new deal ?

Plan de relance : une correction utile mais pas un 

 New deal »

Le plan de relance présenté par Nicolas Sarkozy corrige la mauvaise politique budgétaire menée jusqu’ici par le gouvernement. Mais il n’a rien d’extraordinaire : les 26 milliards d’euros annoncés représentent 0,7% du PIB par an, à comparer avec les 2,5% du plan de relance américain.

par Guillaume Duval, rédacteur en chef d’Alternatives Economiques

Nicolas Sarkozy a solennellement présenté le 4 décembre son plan de relance de l’économie française à Douai, ville symbole des difficultés actuelles de la branche automobile (voir ici). Un plan que le Président a voulu « ambitieux, audacieux et imaginatif ». Malgré les superlatifs qui ont entouré sa sortie, ce plan reste en réalité d’une ampleur limitée, notamment quand on le compare aux mesures déjà mises en œuvre aux Etats-Unis ou préparées pour 2009 par Barack Obama. Il vient toutefois corriger, et c’était plus que nécessaire, la politique budgétaire restrictive que constituaient les budgets 2009 de l’Etat et de la Sécurité sociale tels qu’ils ont été présentés et discutés au Parlement.

Depuis deux mois, nous vivions en effet une situation surréaliste. Lors de son discours de Toulon, le 25 septembre dernier, Nicolas Sarkozy avait – à juste titre – souligné l’ampleur de la crise financière et de ses conséquences prévisibles sur l’économie réelle : « dire la vérité aux Français, c’est leur dire que la crise actuelle aura des conséquences dans les mois qui viennent sur la croissance, sur le chômage, sur le pouvoir d’achat », rappelait-il. Pourtant, le lendemain même de ce discours, le gouvernement présentait un budget de rigueur pour 2009, avec des dépenses publiques en baisse, une fois l’inflation déduite, et même des budgets de l’emploi et du logement en baisse tout court, en valeur nominale. Et dans le même temps, ce budget prévoyait la hausse de différents prélèvements. Même chose quelques jours plus tard pour le budget de la Sécurité sociale.

Durant l’été, le Premier ministre François Fillon avait rejeté de façon catégorique la perspective d’un plan de relance bien que l’économie française ait déjà connu une croissance négative au second trimestre 2008. La priorité restait de limiter les déficits publics afin de corriger les dérapages causés par le paquet fiscal de 2007. Et le paquebot budgétaire conçu à ce moment-là continuait sur sa lancée. Au fil des semaines, cette politique de rigueur devenait d’autant plus surréaliste que parallèlement des sommes énormes étaient affichées pour venir en aide au secteur bancaire.

Le plan annoncé par Nicolas Sarkozy corrige donc enfin de façon significative la mauvaise trajectoire budgétaire sur laquelle la France était engagée. Les 26 milliards d’euros sur deux ans revendiqués officiellement pour ce plan n’ont cependant rien d’extraordinaire : ils représentent une dépense supplémentaire de 0,7 % du PIB sur chacune de ces deux années. De plus, comme toujours, quand on en connaîtra le détail de façon précise, on se rendra probablement compte que ce volume affiché inclut nombre de mesures d’ores et déjà engagées ou prévues. A titre de comparaison, les pouvoirs publics des Etats-Unis ont investi cette année 2,5 % du PIB pour soutenir l’activité, et Barack Obama prépare pour 2009 des mesures encore plus ambitieuses… Et parmi les mesures annoncées par Nicolas Sarkozy, très peu sont liées au final à la transformation écologique des modes de consommation et de production. Comme cela avait déjà été le cas à la fin de l’été lors des débats sur les bonus-malus écologiques et les écotaxes, ceux qui, au sein de la majorité, souhaitaient mettre la « croissance verte » au cœur de la politique de relance n’ont manifestement pas été entendus.

Parallèlement, les mesures à portée sociale, de nature à soulager immédiatement les Français qui sont le plus en difficulté, restent elles aussi très limitées : au lieu par exemple d’augmenter le niveau des minima sociaux, qui ont perdu ces dernières années beaucoup de pouvoir d’achat, le gouvernement se contentera de verser une prime unique de 200 euros aux titulaires de minima sociaux (soit 760 millions d’euros, 3 % du total du plan de relance…Smilie: ;). De même, les mesures annoncées en matière d’aide à la création d’emplois ne vont guère dans le sens d’améliorer la qualité desdits emplois puisqu’elles consistent à renforcer, une fois de plus, les exonérations de charges à proximité du Smic, responsables de la « trappe à bas salaire » qui bloque de plus en plus de salariés au bas de l’échelle des rémunérations.

Bref, si ce plan infléchit utilement la politique budgétaire restrictive engagée jusque-là, on reste très loin d’un new deal à la française. L’annonce en solo de ce plan marque également l’échec d’une politique européenne concertée de soutien à l’économie réelle. Contrairement à ce qui s’était passé pour les banques, le volontarisme du chef de l’Etat n’a pas réussi cette fois à entraîner l’ensemble de l’Union. Il faut dire qu’après le cavalier seul du paquet fiscal en 2007, le soupçon de laxisme populiste en matière budgétaire était très fort chez nos voisins à l’égard de Nicolas Sarkozy. Le refus du gouvernement d’Angela Merkel d’agir pour relancer de façon significative la demande intérieure outre-Rhin risque toutefois de limiter encore plus les effets du plan français.

Guillaume Duval

 

04 Décembre 2008

 

About GhjattaNera

prufessore di scienze economiche e suciale a u liceu san Paulu in Aiacciu

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