COVID-19 : les laboratoires sont-ils responsables de leurs vaccins ?

COVID-19 : les laboratoires sont-ils responsables de leurs vaccins ?

16 juillet 2022 0 Par nicolas

L’inquiétude grandit au sein de la population française au sujet des vaccins, en ce contexte si particulier de pandémie et de quasi-dictature sanitaire mise en place par les gouvernements Philippe, puis Castex.

Sont-ils vraiment efficaces ? Peuvent-ils être nocif sur l’organisme ? Sans tomber dans du complotisme de bas étage, que sait-on vraiment sur ces 3 vaccins qui s’apprêtent à être distribués massivement dans toute la France et l’Union Européenne ?

Selon le Professeur Axel Kahn, président de la Ligue contre le Cancer, « les laboratoires se sont défaussés de leur responsabilité individuelle« .

Cet éminent scientifique et médecin généticien nous fait part de sa sidération : « c’est totalement anormal », disait-il ce mercredi sur Europe 1.

Des données commerciales et non scientifiques

Rappelons aussi que le Professeur Philippe Juvin précisait il y a quelques jours, suite à l’annonce des 95% d’efficacité du vaccin Pfizer / BioNTech, qu’il s’agissait en l’espèce de « données commerciales » et non « scientifiques ».

Pfizer comme les autres laboratoires ont publié des communiqués de presse, repris dans l’ensemble des médias du monde, mais n’ont pas encore publié ces résultats dans de grandes revues médicales à comité de lecture, ce qui est la condition pour parler véritablement de « données scientifiques ».

Il faut en effet que ces dernières fassent l’objet d’une publication exhaustive et surtout d’une relecture critique d’experts reconnus dans leur domaine.

Légalement, les laboratoires sont responsables

Si Axel Kahn ne fait pas partie des « anti-vaccins Covid-19 », il exprime publiquement les craintes et la méfiance d’une partie des Français à l’égard des grands laboratoires et ce qui est perçue comme de l’opacité dans les contrats noués par l’UE. La plus grande confidentialité entoure, en effet, la signature de ces accords. Ce qui contribue à alimenter les fantasmes complotistes du vaccin Covid-19.

« Les laboratoires sont bien responsables au regard de la loi, répond un porte-parole de la Commission européenne. Les contrats d’achat des vaccins contre le Covid-19 conclus avec la Commission respectent en ce sens le règlement européen sur la responsabilité des produits. Le droit européen prévoit clairement une responsabilité des fabricants en cas de problème ».

Urgences en matière de santé publique

Il s’agit là d’une différence majeure avec les États-Unis où le contexte de pandémie rend les laboratoires « irresponsables ».

« Il existe aux États-Unis un régime ad hoc, le Prep Act (Public Readiness and Preparedness Act), qui instaure une immunité de juridiction pour toutes les personnes physiques et morales, issues du public ou du privé, qui participent à la réponse à une pandémie, précise Emmanuelle Trombe, avocate associée au sein du cabinet McDermott Will & Emery, spécialiste des industries de santé. En cas de demande d’indemnisation, c’est l’État qui prend intégralement en charge le préjudice subi ».

Créé en 2005, ce régime qui couvre les « urgences en matière de santé publique » a notamment été en vigueur en 2009 lors de la grippe H1N1.

Impossible, en effet, d’exclure d’éventuelles actions en justice devant les tribunaux nationaux en cas d’effets secondaires graves, avec le risque de voir les laboratoires condamnés à indemniser des patients. Car même si les vaccins ont été développés dans le respect des règles scientifiques, suivant les trois phases rituelles d’essais cliniques, et des procédures réglementaires, en concertation avec les agences sanitaires, tout a été fait sur une durée très courte.

« La vitesse à laquelle les vaccins ont été développés fait qu’on a moins de recul que d’habitude, ajoute Olivier Wierzba, spécialiste du secteur, associé au sein du BCG, un cabinet de conseil. En temps normal, il faut en moyenne dix ans pour développer un vaccin ».

Des risques partagés

Les laboratoires pharmaceutiques ont donc fait pression sur Bruxelles, via notamment la Fédération européenne des associations et industries pharmaceutiques, pour partager les risques. Industriels et financiers d’abord, par le biais des acomptes versés lors des précommandes qui ont permis de démarrer la production des doses. Et juridiques.

« Ce timing très serré imposé par les circonstances a sûrement pesé dans les négociations, notamment sur le partage de la responsabilité », ajoute Me Emmanuelle Trombe. « Il leur a été demandé d’aller très vite dans les essais cliniques et dans la production. Il n’y a pas de raison qu’ils assument seuls ce risque. Sauf en cas de faute lourde avérée ».

Fait inédit dans l’histoire des vaccins, les laboratoires ont, en effet, démarré la fabrication avant même d’avoir bouclé la dernière phase d’essais cliniques, courant le risque de mettre des dizaines de milliers de lots à la poubelle en cas d’échec.

L’État en garantie

« Ce sujet de la mutualisation des risques n’est pas choquant sur le principe », ajoute l’avocate. « C’est ce qui existe notamment avec le système d’assurance obligatoire en matière d’accidents de la route ».

En vertu de ces contrats, les laboratoires peuvent donc appeler l’État en garantie en cas de condamnation. Mais uniquement sous certaines conditions. « Dans des cas rares que nous ne pouvons pas exclure, les États membres peuvent intervenir et contribuer à l’indemnisation », précise le porte-parole de la Commission européenne. Cela pourrait concerner d’éventuels vices cachés qui n’étaient pas connus de l’Agence européenne du médicament, qui évalue les vaccins, et des laboratoires, selon nos informations. Ou d’effets secondaires graves que l’état de la science ne permettait pas de déceler.

Dans les contrats, les laboratoires sont-ils tous logés à la même enseigne en matière de responsabilité ? Le fait que certains à l’instar d’AstraZeneca aient décidé de vendre leurs vaccins à prix coûtant a-t-il pu compter dans la négociation ? « On peut imaginer que ceux qui ne font pas de marge sur le vaccin et participent ainsi à l’effort collectif aient pu demander à être indemnisés plus fortement en cas de problème », estime Me Trombe. « La responsabilité est la même pour tous, répond la Commission. Le prix consenti par les laboratoires n’a pas d’incidence ».

Et qu’en est-il de la responsabilité de la Commission ? « Elle a la responsabilité du bon déroulement de la passation des marchés, pas de l’utilisation des vaccins », précise le porte-parole de Bruxelles. Cela peut donc expliquer pourquoi les institutions européennes et nationales veulent à tout prix inciter à se faire vacciner contre le Covid-19.

La responsabilité aux yeux de l’opinion publique

Reste qu’aux yeux du public, au-delà des aspects juridiques, la responsabilité est avant tout morale. « Le niveau d’exposition de ces laboratoires dans la course aux vaccins et les risques pris en termes de réputation et de crédibilité sur la scène internationale sont inédits », ajoute Marie Humblot-Ferrero, associée au BCG. « Mais il s’agit d’un risque collectif. En cas de problèmes graves, quel que soit celui paie, c’est l’ensemble des parties prenantes, laboratoires, agences sanitaires et l’UE qui seraient tenus responsables par l’opinion publique ».