Texte de Popper sur la science

5 mai 2010 0 Par Caroline Sarroul

Texte de Popper ( père du falsificationnisme, courant de pensée sur la science du XX qui a succédé au positivisme triomphant du XIX ème siècle incarné par Auguste Comte) qui pourrait servir aux élèves de S qui peuvent s’attendre à un sujet sur la science, peut-être le texte, sachant qu’au bac 2009, la science était tombée en sujet de dissertation sur le thème des limites de la vérité et de la connaissance scientifique:

 « Nous pouvons, si nous le voulons, distinguer trois étapes différentes au cours desquelles pourrait être réalisée la mise à l’épreuve d’une théorie. Il y a, tout d’abord, la comparaison logique des conclusions entre elles par laquelle on éprouve la cohérence interne du système. En deuxième lieu s’effectue la recherche de la forme logique de la théorie, qui a pour objet de déterminer si elle constituerait un progrès scientifique au cas où elle survivrait à nos divers tests. Enfin, la théorie est mise à l’épreuve en procédant à des applications empiriques des conclusions qui peuvent en être tirées. Le but de cette dernière espèce de test est de découvrir jusqu’à quel point les conséquences nouvelles de la théorie quelle que puisse être la nouveauté de ses assertions font face aux exigences de la pratique, surgies d’expérimentations purement scientifiques ou d’applications techniques concrètes. Ici, encore, la procédure consistant à mettre à l’épreuve est déductive. A l’aide d’autres énoncés préalablement acceptés, l’on déduit de la théorie certains énoncés singuliers que nous pouvons appeler « prédictions » et en particulier des prévisions que nous pouvons facilement contrôler ou réaliser. Nous essayons ensuite de prendre une décision en faveur (ou à l’encontre) de ces énoncés déduits en les comparant aux résultats des applications pratiques et des expérimentations. Si cette décision est positive, c’est-à-dire si les conclusions singulières se révèlent acceptables, ou vérifiées, la théorie a provisoirement réussi son test : nous n’avons pas trouvé de raisons de l’écarter. Mais si la décision est négative ou, en d’autres termes, si, les conclusions ont été falsifiées, cette falsification falsifie également la théorie dont elle était logiquement déduite. Il faudrait noter ici qu’une décision ne peut soutenir la théorie que pour un temps car des décisions négatives peuvent toujours l’éliminer ultérieurement. Tant qu’une théorie résiste à des tests systématiques et rigoureux et qu’une autre ne la remplace pas avantageusement dans le cours de la progression scientifique, nous pouvons dire que cette théorie a « fait ses preuves » ou qu’elle est « corroborée ». »

Karl Popper, La logique de la découverte scientifique (1934)

Questions :

1. Dégagez et expliquez les 3 étapes qui permettent selon Popper d’évaluer une nouvelle théorie scientifique (5 pts)

2. Expliquez :

a. en quoi  « la procédure consistant à mettre à l’épreuve est déductive » (2 pts)

b. si dire que  la théorie est « corroborée », c’est dire qu’elle est vraie. (3 pts)

Réponses:

1. pour évaluer une nouvelle théorie scientifique, on passe, selon Popper, par 3 étapes :

  • On évalue la cohérence interne de la théorie : il s’agit de repérer des erreurs éventuelles dans le raisonnement, dans les inférences, c’est-à-dire la manière de tirer d’une proposition une autre proposition.
  • On évalue la cohérence externe de la théorie avec d’autres théories: il s’agit de voir ce qu’apporte cette théorie par rapport à ce qu’on sait déjà. Il s’agit d’évaluer ce qu’apporte cette théorie, si c’est un progrès ou un recul. Si cette théorie est plus complexe par rapport à une autre plus simple mais permettant d’expliquer les mêmes choses, on va renoncer à la nouvelle et garder l’ancienne. Si la nouvelle permet d’expliquer plus de choses, est plus précise, on va la préférer à l’ancienne. On évalue la pertinence, l’intérêt théorique de la théorie.
  • On évalue la correspondance de la théorie par rapport au réel. On va faire des tests pratiques pour évaluer la capacité de la théorie à prévoir et expliquer les faits, à agir sur la réalité. On évalue alors son intérêt pratique.

Si la théorie passe ces 3 « tests » on va considérer non pas qu’elle est vraie, mais qu’elle est possible et « corroborée », c’est-à-dire que jusqu’à présent, toutes les expérimentations et applications techniques faites marchent, réussissent.

Mais « faire ses preuves »  est différent d’ « être prouvée », dans le sens où on n’a pas pu faire toutes les expérimentations concernées par la théorie, ni toutes les applications techniques ET dans le sens où on n’est jamais sûr que cette bonne descriptions soit la seule et bonne explication du réel.

2. a) Une déduction, c’est un raisonnement qui va du général au particulier ; c’est le contraire d’une induction, où on va du particulier (expérience de plusieurs cas) au général (une loi). La procédure de test est déductive parce que de la théorie générale (énoncé général de départ), on va déduire des cas où la loi devrait s’appliquer (des énoncés particuliers). Pour tester le principe d’Archimède, on prévoit qu’un bouchon de liège devrait flotter et on teste ce cas. Si les cas particuliers prévus ont lieu, on pourra dire que la théorie est « vérifiée », « a fait ses preuves ».

    b) dire que la théorie est « corroborée » signifie que dans tous les cas particuliers testés, les prévisions faites à partir de la théorie ont été vérifiées. Cela permet de dire que la théorie est vérifiée pour ces cas là, mais on ne peut pas pour autant affirmer que la théorie est pour autant vraie. Car pour cela, il aurait fallu tester toutes les prévisions qu’elle permet de faire ce qui est impossible. Donc elle est vérifiée pour l’instant, « vraie » relativement aux cas testés, mais elle n’est pas vraie absolument. D’autant plus qu’il est possible que dans un cas non encore testé, elle ne soit pas vérifiée. Donc elle n’est pas vraie, elle est pour l’instant non-falsifiée, ce qui est différent.