L’introduction

14 juin 2010 2 Par Caroline Sarroul

L’introduction comme son nom l’indique doit conduire (ducere) dans ( intro).

Elle doit donc amener au coeur du sujet et de son problème. Ce qui signifie qu’elle ne peut commencer par le sujet, ni par des généralités ( tout homme … , depuis le début de l’humanité…, les hommes ont toujours… ).

Il n’y a pas de méthode officielle de l’introduction, mais des attentes communes à tous les profs de philo: ils attendent toujours une définition des principaux termes du sujet, que l’on pose un problème et parfois que l’on annonce son plan!

Mais ils ne disent pas toujours comment le faire concrètement, dans quel ordre!

 

Voilà une structure possible:

 

1. Définir un des termes principaux du sujet sur lequel vous allez vous appuyer pour faire émerger un problème, parce que ce terme a un double sens et que suivant le sens, il permet de donner une réponse différente au sujet et donc de faire naître une contradiction, une tension, un problème. Au temps 1, donnez donc le premier sens de ce mot, sa première définition claire et précise

……………………., c’est d’abord…………………………….

2. Au temps 2, énoncez la réponse que cela vous permet de donner à ce sujet ( cette première réponse est celle qui sera l’axe de votre futur I, elle doit donc être dépassable, c’est-à-dire immédiate, commune et assez faible). C’est l’énoncé de la réponse immédiate qui doit être justifiée par un argument ou un exemple.

Dans ce cas, on pourrait penser que………………………………………….

  • Mettez cette première réponse au conditionnel puisqu’elle est vouée à être dépassée!

3. Au temps 3, précisez que si on utilise le second sens de ce mot ( que nous appelerons le mot d’articulation, car c’est lui qui vous permet de construire I et II) on abtient une réponse « contradictoire » avec la précédente. Là aussi prenez bien le temps de préciser cette seconde définition et d’expliciter la nouvelle réponse obtenue

Mais,…………………… c’est aussi ……………………, et dès lors, on peut désormais penser que …………………………….

4. Ces 2 réponses « contradictoires » justifient que l’on se pose le sujet:

Aussi on peut se demander si …………………….

  • Attention!  Il faut reprendre le sujet tel qu’il vous a été donné, sans changer un mot !

5. Vous pouvez désormais reformuler le sujet, ce qui est en jeu, ce qu’on appelle un problème: c’est à dire une difficulté, une tension

C’est donc du problème de ………………………… dont nous allons traiter

6. Ce 6èmè temps dépend de votre III :  si le III prolonge le II, si le III joue sur un autre mot d’articulation et propose un nouveau renversement-dépassement du II, ce temps 6 est inutile.

Par contre, si vous voulez en III remettre en question le sujet et par là remettre en question l’ensemble du sujet et de votre devoir, alors ici il faut annoncer ce que présupposait le sujet ! Il s’agit simplement de faire remarquer que le sujet se pose si et seulement si on présuppose que, c’est-à-dire si on admet que…

Mais se poser ce problème, c’est cependant présupposer que …..

  1.  Attention! Ne commencez pas ici au temps 6 de l’intro à critiquer le ou les présupposés, sans quoi l’intro est à peine finie que le problème ne se pose même plus! Il faut absolument attendre le III pour exposer vos critiques et saper le sujet par la base.
  2. Attention! Ne confondez pas ce que présuppose le sujet et ce qu’il suggère: ce qu’il suggère, c’est plutôt une réponse plutôt qu’une autre, en général la réponse immédiate ou qu’une autre réponse est possible ( heureusement ceci dit,  sans quoi, il n’y aurait pas de problème!!). Ce que présuppose le sujet, ce n’est pas une réponse, mais c’est une ou des réponses à d’autres questions que celle ci!! Et sans ces réponses, cette question ne se poserait pas!!

7. Au temps 7, vous n’avez plus qu’à annoncer votre plan, avec 3 questions de préférence…

  • Attention! Les questions doivent être enchaînées ( sans tirets, ni retour à la ligne) et elles doivent formées une progression.

