et de croire au signal ». La dépense d’énergie pour contrôler tous les dangers, ce sera de l’agressivité perdue. Il faut sagement économiser ses forces.

 

Et les institutions sont là pour organiser, condenser et préserver économiquement  les énergies, pour renforcer les chances de cohérence et de communication. Actuellement, l’institution est pourtant en régression par rapport à ce qu’elle a été ; Car l’Institution scolaire était autrefois organisée en rôles responsables donnés aux élèves, avec une organisation des relations entre les personnes[6]. Sans cela, les relations ressortent en discordance. Chaque élève est alors considéré comme virtuellement identique ou complément indifférent les uns des autres, c’est le cas des porcs épics. Et il peut rester irresponsable de ses réactions, s’il est exclu d’une participation à des rôles où il peut se sentir reconnu et utile.

 

Dans le cas d’un établissement en crise, il ne faut pas  non plus « croire au signal », mais il convient de reprendre respiration, son équilibre intérieur,  et se remettre en état de coopération entre enseignants, puis essayer de communiquer avec certains élèves, repenser leur organisation, beaucoup plus qu’à penser à la répression. C’est bien l’organisation qui est médiatrice alors que la répression ne fait qu’accroître le niveau de tension et oblige à des réciproques négatives. Celui qui réagit est «  pris » et soumis à l’énergie de l’autre et à ses piquants, sans distance ni humour.

Car la réponse de l’humour n’est pas du tac au tac, elle s’attache à dévier la provocation, en se plaçant à un niveau détendu dans lequel le jeune est « pris » à son tour et mis en bonne humeur. L’opposition pure et simple, c’est faire cadeau à l’autre de son énergie.

Energies et systèmes sociaux

Derrière cette parabole des porcs-épics, nous faisons donc souvent référence à une « énergie » dans la relation humaine. Serions-nous traversés par des courants qui nous dépassent. Une de nos récentes productions a été consacrée à cette problématique[7] :

c’est quoi , une relation énergétique ?

 

Dès que les gens se rapprochent, il se crée des champs potentiels d’énergie perceptible qui les empêchent de se déplacer facilement. Dans le métro, on se frotte et on se serre, on pousse et on est poussé. Quand dans un ascenseur, il y a peu de place, il y a frottement entre les présences des personnes les unes les autres . Sur un trottoir où je m’avance, dois-je faire un effort pour laisser passer l’autre ? Est-ce à l’autre de s’effacer ? Toute présence nécessairement crée des possibilités de frottement, de détour, des rapports multiples. Chaque personne développe un champ de difficultés et de détour pour chaque autre personne et réciproquement. Toute relation est énergétique et suppose une régulation dynamique.

 

                

  L’enseignement mutuel d’après des gravures d’époque,

 

Dans la classe, il y a une pression de la classe sur les profs, et une pression du prof sur les élèves ; une action de détermination, avec une voix forte et de la conviction. L’énergie n’est pas purement physique, ce sont des commandes qui interviennent pour faire que des individus donnent une part de leur énergie ; et inversement, il y a tacitement pression des groupes sur l’individu, prof inclus. Ce qui rentre en action dans le travail, c’est ce qui se manifeste comme tel (étymologiquement), en ergon, dans le travail ; or, ce paradigme n’a pas été suffisamment considéré depuis Aristote ; que la force s’explicite à partir de l’énergie. On s’est rattrapé depuis !

 

L’énergie s’implique en toute forme de relation et d’interaction s’exerçant sur autrui. Tout système est par essence énergétique. Chaque personne rayonne d’une énergie calorifique de 100 watts ! ; le cerveau est parcouru d’électricité. Les neurotransmetteurs chimiques véhiculent aussi de l’énergie. Le concept est transverse à tous les domaines de l’activité humaine.

 

L’énergie suppose la dynamique et l’échange là où on conçoit la stabilité et l’ordre. Elle doit être régulée. La parole peut piquer. Dans une cour d’enfants, l’éducation commence dans la maîtrise des énergies. C’est plus anciennement l’histoire de l’homo faber ; il a su faire une domestication des animaux pour décupler leur nombre, et pour lui, , le moindre marteau permet de préciser une action que la main ne peut plus faire. L’outil est comme une pointe, une lame qui condense de l’énergie, devenue efficace pour casser, couper, heurter : ou servir.

 

La classe peut se manifester comme un système énergétique, par le chahut, aussi bien que par le phénomène de l’inertie qui n’accompagne pas l’impulsion donnée par le prof . Aussi, s’occuper de ces énergies, c’est éviter qu’elles ne nous dépassent. Branchons ces énergies juvéniles ou autres. L’énergie dissipée en agressivité, c’est comme le jet de vapeur de la locomotive qui en perdant sa vapeur perd sa puissance et donc ses chances de performance. Ce sont des décharges d’énergies pour rien.  Comment rebrancher, localiser ces pulsions d’énergies et ces échanges ? C’est l’art du professeur, organisateur et régulateur des relations, notamment avec ses élèves, dans le « sociogramme » des rapports, confiants ou méfiants, des élèves entre eux (ou en « bande »), orientés vers des apprentissages de la vie collective autant que des savoirs.[8]

 

 

Chances et risques de la vie collective[9] ?

 

 Bien sûr, il y a toujours eu des risques et des chances dans la vie des sociétés et des institutions, mais leur niveau n’est pas forcément le même aujourd’hui. En toute hypothèse, les difficultés ont besoin d’être inversés en possibilités de solutions. Accepter que les choses aillent toujours plus mal est une erreur. Dans l’enseignement de l’Histoire, on peut faire apparaître que s’il y a eu des difficultés, elles ont été génératrices de progrès et de bien par inversion du piquant de leur épreuve pour en faire une réalité à un niveau supérieur d’utilité.

 

Guernica a été bombardée, emblématique première ville civile massacrée dans l’Histoire. C’était une négativité absolue de l’acte guerrier, portée sur des êtres qui ne sont pas une menace ; mais on a dû alors développer la défense contre avion (DCA) et donc des calculateurs pour orienter les canons efficacement contre les avions. En définitif, il en est résulté, au-delà des calculateurs, la cybernétique, l’informatique, la création de l’internet. La bataille contre les avions a ainsi obligé à des efforts technologiques, traduits dans des capacités nouvelles de relations entre les personnes. Des interactions fécondes de plus en plus libres, et non imposées, se sont immensément étendues.

 

Cet exemple historique, entre mille autres, doit nous rappeler que, dans toute relation, toute situation, il y a des issues possibles, des possibilités de fertilisation ou d’art à rechercher pour ne pas se laisser immobiliser dans une situation, se laisser prendre par une structure ou s’obséder de « piquants ». 

 

C’est aussi le mythe du Sphinx. L’énigme qu’il propose à Oedipe est, on l’a vu,  résoluble, à condition de ne pas la surcompliquer[10] par le hérissement de soupçons face aux institutions ou aux individus, comme aux évolutions. Toute énigme du devenir a sa solution, pour peu qu’on ne la surcomplique pas.

 

Prenons tranquillement garde de ne pas, confondre l’approche de la complexité de la vie et la hantise des complications, ou même, plus directement, la hantise des risques à savoir candidement courir….


[1] Freud, Essais de psychanalyse, éd. Payot, p.112

 

[2] in André de Peretti, Risques et chances de la vie collective, éd. EPI, 1972, p.42 sq

[3] Voir le chapitre sur le colibri

[4] CHARLES PÉGUY (1873-1914) dans L’Argent, Les Cahiers de la Quinzaine, 16 février 1913, évoque les hussards de son enfance, vers les années 1880 : Nos jeunes maîtres étaient beaux comme des hussards noirs. Sveltes ; sévères ; sanglés. Sérieux, et un peu tremblants de leur précoce, de leur soudaine omnipotence. Un long pantalon noir, mais, je pense, avec un liseré violet. Le violet n’est pas seulement la couleur des évêques, il est aussi la couleur de l’enseignement primaire. Un gilet noir. Une longue redingote noire, bien droite, bien tombante, mais deux croisements de palmes violettes aux revers. Une casquette plate, noire, mais un croisement de palmes violettes au-dessus du front. Cet uniforme civil était une sorte d’uniforme militaire encore plus sévère, encore plus militaire, étant un uniforme civique. Quelque chose, je pense, comme le fameux Cadre noir de Saumur. Rien n’est beau comme un bel uniforme noir parmi les uniformes militaires. C’est la ligne elle-même. Et la sévérité. Porté par ces gamins qui étaient vraiment les enfants de la République. Par ces jeunes hussards de la République. Par ces nourrissons de la République. Par ces hussards noirs de la sévérité. Je crois avoir dit qu’ils étaient très vieux. Ils avaient au moins quinze ans. Toutes les semaines, il en remontait un de l’École normale vers l’École annexe ; et c’était toujours un nouveau ; et ainsi cette École normale semblait un régiment inépuisable. Elle était comme un immense dépôt, gouvernemental, de jeunesse et de civisme. Le gouvernement de la République était chargé de nous fournir tant de jeunesse et tant d’enseignement. L’État était chargé de nous fournir tant de sérieux. Cette École normale faisait un réservoir inépuisable. »

[5] Les Bestiaires, Henry de Montherlant, ; on y trouve aussi une phrase lourde de sens : Le drame du taureau, pendant le quart d’heure de la course, reproduit la vie de l’homme, reproduit le drame de l’homme : l’homme vient assister à sa propre passion dans la passion d’une bête. Là est le grand sens du mystère taurin.

