Les échanges

26 juillet 2009 0 Par caroline-sarroul

 

 

Cette présentation de François Jourde est trés éclairante et résume l’essentiel sur ce thème .

 

 

 

 

Cliquez: 

http://www.slideshare.net/Jourde/echanges-cours-de-philosophie-presentation

 

 

 Pour aller plus loin:

 

Approfondissement: Sur Claude Lévi-Strauss, la nature et les conditions de l’échange:

La parenté définit deux sortes de liens entre les personnes : la consanguinité et l’alliance. Les modalités d’agencement de ces deux notions constituent pour chaque société particulière des ensembles constitués et analysables, qu’on appelle les systèmes de parenté. Le mariage, pour tous les anthropologues qui étudient les règles régissant les rapports humains dans les sociétés (traditionnelles ou non), constitue un rapport contractuel que passent des groupes sociaux entre eux, tout autant (sinon plus) qu’un rapport entre les individus concernés. Lévi-Strauss pose pour principe premier que les règles de mariage, qui définissent les unions recommandées (préférentielles) et les unions prohibées, sont autant de modalités des lois de l’échange.

Elles sont corrélatives des règles de la prohibition de l’inceste en ce qu’elles « représentent toutes autant de façons d’assurer la circulation des femmes et des biens au sein du groupe social, c’est-à-dire de remplacer un système de relations consanguines d’origine biologique par un système sociologique d’alliance », qui garantit ainsi la permanence et la cohésion du groupe social.

L’exogamie est ce qui permet l’échange de biens par les femmes entre les groupes ; elle est fondée par la prohibition de l’inceste, qui à son tour conditionne la possibilité même de l’échange. Ainsi la structure élémentaire de parenté, en d’autres termes ce que Lévi-Strauss appelle « l’atome de parenté », unit nécessairement quatre termes : père, mère, fils et oncle maternel. Il écrit : « Dans la société humaine, un homme ne peut obtenir une femme que d’un autre homme qui la lui cède sous forme de fille ou de sœur ».

   À elle seule, la famille élémentaire ne saurait constituer la parenté ; il lui faut établir une relation supplémentaire, la relation d’alliance. Lévi-Strauss distingue deux formes d’échange : l’échange restreint et l’échange généralisé.

Dans les deux cas, les deux groupes mis en relation contractent, en vertu du principe de réciprocité, une série d’obligations mutuelles dont la durée n’est pas précisée. Ce sont les prestations et les contre-prestations de biens ou de valeurs de prestige.

Définition de l’échangeL’essentiel dans la prestation et la contre-prestation est leur caractère réciproque, que traduit l’échange. On peut donc en réalité distinguer trois modes d’échange : 1° l’échange de biens. Les prestations et les contre-prestations peuvent s’effectuer simultanément ; mais, comme ce système suppose des liens durables entre les deux groupes contractants, elles peuvent s’étaler dans le temps, et il se peut que l’équilibre entre les deux parties ne soit atteint qu’au bout d’un certain temps ;2° l’échange de femmes, qui constitue la base de ce que Lévi-Strauss appelle l’« échange restreint » ;3° l’échange de biens contre des femmes, qui constitue à ses yeux l’« échange généralisé ».

1. L’échange restreint

Lévi-Strauss montre, à la suite des travaux de James George Frazer (1854-1941), Elkin et Alfred Reginald Radcliffe-Brown (1881-1955), que le type idéal est le mariage symétrique simultané des cousins croisés, c’est-à-dire le cas où un frère et une sœur épousent simultanément leurs cousins croisés qui seraient également frère et sœur. Le cas classique de ce type d’échange se trouve dans certaines tribus australiennes, notamment chez les Arendas, ou encore chez les Karieras. Dans un tel cas de figure, la société est divisée en deux moitiés (cela implique que cette société se caractérise par une division de type dualiste), qui peuvent à leur tour se subdiviser chacune en deux sous-groupes. Ou les deux moitiés sont exogames, et leurs sous-groupes le sont également ; ou elles sont endogames, et c’est leurs sous-groupes qui sont exogames. Dans ce dernier cas, les sous-groupes sont reliés deux à deux et cette relation duelle inclut à la fois l’échange simultané des femmes et l’échange de dons et contre-dons (ou services et contre-services).

   La thèse de Lévi-Strauss est de montrer que ce système, dit restreint, n’est qu’un cas particulier de l’échange généralisé. Il apparaît toujours selon lui en liaison avec une organisation tripartite. Quand les Bororos décrivent à Lévi-Strauss leur système de parenté, ils montrent que leur société est de type bipartite ; mais en réalité la description du fonctionnement fait apparaître une troisième entité. Chez les Bororos, deux moitiés exogamiques (matrilinéaires, dans ce peuple) se subdivisent en quatre clans exogamiques, eux-mêmes recouvrant trois sous-fractions : supérieure, moyenne et inférieure. Or un membre dans une fraction supérieure d’une moitié ne peut épouser dans l’autre moitié que la fraction supérieure : cela fait que le type dualiste de l’organisation n’est qu’apparent. Le mode de fonctionnement recouvre en réalité une organisation de type tripartite : supérieur, moyen et inférieur. Chaque groupe n’ayant aucun lien de parenté avec les deux autres, ce sont trois groupes endogames qui existent en fait dans l’échange.

2. L’échange généralisé

Il faut en fait revenir sur les deux types de cousins croisés des Bororos. Cette structure repose sur trois classes d’individus : 1° le sujet pris en référence, avec son groupe apparenté ; 2° les cousins croisés dont seule l’ascendance par les femmes est prise en compte pour la transmission du nom, du statut, de l’appartenance à une unité sociale (clan, sous-groupe, etc.) : ce sont les cousins croisés matrilinéaires ; 3° les cousins croisés dont l’ascendance prise en compte est celle des hommes : ce sont les cousins patrilinéaires. Lévi-Strauss, en reprenant les travaux de certains anthropologues comme Radcliffe-Brown, montre que les échanges préférentiels se situent entre plusieurs groupes, qui constituent ensemble autant d’étapes dans une relation circulaire fermée dans l’échange des femmes et des biens : A donne des femmes à B, qui en donne à X, qui en donne à A. Cette structure à trois n’est pas limitative ; un nombre croissant de groupes peut être intégré à cette relation. C’est pourquoi Lévi-Strauss l’appelle échange généralisé.