À l’aire du numérique, le monde scolAIRE se doit d’être « in the air », moderne, et employer les moyens qui, selon l’argumentation de chacun, seront qualifiés de :

Une alléchante proposition qui motive beaucoup l’apprenant et l’enseignant. Des écoles qui se voient développer leur parc informatique, le nombre de tablettes, l’installation de la fibre, l’accès facile au « monde libre » d’un clic de souris !

Mais comment définir la place du numérique dans nos classes sans le laisser envahir et dénaturer les « indispensables » de base ?

Chic du numérique ! Oui mais… jusqu’où le substitut du clic ?

Quand le numérique s’installe, s’étale et s’impose au quotidien. Qu’en dites-vous ?

Est-ce un moyen idéal de développement de pratiques ou finalement une nouvelle problématique ?

Dans le doute…

Disons que, peut-être comme pour un nouveau médicament, l’emploi du numérique au quotidien demandera du temps avant de laisser émerger les effets secondaires, les incompatibilités et les troubles éventuels liés à sa consommation répétée en milieu scolaire. Parce qu’il ne faudrait pas que…

Actuellement, chacun y va de son avis, de son idée et va plus ou moins utiliser le produit parce qu’il est clairement alléchant et « apparemment sans risque immédiat pour son utilisateur ». Il vend du rêve, de la liberté par sa simplicité d’utilisation et l’accès rapide vers l’au-delà qu’il propose au prof et à l’élève. Mais il ne faudrait pas que

…l’école, comme un grand laboratoire, introduisant depuis ces dernières années l’utilisation du numérique au cœur des apprentissages, devienne une bibliothèque à besoins et envies inépuisable qui pourrait remplir la journée de classe faisant presque oublier aux élèves ils sont et qui se trouve en face d’eux : l’enseignant perçu alors comme un robot qui dirigerait les opérations numériques depuis son propre ordinateur en simple « chef d’orchestre ». On dirait un film de science-fiction mais nous n’en sommes pas forcément très loin. Blogs, sites en tous thèmes et tous domaines qui se développent et proposent des outils, des mallettes, des vidéos, des jeux en ligne, des images, des sons, des outils d’apprentissage de qualité (ou pas) dans une immédiateté hallucinante qui n’encourage pas l’apprentissage de la gestion des frustrations et de la patience… qualités humaines non négligeables…

Alors chic le numérique mais, certainement à dose « homéopRatique », surtout dans l’enseignement primaire.

Au primaire, n’oublions pas les fondamentaux !

Lire, écrire, compter, parler restent les grands axes de priorité d’enseignement en école primaire.

Mais le numérique doit-il y trouver une place et y prendre place surtout, partout ?

Pour accéder à la complexité de la langue française et étudier les règles qui la définissent si complexe, le numérique pourra être d’un extra-secours. Comme une trousse de secours le support numérique permet généralement une entrée dans une notion de manière « douce et acceptable » pour nos jeunes apprenants : grammaire, orthographe, conjugaison, production d’écrits, calcul, géométrie.

Quelques exemples « indigestes » :

– aborder la règle du participe passé qui s’accorde avec le COD s’il est placé avant,

– les terminaisons des verbes (passé simple pas si simple !)

– l’accord des adjectifs (avec l’exception des couleurs désignant des fruits…)

– la proportionnalité,

– les fractions décimales…

La liste des quelques apprentissages « déstabilisants, peu motivants », c’est plus professionnel que « indigestes », pourrait encore s’étaler. Alors oui dans ce cas, le numérique peut devenir baguette magique : il déploie depuis sa tablette ou le padlet une passerelle de motivation vers l’accès au monde complexe de la langue française et des mathématiques. Petit moteur vers la conquête de l’indiges… (oups décidément !) indi…scutable règle orthographique ou mathématique. Hic !

Il ne faudrait pas que…

Lorsque l’élève ne sait pas, il devient alors chercheur : une définition, un exposé, une œuvre d’art, un problème, des hypothèses scientifiques… Il ne faudrait pas que

…ce numérique qui permet de donner des réponses en un temps incontestablement court se substitue aux compétences de l’élève. C’est le MOTEUR DE RECHERCHE qui cherche.

Et l’élève ? Il attend. Il trie. Il recommence. Il lit. Se contente… Dématérialisé. Le devient-il ?

Il ne faudrait pas que l’élève n’exerce plus son propre MOTEUR de recherche d’apprenti trouveur en se laissant guider intuitivement par l’unique introduction de quelques mots clés.

Il ne faudrait pas que son intelligence déductive et sélective soit suppléée et qu’il ne puisse pas s’entraîner de manière consciente à  :

Il ne faudrait pas que le numérique enlève la dynamique d’une mise en recherche physique, active, géographique, par un apprenti figé derrière l’écran pratique qui, bombardé d’infos, utilisera la première ou la plus attractive peu importe son contenu.

Le numérique ? Oui pour un élan de dynamisme, une clé pour un savoir, un outil de valorisation et de communication, un nouveau regard, un moteur !

Mais, il ne faudrait pas que

– la tablette et les touches remplacent la manipulation du crayon. Notons en passant que la tenue du crayon devient une torture dans les classes élémentaires… les mains sont raides, les poignets figés, et la « pince » peu forte pour maintenir fermement le crayon… Premier effet secondaire ? Atrophie de la main à l’exception du pouce et de l’index ?

– l’ordinateur remplace le dictionnaire, la BCD, ces lieux de richesse extraordinaire que le monde littéraire nous offre comme un musée de mots, une caverne de solutions, une grotte de ressources immergeant l’individu dans sa conquête de sens.

– la production en ligne se substitue à l’échange humain qui fait raisonner, montre le chemin de l’erreur à la réussite par un assemblage de questions qui mènent à réflexion et au réinvestissement des savoirs là où le numérique se contente de souligner en rouge et proposer une correction « sur mesure » ou un simple copier/coller…

– la démonstration mathématique en 2D annihile la manipulation, les comparaisons, les déductions…

Mea culpa

Alors oui, moi aussi j’utilise du numérique pour enseigner. Mais la prudence me retient, les « il ne faudrait pas que… » me mettent en alerte et m’invitent à utiliser « la chose » en dose homéo-pratique.

Les propositions numériques parsèment mes enseignements et rendent justement le numérique plutôt chic ! Parce que les élèves ne s’y attendent pas et qu’il débarque comme un allié de passage en classe. Un ami qui ne restera pas mais à qui on accordera l’attention nécessaire pour la suite de l’aventure.

Des vidéos pour introduire une notion complexe de manière ludique et motivante, un reportage photo pour immortaliser une sortie, mémoriser une pratique, dénoncer une pratique (déchets par terre), un texte de lecture projeté pour le travailler ensemble, un repérage géographique à partir d’un logiciel qui nous situe sur la planète, l’enregistrement audio d’une histoire lue à voix haute pour la partager, la découverte d’une œuvre d’art inaccessible, un reportage scientifique « Le hérisson en automne »…

Mon numérique a sa place en classe mais je veille et surveille pour éviter qu’il ne s’installe trop dans le quotidien de mes élèves, généralement déjà bien « gavés » à la maison.

Quoi qu’il en soit, le numérique, c’est chic !

« On ne peut abuser que de choses qui sont bonnes. »

citation de Michel de Montaigne (trouvée sur un moteur de recherche en ½ seconde avec 3 mots clés à défaut d’avoir un livre de citations sous la main…).

 

Une chronique de Claire Maurage

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