[6] Voir à ce propos l’étude en forme de rappel historique et bien oublié de l’enseignement mutuel, L’école mutuelle, une pédagogie trop efficace ?, Anne Querrien, Les empêcheurs de penser en rond, Paris, 2005. Dans l’école mutuelle, un seul maître est nécessaire pour faire fonctionner une école jusqu’à 150 élèves dans la même salle, il est secondé par des moniteurs, élèves les plus âgés et les plus instruits qui transmettent les ordres aux plus jeunes et les font travailler. Ce système peut fonctionner à plusieurs étages, avec des moniteurs généraux, des moniteurs intermédiaires etc., jusqu’au niveau le plus bas des élèves débutants, tout le monde apprenant à son niveau et enseignant au niveau inférieur.

Le maître unique, juché sur son pupitre commande toute cette organisation, les élèves étant installés sur de longs pupitres mobiles, organisés en configuration variables suivant les matières et les groupes de niveau. La méthode introduit une innovation capitale : l’apprentissage concomitant de la lecture et de l’écriture, et fait appel à des outils pédagogiques encore peu usités, comme l’ardoise qui économise le papier ou les tableaux muraux autour desquels les groupes font cercle au moment prescrit.

Cette pédagogie active et coopérative fonctionne assez bien et, dans les années qui suivent la révolution de 1830, plus de 2 000 écoles mutuelles existent, principalement dans les villes, en concurrence avec les écoles confessionnelles. Le glas est sonné quand un Ministère de l’Instruction publique est créé, puis avec la création des Ecoles normales….

 

[7] André de Peretti, Énergétique personnelle et sociale, coll. Cognition et formation  éd. L’Harmattan, Paris, 1999

[8] Plusieurs pistes ont été suggérées pour rabattre les piquants des uns et des autres, nous , par expérience  dans des situations d’éducation et de formation, même d’adultes, deux points : l’organisation des relations dans un groupe et l’attribution de rôles.

 

Sur la technique du sociogramme, voir le chapitre « gérer les relations », dans le manuel de survie à l’usage de l’enseignant même débutant, François Muller, éd. L’Etudiant, Paris, 2005, prix Louis Cros de l’Académie française, ou sur le site http://francois.muller.free.fr/manuel/index.htm

Sur l’attribution de rôle et ses multiples possibles dans un groupe-classe, même référence, voir Table d’une multiplicité de rôles potentiels », in A. de PERETTI, Encyclopédie de l’évaluation en formation et en éducation, ESF, 1998, p.246 sq, disponible en ligne sur http://francois.muller.free.fr/diversifier 

Et particulièrement dans une situation que tout enseignant connaît et doit être amené à développer, quand il conduit une séquence avec les TICE où il peut s’appuyer sur les ressources disponibles dans le groupe en la matière, voir le chapitre « utiliser les TICE » du Manuel de survie.

Voir aussi : Avoir la bonne distance, une page toute en réflexion et en exemples, sur le site de Jacques Nimier, http://perso.wanadoo.fr/jacques.nimier/bonne_distance.htm

 

[9] André de Peretti, Risques et chances de la vie collective, éd  EPI, 1972

[10] Voir le chapitre 10 sur le mythe du Sphinx

22 techniques créatives ou réflexives pour conduire une réunion d’enseignants (socle « inside)

A quel « monde » peut-on attribuer les propos suivants ?

  • Les enfants ont toujours raison.
  • Méfions-nous, on cherche à nous nuire.
  • J’ai tout essayé. On ne peut rien faire.
  • Chacun fait comme il veut.
  • A quoi bon ?
  • Tout cela ne vaut rien. Il faut changer !
  • Ce n’est pas dans les textes.
  • L’essentiel, c’est qu’on s’entende bien.
  • C’était bien mieux autrefois.
  • On n’a pas les moyens.

Au lieu de « bavardages » répétitifs dans nos salles de profs (et d’éviter le phénomène « boite à oeufs », repéré par Lortie), il peut en effet être utile de nous réunir semestriellement ou annuellement pour réfléchir de manière originale en vue d’accroître le plaisir d’enseigner ? La mise en place du socle commun nous y invite.

Voici donc vingt-deux propositions de séminaires, laboratoires, ateliers ou séances, proposés à votre inventivité et à l’amitié de nos collègues. Nous nous sommes préoccupés de proposer des titres nouveaux et des formes originales,mais nous les soumettons dans le grand désordre. Le détail méthodique de certaines peut être retrouvé dans nos ouvrages habituels.

n Séminaires anthropologiques : en confidences: « d’où venons-nous, que sommes-nous, où allons-nous ? » (1897), selon le testament artistique de Gauguin[1], et au-delà, avec les jeunes ! Quel avenir pour l’enseignement, pour la jeunesse, pour nos retraites actives, pour surmonter nos petites tentations de catastrophisme éclairé ! dans le cadre des changements sociaux et techniques, plus ou moins portables.

n Séminaires d’exploration des valeurs : recensons nos valeurs : chacun écrivant pendant un quart d’heure celles qui lui viennent directement à l’esprit ; dans un deuxième temps, mise en commun et réflexions qui s’en suivent. Eventuellement, consultation d’un « mandala » des valeurs[2]

n Laboratoires de Technique du « risque » : cette technique a été vivement appréciée par les nombreux collègues qui l’ont pratiquée. Elle commence par une exposition par chacun et inscription au tableau de difficultés présentes ou à venir, par rapport à la mise en œuvre d’un projet. Cette exposition se fait en brainstorming, chacun soutenu à proposer des idées inattendues ou à reprendre une idée formulée de façon surprenante ; dans un deuxième temps, classement des ces risques, obstacles ou dérives, vraies ou farfelues ; enfin, proposition de mesures possibles pour résorber ou compenser les risques plus probables. C’est une technique d’imagination créative.

n Séminaire de prospective : n’est-il pas utile de nous « pousser les uns les autres à imaginer des scenarii contrastés sur ce que seront nos activités et nos modes professionnelles dans 10 ans ? dans 40 ans ? Là encore, les idées folles peuvent être raisonnables ! L’humour est de bon conseil !

n Séminaire de « réhabilitation » d’instruments ou procédures : nous connaissons un certain nombre d’outils ou de procédures pédagogiques que nous avons vu utiliser dans notre jeunesse ou que nous retrouvons dans nos lectures : est-il possible de partir d’eux ou d’elles pour les transformer de manière à les rendre utilisables dans nos enseignements actuels ? Rénovation !

n Séminaire de rétrospective : nos souvenirs les meilleurs ; nos souvenirs les pires : de nos passages en école, collège, lycée, universitaire et débuts professionnels. Que leur évocation nous apprend-elle dans l’exploration de nos pratiques présentes ? Peut-être trouverons-nous de quoi illustrer nos cours ? On peut échanger oralement ou après des éléments de réponses : écrits sur des papiers (signés ou anonymes) ou inscrits dans des figures métaphoriques (les blasons !)

n Séminaire de mise en perspective (anthropologique, biologique, cosmique….) : Imaginons-nous nous adressant à nos arrières-petits-fils ou à nos arrières-grands parents. Mettons-nous à faire des « vues de Sirius » sur les acquis et les pertes qui caractérisent notre profession.

n Ateliers de métaphorisation : si nous avions à présenter notre discipline, notre pratique, nos conseils professionnels, quelles images, quels symboles, analogies et métaphores aimerions-nous proposer ? Et naturellement, échanges à propos des images, indignées ou dessinées aux tableaux choisis.

n Ateliers de mise en « turbulence » des concepts : chacun d’entre nous apporte un concept et un échange, à la fois imaginatif et rationnel sur les concepts proposés, les met en relation de façon vive, pour être ensuite stabilisés avec humour.

n Séance de « réveil-éveillé-dirigé » : à tour de rôles, chacun décrit des personnages d’un conte sur lesquels ont s’est d’abord mis d’accord, pendant quelques minutes, chaque autre collègue reprenant à la suite et complétant l’évolution de ce conte, selon sa fantaisie et sur des domaines hors banalité.

n Séance de réunion avec tenue de rôles inhabituels ou insolites : notamment « réacteur subjectif », « humoriste », « dessinateur » de ce qui se passe, « contradicteur de principe », « qualificateur », etc… Il est possible d’en inventer. Et cela a marché et marche !

