Le service militaire

Le service militaire devrait donc être bientôt rétabli en France

C’est un aspect que peu d’observateurs ont relevé à l’issue du premier tour de l’élection présidentielle. Mais il est vrai que d’autres considérations ont retenu l’attention des éditorialistes politiques. Ssur les quatre candidats qui pouvaient nourrir quelques espoirs au matin du 23 avril, trois proposaient de rétablir, sous une forme ou une autre, le service militaire, suspendu depuis 2001. Seul François Fillon ne s’était pas engagé sur cette voie.Et comme il a manqué environ 460.000 suffrages à ce dernier pour se qualifier au second tour, il est donc pratiquement acquis que la conscription sera rétablie en France d’ici peu, à la condition, toutefois, que celui ou celle qui sera élu le 7 mai puisse disposer d’une majorité parlementaire pour imposer ses vues.

Ainsi, le rétablissement « progressif d’un service militaire » obligatoire d’une durée minimum de 3 mois figure parmi les engagements pris par Marine Le Pen, la candidate soutenue par le Front national arrivée en seconde position.

En février 2015, elle avait d’ailleurs précisé les modalités de cette mesure : les conscrits auraient donc à suivre une formation « militaire et citoyenne pratique et théorique » pendant les quatres premières semaines. Puis, les deux mois suivants, les appelés, payés 573 euros par mois, seraient « affectés dans une garde nationale, soit au sein d’une unité départementale, soit au sein d’organismes locaux de sécurité civile, comme les pompiers ou de sécurité intérieure, comme la police municipale et nationale. » L’accomplissement de ce service, qui concernerait les Français âgés de 18 ans, serait nécessaire pour obtenir certaines prestations sociales (RSA, APL, etc…).

Le projet de Mme Le Pen ne précise pas comment ce retour à la conscription serait financé, sachant qu’il coûterait « plusieurs milliards » d’euros. Par ailleurs, la candidate soutenue par le FN veut aussi étendre à la métropole le Service militaire adapté (SMA), tel qu’il est en vigueur dans les départements et territoires d’outre-Mer. Une telle mesure est déjà en cours d’expérimentation avec le Service militaire volontaire (SMV).

Arrivé en tête du premier tour, Emmanuel Macron, candidat d’En Marche, a lui aussi proposé d’instaurer un service militaire « universel », mais d’une durée de seulement un mois. Lors de sa conférence de presse dédiée aux affaires de défense, le 18 mars, il en avait estimé le coût à 15/20 milliards d’euros pour sa mise en place et à 2/3 milliards d’euros par an en  rythme de croisière, ces sommes ne devant pas être comprises dans le budget de la Défense.

Pour M. Macron, ce service militaire universel serait une occasion de faire « l’expérience de la mixité sociale et de la cohésion républicaine » pour les jeunes français, de détecter les difficultés, notamment l’illettrisme, de proposer une mise à niveau scolaire […] lorsque ce sera nécessaire » et de préparer les appelés à leur « entrée dans la vie professionnelle comme dans leur vie de citoyen. »

Plus tard, M. Macron a précisé les contours de son projet, en revoyant à la baisse son coût (entre 1,5 et 2 milliards par an) étant donné qu’il serait question d’utiliser « au maximum les infrastructures scolaires et universitaires », lesquelles ne sont libres que pendant les vacances d’été…

Ce projet, qui serait lancé, si M. Macron est élu, dès la fin de cette année, ne manque pas susciter quelques réserves. Durant la campagne du premier tour, le plus acerbe aura sans douté été François Fillon.  »
Je n’aurais pas osé proposer un truc pareil ! Pour moi, cela s’appelle un pêché contre l’intelligence », avait-il lancé lors de la présentation de son programme pour la défense. « Je ne considère pas que les militaires doivent consacrer une grande partie de leur temps à organiser des centres aérés d’un mois pour que les jeunes puissent gambader et améliorer leur  maîtrise du français », avait-il insisté.

Source : Article de Laurent Lagneau, sur site http://www.opex360.com/2017/04/26/elysee-2017-le-service-militaire-devrait-donc-etre-bientot-retabli-en-france/

Délit de solidarité

http://mobile.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2017/01/06/immigration-ou-en-est-le-delit-de-solidarite_5058965_4355770.html

 

La cour d’appel d’Aix-en-Provence a condamné Cédric Herrou, mardi 8 août, à quatre mois de prison avec sursis. L’agriculteur de Breil-sur-Roya (Alpes-Maritimes), militant de la solidarité et de l’aide aux migrants qui traversent la frontière italienne par la vallée de la Roya, est plus sévèrement sanctionné qu’en première instance.

En début d’année, c’était finalement une relaxe qui avait été prononcée à l’égard du professeur du CNRS Pierre-Alain Mannoni, poursuivi pour avoir tenté de transporter des Erythréennes d’Italie en France afin qu’elles se fassent soigner.

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Qu’est-ce que le « délit de solidarité » ?

Le « délit de solidarité » n’existe pas en tant que tel, c’est un slogan politique qui résume une situation, sans exister juridiquement à proprement parler. Aucun texte de loi ne mentionne ce terme. Il fait toutefois référence à l’article L 622-1 du code de l’entrée, du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda), qui date de 1945.

Il dispose que « toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irrégulier d’un étranger en France » encourt jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. Si ce texte est censé lutter contre les réseaux clandestins de passeurs et de trafic humain, son utilisation contre des bénévoles et des citoyens venant en aide à des migrants lui a valu cette appellation.

L’expression « délit de solidarité » est apparue en 1995, lorsque le Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), une association qui « milite pour l’égal accès aux droits et à la citoyenneté sans considération de nationalité et pour la liberté de circulation » initie un « manifeste des délinquants de la solidarité » à la suite de la multiplication de procès contre des Français ayant aidé des sans-papiers.

Quelles sont les exceptions à ce délit ?

Plusieurs mobilisations ultérieures permettent l’introduction d’un certain nombre d’immunités (immunité familiale, dans le cas d’un lien de parenté ou d’un lien conjugal avec le sans-papiers, avec les lois Toubon du 22 juillet 1996 et Chevènement du 11 mai 1998). Mais ce n’est qu’en 2003, qu’une exception à ce délit est ajoutée au texte de loi, le « danger actuel ou imminent » pesant sur l’étranger et pouvant justifier de lui venir en aide.

Après l’élection de Nicolas Sarkozy, en 2007, les associations de sans-papiers dénoncent un usage de plus en plus fréquent de l’article punissant le « délit de solidarité », contre leurs membres ou d’autres citoyens venant en aide aux migrants. Au cours de l’année 2009, en seulement trois mois, une quinzaine de responsables de centre Emmaüs sont inquiétés par la police. Face à la politique du ministère de l’immigration et de l’identité nationale, menée par Eric Besson, des milliers de personnes se déclarent « délinquants solidaires » et appellent à la suppression de ce délit.

En mars 2009, une proposition de loi présentée par le Parti socialiste pour dépénaliser toute aide faite à un migrant lorsque la sauvegarde de sa vie ou de son intégrité physique est en jeu, est rejetée par l’Assemblée nationale. En juillet de la même année, le ministre Eric Besson reçoit tout de même les associations pour des négociations. S’il refuse de toucher à l’article L 622-1, il demande dans une circulaire aux procureurs d’interpréter largement les conditions dans lesquelles le soutien aux immigrés clandestins est justifié, sans interdire toutefois le contrôle d’identité dans les locaux des associations.

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Le « délit de solidarité » a-t-il été abrogé par la gauche ?

Après la victoire de François Hollande, en 2012, Manuel Valls, alors ministre de l’intérieur, promet qu’il va mettre fin au « délit de solidarité », c’est-à-dire, selon lui, à l’ambiguïté du texte de loi qui sanctionne l’aide désintéressée apportée à des étrangers en situation irrégulière. Il n’y a toutefois pas eu abrogation de la loi au sens où l’entendaient les associations.

