Existe-t-il des imbéciles heureux ?

18 novembre 2009 0 Par caroline-sarroul


Un imbécile, c’est celui qui manque de force physique ou intellectuelle, c’est donc un faible par le corps ou l’esprit. Mot d’articulation : bonheur. Le sujet présuppose qu’il y a des imbéciles identifiables et que l’imbécillité n’est donc pas relative comme le bonheur d’ailleurs.

I. l’imbécillité préserve des conséquences douloureuses du raisonnement et du jugement, elle permet de s’éviter quelques déplaisirs et d’arriver à plus de plaisir : l’imbécile vit bien

on peut penser qu’il en existe, parce qu’ils sont préserver des souffrances de la conscience ( de notre finitude, de notre responsabilité en tant qu’être libre et pensant) et de l’usage de la raison qui est source d’insatisfaction : on n’en sait jamais assez, on doute et on est tiraillé entre les injonctions de la raison et nos désirs.

II. mais le bonheur n’est pas que le plaisir, c’est un état de pleine et entière satisfaction OR  les imbéciles ont des hommes et en tant que tels, ils ont sans doute leur frustration, sauf que si leur jugement est limité, ils ne peuvent comprendre les raisons de cela. Ils souffrent d’un mal qu’ils peuvent s’expliquer ni corriger.  Si la connaissance est d’abord douloureuse, elle est  instructive :

– se connaître peut être un moyen de comprendre pourquoi on n’est pas satisfait: désir mimétique,  confusion sur ce qui nous manque vraiment, désir de substitution qu’on découvre en sondant son inconscient chez Freud, être duel à la fois être de raison et être de désir.

– se connaître peut être le moyen de parvenir à davantage de satisfaction :

1. Spinoza et la connaissance de notre nature pour savoir vers quoi on doit orienter « cet effort » qu’est le désir , ne pas confondre nos désirs avec ceux des autres.

2. se connaître peut être le moyen d’accorder ses désirs avec ses possibilités en se rendant compte que tout ne dépend pas de nous, que certains désirs sont hors de notre portée et que s’obstiner à vouloir les réaliser, c’est se condamner à souffrir.

– se connaître, c’est être davantage maître de soi, de ses représentations et par là ne pas être soumis à des peurs ou des angoisses infondées qui troublent notre âme.

3. comme le montre l’Histoire du bon bramin de Voltaire, même si on peut reconnaître que le savant n’est pas plus heureux que la vieille bigote ignorante de tout qui ne s’interroge sur rien, selon Voltaire, il semble difficile voire impossible d’ « accepter le marché de devenir imbécile pour devenir content » même si « c’est être très insensé » que « de préférer la raison à la félicité »

III. Le bienheureux ou celui qui cherche le bonheur n’est pas pour autant pas un imbécile :

– On se contente d’une illusion de bonheur ou d’un bonheur superficiel à la manière d’un imbécile

– Etre heureux c’est en quelque sorte se contenter de ce qui est, ne plus se poser de question ; cela est la définition de la sagesse mais c’est aussi celle de l’imbécillité. Le béat a un visage proche de l’imbécile.

la vraie intelligence est peut-être de renoncer au bonheur pour d’autres buts plus adaptés à notre nature : on peut vouloir autre chose que d’être heureux , soit parce qu’être heureux ferait finalement notre malheur ( Rousseau, « le gros plein d’être » de Sartre), soit parce que le bonheur n’étant qu’un idéal de l’imagination, il est vain et déraisonnable de viser un inaccessible, il vaut mieux lui préférer le plaisir ou la joie, c’est ce que propose Spinoza avec son éthique de la joie et à ce moment là l’intelligence joue un rôle essentielle pour accéder à cette satisfaction : compréhension de la nécessité, de notre nature et orientation du désir vers des objets dignes de ce désir, utiles.