n Jeux méthodologiques de transposition (JMT)[3] : sur une présentation de situation d’enseignement, des petits groupes s’occupent des transpositions possibles, par des imaginations volontairement inattendues ou presque absurdes, suivant des consignes de créativité pour introduire des changements d’importance, de durée, de sens, d’application.

n Jeux de rôles par acteurs inédits : sur une étude de cas jouée entre certains acteurs, ajouter des personnes inattendues qui entrent en action, par exemple poète, philosophe. L’acteur inédit peut être l’une des personnes jouant déjà dans le jeu de rôles et avec qui une intervention inattendue a été préparée

n Recherche d’interstices, de mini perfectionnements cumulatifs, de marges utilisables : dans les programmes, dans les emplois du temps, dans la vie scolaire, dans les rapports inter-disciplinaires, dans les rencontres culturelles, dans l’invitation d’artisans ou de professionnels en classe. Chacun recherche et propose de mini-changements à introduire, de nature à fertiliser le champ scolaire.

n Atelier de recherche ou détection d’antagonismes : entre nos disciplines, entre nos méthodes, entre nos conceptions pédagogiques, entre nos générations, entre nos parcours Et pour nos souhaits de coopération claire, comment utiliser la densité qu’apportent ces antagonismes, en bonnes « dialogiques » (selon Edgar Morin).

n Atelier d’inversion : de tendances, de dérives possibles qu’on a constatées, de nos habitudes et routines, telles qu’elles sont pratiqués dans nos établissements et par nous-mêmes en vue de les assouplir et de les compenser. Des idées positives peuvent en sortir ! en bonne humeur et en ingéniosité féconde, pratiques.

n Recherche de pôles et de paradigmes inédits, latents : quelle organisation permet de passer d’une logique de classe à une logique de compétences, telle que le suggère fortement le CECRL dans nos établissements aux structures cloisonnées ?

De même, le « socle commun des connaissances et des compétences », texte émergeant des latences programmatiques, nous invite à revisiter l’organisation des disciplines et dans leurs contenus, les savoirs et les compétences, de sorte à revaloriser la notion d’option comme décision d’effort et d’orientation à court ou plus long terme. Comment présenter « socle » et « options » ? Quels jeux d’interdisciplinarité sont nécessaires pour forger les compétences attendues à chaud sur le « socle » ?

n Laboratoire d’apprivoisement de l’avenir : comment réaliser dans nos établissements des rencontres inter-générationnelles avec des jeunes et des adultes par lesquelles nous pourrions rendre nos élèves sensibles aux épreuves subies par leurs grands-parents et parents et aux espérances d’avenir rendus possibles par le courage de générations précédentes ? Et par des témoignages stimulants.

n Séminaire d’hybridation culturelle, d’hybridation de méthodes, de techniques, de concepts, de pratiques : il peut être intéressant, comparant des formes différentes, se référant par exemple à Freinet, à Cousinet, à Piaget, à Rogers, à Korcsak, à Piaget, de voir comment fabriquer une situation d’apprentissage originale : coupler par exemple l’imprimerie à l’organisation au travail d’une école ? Comment transposer des activités et des rôles propres à l’imprimerie dans le monde de l’internet ou dans le monde des arts graphiques ?

n Recherche sur les paradoxes de notre responsabilité enseignante : « présence/ distance » par rapport à la classe et aux élèves : spécialisation, mais responsabilité de la culture générale ; pouvoir sur la classe et confiance aux élèves ; rigueur de pensée, et bienveillance des appréciations pour l’approximation des réponses. Autres paradoxes ? Sciences ET lettres ; maths et imagination etc…

n Un jeu d’enjeux et de défis : ne peut-on en jeu de plaisir dans notre métier nous adresser, en une réunion annuelle ou semestrielle, des défis : sur l’audace d’innovations à tenter ; sur des lectures ou des analyses à effectuer ; sur des relations à établir dans le voisinage des établissements ou des universités ; sur des concours intra- ou inter-établissements à proposer aux élèves de tous les âges ou de certains âges ?

n Séminaire de recherche de points d’appui et de leviers : ce séminaire peut être alimenté par l’une ou l’autre des parties du présent ouvrage, rédigé en pensant amicalement à vous. Des choix sont possibles. Bon vent !

A votre créativité et à votre audace, salut !


[1] Voir par exemple, Apprivoiser l’avenir pour les jeunes avec les jeunes, dirigé par Martine Lani Bayle et François Texier, éd. More et Marlen, Paris, 2007

[2] in Techniques pour communiquer, éd. Hachette, op. cit., p.188-189

[3] Voir la fiche plus détaillée sur « Techniques pour communiquer », ou sur http//francois.muller.free.fr/diversifier/index.htm

Q-sort: autour du socle commun, élaboration collective d’un consensus

Nous sommes actuellement régulièrement sollicités pour accompagner la réflexion d’équipes en école, en établissement ou encore en réseau (regroupement d’équipes de direction) pour étudier la mise en place du socle commun de connaissances et de compétences.

De fait, il s’agit pour les structures, pour les personnels, pour les pratiques moins de « mise en place » que d’abord une étude de fond qui porte formativement parlant sur les représentations en la matière, fort diverses n’est-il pas, sur les résistances à ce type d’approche, et sur les évolutions possibles en termes même d’identités professionnelles.

C’est pourquoi à l’occasion de l’encadrement d’un grand groupe (120 personnes), nous proposons la technique dit du Q-sort:

1.C’est l’actualisation du système français au cadre européen de l’éducation
2.C’est encore une réforme de plus, jusqu’à la prochaine
3.C’est enfin l’occasion de faire une école pour tous et pour chacun
4.C’est la négation des disciplines et des programmes
5.La logique du socle est en parfaite contradiction avec la culture et les pratiques de l’enseignement public français.
6.C’est une occasion unique de travailler ensemble et autrement
7.C’est un casse-tête pédagogique pour les chefs d’établissement
8.C’est un texte de cadrage qui permet des applications locales
9.C’est la fin de la liberté pédagogique pour les enseignants
10.Il est urgent d’attendre les instructions complémentaires
11.C’est un document qui va donner de la cohérence aux enseignements et du sens aux apprentissages
12.C’est un compromis infaisable entre la pression de lobbies et des directives européennes
13.La logique du socle est une pleine harmonie avec la dynamique des Assises de l’enseignement catholique.
14.C’est un moyen pour en perdre (des moyens)
15.Nous attendrons une formation pour nous y mettre.
16.C’est un dispositif qui permet de remettre les évaluations à leur juste place
17.C’est introduire le libéralisme dans l’univers scolaire
18.C’est un chantier de vingt ans
19.C’est l’aboutissement d’une réflexion vieille de quarante ans.
20.C’est « ce qu’il n’est pas permis d’ignorer » au terme de l’Ecole obligatoire
21.C’est la modernisation du cadre professionnel qui permet l’évolution des pratiques
22.c’est posséder pour les élèves un outil indispensable pour sa vie… pour la société
23.C’est impossible sans l’accompagnement des enseignants
24.C’est un document qui demande à être discuté par les équipes

Le Q-SORT est un choix de propositions variées et disparates sur un thème.

Objectifs des Q-Sorts portant sur l’analyse de représentations

  1. Procurer à chaque personne l’occasion d’analyser les différentes dimensions d’une conception ou représentation donnée
  2. Offrir la possibilité d’effectuer des choix implicites ou explicites, distincts pour chacun, lui permettant de se situer par rapport à d’autres personnes.
  3. Faire apparaître les tendances d’un groupe, les consensus et les contradictions, par rapport à une conception ou une représentation
  4. Donner une opportunité de mesurer l’évolution d’un groupe ou de chaque individu par rapport à un concept: au début, au cours ou à la fin d’une formation ou d’un séminaire
  5. Observer les distorsions entre des représentations idéales et des conceptions pratiquées
  6. Rendre possible la comparaison des représentations émergeant de divers groupes ou sociétés
  7. Rechercher l’évolution d’un concept ou d’une représentation entre diverses époques

Consignes de passation

  1. La passation se réaliser, individuellement ou collectivement, dans le strict respect de l’anonymat. Les réponses personnelles de classement de propositions ou items doivent être marquées sur deux morceaux de feuille sans nom, dont l’un est gardé par son rédacteur. Ces feuilles peuvent être fournies imprimées à l’avance selon les modèles donnés ci-dessous ou fabriqués sur un modèle tracé au tableau.
  2. Les consignes peuvent s’appliquer à la personne même qui passe le Q-Sort mais on peut aussi demander à celle-ci de se placer du point de vue d’autres personnes (à définir) ou du point de vue du sens commun.
  3. Les consignes peuvent être relatives à l’idéal qu’on se fait du concept ou relatives à la façon dont on l’envisage dans la pratique
    Par exemple:A votre avis, comment classer idéalement les différents items ?Selon vous, comment telle catégorie de personnes classerait-elle les différents items pour une présentation idéale de ce concept ?Selon votre pratique personnelle, classez les différents items

    Selon vous, comment classer les items pour indiquer de quelle façon telle catégorie de personnes vit en pratique ce concept ?