En effet, la loi du 31 décembre 2012, tout en conservant le fameux article L 622-1, élargit les clauses d’immunité à ce délit, en établissant une distinction claire entre des réseaux de trafic et les bénévoles et membres des associations, ainsi que les autres citoyens. Le texte précise ainsi qu’aucune poursuite ne peut être engagée si l’acte « n’a donné lieu à aucune contrepartie directe ou indirecte et consistait à fournir des conseils juridiques ou des prestations de restauration, d’hébergement ou de soins médicaux destinées à assurer des conditions de vie dignes et décentes à l’étranger, ou bien tout autre aide visant à préserver la dignité ou l’intégrité physique de celui-ci ».

Cette réécriture n’a pas convaincu les associations, le président du Gisti évoquant même une « réformette cosmétique pour faire plaisir aux associations » et un texte visant, selon lui, à « noyer le poisson par la formulation ». De plus, le texte évoque l’aide au séjour mais n’évoque pas l’aide à l’entrée ou la circulation au sein du territoire français, ce qui met encore en danger les personnes transportant des migrants. Parler d’une suppression du « délit de solidarité » reste délicat étant donné qu’aucun texte de loi portant ce nom n’existe réellement.

Les derniers procès relevant du « délit de solidarité »

Des cas récents montrent que les modifications faites par Manuel Valls n’ont pas empêché la poursuite de bénévoles ayant aidé des migrants. Outre Cédric Herrou, trois procès ont eu lieu sous le quinquennat Hollande, démontrant un décalage entre la position du parquet et la volonté affichée par Manuel Valls (qui a déclaré notamment devant la commission du Sénat le 25 juillet 2012 : « Notre loi ne saurait punir ceux qui, en toute bonne foi, veulent tendre une main secourable. »)

En avril 2016, Fernand Bosson, conseiller municipal et ancien maire de la commune d’Onnion (Haute-Savoie), a été jugé par le tribunal correctionnel de Bonneville pour avoir hébergé pendant deux ans une famille kosovare déboutée du droit d’asile. Il a finalement été déclaré coupable mais dispensé de peine – le procureur avait pourtant requis une amende de 1 500 euros.

C’est le 23 novembre 2016, que s’est tenu le procès de Pierre-Alain Mannoni, professeur à l’université de Nice Sophia-Antipolis et chercheur au CNRS. Niçois, il avait transporté trois Erythréennes blessées, d’un camp illégal de migrants dans la vallée de Roya à la gare de Nice, afin qu’elles rejoignent Marseille pour se faire soigner.

Dans la vallée de la Roya, une zone montagneuse située entre l’Italie et la France, de nombreux migrants incapables de passer la frontière, restent bloqués et un collectif d’habitants s’est créé dans la région pour leur venir en aide. Ces épisodes juridiques pourraient encourager le législateur à lever le flou sur les limites du « délit de solidarité ».

Délit de solidarité

https://info.arte.tv/fr/delit-de-solidarite-larme-des-politiques-contre-laide-aux-migrants

 

Délit de solidarité : l’arme des politiques contre l’aide aux migrants

Pays : France

Tags : accueil des migrants, Justice, droits de l’homme

Le 24 octobre 2016, l’Etat lançait une grande opération de démantèlement de la jungle de Calais. Plus de 7400 migrants étaient évacués dans plus des centres d’accueil et d’orientation répartis dans toute la France. Extrêmement médiatisée, l’opération a mis en lumière la politique migratoire du gouvernement français. Mais dans l’ombre de Calais, plus d’une trentaine de personnes ont été poursuivies en un an et demi, pour leur engagement solidaire. Comme ces bénévoles, de nombreux citoyens français se retrouvent régulièrement pris dans les mailles de la Justice. L’enseignant-chercheur Pierre-Alain Mannoni et l’agriculteur Cédric Herrou ont récemment été condamnés à plusieurs mois de prison avec sursis pour avoir transporté ou hébergé des migrants en France. Pourtant, le “délit de solidarité” dont les deux “passeurs” sont accusés n’existe pas juridiquement. Le terme, créé par les associations pour dénoncer la répression des citoyens portant secours aux migrants, se base sur un texte de loi soumis à la libre interprétation des juges.

Quand Pierre-Alain Mannoni s’est arrêté sur la route le 18 octobre 2016 pour emmener trois Érythréennes blessées se faire soigner à Marseille, il n’imaginait pas être traité de délinquant. Accusé d’avoir aidé des étrangers en situation irrégulière à entrer et séjourner en France, il a d’abord été relaxé en première instance pour finalement être condamné en appel à deux mois de prison avec sursis. “Les juges n’ont rien voulu savoir quand je leur ai expliqué qu’à l‘époque j’ignorais totalement l’existence du Ceseda”, confie l’enseignant-chercheur niçois. Le Ceseda, code d’entrée et de séjour aux étrangers et demandeurs d’asile, c’est ce précieux sésame sur lequel la justice française s’appuie depuis des années pour « juger les citoyens rendus coupables de délit de solidarité« .

Un “pur slogan politique”

Au départ, le texte servait à lutter contre le trafic d’êtres humains. »

Patrick Henriot – juriste membre du Gisti

Régulièrement cité par les médias, le délit de solidarité n’a aucune existence juridique. Il a été formulé pour la première fois par le Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti) en 1995 lors d’une campagne pour dénoncer les vagues d’interpellations envers des citoyens et des bénévoles associatifs portant assistance aux migrants. “Les gouvernements successifs ont toujours nié l’existence d’un délit de solidarité, affirmant que ce texte servait à lutter contre le trafic d’êtres humains, explique Patrick Henriot, juriste membre du Gisti. Mais la réalité est plus complexe et dans les faits, le terme sert aussi à pénaliser les humanitaires ». Il fait référence à l’article L 622-1 du Ceseda qui prévoit que « toute personne aidant directement ou indirectement à l’entrée, à la circulation et au séjour des étrangers en situation irrégulière encourt une peine maximale de cinq ans de prison et trente mille euros d’amende ».

L’héritage de la xénophobie d’avant-guerre

L’article L. 622-4 protège les humanitaires de poursuites à deux conditions. »

Laurène Chesnel – CNCDH

La disposition initiale date d’un décret-loi de 1938 pris par le gouvernement Daladier dans un contexte particulièrement xénophobe” relate Laurène Chesnel, rapporteure d’un avis sur le délit de solidarité émis par la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH). Objectif à l’époque : faciliter les opérations de police pour renvoyer les étrangers dans leur pays. Depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, l’article continue d’être employé, même si sous la pression des associations, l’ancien gouvernement a entrepris à plusieurs reprises de modifier le texte. En décembre 2012, une loi a ainsi introduit l’article L. 622-4 du Ceseda, qui exempte les personnes de poursuites à deux conditions : l’acte reproché ne doit avoir apporté aucune contrepartie directe ou indirecte à l’aidant et celui-ci doit s’être contenté de fournir des conseils juridiques, des prestations de restauration, d’hébergement ou des soins médicaux dans le but d’assurer des conditions de vie dignes et décentes à l’étranger. De quoi théoriquement mettre hors de cause les militants associatifs. Seul bémol : le texte ne concerne que l’aide au séjour et non l’entrée et la circulation.

Un texte soumis à l’interprétation des juges

La  deuxième condition pour échapper à une condamnation met en jeu le principe de dignité. Or c’est un concept extrêmement large, remarque Patrick Henriot. Résultat : c’est souvent en jouant sur l’imprécision de cette notion juridiquement floue que l’Etat français poursuit les aidants ». En 2009, alors que Nicolas Sarkozy était au pouvoir et que le nombre d’interpellations était à son apogée, des bénévoles ont ainsi été interpellés pour avoir rechargé le téléphone portable d’un migrant à Calais, ou donné des cours d’alphabétisation, au motif que leurs actes ne visaient pas à préserver la dignité de ces personnes.

