Dans mes différentes escapades à travers les romans que j’ai pu parcourir, il existe des moments et des rencontres qui laissent une empreinte profonde sur les lecteurs, bien au-delà de la page. L’une de ces rencontres emblématiques se trouve dans le récit de Salvatore Piracci, un personnage au destin inextricablement lié à une femme mystérieuse, la femme du Vittoria. Plus précisément, le moment où elle demande à Piracci de l’aide, afin d’obtenir une arme lui permettant de mettre fin à ses souffrances, en se vengeant de l’homme responsable de son malheur, il y a 20 ans de cela. C’est pour cette raison bien précise que j’ai décidé d’interpréter le personnage de Salvatore, enregistrant ses pensées les plus intimes, laissant place à une réflexion sur sa vie après cette seconde rencontre, marquant le premier tournant mystérieux du roman.
I. L’OMBRE DE CATANE – PAGE 40
Dans un silence pesant, Salvatore Piracci se retrouve seul dans son appartement, il fait nuit, il n’y a aucun bruit, mis à part ceux de cette femme, en train de quitter son logement. La femme du Vittoria vient de partir de sa modeste demeure avec l’arme qu’il lui a fournie. Mais qu’a-t-il fait ? Pourquoi ? Pourquoi avoir cédé ? Piracci, assis sur le bord de son lit, prend une grande inspiration, la poitrine lourde de remords. Il a besoin de parler, de se décharger de cette culpabilité qui menace de l’étouffer. La solitude de cette pièce sombre avec pour seul lumière le reflet de la lune, lui donne l’impression d’être coupé du monde, mais il a un moyen de libérer ses pensées. Angelo ? Non se dit-il, à cette heure là mon vieil ami doit se reposer, il n’est pas disponible. Que faire alors pour me libérer de ce fardeau ?
Il attrape son vieux smartphone posé sur la table de chevet, un vestige de son passé, et appuie sur le bouton rouge d’enregistrement. Le mécanisme grince légèrement, il allume une cigarette, puis la voix de Piracci résonne dans la pièce, teintée d’émotion. Au fur et à mesure que Salvatore Piracci parle dans l’enregistreur, il se rend compte que ces mots captureront un instant de sa vie qu’il ne pouvait pas laisser sombrer dans l’oubli. Il ressent le besoin impérieux de laisser une trace de ce moment, de cet épisode qui marquera à jamais sa conscience. Les pensées de Piracci se mêlent aux mots qu’il murmure à voix basse dans son petit appartement. Il se dit que cet enregistrement est un acte de préservation, une manière de cristalliser les tourments et les dilemmes qui le hantent. Il craint que, confronté à l’ampleur de ses actions, à la complexité des sentiments qui l’ont poussé à aider la femme du Vittoria, il ne finisse par les oublier ou les minimiser avec le temps. Il a besoin d’un rappel constant de ce qu’il a ressenti, de ce qu’il a choisi de faire, mais aussi des mots de cette femme. Piracci se dit que son smartphone est comme un témoin silencieux de son âme en conflit. C’est sa manière de préserver l’authenticité de ses émotions, de se rappeler que, malgré tout ce qui se passe, il n’est pas insensible aux conséquences de ses actions. Il veut que les mots qu’il prononce soient gravés dans le temps, une preuve tangible de sa lutte intérieure. L’enregistrement continue à tourner, avalant les tourments de Piracci, ses doutes et sa peur. La voix enregistrée est le reflet de son âme en conflit, cherchant désespérément une réponse à un dilemme moral insurmontable.
En fin de compte, Salvatore Piracci comprend que cet enregistrement sera un héritage de ses tourments, une preuve de sa lutte pour ne pas sombrer complètement dans l’obscurité. Il sait que cette voix enregistrée sera son rappel constant, sa promesse de ne pas oublier les leçons apprises dans ce moment de faiblesse et de complexité. Parler lui a fait du bien, il peut dormir plus serein.