  4. Les consignes peuvent également porter sur le passé et le présent:
    Par exemple:Comment autrefois aurait-on classé ces différents items ?Comment aujourd’hui classe-t-on ces différents items ? Dans la pratique, dans l’idéal, par vous, par d’autres personnes…
  5. Le classement s’effectue selon des échelles de répartition correspondant à une distribution aussi proche que possible de la distribution gaussienne. Ces échelles sont placées sur les modèles de feuilles-cadres ci-dessous. Une telle répartition obligée contraint d’une certaine façon l’individu à décider ses choix de façon aussi réfléchie qu’affective.
  6. Il faut compter de 15 à 30 minutes pour un Q-Sort de 20 items

A la rescousse ! Wegener, Jules Verne et Glück, tous réunis ! (à propos de la commission Pochard)

Voilà, la commission Pochard a rendu son verdict ! Qui n’en est pas un ; c’est un livre vert [2]d’audit sur le métier d’enseignant et de recommandations, peut-être destiné à caler l’armoire normande de quelque bureau ministériel ? Mais, enfin, on a pu évoquer publiquement les conditions du métier, quelques évolutions possibles et mêmes souhaitables ; les auditions ont été larges (et on peut les voir et entendre sur le site de l’éducation, c’est passionnant[3]) ; le rapport écrit fait la part belle aux études anciennes, mises en perspective.

Les propositions sont très acceptables, quoiqu’en disent certains, et elles demandent à être entendues, discutées, relayées et étudiées. Au moins pour trois raisons que je voudrais avec vous développer ici en invoquant à notre renfort trois autres experts pour le moins…inattendus. : ce sont nos amis Wegener, Jules Verne et Glück. Ils nous aideront à faire le point sur ce qu’il faut retenir de ce rapport.

Wegener[4] au renfort des enseignants

Il y a encore peu de temps, à l’échelle humaine, et encore moins à l’échelle architectonique, nous partagions tous l’évidence que la terre était comme une « pomme plissée », où les sommets trouvaient leur origine dans le manque d’eau des matériaux. Il a fallu une sorte de révélateur comme cet Allemand, Wegener, en 1915, à la convergence de plusieurs sciences, pour construire la théorie de la tectonique des plaques.

Science déductive, intuition faite d’observations et de récurrences, plus tard prouvée scientifiquement, la géo-morphologie proposait une « construction du monde » suivant une dynamique bien différente, dont l’énergie est à puiser dans la convection du magma et la mobilité des plaques. Tout y est en mouvement.

Telle la faille de San Andreas, en Californie, en décrochement, à la jonction des plaques tectoniques du Pacifique et de l’Amérique, tous, nous savons que San Francisco et Los Angeles disparaîtront en peu de jours en cas de secousse forte dite de rattrapage : c’est-à-dire d’une autre façon que moins cela bouge, plus cela va bouger ; les tensions et pressions retenues seront d’autant plus fortes qu’elles ont été contenues. L’arc doit se détendre.

Que dirait alors Wegener de notre organisation humaine, sociale et professionnelle de l’Education, et de notre statut professionnel, celui de l’enseignant, statut de 1950, mais d’un modèle généré encore plus ancien ? Alors que tout, juste à côté, y est dynamique. Et quels sont les faisceaux qui montrent que notre profession, notre « monde » est bien relié aux autres qui connaissent de façon plus ouverte des évolutions moins saccadées et plus sereines.

Est-il bien raisonnable, viable, et même sérieux de penser que seuls les enseignants, français évidemment, seront « sauvés des eaux » de nos civilisations occidentales post-modernes. Ce n’est plus Wegener qu’il nous alors invoquer, mais bien saint Augustin, assiégé par les Avars dans sa Ville fortifiée d’Hippone. L’Ecole doit-elle être cette forteresse du Savoir, hermétique à tout ce que le Monde risque et promet dans un même mouvement ? Quel message d’avenir adressons-nous à nos élèves ?

Wegener nous a donc appris que pour comprendre le monde, il nous faut changer sans doute de représentation du monde, et que l’étude du terrain nous apprend plus que le savoir livresque et sclérosé enseigné dans l’université d’alors. Alors, allons sur le « terrain », avec Jules Vernes.

« Voyage au Centre de l’Enseignement », Jules Verne à la rescousse

Enquête archéologique sur les terrains de l’innovation et de l’expérimentation

Jules Verne nous a fait participer activement et de manière stimulante à un Voyage au Centre de la Terre[5] ; peut-être vous souvenez-vous qu’un professeur se mettait en devoir de décoder une énigme runique ; pour cela, il lui fallut partir en aventures pour résoudre des problèmes « éruptifs » tels que nous pouvons encore les connaître dans notre propre monde ; et dans ce parcours, parfois initiatique, parfois intérieur, découvrir des minerais, des trésors, des civilisations perdues ; parvenir enfin à sortir des entrailles de la Terre vers la belle Italie, paradis perdu.

L’enquête de terrain, l’accompagnement des équipes, l’analyse des dispositifs, l’évaluation partagée des expérimentations, sont des sources prometteuses pour détecter l’actualité du métier, plus sans doute, les lignes de force qui travaillent la profession. Car, tous ces collègues, tous niveaux confondus, toutes disciplines mêlées, (et cela répondra au prétendu argument de la spécificité intrinsèque d’un élément), préfigurent encore de façon « souterraine » les grands traits de l’Ecole moderne, comme une convection magmatique, à la manière de Wegener, eh oui !

Dans une courte synthèse, quelles sont les caractéristiques éprouvées, décodées, vécues par les enseignants engagés dans l’innovation et l’expérimentation pédagogique ? : tout d’abord, le cadre du métier n’est plus la classe, mais bien l’établissement : le travail s’affirme comme une organisation plus collective, régulée et ouverte, avec des prises de responsabilités qui décentre le professionnel de la stricte activité d’enseignant-transmetteur. Il y a des machines pour cela !

Ensuite, l’organisation, les contenus, les dispositifs sont au diapason de l’élève ; cela a des incidences très fortes sur le temps de présence et sur les modalités de servir du prof. L’action emporte une dimension de réorganisation des espaces, des temps et des rythmes scolaires ; les tice dans ce domaine n’y sont pas pour rien.

Enfin, les équipes ont entamé, sans vraiment le savoir, mais c’est bien cela un processus, une véritable mue : en acceptant quelques dilemmes ingérables au niveau personnel (le désordre, la toute puissance, l’autorité par exemple), les personnels ont développé une coopération professionnelle qui les rend plus forts, comme ils ont pu le faire avec leurs élèves. Des questions délicates comme le rapport au pouvoir, souvent soupçonné d’autoritaire, ou le libéralisme des positions, sont progressivement éloignées par l’ouverture des pratiques, des classes… et des esprits.

Ainsi, Jules Verne nous en avait averti, plonger au cœur de la Terre nous fait plonger au cœur de nous-mêmes. Les leçons du terrain nous disent que c’est bien une identité professionnelle qui est en pleine mutation. A ce titre, nous pouvons comprendre les résistances, inerties et secousses provoquées.

Orphée dans d’autres temps épiques est descendu dans les entrailles de la Terre pour retrouver son Eurydice. Allons ensemble à sa quête.

« J’ai perdu mon Eurydice[6] » : l’actualisation du « programme » enseignant en Europe, et l’exception française

Glück nous a servi un très bel air, mais Eurydice pour nous, en éducation, sera moins belle que celle délaissée aux Enfers. Eurydice,[7] le réseau d’information sur l’éducation en Europe, a publié en juin 2003 un important document sur la profession enseignante en Europe. Bien des aspects sont analysés, dont les tâches statutairement requises (p.54) .Ah, on retrouve les Lois de 1950.

L’enquête trans-nationale a permis de distinguer six domaines complémentaires à l’acte d’enseigner : supervision d’élèves entre ou après le cours, remplacement de collègues, soutien des futurs enseignants ou entrants ; seule est retenue les tâches d’évaluation des élèves (notations, conseil de classe, contacts avec les parents d’élèves).

La France présente un profil en la matière particulier en Europe. Quasiment aucune des tâches complémentaires au cours n’y est prescrite :

Le travail en équipe, note le rapport, est promu par des formations offertes aux enseignants.

La construction européenne se fera-t-elle aussi par l’harmonisation des statuts du métier d’enseignant et l’enrichissement de son rôle, particulièrement en matière de travail collectif ?

Ce qui caractérise ainsi l’exception française, c’est que le cadre de la prescription a été maintenu, là où il a évolué plus souplement, plus réactivement, plus ouvertement partout ailleurs, même si les situations sont diverses. Nous pouvons défendre une certaine spécificité à la française, mais nous serions coupables de rester aveugles à ce que nos élèves doivent faire, et par conséquent, à ce que nous devons faire pour qu’ils fassent….

Soyons attentifs à cinq points, et relions-les sans attendre !