Pour Cédric Herrou et Pierre-Alain Mannoni, respectivement condamnés à quatre et deux mois de prison avec sursis pour avoir hébergé et transporté des sans-papiers, la Cour d’appel est allée encore plus loin. Elle a rejeté la protection de l’article L. 622-4 en décelant une contrepartie à l’aide apportée. Selon les magistrats, les deux accusés n’ont pas agi par simple envie de porter secours mais par esprit de rébellion. Leurs actes « s’inscrivent dans une démarche militante visant à faire échec à la politique migratoire menée par l’Etat”. Une solution qui a suscité de nombreuses réactions politiques et associatives lors des deux procès : “Les juges n’ont absolument pas tenu compte de la détresse physique des trois Érythréennes relève Pierre-Alain Mannoni. Ils m’ont d’emblée qualifié de militant, alors que je ne fais partie d’aucune association et que je ne m’étais jamais revendiqué comme tel.”

Des aidants traités comme des militants

Au procès, de simples citoyens solidaires, on devient des militants »

Pierre-Alain Mannoni – enseignant-chercheur

Un mois après avoir été condamné, le chercheur du CNRS n’abandonne pas : la répression de l’Etat ne l’a pas dissuadé à aider les migrants bien au contraire. “De simples citoyens solidaires, on devient des militants, lâche-t-il. Chaque nouveau procès renforce les convictions des aidants et pousse les associations à mieux s’organiser.” Selon lui, un vrai rapport de force est en train de se mettre en place en France avec des citoyens, des élus, des associations qui rejoignent “le camp des solidaires” pour former un front uni contre le gouvernement.

Que les gouvernements le veuillent ou non, les migrants qui s’entassent dans la rue ou dans des camps ont besoin d’aide” remarque Patrick Henriot. Les premières personnes confrontées à leur détresse sont les citoyens qui les croisent sur la route chaque jour.” Si certains Etats comme l’Allemagne s’organisent et mettent en place des moyens publics pour prendre en charge l’hébergement, la nourriture ou l’accès à l’eau, d’autres comme la France laissent aux associations le soin de s’en charger. Rapidement débordées, celles-ci laissent la crise se répandre sur la société civile forcée comme Pierre-Alain Mannoni de prendre le relais. “Scandalisés par le manque de moyens, ces gens deviennent rapidement des contestataires, des militants.”

Les poursuites, partie visible de l’iceberg

17

Poursuites recensées en 2017, un record ces trois dernières années.

Source CNCDH

Alors que les interpellations s’étaient espacées après la réforme de 2012, les associations constatent une recrudescence : 17 cas de poursuites ont été recensés depuis le début de l’année et trois condamnations ont été prononcées cet été. A cela s’ajoute un arsenal de mesures initiées par les forces de police sous la coupole du procureur de la République : perquisitions, gardes à vue, interrogatoires, contraventions. En treize mois, Cédric Herrou a ainsi subi sept gardes à vue, quatre perquisitions. Son véhicule a été saisi, sa maison mise sous surveillance policière. L’agriculteur a l’interdiction de quitter le territoire et pointe tous les quinze jours au commissariat. Pour les militants, ces mesures sont le signe d’un acharnement qui se répand dans toute la France. “A Calais, la mairie a par exemple demandé à l’association l’Auberge des migrants de mettre aux normes sa cuisine pour pouvoir continuer à exercer son activité, ce qui représente un coût considérable pour les bénévoles” explique Laurène Chesnel. A Paris, les policiers ont arrêté des consultations gratuites de médecins du monde en verbalisant leur camionnette pour stationnement irrégulier. Généralement sans poursuites, “ces mesures instaurent un climat de suspicion générale et de répression vis-à-vis des aidants” note Patrick Henriot.

La France, épinglée par le Conseil de l’Europe

Dans son avis rendu en mai 2017, la CNCDH demande au gouvernement français de modifier l’article 622-1 pour ne sanctionner que l’aide à but lucratif. “Les exemptions de l’article 622-4 deviendraient alors inutiles et la France serait en conformité avec le droit européen” argumente la rapporteure de la Commission indépendante Laurène Chesnel. La directive européenne de novembre 2002 demande en effet aux Etats membres de pénaliser l’aide lucrative aux migrants et non de lutter contre l’aide humanitaire. Cette directive a été rappelée en 2015 par le Conseil de l’Europe pour dénoncer certains pays européens appliquant le délit de solidarité envers les aidants. La France en faisait partie. Si aucune mesure n’a été prise en réponse à l’avis de la CNCDH, le président Emmanuel Macron a annoncé une réforme complète du droit d’asile durant son mandat et un projet de loi asile et migration qui devrait être discuté en janvier prochain.

Le délit de solidarité, ailleurs en Europe
Le Gisti recense des exemples de poursuites pour délit de solidarité dans plusieurs pays européens (Allemagne, Belgique, Danemark, Grèce, Italie). Dans ces pays, la loi sanctionne l’aide à l’entrée et au séjour des étrangers à but lucratif.

 

la fiabilité de l’information sur inetrnet

La fiabilité de l’information sur Internet revêt une importance cruciale. En effet, il se peut qu’après avoir passé plusieurs heures à rechercher une information, vous vous rendiez compte que son origine n’est absolument pas fiable. Hélas, cela peut arriver plus souvent qu’on ne le croit, surtout sur le web. On retombe sur le plus grand avantage/inconvénient d’Internet : l’extrême liberté qu’il y règne. Tout le monde peut s’exprimer sur Internet sans discrimination de race, de religion, de classe, de revenu…. Ainsi, des ressources directement issues de la Nasa ou du Sénat américain côtoient celles du jeune étudiant italien ou pire du naziskin anglais. Il faut le savoir, quiconque peut développer une vitrine sur le web. Le meilleur et le pire sont intimement liés.

Les fausses informations sont encore plus dangereuses. Comment savoir qui dit vrai et qui dit faux ? Comment reconnaître ceux qui essayent de dissimuler le faux sous une apparence vraisemblable ? De plus, la même information peut se trouver dans d’innombrables sites. En effet, sur les réseaux les informations peuvent être reproduites à l’infini. Comment vérifier la source d’origine ? Comment vérifier que le contenu d’un document reproduit n’a pas été altéré ?

Deux aspects doivent être considérés avec la plus grande attention au moment de l’exploitation des informations issues d’Internet : la désinformation et la contrefaçon.

  • La désinformation sur Internet a fait l’objet de nombreux articles et ouvrages. Il est vrai que le réseau peut se transformer en un parfait outil de désinformation. Puisque quiconque peut désormais publier des pages web et écrire dans les forums de discussion de manière complètement anonyme, ou pire en se faisant passer pour quelqu’un d’autre, les dangers sont évidents. Par exemple, dès 1988 le groupe Airbus Industrie a subi une véritable  » guerrilla  » à travers de nombreuses fausses informations et attaques parues dans les forums de discussion consacrés à l’aviation, à la suite de l’accident d’Absheim. Naturellement, malgré les soupçons, personne n’a réussi à prouver que les messages étaient publiés par des personnes proches du concurrent Boeing. Mais il ne s’agit pas d’un cas isolé. Toujours dans le même domaine, il faut également citer le crash de l’ATR 42 aux Etats-Unis en Octobre 1994 et celui d’un Airbus roumain en mars 1995. Dans les deux cas, plusieurs campagnes de désinformation et de déstabilisation ont eu lieu au sein des forums de discussion.
  • La contrefaçon est un problème très grave sur Internet. Il est par exemple possible de copier, sans aucun effort, la documentation commerciale d’un concurrent et la reproduire sur son site. C’est le cas de figure auquel a été confronté Cybion, société française spécialisée dans la recherche d’informations et la veille sur Internet, qui a vu son offre commerciale de services purement et simplement recopiée par un concurrent français, sans adaptation, ni périphrase. Il faut cependant faire très attention car les lois du copyright s’appliquent aussi sur Internet. Juridiquement, la situation devient plus compliquée quand le siège social de votre concurrent se trouve dans un autre pays. Dans le cas de la contrefaçon flagrante, le concurrent peut se livrer en outre à de la concurrence déloyale et à du parasitisme.

Informations issues de Carlo Revelli, extraites du livre : « Intelligence Stratégique sur Internet »

 

http://www.netalya.com/fr/Article2.asp?CLE=10

L’information sur Internet

S’informer sur Internet, les Français restent perplexes

C’est la deuxième fois que les courbes se croisent. En janvier 2013, le baromètre de La Croix établissait que 36 % des sondés exprimaient leur défiance à l’égard des informations trouvées sur Internet, contre 35 % de confiants.

