Debussy – Doctor gradus ad parnassum

« DOCTOR GRADUS AD PARNASSUM »
Extrait des « Children’s corner »

Claude Debussy

Composé en 1908, « Children’s corner » est un recueil de 6 pièces dédié à sa fille Chouchou. Nous allons nous intéresser à la première d’entre elles, « Doctor gradus ad parnassum ».

Cette pièce annotée « modérément animé » en ut majeur, à 4 temps n’est en fait qu’une fine raillerie des redoutables exercices de Clementi et exprime ainsi avec humour l’opinion plutôt sceptique de C.Debussy quant à la valeur de ce genre d’éducation musicale. Cette pièce très rafraîchissante aux allures de toccata scintillante symbolise à mon sens une certaine ardeur, une impatience juvénile.

Nous allons en extraire les aspects et les intérêts pédagogiques.
Tout d’abord, ce morceau est à mon sens très motivant quel que soit l’âge où le niveau de l’élève ; la musique et le langage sont faciles d’accès et renferment une indémodable modernité. Pourvu d’un large éventail de nuances allant du pianissimo au fortissimo, ce morceau permet déjà à l’apprenti pianiste d’explorer les sons, leurs intensité, et requiert également une bonne gestion du temps musical et du tempo. Malgré le flux ininterrompu de doubles croches, son incroyable richesse harmonique offre une atmosphère très chaleureuse.

Le premier thème, qui subira quelques mutations tout au long de la pièce, nécessite déjà une grande égalité des doigts et une recherche de plans sonores (« égal et sans sécheresse »). En effet, à la main droite, seule la première des doubles-croches fait partie de la mélodie et se doit de briller par rapport au trois autres qui sont là pour déployer l’harmonie. Cette mélodie fonctionne avec la ligne de basse à la main gauche et ces deux voix peuvent être travaillées en supprimant le reste. La main droite peut aussi être travaillée seule en plaquant les quatre doubles de chaque temps pour prendre conscience de l’harmonie et obtenir l’empreinte de chacune et mémoriser plus rapidement.
Ce travail peut être effectué tout au long de l’œuvre et permettra à l’élève de bien distinguer les parties entre elles.

Un autre aspect pédagogique intéressant, et qui n’est pas présent dans tous les répertoires, sera le croisement de mains – le passage de la main gauche par-dessus la droite – le fait d’avoir la main gauche mobile par rapport à une main droite plus statique. Ce paramètre permet déjà d’aborder la notion de geste et d’en comprendre son intérêt car l’ensemble de ce passage apporte un certain effet, la main gauche est plus libre, ricochant de l’extrême basse à l’extrême aigu, le tout conduit par la main droite qui ne doit surtout pas rester passive et doit permettre de transporter le son d’un extrême à l’autre.

Enfin dans l’ensemble de cette pièce nous soulignerons l’importance de la pédale qui, à certains moments peut se permettre de noyer des groupes de notes, tandis que sur d’autres passages elle doit être employée de façon quasi chirurgicale. Cela va dans l’idée qu’il y aura également beaucoup d’effets à trouver, propre à l’esthétique de la musique de C. Debussy : effets liés aux nuances (soufflets, crescendo decrescendo sur une mesure), effets de vagues ou d’explosion.