Ainsi, réveillons Orphée, revenons à la Lumière, comme à la fin du roman picaresque de Jules Verne, accueillons la complexité du métier et la modernité de notre profession, dans une intelligence de la prescription faite nouvellement en janvier 2007[8] (dix compétences du métier) en insistant sur quelques points d’inflexion, non tant des textes que des pratiques, dont Perrenoud disait qu’elles constituent cette révolution du 3ème type, la plus efficace car la plus durable, mais la moins évidente.

Voici donc cinq points d’inflexion du métier pour les vingt prochaines années, à construire dès la formation initiale et à organiser dans les services déconcentrés

n Une mobilité nécessaire : c’est bien une question de management qui vaut pour tous les cadres, et non pour les enseignants ? La mobilité est source de fertilisation croisée, de décalage formatif et de santé mentale et intellectuelle ; non pas forcément, dans les mêmes termes que les personnels militaires, mais sur des rythmes plus formatifs, tels que 7 ans par exemple, c’est-à-dire le cycle de « vie » des connaissances et savoirs professionnels. La mobilité peut être certes géographique, mais aussi, dans une même aire, de niveau, de degré, de discipline, d’équipes. Bref, un peu de souplesse organisée éviterait bien des situations enkystées et problématiques non pour les enseignants que pour les élèves eux-mêmes !

n Une prise en compte des compétences et du parcours de formation : obligation, responsabilité, variété, continuité, ouverture – la mobilité serait bien facilitée par la valorisation des étapes, expériences et savoirs dégagées ; le parcours professionnel est un parcours de formation tout au long de la vie. Alors que la VAE agit dans tous les autres corps de métier, rien n’existe encore dans l’enseignement. Rien n’est fait pour que les personnels s’impliquent à évoluer, à bouger, à capitaliser. Là aussi, peu de choses suffirait à déclencher beaucoup. Le regard porté sur les compétences, l’attention des cadres portée à la formation continue, l’accompagnement à l’évaluation seraient des facteurs producteurs de performances à la mesure de la richesse du tissu humain de la profession. Mais qui le sait ?

n Un travail d’équipe, valorisé et supporté : injonction totalement paradoxale que le voir inscrit partout dans les textes et jamais appliqué dans la formation initiale et continue ! La performance individuelle, et toute discipline, prime tout autre aspect relégué à des abysses très secondaires ; là encore, peu de choses suffiraient à inverser le processus ; organiser des groupes de travail en formation, évaluer la performance collective au concours, favoriser explicitement les équipes dans l’emploi du temps et les services, tout cela ne tient pas des textes institutionnels, mais bien des pratiques, et derrière elles, des valeurs en jeu. Actuellement, on joue au tennis sur un terrain de football ! Qui gagne, à votre avis ?

n Un temps professionnel enrichi et intéressant pour l’élève et pour l’enseignant : l’Ecole n’a pas encore fait sa révolution en restant figée à l’ère tayloriste et ultra-libérale de la décomposition du temps et de l’émiettement des savoirs. Ce type d’organisation valables pour une petite partie des élèves n’est pas pertinente pour tous les élèves ; c’est bien en observation les lycées professionnels qui réussissent comme aussi les structures pour décrocheurs que l’on voit se transformer l’organisation du temps scolaire : longues plages de travail, activités menées à bien, travail d’équipe, évaluations différées et validantes, capitalisation des savoirs. Tous les acteurs de ce système ont à gagner pour une réflexion qui ne peut se faire que … localement. Aniko Husti l’a bien montré dans les expérimentations sur le « temps mobile ». Penser global, agir local !

n Une évaluation régulière et partagée : dans nos académies, dans certaines disciplines, il se trouve des enseignants qui n’ont pas vu un inspecteur dans leur classe depuis … 25 ans. Comment régulent-ils alors leurs pratiques pour survivre ? Après tout, ils vivent même très bien en ayant construit pas à pas des systèmes de dérivation et d’approfondissement professionnel ; ce qui était impensable ou difficile encore il y a quelques années, s’avère tout à fait réaliste à présent : la vie des disciplines, en listes de diffusion, sites en réseau, associations professionnelles, permet, si l’on y prend garde, un processus de formation continuée et d’actualisation de ses pratiques tout à fait remarquable. Ce qui manque certes, c’est la régularité et la proximité du conseil pédagogique, tel que l’on trouve dans le premier degré, très efficace et bienveillant. Ces approches plus collectives, plus professionnelles, plus partagées dans l’analyse que dans la prescription sont bien plus pertinentes et porteuses d’évolution que la pure inspection individuelle. Un entretien bien mené et ritualisé avec son chef d’établissement construit chacun de deux acteurs, plus sûrement que son absence totale et surréaliste dans notre contexte professionnel actuel. Pour filer la métaphore sportive, on joue au football avec un gardien de but « en aveugle ».

n Des possibilités de bifurcation et de seconde carrière : ceux qui ont des proches, conjoints, mais aussi grands enfants le mesurent : mobilité, souplesse, variété, diversité, changement, adaptation, sont des caractéristiques professionnelles qui touchent tous les domaines ; c’est vrai pour nos classes au quotidien Et les enseignants seraient encore une fois les seuls à ne pas connaître d’évolution professionnelle. La profession peut être vécue comme une impasse, faute de pouvoir identifier et faire reconnaître les compétences rares qu’elle peut développer chez ceux qui l’ont « habité ». De la même façon qu’il est intéressant que des personnels arrivent à l’enseignement en milieu de carrière, de même, certains devraient plus facilement partir pour le bien de tous, et de la société ! Des initiatives tels que l’association Aidoprofs[9] sont à faire connaître assurément auprès des collègues.

NOTA BENE : Le jeu de cet exercice sur la commission Pochard nous a forcé à tenter une analyse plus sectorielle. Cependant. « on n’a pas raison tout seul ! » ; on ne peut inviter au changement des pratiques sans penser « systémique », en envisageant l’accroissement de responsabilité de l’établissement, l’évolution nécessaire de l’accompagnement, la formation des cadres par exemple. Réforme de troisième type, vous dis-je.


[2] http://www.education.gouv.fr/cid20894/remise-du-rapport-sur-la-redefinition-du-metier-d-enseignant.html

[3] Je vous propose une liste forcément sélective et subjective, mais c’est un bon commencement:

François Perret, Doyen de l’inspection générale de l’éducation nationale (IGEN) , Hervé Hamon, Jean-Marc Monteil , Jacques Lesourne, Philippe Meirieu, Claude Thélot , Jean-Pierre Obin. Il nous faut juste … un peu de temps pour regarder, écouter, méditer . http://winmedia.axime.com/MENESR/education.gouv.fr/actu/2007_11_perret.mpeg

[4] Alfred Wegener est un astronome et météorologue allemand, principalement connu pour sa théorie de la dérive des continents publiée en 1915.

[5] Voyage au centre de la Terre est un roman de science-fiction, écrit en 1864 par Jules Verne. Ayant découvert un manuscrit runique ancien, un savant, son neveu et leur guide entreprennent un voyage vers le centre de la Terre en y entrant par un volcan islandais éteint. Comme à l’habitude de Jules Verne, le roman est un habile mélange de données scientifiques, d’extrapolations osées et d’aventure. L’introduction du roman reflète l’engouement d’alors pour une science jeune, la cryptologie. La suite enchaîne une description de l’Islande de la fin du XIXème siècle, puis une vaste introduction à deux autres sciences en plein essor, la paléontologie et la géologie. L’intégrale du roman peut être écouté en mp3 sur http://www.litteratureaudio.com/index.php/2007/07/17/jules-verne-voyage-au-centre-de-la-terre/ . On complétera utilement l’hommage par l’analyse des dimensions de l’espace et du temps dans le roman proposée par Lionel Dupuy http://pagesperso-orange.fr/jules-verne/CIEH2.htm .

[6] Extrait d’un air d’ Orphée et Eurydice, Tragédie-opéra en trois actes de Christoph Willibald Gluck, Livret français de Pierre-Louis Moline d’après le livret italien de Ranieri de’ Calzabigi, 1774

[7] Sur http://www.eurydice.org/Documents/KeyTopics3/fr/FrameSet3.htm

[8] Ce texte a permis de donner le cadre et les références du « Cahier des charges de la formation initiale », paru au Bulletin officiel le1er janvier 2007. Vous pouvez le retrouver dans son intégralité sur la page www.education.gouv.fr/bo/2007/1/MENS0603181A.htm

– agir en fonctionnaire de l’État et de façon éthique et responsable ; – maîtriser la langue française pour enseigner et communiquer ; – maîtriser les disciplines et avoir une bonne culture générale ; – concevoir et mettre en oeuvre son enseignement ; – organiser le travail de la classe ; – prendre en compte la diversité des élèves ; – évaluer les élèves ; – maîtriser les technologies de l’information et de la communication ; – travailler en équipe et coopérer avec les parents et les partenaires de l’école ; – se former et innover.

