Quand les élèves s’organisent pour aider la planète

Je ne savais ni où ni comment le sujet allait être abordé et comme souvent j’attendais le « bon moment »… Sans savoir l’allure, la forme ou le temps qu’il allait prendre, je savais que l’instant T serait le point de départ d’une prise de conscience, d’une mise en route collective, d’une mobilisation générale : tous pour un, un pour tous ! Sauvons la planète !

Disons, plus exactement : Comment aider notre planète ? Parce que question « sauvetage »… le plan de secours mondial est déjà bien en retard et il est plus en notre capacité de l’aider à notre petite et humble échelle… Le sujet de l’écocitoyenneté est inscrit cette année dans mes projets. Il n’attend plus que le signal de départ pour éclore.

Et puis, il était une fois…

Ce fut vraiment inattendu comme approche. Un retour de récré, qui aurait pu passer inaperçu sans doute, semblable à toute autre entrée en classe : on se désaltère, on déblatère, les commères racontent leurs misères, on soigne les blessures de guerre… « c’est de la faute à Pierre ! ». Et puis, un groupe s’est approché de moi : « Madame, on a trouvé une mante religieuse ! »

Toujours charmée par la naïveté de mes petits apprenants, je les laisse dans un premier temps dans leur illusion, il sera bien temps ensuite d’analyser et de rappeler : « nous sommes dans le Nooooord de la France et la mante religieuse ne fait pas partie des insectes traditionnels de notre faune évoluant dans une météo réputée pluvieuse, grisonnante et fraîche, peu propice à son développement et épanouissement personnel. »

Curieuse de voir à quoi ressemblait leur « trésor », bien entendu, je me suis approchée. À vrai dire, le reste d’insecte qu’ils tenaient au creux de leur main ne ressemblait plus à grand-chose. Il ne restait que quelques grandes pattes un peu crochues et 2 parties d’un corps qui semblait en effet avoir été bien grand.

 

Je pensais maîtriser la plupart des insectes des bois et des fourrés de ma belle France du Nord, ayant moi-même grandi au milieu des pâtures… Mais … page blanche. Qu’est-ce que c’est ? Ni sauterelle, ni scarabée, ni libellule… c’est quoi ce lézard ?
Sans vouloir m’aventurer, je me suis alors approchée de mon ami « Internet » pour en avoir le cœur net : m-a-n-t-e r-e-l-i-g-i-e-u-s-e (images). C’était bien une mante religieuse.

Prêts ? Partez !

Ça y est, je tenais mon entrée fracassante dans le monde de l’environnement.
Mettant de côté tout ce qui était alors prévu pour ce retour de récré (jeu de calcul, récitation de poésie, élaboration des règles de la classe), je bondis sur l’occasion pour réveiller l’intérêt des enfants, les questionner, les mettre en projet : aidons la planète.

Pourquoi voit-on une mante religieuse dans notre village alors qu’elle vit habituellement dans des zones chaudes et sèches ?
Pourquoi le climat se dérègle-t-il ?
Qu’est-ce que le réchauffement climatique ?
Quelle influence l’homme a-t-il sur la planète dans son comportement ?

Gaspillage, surconsommation, pollution… tout y est passé. Les enfants sont donc de bons récepteurs d’informations et récitent bien leurs leçons.

Mais qu’en est-il de leurs propres habitudes ?
Comment pouvons-nous agir à notre niveau pour aider la planète ?

Il n’aura pas fallu beaucoup les pousser.

La récréation suivante réveilla en eux un élan de bienveillance envers la nature. Peut-être animés par l’espoir de croiser à nouveau une mante religieuse migratrice, mais peu importe, mes élèves se mirent à ramasser tout ce qui était « contraire à la nature » dans la cour de récré. À la fois surpris et en colère, ils firent une sacrée récolte : papier, aluminium, mouchoirs, bouchons plastiques, mousse de ballon, emballages plastiques, vis, polystyrène…

Pour marquer les esprits et avancer encore dans notre démarche d’écocitoyens en révolte, nous avons commencé à stocker en classe toutes ces trouvailles en vrac sur une affiche.


La suite logique fut de s’informer sur le temps que mettait chaque déchet à se dégrader dans la nature… Quel triste constat : le papier plusieurs mois, le plastique 100 ans, l’aluminium 200 ans, le polystyrène 1000 ans, le verre 4000 ans… Largement morts et décomposés, en ce qui nous concerne, d’ici là…

À l’attaque !

Notre démarche ne pouvait donc s’arrêter là. Il y aura deux plans d’attaque : sensibiliser les élèves de l’école aux conséquences de leur « flemmardise » de jeter leurs déchets dans un endroit inadapté plutôt qu’à quelques pas de là « dans la poubelle », mais aussi partir à l’assaut des déchets : les capturer dans la nature environnante pour les remettre à leur place.
Cette action de désintoxication de la nature s’est très vite organisée puisque les élèves, plus que motivés, étaient impatients de s’investir « pour du vrai ».

Bien entendu, en tant que pédagogue responsable, il fallait que je remplisse scrupuleusement mon tableau des charges en respectant les étapes indispensables suivantes :

Informer : comprendre ce qu’est un déchet, sa nature, ses dangers.

Organiser : réfléchir aux équipements nécessaires, se préparer (gants, chaussures adaptées, pinces pour les déchets inaccessibles, gilet de sécurité).

Mobiliser : appeler du renfort ! SOS parents, parce qu’avec 27 élèves, le ramassage des déchets risquait vite de se transformer en une terrible « chasse aux œufs » !

Prévenir : observer le ramassage possible et impossible, les dangers potentiels de la route, des barbelés, des objets eux-mêmes.

Agir : partir en petits groupes avec une fiche de groupe pour répertorier la nature des déchets, observer le déchet et son environnement, en déterminer sa nature et le ramasser après autorisation de l’adulte.


C’est ainsi que nous avons quitté l’école en cette veille de vacances de la Toussaint avec la sainte mission d’agir pour le bien-être de la nature.


En 1 heure seulement, nous avons récolté 7 sacs de 30 litres de déchets…

Ce n’est que le début de la suite…

Une chronique de Claire Maurage

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