Après un regain de crédibilité en 2015, l’écart est plus fort encore cette année?: 44 % des personnes interrogées n’apportent pas de crédit à la restitution de l’information sur Internet, contre 31 % qui, au contraire, accordent leur confiance. Un scepticisme en hausse 8 points par rapport à janvier 2015.

Les attentats et leurs cortèges d’informations non vérifiées, de rumeurs et de thèses conspirationnistes sont sans doute passés par là. Internet n’est certes pas la seule source de « mal-information », loin de là, mais la diversité foisonnante, ainsi que la viralité du réseau, en font un vecteur puissant de propagation.

La télévision, source principale d’information chez les jeunes

Chez les jeunes, grands adeptes du numérique, la télévision repasse toutefois largement devant Internet comme source principale d’information?: alors que les deux grands types de médias étaient à égalité l’an dernier à 47 % pour les 15-24 ans, le petit écran est stable tandis que le Net chute à 41 %.

Les courbes ne se sont pas croisées, comme le laissait croire le sondage de l’an dernier. Les jeunes générations restent néanmoins « accros » aux réseaux sociaux, leur premier réflexe à 42 % quand ils se connectent pour s’informer, contre 2 % pour les plus de 65 ans?!

Une fréquentation encore appelée à grimper?: « Aux États-Unis, ces chiffres montent à 60 % chez les jeunes », indique le sociologue Jean-Marie Charon, selon lequel cette évolution illustre la tendance lourde de « la circulation horizontale de l’info via les moteurs de recherche et la recommandation sur les réseaux sociaux ».

Le recours aux médias en ligne progresse chez les 50-64 ans

« L’attitude des 18-25 ans est à la défiance vis-à-vis d’Internet comme de la télévision, les deux médias qu’ils consomment le plus », ajoute ce spécialiste des médias qui identifie de nettes majorités?: 59 % des 18-24 ans et 52 % des 25-34 ans. Un phénomène qui ne cesse de croître au fil des années parmi les jeunes générations?: 8 points de plus pour les 18-24, et 6 pour les 25-34, par rapport à 2013. Sans même parler des réseaux sociaux, agrégats de subjectivités, qui n’inspirent que des doutes à plus des trois quarts d’entre eux.

Scepticisme partagé chez les plus de 65 ans, et qui ne cesse d’augmenter avec une chute en un an de 12 points par rapport à l’an dernier (de 27 à 15 %). Des générations qui ont de plus en plus recours aux médias en ligne pour s’informer?: 18 % des 50-64 ans contre 10 % l’an dernier.

Signal encourageant toutefois, dont témoignent les records d’audience de médias en ligne atteints lors des attentats de janvier et de novembre, les sondés se tournent plus volontiers vers les sites et applications mobiles de la presse écrite pour approfondir certains sujets?: 15 % contre 11 % l’an dernier. Un chiffre qui grimpe à 27 % chez les 25-34 ans.

Stéphane Dreyfus -LaCroix

La fiabilité et internet

 

Les nouvelles « cyberarnaques » africaines

Les réseaux de cybercriminalité se sont renforcés en Afrique de l’Ouest, selon une étude parue jeudi et réalisée par Interpol et Trend Micro.

C’est une autre menace technologique, invisible et sournoise. En Afrique de l’Ouest, les réseaux de cybercriminalité se sont considérablement renforcés et structurés ces dernières années. Ce ne sont plus seulement des amateurs utilisant des techniques basiques depuis des cybercafés mal équipés pour échapper à la pauvreté. Désormais, des experts bien formés lancent des offensives pour piller des individus ainsi que des entreprises de la région et d’ailleurs, selon l’étude réalisée conjointement par Interpol et le laboratoire de sécurité informatique japonais, Trend Micro, rendue publique jeudi 9 mars.

Une variable explique en partie la sophistication de ces nouveaux réseaux mafieux : plus de la moitié des 10 millions de diplômés des 668 universités de la région englobant la dizaine de pays situés en Afrique de l’Ouest ne trouvent pas d’emplois. Et de Bamako à Accra, en passant par Abidjan, Cotonou et Lagos, près de 50 % des gangsters œuvrant sur les territoires numériques sont des chômeurs.

Les « Yahoo boys », de redoutables amateurs

Une nouvelle génération de cybercriminels ouest-africains a émergé. Elle se compose de jeunes diplômés sans emploi, regroupés pour certains au sein de gangs virtuels, qui se vantent sur les réseaux sociaux de leurs cyberbraquages, échangent leurs techniques d’arnaques classiques et sophistiquées dans le monde réel. La plupart d’entre eux ont entre 19 à 39 ans.

Selon Interpol et Trend Micro, ils se répartissent en deux catégories. D’un côté, les « Yahoo boys » – du nom des outils gratuits du grand groupe de l’Internet américain qu’ils utilisaient autrefois. Ces novices du piratage informatique maîtrisent les outils et les techniques simples mais éprouvés depuis bientôt deux décennies pour séduire leurs proies en ligne, qu’ils tentent de harponner par e-mails. Ils n’inventent rien, n’innovent pas mais recyclent et améliorent continuellement – notamment dans la formulation et l’orthographe – les stratagèmes d’envoi de courriels de séduction, de propositions d’affaires ou des invitations à payer pour débloquer d’importantes sommes sur des comptes en banque. Cette « arnaque nigériane » a même hérité d’un nom de code, le « scam 419 » (scam est un mot anglais qui signifie « arnaque »), du nom de la loi 419 du code pénal nigérian qui tente de la combattre.

Le plus souvent, ces « Yahoo boys » orchestrent plusieurs tentatives de fraudes en même temps et varient les scénarios. Ces gamins aiment à musarder sur les réseaux sociaux, à commencer par Facebook. Ils y repèrent régulièrement leurs victimes en utilisant de faux comptes. Et ils exhibent sur leurs pages officielles leurs butins transformés en bouteilles de champagne, montres, voitures et autres objets de luxe.

Les barons du cybercrime

D’un autre côté, les « cybercriminels en chef », eux, bénéficient de l’expérience de « Yahoo boys » qu’ils furent autrefois. Ils ont, au fil des années, acquis des connaissances informatiques sur le terrain ou, pour certains, sur les bancs des universités. Et disposent désormais d’un certain entregent.

Ces barons de la cybercriminalité ont recours à des logiciels plus complexes, qu’ils acquièrent à peu de frais dans les tréfonds de l’Internet : le Dark Web. Là, ils se fournissent auprès de hackeurs d’origine russe pour la plupart, selon la dernière étude d’Interpol et de Trend Micro.

Leurs offensives nécessitent plus de temps et de compétences. Ils utilisent notamment des logiciels spécifiques, comme des key loggers (espionnage de frappe au clavier), des RATS (Remote Access Tools – prise de contrôle à distance), mais aussi des outils plus sophistiqués d’envoi automatique d’e-mails, et désormais d’autres techniques plus élaborées de phishing (« hameçonnage ») ou de crypto lockers (racket par verrouillage de l’ordinateur). Cet arsenal de piraterie informatique s’installe habituellement sur les ordinateurs des victimes, à leur insu, grâce à des virus, malwares et chevaux de Troie dissimulés dans des e-mails de spam (pourriels).

Elles ciblent en priorité des entreprises aux Etats-Unis d’abord (11 % des attaques) puis en Chine (10 %) et en Inde (5 %). Ces e-mails conçus pour piéger les entreprises sont de plus en plus élaborés : arnaques aux dirigeants de société, demandes d’ordres de virement ou de changements des identifiants bancaires… Plus de 400 entreprises sont ainsi ciblées chaque jour dans le monde par ces e-mails visant à gagner la confiance par « ingénierie sociale », selon le FBI.

Nigeria, épicentre de la cybercriminalité africaine

Selon les autorités africaines, désormais préoccupées par les ravages de la cybercriminalité, il est temps d’agir. Les estimations varient selon les sources, mais plusieurs centaines de millions de dollars sont détournées par des cybercriminels chaque année sur le continent. La société d’antivirus, Kaspersky, prétend avoir neutralisé 49 millions de cyberattaques en Afrique, en 2014.

