Hisui est le nom de ce journal, il veux dire Jade en japonais. Ce doux prénom est le prénom de l’enfant d’Hélène, elle l’a tant désiré mais malheureusement cette petite fille n’a jamais vu le jour. Pourtant, elle a toujours eu ce besoin de communiquer avec elle, c’est pourquoi peu de temps après cette perte tragique elle a décidé d’ouvrir ce journal.
« Hervé Joncour est l’homme que j’ai choisi pour devenir ton père. (…) Suite à ton départ il a fait une dépression, cette dernière l’a poussé à quitter son poste dans l’armée. Au grand dam de ton grand-père qui lui avait imaginé une grande carrière militaire. C’est ainsi qu’à l’aube de ses 24 ans il a décidé d’acheter puis revendre des vers à soie, cette profession insolite qui est effectivement assez surprenante aux premiers abords mais prend tout son sens quand on comprend que cette dernière est menacée d’extinction à cause de terribles épidémies »
« Ton père est le genre d’homme avec qui j’aurais souhaité que tu fasses ta vie, il est doux et attentionné. Malheureusement, cela restera de l’ordre du souhait »
« Ton père est revenu de son premier voyage au Japon, il a de nouvelles idées pour ce jardin dont il rêve, il me raconte peu de choses de ses voyages mais du peu qu’il m’en a raconté, le Japon me semble être un pays où il fait bon vivre, j’ai aperçu quelques uns de ses croquis dans son carnet de voyage, les paysages semblent figés dans le temps. Comme j’aimerai, moi aussi, voyager ! »
« Ma chère Jade, je ne te cache pas mon désarroi face aux absences à répétition de ton père, il semble fuir les problèmes du quotidien en s’accrochant coûte que coûte à cette cause.. »
« Cela fait maintenant un mois qu’il est revenu de son second voyage, aujourd’hui je suis allée voir le lever du soleil sur la colline qui surplombe notre ville, Lavilledieu. Je ne saurais l’expliquer mais je le sens plus distant, il regarde souvent un morceau de papier qu’il range précipitamment lorsque je m’approche, je le sens s’éloigner de moi sans que je ne sache pourquoi… Aurait-il rencontré quelqu’un là-bas ? Il est vrai que de nos jours l’émoi de l’aventure peut pousser les hommes à remettre en cause les serments sacrés du mariage, cependant je ne le pense pas capable d’une telle chose… »
« C’est en vain que nous avons essayé de te rendre grande sœur… Durant nos deux semaines sur la Riviera, avec ce cadre plus qu’idyllique, nous nous sommes persuadés que nous pourrions concevoir un petit bout. »
« Jade, je suis dans tous mes états, ton père me trompe, il se rend chez une certaine japonaise pour discuter de ce fameux bout de papier… »
« Je sens que mes forces m’abandonnent peu à peu, je vais bientôt te rejoindre ma chérie. Récemment, sentant la fin porche j’ai décidé d’écrire une lettre à ton père au travers de laquelle j’exprime tout ce que ma pudeur n’a jamais pu lui exprimer de vive voix, cette voix qui dit être la plus douce au monde. Je l’ai toujours aimé et je l’aimerai toujours par-delà la mort. J’espère sincèrement qu’il la gardera près de lui, ainsi une partie de moi continuera de vivre à ses côtés même s’il ne le sait pas, une partie de moi restera pour veiller sur lui. Et quand je t’aurai rejoint mon enfant chéri nous veillerons ensemble sur sa vie »
« J’ai suivi ma pulsion, je n’aurai surement pas dû mais il fallait que je sois sûre que cette lettre reste auprès de lui et vu l’intérêt qu’il a prêté à ce morceau de papier j’ai demandé à cette femme de traduire ma lettre en japonais. »
« Cette année lors de notre traditionnel voyage à travers le monde après Naples, Madrid encore Londres, nous sommes allés a Prague, c’est une ville magnifique. J’aurais tellement aimé t’emmener visiter ce nouveau monde qui s’offre à nous »
De la part d’Hélène à sa fille adorée, Jade.
