le déficit commercial , une alayse de JP Fitoussi dans Libération

«Le déficit commercial de la France n’a pas d’importance»….

Pour Jean-Paul Fitoussi, président de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), il n’y a pas lieu de s’inquiéter outre mesure des 39,17 milliards de solde négatif des échanges commerciaux français en 2007. Les explications de l’économiste.

Pour la quatrième année consécutive, la France accuse en 2007 un solde négatif des échanges commerciaux: -39,17 milliards d’euros. Un record, après une année 2006 où elle avait déjà enregistré 28,2 milliards de déficit après 22,8 milliards en 2005. Concrètement, cela signifie que la France a davantage importé de produits qu’elle n’en a vendus. Cette situation est-elle le signe de la mauvaise santé d’une économie française de moins en moins concurrentielle sur le plan mondial? Les explications de Jean-Paul Fitoussi, économiste et président de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).

Comment un tel déficit commercial peut-il se comprendre?
Il y a trois explications. La première est l’augmentation du prix du pétrole. La seconde explication est intra-européenne, c’est-à-dire la concurrence par les coûts, notamment salariaux, que l’Allemagne conduit depuis cinq ans et qui lui a fait gagner des parts de marché à l’intérieur de l’Europe. Ces deux points ne sont pas graves, car une politique de baisse des coûts salariaux n’est pas tenable, ni soutenable. La troisième raison est liée à l’augmentation de l’euro, qui fait perdre des parts de marché à la France en dehors de la zone de la monnaie unique.

Quelles vont-être concrètement les répercussions de ce déficit commercial en France?
En principe, dans le cadre de la zone euro, ce déficit commercial n’a pas d’importance. Pas plus par exemple que le déficit éventuel du Limousin par rapport à la région parisienne. C’est pour cela que l’on a créé l’euro. Mais ce déficit signifie que le moteur et critère de la croissance en France est faible. Donc que cette dernière dépend de la consommation et  et de l’investissement dans l’Hexagone. En principe, le moteur externe devrait se rallumer au fur et à mesure que les salaires allemands reviendront à la normale et que l’euro reviendra à un niveau plus raisonnable. La politique monétaire est un élément essentiel dans un grand « pays » comme la zone euro, car cela touche l’ensemble des moteurs de la croissance.

L’Allemagne aussi est dépendante de la cherté de l’euro. Et pourtant elle s’en sort mieux, avec 215 milliards d’euros d’excédent en 2007…
Les échanges franco-allemands comptent beaucoup dans le solde de l’Allemagne et de la France. En serrant les salaires, l’Allemagne fait en sorte que les consommateurs allemands n’importent pas beaucoup de produits français, alors que les consommateurs français continuent d’importer des produits allemands. C’est un jeu non coopératif. Dans les échanges internationaux, un pays peut toujours s’en sortir en baissant les salaires au détriment de ses voisins.

Pourquoi l’Allemagne se conduit-elle de la sorte?
Elle ne pouvait pas faire autrement, puisqu’elle était obligée de digérer la réunification (avec l’Allemagne de l’Est, ndlr) et de rétablir la compétitivité qu’elle avait avant cette réunification. En 1989, l’Allemagne de l’Ouest avait un excédent extérieur de 4% du PIB. Dans les années 1990, cet excédent s’est transformé en déficit. Là, on assiste à un retour à la normale, mais dans les pires conditions. Parce que l’euro est fort et qu’ainsi l’Allemagne perd des parts de marché en dehors de la zone euro. Elle a donc été obligée de compenser ses pertes par des gains très fort dans la zone euro.

Ce déficit du commerce extérieur est-il grave pour l’économie française?
La France pourrait réagir pareillement à l’Allemagne: serrer les salaires pour se refaire une santé commerciale aux dépens des autres pays de la zone euro. Mais il est heureux que ce ne soit pas possible. A ce jeu-là, tout le monde est perdant. Car, en réalité, le commerce extérieur n’est pas un indicateur que l’on doit regarder. Le fait que les Etats-Unis soient en déficit extérieur depuis trente ans n’a pas empêché leur croissance d’être supérieure à celle de la zone euro. Autre pays à être dans cette situation dans l’UE: l’Espagne. Pourtant, ce pays a une croissance plus forte que celle de la zone euro, et ce depuis longtemps.

About GhjattaNera

prufessore di scienze economiche e suciale a u liceu san Paulu in Aiacciu

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