[9] http://www1.planeteafrique.com/AideAuxProfs/index.asp?affiche=Accueil.asp

Techniques et supports de formation pour mieux travailler en équipe

Comme le signalait encore le « Café pédagogique », notre site se visite comme un « palais vénitien ». La comparaison toute baroque n’est pas pour nous déplaire. Elle rend compte aussi de la navigation sur l’internet, fondé sur le principe de la sérendipité (dont nous reparlerons plus tard).

Ainsi, en s’appuyant sur les ressources développées lors de formation de formateurs, nous avons capitalisé un nombre certain de ressources, toujours mobilisables selon les besoins, au service du travail collaboratif. C’est bien une invitation à varier ses pratiques, dès lors qu’il ne suffit plus de mettre des personnes autour de la table pour que le miracle se produise. Organisons, varions, diversifions! Nous aurons au moins le sentiment, avant de confirmer tout cela, que « çà » avance !

fiches
écouter ; reformuler ; argumenter et négocier ; travailler en groupe oblige à ; les étapes d’une réunion;
Outils de régulation d’une équipe et/ou d’un projet

le QQCOQP; Le remue-méniges ou brainstorming ; ; Les 5 M ou arbre des causes d’Ishikawa ou arêtes de poisson; Trente façons d’enterrer une idée ; Grille d’observation d’une réunion

Le photolangage: techniques et banque d’images pour évoquer le métier d’enseignant;.

Mon vélo ou présentation interactive

Tests dynamiques
Test: êtes-vous un bon participant ? … et un bon « communicant » ?; Test: êtes-vous un bon animateur ?;; jeu de rôles sur l’organisation d’une réunion; AUTODIAGNOSTIC DES ROLES: quelle image j’ai de moi, quelle image je donne aux membres de mon équipe ?; Test d’écoute: le savant; L’accueil des réfugiés; Q-sort, deux exemples : projet d’école et travail d’équipe; Perdus en mer; La Nasa; Le blason, trois exercices d’application

 

l’effet « Bunuel » ou l’auto-enfermement collectif en éducation ?

Ou la petite métaphore de l’auto-enfermement qui nous menace, pas seulement au cinéma

Est-il possible d’ouvrir des portes ouvertes ? Rien n’est moins sûr !… C’est question de conviction. Et c’est à examiner notre rapport aux « portes » que nous entraîne un film de Luis Bunuel[1], L’Ange exterminateur, dont voici d’abord le script.

Nobile, riche aristocrate de Mexico, invite ses amis à dîner dans sa luxueuse maison de la rue de la Providence. Quelques faits bizarres se produisent : des domestiques partent sans expliquer leur comportement, le groupe connaît une impression de déjà vécu, Ana retire de son sac deux pattes de poulet alors que Blanca joue au piano une sonate de Paradisi. Et voici qu’une étrange absence de volonté empêche les invités de franchir les limites du grand salon. Sentant venir la fatigue, les invités campent sur place.

A l’aube le sortilège continue, il est impossible de sortir du salon. Le vernis des conventions disparaît, les belles manières font place à l’égoïsme le plus brutal. Un cadavre est caché dans un placard, deux amoureux se suicident, on perce les canalisations pour boire.

Le sortilège cesse après que l’un des invités ait eu l’idée de replacer chacun dans sa position initiale, au moment de la sonate de Paradisi, Les naufragés de la rue de la Providence sortent… Tout le monde se retrouve dans la cathédrale pour un Te Deum de remerciement. C’est là que le sortilège recommence alors que des émeutes éclatent dans les rues.

Nous pensons de ce film de Bunuel, l’Ange exterminateur , que tout enseignant, tout éducateur, devrait l’avoir vu parce qu’il est significatif des risques de paralysie et d’auto-fermeture que l’on peut avoir dans la vie sociale, et que l’on peut déjouer.

L’histoire, on la rappelle rapidement, réunit une soixantaine de personnes que, après avoir vu un opéra, viennent souper dans une magnifique maison à Mexico. Là, brusquement, le personnel de maison sent qu’il faut qu’il s’en aille, car les gens veulent rester entre eux ; alors, commence une série de dialogues, avec ce que nous savons s’exprimer, selon Bunuel, du « charme discret de la bourgeoisie ». Mais cela pourrait être aussi le fait d’intellectuels parisiens notamment ou de profs qui savent pratiquer des échanges de petites méchancetés, de manière à ne pas paraître être ce que l’on est en faisant croire qu’on est autre chose que ce que l’on est…

Tout cela s’exprime drolatiquement, inconsidérément, avec le génie de Bunuel. Brusquement, une personne se met à chanter et une fois qu’elle a chanté, il se passe que nous proposons d’appeler « l’effet-Bunuel » : chaque personne convainc chaque autre personne que les portes de la maison sont fermées, que l’on est allé vérifier, et que ce n’est donc plus la peine d’aller voir ce qu’il en est. Il s’ensuit une complicité d’auto-enfermement : on ne peut rien faire, on n’a rien à faire, il n’y a pas de pouvoir ni de décision. Il y a donc une démission consentie.

Après cela, bien entendu, il se passe sur l’écran beaucoup de choses, les gens se font encore des confidences plus ou moins vraies, ils amènent des relations inattendues. Puis on voit que passent, est-ce vrai ou est-ce un fantasme ou les deux à la fois, des bras coupés. Bien sûr, les gens se sont symboliquement mais pratiquement coupés les bras, les gens se sont ligotés. Et il y avait un cadavre !

A un moment donné, moment extérieur d’espérance, au-dehors, un gamin d’une douzaine d’année, qui tient un ballon, va aller ouvrir la porte réputée close. Tout le monde regarde. Il y a avec les badauds le commissaire de police, le préfet, tout le monde, toutes les autorités sont là, parce tous s’étaient dit consensuellement que si les gens à l’intérieur ne peuvent pas sortir, c’est qu’on ne peut pas entrer, ‘est qu’on ne peut pas aller à leur secours.

Mais au moment où le gamin va ouvrir la porte (qui est effectivement ouverte), par manque de chance, un coup de vent vient et le ballon s’en va. L’enfant candide court après le ballon. Résultat : il n’ouvre pas la porte. Alors les choses continuent dans leur fermeture, jusqu’au moment où, pour finir, à l’intérieur, chacun ayant repris sa place initiale, la dame qui avait chanté dit : « mais enfin, après que j’ai chanté, on a dit que les portes étaient closes, et si on allait voir. Allons voir ». Ils vont voir et effectivement les portes sont ouvertes. Mais le doute recommence ensuite sans tarder, dans une église où ils viennent chanter un Te Deum pour célébrer leur libération : celle d’une nécessaire fermeture, d’une conviction à l’auto-enfermement. Quand les trois prêtres vont vers la sacristie, ils se retournent et s’aperçoivent que les gens à nouveau se mettent devant la porte et n’osent plus sortir. L’initiative reste interdite, taboue.

A l’envers de ces paralysies contagieuses et complices ou « magiques », il faut affirmer que, quelles que soient les circonstances et les menaces, dans la vie, notamment professionnelle, au-delà des portes fermées, il est opportun de savoir travailler en équipe, en réseau et en échanges réciproques, d’une façon rusée, grâce à laquelle la dissymétrie des différences entre les individus est compensée par la réciprocité de leur estime, de leur mutuelle affection et de leurs rapports de coopération consentie, étayant les initiatives de chacun, indispensable à tous.

Contre l’enfermement

Ce conte de Bunuel peut nous inviter, tout compte fait, enseignants, à ne pas nous co-enfermer, ou nous auto-enfermer, derrière une conception lourde autant que figée des programmes considérés comme constructions fermées et enfermantes : au lieu d’ouvrir des portes et de circuler souplement dans les pièces de ces programmes, en effectuant des choix libres qui nous sont reconnus statutairement, comme possibilités ouvertes à notre responsabilité professionnelle.

Cette liberté responsable vaut pour nos pratiques pédagogiques ou didactiques, organisationnelles ou évaluatives. Aussi bien, l’alerte de l’effet-Bunuel peut nous inciter à ne pas nous laisser bloquer dans une conception linéaire, restreinte, sans variété ni surprise, de notre activité d’enseignement : dans sa fonction organisatrice des relations entre les élèves, comme dans l’ajustement des emplois du temps, trop souvent émiettés en une kyrielle d’heures disjointes selon des disciplines distinctes, séparées, et sans synthèse interdisciplinaire. Rappelons que des recherches menées par l’INRP ont montré que des séquences d’enseignement de trois heures à la suite dans une même discipline se révèlent d’une efficacité très supérieure à l’enseignement dispensé en trois heures séparées, à tous les âges et pour toute les disciplines.

Il devient aussi urgent d’innover originalement : nous ne sommes pas condamnés, par mythe identitaire et « bunuellisme » à répéter des routines réductrices : ce qui serait « dérogeant » à l’éthique, à la noblesse de la pédagogie, en ce qu’elle est bien l’art de la fraîcheur et du renouvellement, de l’originalité créative et des stratégies inventives.

