Arté- Le visage

4 mars 2009 0 Par caroline-sarroul

Regardez   : 

http://www.arte.tv/fr/Videos-sur-ARTE-TV/2151166,CmC=2315688.html

Emmanuel Lévinas

« Quelle que soit sa contenance, le visage de l’Autre expose à mon regard la plus extrême faiblesse présentée dans toute sa nudité. Il éveille en moi le désir de meurtre, et à la fois, « est ce qui nous interdit de tuer ». J’ai le désir d’anéantir cette vulnérabilité dans laquelle je me reconnais et en même temps le devoir de la protéger. L’« épiphanie » d’autrui, dans son visage, engage immédiatement ma responsabilité. Aussitôt que l’autre me regarde, il m’incombe d’assumer sa faiblesse, sa fragilité et sa vulnérabilité. La relation qui s’établit, « constitue le fait originel de la fraternité » et engage ma liberté. « Je suis responsable d’autrui sans attendre la réciproque, dût-il m’en coûter la vie. La réciproque c’est son affaire ». Dans ma relation à autrui l’éthique se doit d’être élevée au niveau d’un absolu qui règle mon existence avec une rigueur inébranlable. »                                                                                                            

(Nb: Le visage est donc à la fois, par son évidence de vulnérabilité, appel au meurtre et injonction de ne pas tuer. Précision sur le meurtre : c’est une volonté de négation absolue.Cette volonté ne peut s’éveiller que vis à vis de ce qui échappe toujours. Il faut en ce sens distinguer le désir de tuer un animal et le désir de meurtre (le meurtre d’autrui  est en même temps l’aveu qu’autrui nous  échappe irrémédiablement (puisqu’il faut le tuer pour en finir) C’est l ‘aveu d’impuissance fondamentale. Lévinas pointe cette dialectique et souligne qu’au cœur du meurtre il y a l’expérience de ce qui fonde aussi l’interdiction du meurtre. Le visage est littéralement désarmant. Il est un appel, une demande qui est un ordre ( comme on dit à quelqu’un « qu’on le demande. Le visage parle, il dit l’interdit du meurtre et le devoir de responsabilité. ET Lévinas souligne qu’il est difficile de se taire en présence de quelqu’un ( « Il faut parler de quelque chose, de la pluie du beau temps, peu importe, mais parler, répondre à cette présence vivante » ).Lévinas souligne que symboliquement  répondre à l’autre homme c’est déjà répondre de lui , le prendre en charge.) 

D’où

Une éthique sans liberté 

 La responsabilité dépossède le moi de sa souveraineté. Le rapport à autrui  destitue l’homme de sa liberté.Je ne suis pas libre ou non de répondre à cet appel ; je ressens fondamentalement cette responsabilité. J’y suis obligé.

Pour Lévinas, si l’Ethique est fondée sur une libre décision elle est  un lieu de plus où règne le moi et ses modes d’appropriation du monde. Par contre si le ressort de l’éthique est un appel et une obligation fondamentale, le moi perd en autonomie et fait l’expérience de quelque chose qui lui vient d’au-delà de lui-même et qui lui résiste. La responsabilité pour autrui n’est pas une responsabilité que je prends à son égard.Elle se situe en deçà de toute liberté. Je fais l’épreuve de cette responsabilité avant d’avoir pu la décider, elle s’impose à moi. Là est l’expérience de la présence d’autrui. Autrui ne se distingue pas chez Lévinas de cette expérience fondamentale de ma responsabilité envers lui.

Le face à face est de nature essentiellement dissymétrique : je suis otage.La responsabilité envers autrui me prend en otage, l’autre est d’emblée placer plus haut que moi , ma responsabilité envers lui m’accable même si je fais tout pour me raisonner et retrouver ma maîtrise par des arguments qui veulent calmer mon scrupule « ce n’est pas ton affaire…. » ;  «Il y a des gens payés pour s’occuper de ces malheureux… », où encore,  « ce sont tous des faignants, des bons-à -rien ».S ‘éprouver sujet et irremplaçable dans l ‘épreuve de la responsabilité. Cette passivité absolue du sujet qui éprouve sa responsabilité envers autrui est ce qui ouvre le moi sur un autre que lui. Le moi sort de sa solitude princière mais, en même temps, c’est dans le sentiment de responsabilité envers autrui que le moi  se sent irremplaçable. Personne ne saurait le remplacer, cette responsabilité envers et pour autrui est sa suprême dignité de sujet. Je suis unique en tant que responsable, là est mon identité inaliénable de sujet « ma responsabilité est incessible personne ne saurait me remplacer La responsabilité est ce qui exclusivement  m’incombe  et que humainement je ne peux refuser. Je suis sujet dans la mesure où je suis responsable. Je puis me substituer à tous mais nul ne peut se substituer à moi.  Il y a un infini de l’exigence éthique,  une disproportion, elle est insatiable, elle comprend une exigence de sainteté .