Une émotivité absurde

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Albert Camus, écrivain, philosophe, journaliste militant, romancier, dramaturge, essayiste et nouvelliste français nous immerge avec son roman L’Etranger dans une Algérie française des années 1940-1950, lieu de sa naissance. Ce roman fait partie d’une tétralogie nommée le « cycle de l’absurde » ; dans celui-ci l’auteur fait ressortir l’absurde à travers le personnage principal, démuni de tact et d’empathie.

L’histoire est celle d’un homme nommé Meursault, habitant à Alger. Dès les premières lignes, il apprend le décès de sa mère, nouvelle qui n’a pas l’air de l’ébranler. Après nous avoir décrit les funérailles pénibles de sa mère sous la chaleur accablante de ce pays, il se rapproche d’une ancienne connaissance, Marie, avec qui il entretiendra une relation. Mal à l’aise avec autrui et ignorant face aux codes sociaux, Meursault donne l’impression de n’avoir d’intérêt que pour la nature, la solitude et le calme.

Un jour qu’il se rend dans un cabanon près de la plage avec son ami Raymond, des tensions de longue date avec deux « Arabes », comme il le dit, refont surface et débouchent sur un événement tragique : Meursault tire à l’arme à feu sur l’un des deux adversaires, qui y laisse la vie !

La suite du roman décrit le procès de Meursault suite à ce crime.

Un personnage apathique…

L’attitude de Meursault nous dérange tout au long du récit car il semble n’avoir aucun sentiment pour ses semblables. Il lui est pénible de converser avec d’autres personnes trop longtemps, et il ne sait pas ce qu’il doit dire pour ne pas paraitre étrange, n’ayant pas la notion des codes sociaux : « J’ai dit « oui » pour n’avoir plus à parler », et plus loin « J’ai répondu « Non. » Il s’est interrompu et j’étais gêné car je sentais que je n’aurais pas dû dire cela ».

Ce qui est surprenant, c’est qu’il ne cache pas la vérité. A la lecture, cela parait parfois burlesque, parfois grossier, car il dit ce qu’il pense sans prendre la peine d’adoucir ses propos. Le comportement misanthrope de cet homme peut même nous faire éprouver du dégoût, notamment lorsqu’il aide son ami Raymond à se venger d’une femme sans penser qu’il lui ferait du mal.

Il apprécie la solitude, et on ne ressent un peu son humanité qu’auprès de Marie, qui accepte son étrangeté.

… amoureux de la nature

Ce qui nous permet de ne pas à notre tour mépriser le personnage, c’est en effet son attachement à la jeune femme. Cependant, même envers cette dernière, il peut faire preuve d’une grande maladresse et d’une certaine froideur.

Ses émotions ne sont pas totalement absentes, comme en témoigne son attachement à la nature, à l’inverse de ce qu’il éprouve pour ses semblables. « Au-dessus des collines qui séparent Marengo de la mer, le ciel était plein de rougeurs. Et le vent qui passait au-dessus d’elles apportait ici une odeur de sel […] je sentais quel plaisir j’aurais à me promener s’il n’y avait pas eu maman. » C’est d’ailleurs à la plage qu’il rencontre de nouveau Marie.

Il y décrit une Algérie belle et mythique, sans évoquer la situation politique de l’époque : « Autour de moi c’était toujours la même campagne lumineuse gorgée de soleil. Le soleil avait fait éclater le goudron ». Et c’est très intéressant pour nous de ressentir cette chaleur pesante et présente en permanence, tout au long de l’histoire.

D’autre part, nous ne pouvons-nous empêcher d’être embarrassé lorsqu’avec son camarade Raymond ils parlent des Arabes : « Là, nous avons trouvé nos deux Arabes. Ils étaient couchés, dans leurs bleus de chauffe graisseux ». Bien qu’à l’époque de Camus la notion de racisme était différente, et que cette façon de parler avait moins de connotation, on ressent les tensions entre les pieds-noirs et les habitants natifs d’Alger. Leur vocabulaire nous parait très brut. 

On comprend le titre par le fait qu’on ne raconte rien sur le passé de Meursault dont on ne connait même pas le prénom. Mais on l’explique surtout par l’étrangeté du personnage qui ne cesse de nous surprendre tout au long de la lecture.

Un roman abordable

Source : https://www.flickr.com/photos/ antoniomarinsegovia/49501972752

Le roman est rédigé dans un langage courant, sans mots rares ou difficiles, ce qui m’a facilité la lecture. 

J’ai trouvé très intéressant le fait que le narrateur soit le personnage principal et que le récit soit écrit à la première personne. Le personnage lui-même semble ne rien nous cacher et est totalement transparent de ce fait, en nous faisant part de ses pensées les plus profondes.

Je vous conseille vivement L’Etranger car il invite à la réflexion sur les rapports et les émotions humaines.

Je lui attribue la note de 4 étoiles. 

Camus, Albert. L’Etranger. Gallimard, 1994. 185 p. Folio, 2. ISBN 2-07-036002-4

Romain MASSINON, 1ère2

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