Pour se faire une idée des sommes détournées, il faut se plonger dans les études annuelles de l’IC3, (Internet Cyber Crime Center), une entité dépendant du FBI américain. On y apprend qu’en 2015 près de 31 000 victimes d’escroqueries classiques, comme celles pratiquées par les « Yahoo boys » africains, s’étaient fait délester de près de 50 millions de dollars.

Une étude menée en 2016 par le cabinet de sécurité Symantec met en exergue l’importance du Nigeria dans cette économie criminelle. Pas moins de 46 % des e-mails envoyés à des fins cybercriminelles proviennent de ce seul pays.

Dans son ouvrage sur le crime organisé au Nigeria (Hurst, 2016, non traduit), le chercheur Stephen Ellis relate avec précision la dissémination des réseaux de cybercriminels nigérians opérant en Afrique du Sud, en Côte d’Ivoire, en Grande-Bretagne ou en Australie. « Il y a même des collèges privés à Lagos [capitale économique du Nigeria] qui proposent des cours de fraudes à la carte de crédit et d’autres techniques [de cybercrimes]. » Ces enseignements sont facturés 70 000 nairas (210 euros) et sont dispensés le plus souvent la nuit. Plusieurs cybercriminels arrêtés au Nigeria en 2009 et 2010 étaient en contact régulier avec des hackeurs lituaniens et russes, spécialistes des arnaques et du piratage de comptes bancaires.

Le 1er août 2016, Interpol annonçait l’arrestation de « Mike », le « Prince nigérian » de cette industrie criminelle. A lui seul, il aurait détourné plus de 60 millions de dollars, dont plus du quart au préjudice d’une seule entreprise.

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/afrique/article/2017/03/09/les-nouvelles-cyber-arnaques-africaines_5092106_3212.html#5EBksOPC1qa3shlr.99

Le délit de solidarité

Article du Monde .fr

La cour d’appel d’Aix-en-Provence a condamné Cédric Herrou, mardi 8 août, à quatre mois de prison avec sursis. L’agriculteur de Breil-sur-Roya (Alpes-Maritimes), militant de la solidarité et de l’aide aux migrants qui traversent la frontière italienne par la vallée de la Roya, est plus sévèrement sanctionné qu’en première instance.

En début d’année, c’était finalement une relaxe qui avait été prononcée à l’égard du professeur du CNRS Pierre-Alain Mannoni, poursuivi pour avoir tenté de transporter des Erythréennes d’Italie en France afin qu’elles se fassent soigner.
Qu’est-ce que le « délit de solidarité » ?

Le « délit de solidarité » n’existe pas en tant que tel, c’est un slogan politique qui résume une situation, sans exister juridiquement à proprement parler. Aucun texte de loi ne mentionne ce terme. Il fait toutefois référence à l’article L 622-1 du code de l’entrée, du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda), qui date de 1945.

Il dispose que « toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irrégulier d’un étranger en France » encourt jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. Si ce texte est censé lutter contre les réseaux clandestins de passeurs et de trafic humain, son utilisation contre des bénévoles et des citoyens venant en aide à des migrants lui a valu cette appellation.

L’expression « délit de solidarité » est apparue en 1995, lorsque le Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), une association qui « milite pour l’égal accès aux droits et à la citoyenneté sans considération de nationalité et pour la liberté de circulation » initie un « manifeste des délinquants de la solidarité » à la suite de la multiplication de procès contre des Français ayant aidé des sans-papiers.
Quelles sont les exceptions à ce délit ?

Plusieurs mobilisations ultérieures permettent l’introduction d’un certain nombre d’immunités (immunité familiale, dans le cas d’un lien de parenté ou d’un lien conjugal avec le sans-papiers, avec les lois Toubon du 22 juillet 1996 et Chevènement du 11 mai 1998). Mais ce n’est qu’en 2003, qu’une exception à ce délit est ajoutée au texte de loi, le « danger actuel ou imminent » pesant sur l’étranger et pouvant justifier de lui venir en aide.

Après l’élection de Nicolas Sarkozy, en 2007, les associations de sans-papiers dénoncent un usage de plus en plus fréquent de l’article punissant le « délit de solidarité », contre leurs membres ou d’autres citoyens venant en aide aux migrants. Au cours de l’année 2009, en seulement trois mois, une quinzaine de responsables de centre Emmaüs sont inquiétés par la police. Face à la politique du ministère de l’immigration et de l’identité nationale, menée par Eric Besson, des milliers de personnes se déclarent « délinquants solidaires » et appellent à la suppression de ce délit.

En mars 2009, une proposition de loi présentée par le Parti socialiste pour dépénaliser toute aide faite à un migrant lorsque la sauvegarde de sa vie ou de son intégrité physique est en jeu, est rejetée par l’Assemblée nationale. En juillet de la même année, le ministre Eric Besson reçoit tout de même les associations pour des négociations. S’il refuse de toucher à l’article L 622-1, il demande dans une circulaire aux procureurs d’interpréter largement les conditions dans lesquelles le soutien aux immigrés clandestins est justifié, sans interdire toutefois le contrôle d’identité dans les locaux des associations.
Le « délit de solidarité » a-t-il été abrogé par la gauche ?

Après la victoire de François Hollande, en 2012, Manuel Valls, alors ministre de l’intérieur, promet qu’il va mettre fin au « délit de solidarité », c’est-à-dire, selon lui, à l’ambiguïté du texte de loi qui sanctionne l’aide désintéressée apportée à des étrangers en situation irrégulière. Il n’y a toutefois pas eu abrogation de la loi au sens où l’entendaient les associations.

En effet, la loi du 31 décembre 2012, tout en conservant le fameux article L 622-1, élargit les clauses d’immunité à ce délit, en établissant une distinction claire entre des réseaux de trafic et les bénévoles et membres des associations, ainsi que les autres citoyens. Le texte précise ainsi qu’aucune poursuite ne peut être engagée si l’acte « n’a donné lieu à aucune contrepartie directe ou indirecte et consistait à fournir des conseils juridiques ou des prestations de restauration, d’hébergement ou de soins médicaux destinées à assurer des conditions de vie dignes et décentes à l’étranger, ou bien tout autre aide visant à préserver la dignité ou l’intégrité physique de celui-ci ».

Cette réécriture n’a pas convaincu les associations, le président du Gisti évoquant même une « réformette cosmétique pour faire plaisir aux associations » et un texte visant, selon lui, à « noyer le poisson par la formulation ». De plus, le texte évoque l’aide au séjour mais n’évoque pas l’aide à l’entrée ou la circulation au sein du territoire français, ce qui met encore en danger les personnes transportant des migrants. Parler d’une suppression du « délit de solidarité » reste délicat étant donné qu’aucun texte de loi portant ce nom n’existe réellement.
Les derniers procès relevant du « délit de solidarité »

Des cas récents montrent que les modifications faites par Manuel Valls n’ont pas empêché la poursuite de bénévoles ayant aidé des migrants. Outre Cédric Herrou, trois procès ont eu lieu sous le quinquennat Hollande, démontrant un décalage entre la position du parquet et la volonté affichée par Manuel Valls (qui a déclaré notamment devant la commission du Sénat le 25 juillet 2012 : « Notre loi ne saurait punir ceux qui, en toute bonne foi, veulent tendre une main secourable. »)

En avril 2016, Fernand Bosson, conseiller municipal et ancien maire de la commune d’Onnion (Haute-Savoie), a été jugé par le tribunal correctionnel de Bonneville pour avoir hébergé pendant deux ans une famille kosovare déboutée du droit d’asile. Il a finalement été déclaré coupable mais dispensé de peine – le procureur avait pourtant requis une amende de 1 500 euros.

C’est le 23 novembre 2016, que s’est tenu le procès de Pierre-Alain Mannoni, professeur à l’université de Nice Sophia-Antipolis et chercheur au CNRS. Niçois, il avait transporté trois Erythréennes blessées, d’un camp illégal de migrants dans la vallée de Roya à la gare de Nice, afin qu’elles rejoignent Marseille pour se faire soigner.

