« Déploie tes ailes et allons jusqu’à la mer étoilée.
Nous n’avons plus de temps à perdre, sois libre. »
Entre 1988 et 1995 Ernest Pignon Ernest, un artiste engagé d’art de rue, se rend à Naples pour se lancer dans son projet nommé « Épidémies ». Parmi ces œuvres papiers, posées sur plusieurs murs des rues de Naples, une œuvre a particulièrement capté mon attention : « Les âmes du purgatoire ». Apposé sur l’enceinte de l’église de Zecca, ce magnifique ange tenant la main d’une personne désespérée fait à échelle 1 est très impressionnant et nous mène tout droit dans la triste histoire des épidémies qui ont ravagé le monde.
N’hésitez pas à écouter cette émission de Radio L’ardoisière adoptant le point de vue de l’œuvre :
« Hé toi, approche. Viens, n’aie pas peur. Prends ma main, allez, prends-la. Ce n’est rien, juste qu’une petite mort. Crois-moi. La vie n’a pas été facile, hein ! Mais si tu me vois, ça veut dire que tu as besoin de moi, là, maintenant, tout de suite.
Regarde mes ailes, regarde ma toge, les Dieux te rappellent à eux. Je suis Charon, je suis le passeur, celui qui t’emmène dans la beauté de l’après-vie contre ton obole. Les rues sales, la faim, le froid, les épidémies, tout ça, c’est fini. Par ici, plus personne ne sait couvrir ses plaies. Aller, accroche-toi à moi, allez, plus fort que ça ! je suis là pour t’aider, je veux te sortir de là. Au Paradis, tu auras ce que tu voudras, tu pourras devenir n’importe quoi, une fée, un ange … N’importe quoi !
La nuit, tu rêvais d’une vie incroyable, pas vrai ? Je te l’offre, les Dieux te l’offrent. N’hésite pas, ce serait un comble. Tu aimerais être vivant ? Être quelqu’un de bien meilleur ? Retourner en arrière ? Mais pour quoi faire ? La vie ne t’a offert que tristesse, famine et maladie. Au diable les autres. Avec nous tu seras bien. Ne pleure pas, le Styx est déjà bien assez rempli de larmes comme ça. Tout se passera bien.
Je suis ton sauveur, celui qui te sort de ce monde trop agité, tout ne va pas bien par ici. Sois content d’aller vers un Paradis. Car ce monde est drôlement moche. Regarde ! Le ciel est si bas mais il est à toi, il est à nous ! Faisons un tour dans les cieux, rien qu’un petit tour. Déploie tes ailes et allons jusqu’à la mer étoilée. Nous n’avons plus de temps à perdre, sois libre.
Donne moi la main, promis je ne te lâcherai pas. Croix de bois, croix de fer, si je mens je vais en Enfer, et ce serait un comble pour un ange, n’est-ce pas pas ? »