Dans l’enseignement, ce qui enferme, ce peut être donc :

  • une conception lourde et figée des programmes, pseudo-encyclopédique et obsessionnelle… !
  • une conception linéaire de l’activité d’enseignement,
  • une conception pesante, ou trop distante, de la relation aux élèves
  • une déficience d’ingénierie pédagogique

D’où proviendrait cette autosuggestion négative ?

Souvent, dans les institutions centralisées, les gens n’osent pas prendre les solutions et les décisions qui sont à leur portée. C’est une mise en impuissance collective. « Ce n’est pas possible, on a essayé » ; « les autorités l’interdisent ; , « c’est inutile avec les élèves tels qu’ils sont ». Ne retrouve-t-on pas ces litanies de la conservation d’une situation triviale, très fréquemment, dans notre système de formation et d’enseignement ? Cela pourrait provenir à la fois d’habitudes et aussi d’un déficit d’ouverture et de complexité organisée dans les formations des enseignants.

Nos collégiens ne s’autorisent pas assez à s’autoriser. S’il s’agit très souvent d’innovations à mettre en œuvre, ou d’accepter de nouvelles manières de faire, les enseignants français éprouvent une résistance qui tient au fait qu’ils craignent de faire du nouveau. Ils croient l’Institution, étatisée, beaucoup plus raide qu’elle n’est. C’est une vision fossilisante de celle-ci..

La position initiale de l’enseignant en France est pourtant liée à une conception individualiste, voire anarcho-syndicaliste, dans laquelle chaque enseignant est réputé propriétaire d’un poste dans les conditions où il est en état et en droit de faire les choses qui lui conviennent. Mais, en même temps, s’oppose l’existence du cadre institutionnel dans lequel les individus placent leur angoisse d’indépendance, avec des contraintes multiples de temps, de lieux, d’objectifs. Ce sont des conditions très contradictoires par rapport à leur élan d’individualisation ; elles risquent de pousser à un modèle moyen habituel et d’obérer en chacun la personnalisation créatrice.

On peut citer à titre d’amusement encore d’autres logiques contrariantes qui interfèrent dans la réalité des enseignants,

« Nous n’avons pas le temps »

« Nous n’avons pas été formé pour cela (nouvelles taches, nouvelles manières, nouvelles…) »

« Les élèves n’ont pas le niveau ».

« Autrefois, c’était mieux. »

« Que va dire mon inspecteur, nous ne sommes pas soutenus par l’Institution. »

« Les parents ne sont pas d’accord. »

Comment alors pousser les collègues à oser ouvrir la porte ?

Qu’est ce que chacun peut en effet faire dans le cadre d’une Institution, à la fois ancienne et apparemment très formatée ? Michel Serres (in Rameaux, sur le formatage du père) l’analyse bien : chacun doit enseigner ce qui provient des générations antérieures par le fait de la littérature ou de la culture ; il est nécessairement dans le formatage du père et ne s’autorise pas, trop naturellement, à être le fils capable d’initiative.

Il faut pourtant pour ce chacun se départir de ce sentiment de relative impuissance qui le conduit à un enfermement.

Il y a toujours, dans une clôture, des issues, des réalités faillibles, des interstices. Mais nous ajoutons trop inertement à la fixité des choses en les bouchant par un lancinant besoin de sécurité. Dans notre monde actuel, où cependant les réalités de toutes natures sont en train de changer très rapidement, il y a cependant plus grave péril à rester statique.

Enseignants, nous sommes de plus en plus Invités à créer : qu’est-ce qu’il est possible, à trouver comme solutions neuves qui permettent de faire originalement progresser nos élèves ? La donnée basique de l’Education a toujours été la Liberté pédagogique, depuis Jules Ferry et non se cantonner dans ce qu’on a vu ou entendu dans les pratiques de formation.

Il est vrai, le travail relationnel est toujours anxiogène, a fortiori avec des groupes d’enfants. Un souci d’adaptation revient trop souvent à se donner une consistance défensive et conservative. On projette alors sur l’Institution des rigidités qu’elle n’a pas forcément. Les enseignants habitués à la compétition du système universitaire pensent le système scolaire comme celui d’individualités en concurrence, avec des liens méfiants. La difficulté de communiquer professionnellement est évidente.

Les implications pour penser la formation des enseignants et l’enseignement aux élèves sont nombreuses pour assurer la variété, les choix possibles d’organiser les classes, les alternatives de progressions, préparant les élèves à la souplesse et non au psittacisme[2]. La richesse est celle du possible, la difficulté vient de la pauvreté et la rigidité « monogamme. »

Car on peut voir le programme de l’Enseignement comme un large catalogue de gammes, en possibilités offertes et non comme l’énoncé d’une menace impliquant que tout son contenu doit être fait. L’enfermement ici est excessif, quand n’est pas laissée une responsabilité de choix sur l’importance, l’intensité à accorder aux divers éléments.

L’autre enfermement réside dans la rigidité de notre évaluation : elle se veut habituellement absolue, définitive, sans discussion. Nous n’aimons pas la laisser apparaître comme si elle était un élément provisoire, indicatif, stimulant.

Il en résulte le danger d’arriver à une identification entre la nature de l’élève et le produit éphémère de son travail, bloquant devant lui des portes d’avenir et de vie.

Au surplus, chaque enseignant, chaque discipline s’étant fermée, l’intercommunication et les choix ne se font pas. Il n’y a de « portes » pour des adaptations. L’égalité s’enferme dans l’identité, c’est-à-dire dans la clôture de chacun sur soi. On confond uniformité et uniformisation, de quoi mettre à « cran » les jeunes décrits comme « nuls », ou « insuffisants », oralement et par écrit, ou sur écran.

Qu’en pensez-vous ?


[1] Au départ, le film s’intitulait « Les naufragés de la rue de la providence ». le titre définitif a été suggéré à Bunuel par un de ses amis dramaturges qui l’envisageait pour une pièce de théâtre. Le titre, référence à l’Apocalypse était libre de droit et Bunuel l’a utilisé pour son film.[2] psittacisme : vient de perrroquet : répétition mécanique de notions qui n’ont pas été assimilées.

L’établissement, « fabrique de compétences » ?

(dessin extrait du « Journal d’un remplaçant » de Martin Vidberg, http://www.bulledair.com/everland/

Je vous parlerai depuis Sirius, c’est-à-dire, de la France, où tout est spécifique et tellement universel ! La formation d’enseignant reste encore un sujet à traiter, tant les mécontentements de toutes parts se font entendre. Quand il nous faut à présent recruter massivement. Comment rendre une formation initiale et continuée plus efficace ? Quelle est la « prise de compétence » des enseignants débutants en établissement ? Quels gestes, quels actes donnent sens au sentiment de compétence ?

Bien formé, mais à quoi ? L’histoire vraie de M. X

Je connais l’histoire vraie d’un enseignant d’histoire-géographie (en France, c’est comme cela), débutant dans le métier, dans un collège urbain de type REP (éducation prioritaire).

Consciencieux, il fait tout il a appris, et comme il pense que cela est bon pour ses élèves ; il travaille dur, mais cela se passe plutôt bien.

Au conseil de classe du 1er trimestre, le chef d’établissement fait le tour de table : dans un ordre aléatoire des places, il donne la parole à chacun des enseignants, en ayant soin de les identifier pour les autres participants ; mais en arrivant sur notre jeune enseignant, il bute, il ne connaît pas son nom ; « alors, euh,…, en histoire-géo, c’est comment ? ».

Ce n’est pas un oubli, c’est un « blanc » que d’autres d’ailleurs autour de la tablée ont partagé. Il a eu beau faire tous les gestes, dire tous les mots attestant de son sérieux, de sa compétence encore nouvelle, mais non perçue. Il faut attendre, mais quoi ? Manifestement, il n’a encore pas « sa place » (reconnue) dans l’établissement.

2ème trimestre, même configuration. Le chef d’établissement applique sa méthode. Tout le monde y passe, et cette fois, c’est la bonne. « Alors, M. X, comment vous percevez la classe ? ». L’enseignant débutant a enfin un nom, une identité professionnelle, et l’assemblée l’écoute, au même titre que les autres collègues.

Comment expliquer ce changement insignifiant dans l’adresse à la personne et qui pourtant dit beaucoup sur le sentiment de compétence, tant pour l’enseignant débutant lui-même que pour ses « autruis significatifs » qui l’ont reconnu comme un des leurs ?

Est-ce le sérieux de l’instrumentation très contemporaine de ses évaluations auprès des élèves ? Est-ce un possible travail partagé et reconnu avec quelques-uns qui ont de la « portance » dans le collège ? Est-ce le seul jeu du temps qui passe, c’est à dire des six mois de travail, non forcément en commun, mais de coexistence (pacifique) dans la salle des profs ? Peut-être tous ces facteurs objectifs corrélés.

