L’Etat est-il plus à craindre que l'absence d'Etat ?

8 avril 2009 0 Par caroline-sarroul

I. En un sens oui, car si l’absence d’Etat est l’état de Nature hypothétique, on peut imaginer comme Rousseau que les hommes y jouissent d’une liberté « totale » qui n’a pour bornes que les force de chacun. Qui dit Etat, dit forcément règles communes, donc limitation de la liberté de chacun pour bénéficier de la protection de la force commune. L’Etat étant un lieu de pouvoir on peut aussi craindre des abus à la mesure de ce pouvoir transcendant, alors qu’à l’Etat de nature, même si certains sont plus forts que d’autres, personne n’incarne une force au dessus et même étrangère aux autres forces. Les anarchistes tiennent pour responsable l’Etat de la violence qu’il déchaîne en interdisant, en forçant à l’obéissance, en posant les individus les uns contre les autres (ta liberté s’arrête à la mienne et la mienne est arrêtée par la tienne), en imposant son intérêt contre l’intérêt général.

II. Mais l’absence d’Etat ce n’est pas nécessairement le bon sauvage solitaire, ou cette société idéale pacifique et raisonnable que vante les anarchistes. On peut penser que sans Etat, c’est comme le pense Hobbes, ce serait la sauvagerie, une guerre de tous contre tous, donc dans ce cas, il vaut mieux l’Etat que le désordre  et la mort. D’autant que si l’homme est insociable, il est aussi sociable, il ne peut pas se passer de la vie en société et celle-ci ne semble pas pouvoir se passer d’une structure, d’un lien vertical, et si ce lien n’est pas celui de la communauté religieuse ou de la communauté primitive, appuyée sur un passé ancestral, une cohésion naturelle ; l’Etat peut-être ce lien. De plus, ce que l’on craint, ce n’est pas l’Etat mais ses dérives possibles que l’on sait très probables au regard de la nature humaine chez les gouvernants et de la société civile (les gouvernés) L’indifférence pour le domaine public, l’individualisme, le culte du bien-être, la passion de l’égalité,  tout cela  fait qu’on exige de plus en plus d’Etat et qu’on s’y intéresse de moins en moins).

 III. L’Etat peut être un BIEN si la sécurité ne passe pas avant égalité et liberté ( cf Rousseau et les gains quand on passe de l’état de nature à l’Etat social), si la société civile joue son rôle de contre-pouvoir et si le citoyen se préoccupe de ses ministres, de son Etat et les autres conditions à respecter pour que la République fonctionne. Mais pour cela, il ne faut pas le craindre plus que l’état de nature ou qu’une société primitive, mais le craindre, dans le sens de s’en méfier, de rester vigilant. Le citoyen a bien deux devoirs : obéir et résister. Il faut le craindre pour ne pas tout attendre de lui, pour préserver le domaine privé, notre bonheur sans quoi on pourrait tomber dans un paternalisme despotique.

(on pouvait aussi faire un II montrant que l’Etat n’est pas à craindre pour la communauté, le citoyen sous certaines conditions ( plutôt Rousseau que Hobbes par exemple) mais III. Il est à craindre pour l’individu dont l’Etat demande le sacrifice en un sens comme toute vie en société cependant ( Schopenhauer))