Dans la vallée de la Roya, une zone montagneuse située entre l’Italie et la France, de nombreux migrants incapables de passer la frontière, restent bloqués et un collectif d’habitants s’est créé dans la région pour leur venir en aide. Ces épisodes juridiques pourraient encourager le législateur à lever le flou sur les limites du « délit de solidarité ».

Le délit de solidarité

Source : site internet LegiFrance, Avis de la CNCDH sur le délit de solidarité

Avis : mettre fin au délit de solidarité

NOR: CDHX1715073V
ELI: Non disponible

(Assemblée plénière – 18 mai 2017 – Adoption : unanimité – une abstention)

1. A Calais, dans la vallée de la Roya, à Paris… en plusieurs lieux du territoire français, des femmes et des hommes, militants associatifs, bénévoles ou citoyens anonymes s’engagent chaque jour dans des actions concrètes de solidarité pour venir en aide aux milliers de personnes exilées, contraintes de survivre dans les pires conditions, après avoir parcouru des milliers de kilomètres pour tenter de trouver un refuge et une protection en Europe. Face à ces actes d’humanité envers les personnes migrantes, les demandeurs d’asile, les Roms, les sans-papiers, les pouvoirs publics, loin de les encourager, se mobilisent au contraire pour y faire obstacle par différents moyens.
2. Arrestations et poursuites de citoyennes et citoyens ayant aidé des personnes migrantes, avec la menace de lourdes sanctions et parfois condamnations, mesures d’intimidation, entraves à l’action des associations. La solidarité est tenue pour un délit. Si les associations avaient constaté une baisse des poursuites, à la suite de l’adoption de la loi du 31 décembre 2012 (1), elles notent depuis deux ou trois ans une recrudescence d’affaires, certainement liées au renforcement des contrôles aux frontières. Pour les cinq premiers mois de l’année 2017, on recense plus d’une douzaine d’affaires, qui concernent dix-neuf personnes (2). Plus largement, les actes de dissuasion et d’intimidation prennent des formes multiples : surveillance, multiplication des contrôles, arrestations, placements en garde à vue, courriers, et perquisitions parfois musclées. Des mesures sont également prises par certaines collectivités locales à l’encontre des associations pour les empêcher de mettre en place leurs actions humanitaires, les obligeant à entamer de fastidieuses contestations en justice (3). La CNCDH s’inquiète de la recrudescence de poursuites visant à empêcher l’expression de la solidarité envers les personnes migrantes Au-delà, c’est le soutien à l’ensemble des personnes étrangères précarisées qui tend à devenir suspect (4).
3. Dans un courrier adressé au Premier ministre, en date du 24 février 2017, la présidente de la CNCDH condamnait les actes d’entrave à la solidarité et demandait au chef du Gouvernement de  » donner sans tarder les instructions pour que cessent les entraves à l’action des associations de solidarité et de défense des droits de l’homme « . Dans son courrier en réponse, le Premier ministre affirme que  » l’article L. 622-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers a été abrogé le 31 décembre 2012 – ce que l’on a appelé la  » dépénalisation du délit de solidarité « .  »
4. Pourtant, contrairement à cette affirmation, trop largement partagée, l’article L. 622-1 du Ceseda n’a pas été abrogé (5). La loi du 31 décembre 2012 a introduit, dans un nouvel article, des exemptions, familiales et humanitaires, excluant des poursuites pénales  » toute personne physique ou morale, lorsque l’acte reproché n’a donné lieu à aucune contrepartie directe ou indirecte et consistait à fournir des conseils juridiques ou des prestations de restauration, d’hébergement ou de soins médicaux destinées à assurer des conditions de vie dignes et décentes à l’étranger, ou bien toute autre aide visant à préserver la dignité ou l’intégrité physique de celui-ci  » (article L. 622-4 du Ceseda). Cela ne constitue pas pour autant une protection suffisamment efficace contre des poursuites visant des actions  » humanitaires et désintéressées « , notamment parce que la formulation des dispositions de l’article 622-4 du Ceseda est si imprécise qu’elle peut donner lieu à des interprétations jurisprudentielles contradictoires, en fonction de la nature des actes de solidarité incriminés (6).
5. Les exemptions prévues ne jouant que pour l’aide au séjour, à l’exclusion de l’aide à l’entrée et à la circulation en France des étrangers en situation irrégulière, même désintéressée, une personne peut être poursuivie et condamnée si elle aide un étranger à passer la frontière ou même, seulement, à se rendre d’un point à un autre du territoire national (par exemple en le prenant à bord de son véhicule). De plus, en matière d’aide au séjour, deux conditions cumulatives doivent être remplies pour bénéficier de l’exemption de poursuite : ne recevoir  » aucune contrepartie directe ou indirecte  » (le texte ne précisant pas la nature de ces contreparties des situations assez diverses peuvent se présenter et donner lieu à des interprétations multiples) et apporter une aide se limitant aux domaines prescrits par la loi (à savoir conseils juridiques, prestations d’hébergement, de repas ou de soins médicaux) ou bien toute autre aide visant à préserver la dignité ou l’intégrité physique de la personne). Or, dans ce dernier cas, cette condition n’est que très difficilement remplie : donner des cours d’alphabétisation ou recharger un téléphone portable, par exemple, pourra ne pas être considéré comme nécessaire pour  » préserver la dignité ou l’intégrité physique « . En conséquence, ces formes d’aide – et beaucoup d’autres – ne seront pas exemptées de condamnation, même si elles sont totalement désintéressées et ne donnent lieu à aucune contrepartie. Ces restrictions au jeu de l’immunité dont les aidants devraient logiquement bénéficier ouvrent la porte à des poursuites, criminalisant ainsi des actions de solidarité. L’hébergement d’urgence, l’accès aux soins, la protection de l’enfance sont autant d’obligations à la charge des pouvoirs publics, dont la défaillance a imposé aux citoyens, militants et associations d’apporter des réponses à la mesure de leurs moyens.
6. De plus, la CNCDH estime que de telles restrictions vont à l’encontre de la directive européenne 2002-90 du 28 novembre 2002, qui dispose que seule l’aide au séjour apportée dans un but lucratif est sanctionnée. L’étendue de l’incrimination française est donc critiquable au regard du droit de l’Union européenne, dans la mesure où elle dépasse largement la définition de l’aide au séjour irrégulier retenue par la directive, qui permet en outre aux Etats membres de  » décider de ne pas imposer [ces] sanctions […] dans les cas où [le] comportement a pour but d’apporter une aide humanitaire à la personne concernée (7) « . Ces restrictions s’opposent également à la résolution 2059 de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe qui, rappelant cette directive, en constate la violation par des pays qui  » sanctionnent l’aide humanitaire, instituant ainsi un  » délit de solidarité  »  » et  » rappelle la nécessité de mettre fin à la menace de poursuites pour complicité à la migration irrégulière, engagées à l’encontre des personnes qui portent secours  » (8). Elles vont aussi à l’encontre des recommandations de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) (9) qui enjoint aux Etats de  » s’assurer que l’aide sociale et humanitaire apportée aux migrants en situation irrégulière dans tous les domaines relevant des services publics et privés ne soit pas érigée en infraction pénale « , soulignant que  » l’incrimination de l’aide sociale et humanitaire apportée aux migrants en situation irrégulière favorise l’intolérance et le racisme « . En outre, il convient de souligner que si le droit positif est présenté comme permettant de lutter contre les filières de passeurs et la traite des êtres humains, le protocole contre le trafic illicite de migrants, additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, ratifié par la France, n’impose pas davantage d’incriminer cette aide non lucrative. La CNCDH rappelle par ailleurs les dispositions de l’article 12 de la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme qui demandent aux Etats de prendre  » toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration. A cet égard, chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, d’être efficacement protégé par la législation nationale quand il réagit par des moyens pacifiques contre des activités et actes, y compris ceux résultant d’omissions imputables à l’Etat et ayant entraîné des violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales.  » (10)
7. La CNCDH considère que l’engagement de celles et ceux qui apportent aide et soutien aux personnes migrantes est légitime au regard de la protection des droits fondamentaux. Elle constate que les décisions prises ces derniers mois par le Gouvernement, à la suite de l’état d’urgence et du rétablissement des contrôles aux frontières ou plus récemment dans la foulée du démantèlement du bidonville Calais, se traduisent dans les faits par un abandon total de très nombreux exilés, dont beaucoup sont mineurs. A ce titre, la CNCDH tient à rappeler que le rétablissement temporaire du contrôle aux frontières et la possibilité pour les pouvoirs publics de procéder à des contrôles systématiques à plusieurs points de passage autorisés (PPA), ne justifient pas les atteintes portées aux garanties procédurales et aux droits essentiels prévus par la loi et les engagements internationaux de la France. En effet, tout étranger souhaitant pénétrer sur le territoire bénéficie, en vertu des dispositions du Ceseda (11), de droits minimaux tels que – pour n’en citer que certains – le droit de se voir notifier dans une langue qu’il comprend une décision écrite et motivée de refus d’entrée, le droit d’être informé de la possibilité de ne pas être renvoyé immédiatement (droit au  » jour franc « , dont doivent systématiquement bénéficier les mineurs), ou encore le droit de demander l’asile et de voir sa demande examinée. Or, la CNCDH déplore que la procédure actuellement appliquée, notamment à la frontière franco-italienne, présente de très nombreuses défaillances, lorsqu’elle n’est pas tout simplement ignorée (12). La CNCDH rappelle également que, si le droit d’asile est un droit garanti par la Constitution française (13), la protection des réfugiés, y compris aux frontières, fait également partie des obligations que l’Etat doit respecter en application de la Convention relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951 (14), d’une part, et du droit de l’Union européenne, d’autre part.
8. Alors que l’Etat n’assume pas ses obligations de protection des mineurs isolés étrangers, alors que persistent les dysfonctionnements du dispositif d’asile, alors que se poursuivent les évacuations de campements sans solution adaptée et pérenne de relogement et d’accompagnement vers l’accès au droit, alors que perdurent de graves violations des droits fondamentaux des personnes migrantes et réfugiées, la CNCDH condamne les entraves apportées aux actions de solidarité de la société civile, qui ont pour seul objet de pallier les carences de l’Etat. De telles mesures, très intimidantes et lourdes de conséquences, peuvent provoquer une forme d’autocensure de la part des citoyens et des bénévoles associatifs, et font obstacle aux manifestations de solidarité de la société française. Considérer, de facto, la solidarité comme un délit, c’est renforcer le risque de fractures sociales, gravement mettre en péril la cohésion de la société et oublier que la fraternité est une valeur fondatrice de la République.
Recommandation n° 1 : la CNCDH appelle le Gouvernement et le législateur à modifier la rédaction de l’article L. 622-1 du Ceseda afin que le droit national soit désormais conforme au droit européen. Dans ce nouvel article, seule l’aide à l’entrée, à la circulation, ou au séjour irréguliers apportée dans un but lucratif doit être sanctionnée. Il s’agit en effet de pouvoir punir les filières de passeurs, les réseaux de traite des êtres humains et toutes les personnes qui profitent de la détresse des exilés pour en tirer un profit financier. L’article pourrait être ainsi rédigé :
 » Toute personne qui aura sciemment facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, d’un étranger en France, dans un but lucratif ou moyennant une contrepartie sera punie d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 30 000 euros.  »
Il conviendrait alors d’abroger l’article L. 622-4.
9. Recommandation n° 2 : la CNCDH appelle également les autorités publiques à cesser de recourir à des délits annexes sans rapport avec les infractions de l’article L. 622-1 du Ceseda, ou à l’immigration (délits d’outrage, d’injure et de diffamation, de rébellion ou de violences à agent de la force publique ; délit d' » entrave à la circulation d’un aéronef « , réglementation sur l’hygiène ou la sécurité applicables à des locaux ; etc.) pour intimider et parfois poursuivre les aidants solidaires. Il doit être mis un terme à l’emploi de tels procédés.
10. Recommandation n° 3 : la CNCDH recommande enfin que les pouvoirs publics concentrent leurs moyens et leurs actions au renforcement de leur capacité d’accueil et d’accompagnement des personnes migrantes, afin de garantir l’effectivité de leurs droits fondamentaux.