Il y a pourtant une petite « chose » qui a changé dans l’entre-deux : il a pris des tickets de cantine, il a pris le temps de déjeuner avec ses collègues à la demi-pension, au lieu, avant, de se concentrer, de se sur-préparer. Echanges informels, échanges réguliers, non-professionnels, et pourtant, importants. En adoptant us et coutumes, la petite communauté enseignante l’a reconnu comme l’un des leurs, c’est-à-dire, adapté au contexte, donc compétent.

« Connaître tous les étages de la maison » (Jacques Lévine)

Dans son traité, De natura rerum, Lucrèce échafaudait une théorie de la construction du monde : dans une pluie drue et rectiligne d’atomes, il a suffi d’une légère déclinaison angulaire de l’un d’eux pour que, par chocs et contre-chocs, la matière se créée. Ce « clinamen » ne représente rien en soi, mais permet l’avenir du monde. Par transposition, il a fallu à notre jeune débutant d’élargir son regard, d’embrasser son champ réel d’action pour enclencher le processus.

Ainsi, il ne semble pas, l’expérience l’apprend, que cela soit suffisant, pour être un « bon enseignant », de tenir ses classes, de faire des cours construits. L’enseignant appartient à un microcosme complexe, qu’il lui importe d’appréhender, de décoder, de s’approprier, et d’en faire une ressource, un point d’appui.

Ce micro-système, organisation d’adultes professionnels, obéit à des règles, écrites et surtout non écrites, comme toute organisation humaine, soumise à des forces internes et des tensions externes, Un espace-temps où se travaillent quotidiennement des questions relatives au pouvoir, à l’autorité et au savoir. Sont-ce des dimensions prises en charge dans la formation ?

En France, le texte de 1997, relatif aux « missions et compétences de l’enseignant, sortant de formation initiale » se construit en trois étages : sa classe, son établissement, l’Institution. Alors, comme le signalait Jacques Lévine, il nous faut connaître « tous les étages de la maison », et non se cantonner à une seule pièce, quand les élèves ont arpenté de la cave au grenier !

Ce champ psycho-social, est-il l’objet d’une formation ? Est-ce que la formation initiale permettrait de construire efficacement la compétence requise ? Sous quelles modalités les plus propices ? Nous touchons ici un réel besoin de formation générique de tout enseignant débutant.

Et ce pourrait être le propre du tuteur en établissement. Mais… le sait-il ? Comment lui-même a-t-il été formé à cette problématique, non tant disciplinaire (comme nous le savons le faire très bien en France), mais bien professionnelle ? Quel rôle donne-t-on à la formation de formateurs, qui devrait inclure les tuteurs en établissement… Ce n’est pas le cas.

Ainsi, la question de la formation initiale en établissement renvoie-t-elle à la finalité de formation tout court : quel enseignant la Nation désire-t-elle, pour quelle Ecole ? Ces questions font débat en France, comme chez vous, dans les cantons suisses ; les controverses sont encore très actuelles, et d’une certaine manière, encore irrésolues.

La formation sur site, comme moment de construction de la compétence collective

Il y a bien des moments ou des modalités privilégiées où la formation peut jouer comme « enrôlement » dans le métier : c’est le propre de la formation continuée sur site.

Plus ou moins développée selon les académies, plus ou moins « professionnalisée » selon les expériences et les formations sollicitées, l’accompagnement d’équipe sur site est une tendance lourde de ces dernières années, au travers des péripéties qu’a connu le système de formation d’enseignant en France.

Quelles que soient les entrées ou les thèmes choisis dans l’accompagnement d’une équipe en projet, ou en difficulté, il s’agit bien de développer une même compétence « collective »[1], englobant tous les acteurs concernés sur site dans un processus professionnalisant ; en ce sens, un enseignant débutant apprend autant qu’il peut apporter à son équipe.

C’est un temps fort, le plus souvent, perlé, espacé sur plusieurs mois, et finalisé. Bien menée, une formation, partie intégrante d’un plan de formation d’établissement, représente un moyen efficace, investi par le chef d’établissement, qui transforme le collège en une « organisation apprenante ».

Il appartient donc aux institutions de formation, IUFM et désormais Universités en France, et en Suisse, les HEP, de pouvoir organiser ces accompagnements adéquats, souples et efficaces, pour conduire le changement et permettre, entre autres, la prise de compétences de ces jeunes qui arrivent en masse actuellement dans nos écoles.

Pour aller plus loin :

Des pages pour l’enseignant débutant

http://parcours-diversifies.scola.ac-paris.fr/PERETTI/debuter.htm

http://parcours-diversifies.scola.ac-paris.fr/PERETTI/autonomieeleve.htm (une formalisation en cristal de 30 compétences, avec liens hypertextes)

Un portail pour les formateurs

http://parcours-diversifies.scola.ac-paris.fr/PERETTI/former.htm

et plus particulièrement à propos de la formation sur site

http://parcours-diversifies.scola.ac-paris.fr/PERETTI/systemeetablissement.htm

Autour du concept d’établissement apprenant ou établissement formateur, trois diaporama issus du séminaire de printemps 2007 de l’ISP-Paris


Létablissement scolaire apprenant . A. Bouvier – Support diaporama de la première conférence d’Alain Bouvier


Le management d’un établissement apprenant. A. Bouvier. – Support diaporama de la deuxième conférence d’Alain Bouvier

Transformer l’école en organisation apprenante. M. Gather Thurler – support diaporama de la conférence de Monica Gather Thurler

Voir d’autres articles d’Alain Bouvier:

http://www.forres.ch/textes.htm#bouvier

ainsi que : Régulations intermédiaires et pilotage des systèmes éducatif


[1] J. BEILLEROT introduit brièvement, mais de manière éclairante, le concept de compétences collectives en partant d’un postulat : « il y a des compétences (et donc des savoirs) qu’aucun n’aurait pu détenir, ni inventer ou construire seul ». Ainsi, on ne peut apprendre à négocier qu’à plusieurs, et une négociation réussit ou échoue pour tous.
Ces compétences collectives résultent de la conjugaison de compétences individuelles (agencement de savoirs différents ou agencements de savoirs mis différemment en oeuvre), qui sont plus que l’addition de chacune.

O tempora,O mores: le temps mobile en établissement, toujours à revoir


Une information à la fois historique et d’une furieuse actualité ! Le « droit à l’expérimentation » inscrit dans l’article 34 de la Loi pour l’orientation de l’Ecole de 2005, et l’incitation forte désormais à « travailler autrement », faite par l’Institution elle-même, tant par la DGESCO, l’IGEN et les recteurs d’académie mettent les équipes de direction et d’enseignement devant des choix pédagogiques.

Non plus de simples projets, qui tout pédagogiques, restent intéressants en eux-mêmes, mais ils présentent la caractéristique de saturer le temps des acteurs et les organisations qui ne bougent pas pour autant. Pour peu, ils servent de caution pour un certain immobilisme des pratiques collectives. Mais des projets avec des « objets », comme dit Guy Berger, qui permettent à des équipes de faire évoluer tout ou partie de l’organisation du travail en établissement ; travailler sur le « temps mobile », des plages plus longues, des variétés de groupements accentuent les performances d’un établissement.

La forme du temps scolaire emporte le fond des pratiques enseignantes ! Par un paradoxe intéressant, une heure de cours, c’est trop long et pas assez: trop long pour un enseignement frontal, répété six fois dans la journée; trop court pour y installer une variété requise de formes de travail. Ainsi, en décompressant le cours sur une plage plus longue, on rend possible des phases d’enseignement, d’acquisition, d’appropriation individuelle et collective, de recherche et d’évaluation. Tout cela n’est pas nouveau en soi. Mais notre grande maison du Savoir semble être frappée d’amnésie professionnelle et de non-reconnaissance de l’expérience, ce qui dans d’autres milieux passerait pour une faute grave.

A l’occasion des travaux de mémoire, engagés avec André de Peretti, j’ai pu retrouvé une « pépite » en une VIDEO produite en 1987 par l’INRP et Aniko HUSTI, autrice du Temps mobile, en 1985. On y découvre des récits d’expériences réussies de temps mobile, de temps variables, à rythme parfois individuels, en Alsace, à Chalon, et… à Paris (Collège Braque, Lycée Bergson), des interventions d’enseignants, d’élèves, de parents. Les chefs d’établissement eux-mêmes, tableaux à l’appui, montrent la relative facilité de quelques dispositifs. Suivis d’entretiens avec Aniko Husti, Guy Berger et André de Peretti.

Vous pouvez visionner tout cela facilement sur l’internet (version rapide en flash) à partir de page http://francois.muller.free.fr/diversifier/index.htm ou plus directement sur http://francois.muller.free.fr/diversifier/TEMPS.htm

POUR ALLER PLUS LOIN

QUelques éléments d’analyse et d’actualisation des travaux de HUSTI en ligne à partir cette page

(extraits d’une publication « 1001 propositions pédagogiques », André de Peretti et François Muller, ESF, oct. 2008)