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TRAVERSÉE D’UN ROMAN

Chère Soie,

Il y a de cela plus d’un mois maintenant, j’ai fait ta rencontre. J’avoue ne pas avoir été emballée par notre première approche. J’ai toujours eu du mal avec les romans imposés par l’Ecole, que ce soit des recueils de poèmes, des livres récents ou bien même des grands classiques. J’aime la lecture, mais seulement quand j’ai le choix de ce que je lis. Me lancer dans ta lecture a été très dur, j’ai lu les premiers pages de ton roman sans vraiment accrocher. Je ne comprenais pas tout, je ne sais pas si c’était mon cadre de lecture ou ton style d’écriture, mais j’ai très vite baissé les bras. Je t’ai regardé prendre la poussière sur mon bureau pendant plus d’une dizaine de jours. J’avais beau te passer devant plus de dix fois par jour rien n’y a fait. 

C’est une certaine pression de la classe qui m’a poussée à me relancer dans ta lecture. Tout le monde disait avoir fini alors que moi, je n’avais même pas atteint la moitié. Les challenges et la compétition m’ont toujours motivée dans la vie, alors te finir est devenu mon objectif premier. De plus, je voyais la « dead line » des travaux d’appropriation sur toi approcher à bien trop grands pas selon moi. Je me suis donc armée de tout le courage que je pouvais pour finir ta lecture. Après de nombreuses pages d’incompréhension, j’ai enfin vu le bout du tunnel quand, page après page, je comprenais enfin le sens de tes écrits. 

Ton auteur Alessandro Baricco m’était totalement inconnu, je n’avais jamais entendu parler de lui ni n’avais lu un roman de lui. J’ai été mitigé tout au long du roman par son style d’écriture, certains chapitres me paraissaient durer des heures tandis que d’autres filaient à une vitesse folle. Au-delà de ça, ton auteur a une tendance à utiliser l’anaphore qui est une figure de style que jusque-là, je n’avais rencontré que dans des poèmes. J’ai donc été surprise de découvrir cette figure dans un roman. J’ai d’abord cru à une erreur de ma part quand il m’a semblé relire un passage que j’avais déjà lu. J’ai donc tourné page après page, dans un sens puis dans l’autre pour finalement me rendre compte qu’en effet, je relisais le même passage, mais seulement a des chapitres différents. De là, mon intérêt pour le roman s’est éveillé.

Au travers de ta lecture, j’ai aussi eu la chance de découvrir le monde de l’industrie de soie. J’ai réalisé que je n’avais aucune idée de commun était fabrique la soie. Et quelle fut ma surprise quand j’ai découvert que cette fibre était issue de vers. Un sentiment de dégoût a d’abord pris le dessus, mais a vite été remplacé par un émerveillement total. J’ai découvert l’histoire mouvementée de l’industrie de la soie au XIX siècle. Les maladies qui touchaient les vers à soie ainsi que les problèmes d’approvisionnement qui ont conduit Herve Joncour à se rendre au Japon. 

J’ai adoré découvrir le Japon au travers des yeux du personnage principal, son émerveillement pour un pays étranger, une culture totalement différente de la sienne. J’ai aussi particulièrement apprécié le fait que ce pays qui nous paraît une destination anodine au jour d’aujourd’hui, soit « la fin du monde » au XIX siècle, d’après les mots des personnages du roman.

Tout au long de ton histoire, j’ai été partagé entre détester Hervé et l’adorer. J’ai été très admirative de son courage lorsque, malgré tous les avis négatifs et les tentatives de dissuasion de la part des habitants de Lavilledieu quant à son projet de partir au Japon afin d’acheter des vers à soie en pleine santé, il est quand même parti à l’autre bout du monde. Le personnage a su faire preuve d’une détermination sans failles pour aller au bout de son idée. Malgré cela, j’ai été très déçue d’Hervé lorsque dans ma lecture, j’ai découvert que le mystère femme du Japon représentait plus qu’un simple jeune femme pour Hervé. D’autant plus que de notre point de vue de lecteur, l’auteur a décidé de nous faire part des émotions et craintes de Hélène, la femme d’Hervé Joncour restée au pays. Même si Hervé n’a finalement commis aucune faute vis à vis de sa femme et de leur mariage, Hélène passait son temps à s’inquiéter pour son mari et leur relation tandis qu’Hervé pensait à une autre femme. Ces différents passages restent une déception pour moi.

Par ailleurs, j’ai apprécié l’aspect historique du roman. Alessandro Baricco fait référence tout au long de son roman à des événements historiques concernant entre autres le Japon. Dans ton chapitre 31, on redécouvre un Japon profondément changé, tous les habitants sont dans l’attente que la guerre éclate, alors que quelques chapitres auparavant rien ne laissait présager une guerre, dans le pire des cas seulement quelques conflits. Et enfin dans le chapitre 43, lorsque Hervé retourne au Japon après des mois d’absence, c’est le choc, que ce soit pour lui ou pour nous. Il ne reste plus rien du village ou il avait l’habitude de se rendre. La guerre a finalement éclaté et a tout détruit sur son passage. Ce contraste entre les premiers et les derniers chapitres est très marqué, je pense que l’auteur a essayé de marquer un tournant dans l’histoire. Et j’avoue ne pas y avoir été préparé ou du moins pas assez. 

Je me suis aussi particulièrement identifiée à Hervé à certains moments du roman. À plusieurs reprises, on entend parler d’un parc qu’Hervé aurait imaginé, construit et entretenu. J’ai eu le sentiment qu’il avait besoin d’un point de repère, une espèce de phare dans la tempête et les tourments de sa vie. Ce lieu s’est apparenté à son petit coin de paradis et de repos, il l’imagine et construit selon ses envies et l’a choyé jusqu’à la fin de sa vie. On pourrait presque comparer ce parc à son enfant. J’ai donc été touché par ce besoin qu’a ressenti le personnage d’avoir son espace rien qu’à lui où il est en parfaite harmonie avec lui-même. 

Une des choses qui m’a le plus marquée dans le roman est le lien particulier et à la fois mystérieux entre Hervé Joncour et Hara Kei. Leur première rencontre était bizarre, Herve n’osait pas parler et Hara Kei n’était pas plus bavard. Mais malgré cela, lorsque dans le chapitre 41, Hervé parle de lui ainsi que de sa vie Hara Kei semble comme pendu aux lèvres du jeune homme. Aucun problème de compréhension ne semble impacter leur échange, malgré la barrière de la langue les deux personnages donnant l’impression de se comprendre. 

À la fin de ta lecture, j’ai été agréablement surprise de découvrir une dernière facette de Hervé qui est celle de la transmission. Jusque-là, selon l’auteur, le personnage ne serait jamais accordé cette chance, mais une fois la majeure partie de sa vie passée, il est revenu sur ses décisions. Au travers de ces récits, Hervé faisait voyager les gens de Lavilledieu et rêver les enfants. Ce passage m’a particulièrement plu entant donné que j’espère un jour avoir le même impact auprès des enfants. 

Je t’avoue que je n’ai plus rien à te dire, chère Soie. Mais sache que j’ai été honorée de te rencontrer et de te lire. 

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