(1) Loi n° 2012-1560 du 31 décembre 2012 relative à la retenue pour vérification du droit au séjour et modifiant le délit d’aide au séjour irrégulier pour en exclure les actions humanitaires et désintéressées.
(2) Le Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigrés) tient à jour sur son site internet le recensement des poursuites, audiences, et décisions des tribunaux : http://www.gisti.org/spip.php?article5179#B
(3) A Calais par exemple, la mairie a voulu interdire les distributions de repas et de nourriture et a tenté d’empêcher l’accès aux douches situées dans les locaux du Secours catholique. Le tribunal administratif de Lille a, le 22 mars 2017, suspendu les arrêtés anti-distribution.
(4) Voir le Manifeste des Délinquants solidaires ( http://www.delinquantssolidaires.org/le-manifeste/)
(5) Article L. 622-1 du Ceseda :
 » Sous réserve des exemptions prévues à l’article L. 622-4, toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, d’un étranger en France sera punie d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 30 000 euros.
Sera puni des mêmes peines celui qui, quelle que soit sa nationalité, aura commis le délit défini au premier alinéa du présent article alors qu’il se trouvait sur le territoire d’un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 autre que la France.
Sera puni des mêmes peines celui qui aura facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d’un étranger sur le territoire d’un autre Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990.
Sera puni de mêmes peines celui qui aura facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d’un étranger sur le territoire d’un Etat partie au protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, signée à Palerme le 12 décembre 2000.  »
(6) Pierre-Alain Mannoni, poursuivi devant le tribunal correctionnel de Nice pour avoir  » facilité par aide directe et indirecte la circulation et le séjour irrégulier sur le territoire national d’étrangers en situation irrégulière, en l’espèce en transportant et en hébergeant chez lui trois érythréennes dont une mineure qu’il savait en situation irrégulière « , a été relaxé le 6 janvier 2017. Le juge a estimé que le prévenu  » a agi dans des circonstances telles qu’il a recherché conformément aux dispositions de l’article L. 622-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile à préserver la dignité et l’intégrité des trois migrantes, mettant en œuvre tout moyen, toute aide et en l’espèce en leur permettant de quitter dans son véhicule un lieu inadapté afin de les mettre en sécurité dans son appartement.  » L’affaire est cependant toujours en cours car le Parquet a fait appel.
Dans une affaire antérieure, Claire Marsol a été condamnée par le tribunal correctionnel de Grasse le 18 décembre 2015, puis par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence le 2 décembre 2016, à 1.500 € d’amende pour  » aide directe ou indirecte à l’entrée, la circulation, le séjour irrégulier de deux étrangers en France « ,  » en l’espèce en leur fournissant des conseils et en les prenant en charge dans sa voiture, en agissant en son nom propre et non pour le compte de l’association humanitaire dont elle est membre, deux personnes de nationalité érythréenne en séjour irrégulier dans l’espace Schengen, pour les conduire de la gare de Nice à la gare d’Antibes et afin de les soustraire au contrôle de police en gare.  » Le tribunal relève que  » rien ne permet d’affirmer que les deux personnes étaient atteintes dans leur dignité ou leur intégrité physique au moment de l’intervention de Mme Marsol.  »
Ces deux affaires présentes des circonstances assez différentes, ce qui explique les divergences de jugement, le juge ayant estimé dans un cas, et pas dans l’autre, que l’acte visait  » à préserver la dignité ou l’intégrité physique  » de l’étranger en situation irrégulière. Mais, l’affaire Claire Mariol montre que de simples actions de solidarité, totalement désintéressées, ne peuvent aujourd’hui toujours pas être exemptées de condamnation, en raison du caractère imprécis de la loi.
(7) Directive 2002/90/CE du Conseil du 28 novembre 2002 définissant l’aide à l’entrée, au transit et au séjour irréguliers, article 1-2.
(8) Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, 22 mai 2015, Résolution 2059 (2015) La criminalisation des migrants en situation irrégulière : un crime sans victime.
(9) European Commission against Racism and Intolerance, recommandation de politique générale n° 16 adoptée le 16 mars 2016.
(10) Résolution de l’Assemblée générale A/RES/53/144 adoptant la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’homme, 1998.
(11) Les personnes qui font l’objet d’un contrôle au niveau d’un point de passage autorisé, c’est-à-dire avant de pouvoir pénétrer sur le territoire français peuvent, si elles ne remplissent pas les conditions d’entrée, faire l’objet d’un refus d’entrée suivants différents motifs, mais elles doivent bénéficier toutefois d’un certain nombre de garanties et de droits prévus par le Code frontières Schengen et par la loi (articles L. 221-1, L. 213-9, R. 213-2 et R. 213-9 du Ceseda). Ces dispositions définissent également les modalités concrètes de la procédure de demande d’asile à la frontière.
(12) Amnesty International France, Des contrôles aux confins du droit, Synthèse de mission d’observation, février 2017.
(13) Le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 dispose à l’article 4 que :  » Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d’asile sur les territoires de la République « .
(14) L’article 31 §1 de la Convention relative au statut des réfugiés stipule :  » Les Etats contractants n’appliqueront pas de sanctions pénales, du fait de leur entrée ou de leur séjour irréguliers, aux réfugiés qui, arrivant directement du territoire où leur vie ou leur liberté était menacée au sens prévu par l’article premier, entrent ou se trouvent sur leur territoire sans autorisation, sous la réserve qu’ils se présentent sans délai aux autorités et leur exposent des raisons reconnues valables de leur entrée ou présence irrégulières. « 

Le droit de vote des étrangers .

Droit de vote des étrangers : où en est-on en France ? Quels pays l’ont déjà adopté ?

12 pays de l’Union Européenne accordent le droit de vote à tous les étrangers © REUTERS.

Selon deux ministres, le droit de vote des étrangers aux élections locales serait mis en place d’ici 2014.
•Le résumé :

« J’accorderai le droit de vote aux élections locales aux étrangers résidant légalement en France depuis cinq ans. » Tel est formulé l’engagement 50 de François Hollande lors de sa candidature à la présidence de la République.

Mais un article du Canard Enchaîné, publié en septembre, a suggéré que la réforme pourrait bel et bien passer à la trappe. 75 députés socialistes ont donc lancé, dans Le Monde, un appel demandant au gouvernement d’accélérer la mise en place de cette mesure.

La réaction du ministre de l’Intérieur Manuel Valls n’a rien fait pour rassurer les députés socialistes. Selon lui, il ne s’agit pas « d’une revendication forte dans la société française ». Afin de rattraper le coup, deux autres ministres sont venus à la rescousse .

Alain Vidalies, ministre en charge des relations avec le Parlement, a précisé sur BFMTV que « l’engagement présidentiel sera tenu avant la fin de la législature et probablement au cours de l’année 2013 pour les élections de 2014« . « C’est une nécessité, c’est une promesse du président de la République, ce sera fait l’année prochaine », a confirmé la ministre du Logement Cécile Duflot, sur France Inter.

Si le droit de vote des étrangers aux élections locales existe dans de nombreux pays de l’Union Européenne et en Amérique latine, il risque d’être plus compliqué à adopter en France, où il faudrait réviser la Constitution…

1. En France, une adoption qui suppose de réviser la Constitution, avec une majorité des trois cinquièmes

Pour l’instant, ce sont les dispositions introduites par le traité de Maastritch en 1998 qui prévalent : seuls les ressortissants de l’Union européenne peuvent participer aux élections locales.

Le 8 décembre 2011, le Sénat – où la gauche est majoritaire – a adopté une proposition de loi ouvrant aux étrangers non citoyens de l’Union européenne qui résident depuis plus de cinq ans en France la possibilité de voter et d’être élu aux élections municipales (à l’exception du fauteuil de maire).

Cette proposition de loi avait déjà été votée par l’Assemblée nationale (alors majoritairement à gauche) le 20 octobre 1999.

Pour être définitivement adoptée, la proposition de loi devra repasser devant les députés. Si le texte est voté à l’Assemblée, il sera transmis au Sénat pour une seconde lecture de pure forme, puis finalement adopté. S’il y a désaccord, il sera à nouveau débattu au Sénat.

Mais dans tous les cas, l’autorisation du droit des vote des étrangers implique de réviser l’article 3 de la Constitution, qui pose que « sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques« .

Pour cela, le Président, après adoption du texte, a deux options :
• L’organisation d’un référendum. Mais on imagine mal François Hollande le faire et risquer ainsi de coaliser la droite et l’extrême droite contre lui.
•Réunir le Parlement en congrès à Versailles.

Dans ce dernier cas, pour que la révision de la Constitution soit adoptée, elle doit être votée à une majorité des trois cinquièmes du Parlement en congrès. Or, pour l’instant, cette majorité n’est pas assurée. Si le Parlement est réuni en Congrès (577 députés et 348 sénateurs, soit 925 parlementaires seront appelés à se pronnonvcr sur la réforme de la Constitution.

Si l’on additionne les effectifs des groupes communistes, socialistes, écologistes et radicaux du Sénat et de l’Assemblée, on arrive à 523 voix. Si aucune de ces voix ne fait défaut, pour atteindre la majorité des trois cinquièmes (555 voix), il faut donc convaincre au moins 32 autres parlementaires parmi le centre (60 élus), l’UMP (328 élus) ou les non-inscrits (14 élus).

La majorité utilisera probablement l’argument selon lequel les étrangers ont déjà le droit de voter aux élections locales dans d’autres pays d’Europe ou d’Amérique latine.

2. Douze pays de l’UE accordent le droit de vote aux élections locales à tous les étrangers

L’Irlande est le pays le plus ouvert de l’Union européenne. En 1963, les Irlandais accordaient le droit de vote à tous les étrangers aux élections municipales. Depuis 1992, aucune durée minimale de séjour sur le territoire irlandais n’est exigée. Les immigrés ont le droit de vote et peuvent aussi se faire élire aux élections municipales.

Onze pays européens (Belgique, Danemark, Luxembourg, Pays-Bas, Suède, Finlande, Estonie, Slovénie, Lituanie, Hongrie, Slovaquie) et plusieurs cantons suisses accordent le droit de vote aux élections locales à tous les étrangers… après une durée minimale de séjour sur leur territoire – entre deux et cinq ans selon les pays.

Dans cinq de ces pays (Danemark, Finlande, Luxembourg, Pays-Bas, Suède) les étrangers ont également le droit de se faire élire aux élections municipales.

3. Trois autres pays de l’UE n’accordent le droit de vote qu’à certains étrangers

Dans trois autres pays européens, le droit de vote est accordé aux ressortissants de certains pays qui ont conclu un accord bilatéral.
•L’Espagne, depuis sa loi électorale du 19 juin 1985, permet aux Chiliens, Uruguayens et Norvégiens de voter aux élections municipales. En 2009, des accords bilatéraux ont été signés avec l’Amérique du Sud, accordant le droit de vote aux élections locales à environ 500 000 personnes originaires de Colombie, du Pérou, de l’Argentine, d’Équateur, de Trinité-et-Tobago et d’Islande.
•Au Portugal, des traités de réciprocité donnent le droit de vote aux élections municipales aux citoyens issus de pays dont la langue officielle est le portugais (Brésil, Cap-Vert), de la Norvège, de l’Uruguay, du Venezuela, du Chili et de l’Argentine.
•Au Royaume-Uni, une loi du 1983 accorde le droit de vote aux élections législatives et locales à tout citoyen des États-membres du Commonwealth ainsi qu’aux Irlandais.

4. En Amérique latine, la plupart des pays accordent le droit de vote aux étrangers

En Amérique latine, seuls deux états sur douze réservent le droit de vote à leurs seuls nationaux (Équateur et Surinam).

Trois États accordent même le droit de vote à tous les étrangers et à toutes les élections : le Chili, au bout de cinq ans de résidence, le Venezuela, au bout de dix ans, et l’Uruguay, au bout de quinze ans.

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