 

Voilà donc une méthode possible!

Prenez en tout cas bien votre temps en intro ( 15-20 lignes, c’est un minimum!)

Et n’oubliez pas que tous les autres termes du sujet devront avec la même précision être définis par la suite!

 

Voici quelques exemples:

Peut-on penser sans préjuger ?

 1 Préjuger, c’est se décider sur une question  avant de l’avoir approfondie, avant d’avoir connaissance de tout ce qui doit servir à la résoudre, avant d’avoir pu vraiment jugé. 2. En ce sens, comme penser, c’est réfléchir,  juger,  il semble possible de penser sans préjuger, il semble même qu’il ne puisse y avoir de véritable pensée qu’à cette condition. « Penser,  c’est dire non » disait Alain et non d’abord à tout ce qui est cause de préjugé : le monde, le tyran, le prêcheur, la foule, les sens, … 3. Mais préjuger, cela pourrait aussi être:  avoir déjà jugé,  avoir déjà exercé son jugement, et il semble qu’une pensée ne puisse se construire sur rien, il faut bien qu’elle s’appuie sur quelque chose. Dès lors toute pensée présupposerait un travail de jugement préliminaire, des vérités posées. Comme le dit le même Alain, si je pense car je pars du principe que “ce que je crois ne suffit pas”, que le préjuger est insuffisant,  mais cette  “incrédulité est de foi stricte”. Autrement dit à l’incrédulité, je dis oui, je ne doute pas de mon doute, je fais même du doute, comme de la rigueur, de la cohérence, de l’universalité, des  conditions de la pensée. Et, cela est affirmé, préjugé ! Le philosophe veut parvenir au vrai et rejette l’opinion car il a jugé que la vérité était plus salutaire, digne  que l’illusion et le faux. 4. Aussi on peut se demander si on peut finalement  penser sans préjuger ?  5. C’est donc du problème des conditions d’existence de la pensée et de la place du préjuger en elle dont nous allons traiter. 7.  Nous l’aborderons en nous demandant si penser n’est pas par définition renoncer au préjuger, si pour autant on peut penser en remettant sans cesse tout en question et sur du vide, et  si la nécessité  du contraire peut suffire à justifier qu’on renonce à penser pour ne pas préjuger?  

Peut-on être soi-même avec les autres ?

(1)Etre soi-même, c’est d’abord accorder son être avec son paraître, se donner à voir aux autres tel que l’on est, rester fidèle à soi. (2) Or il semble bien difficile de rester toujours  fidèle à soi quand les autres sont là. Souvent, nous nous taisons ou même mentons pour ne pas froisser les autres ; nous abandonnons un comportement naturel pour jouer la comédie ou nous forçons à paraître ce que nous ne sommes pas pour être accepté, intégré, aimé ou parce que cela correspond à notre moi social, à ce que nous sommes pour les autres…. (3) Mais être soi-même, ce n’est pas seulement paraître tel que l’on est, c’est aussi et surtout  être ce que l’on est, être soi pour soi. Or,  lorsque je triche pour plaire, par exemple, je ne suis pas moi-même parce que je ne fais pas ce que je pense me plaire, mais ce besoin de plaire n’est-ce pas moi, et peut-être même davantage moi que cet acte que je me suis interdit de faire. Aussi au moment même où je pense ne pas être moi-même, je reste moi en n’étant plus moi-même et il se pourrait même que je sois en réalité moi-même. Et dans ce cas, le rapport à l’autre ne m’a pas empêché d’être moi  et m’a peut-être même permis  d’être moi-même, m’a  révélé qui je suis. Donc la présence des autres n’apparaît plus comme un obstacle  pour être soi-même. (4) Aussi on peut se demander si on  peut être finalement  soi-même avec les autres? (5) Nous aborderons donc ce problème des conditions pour être soi-même, de la place des autres dans celles-ci. (6) Mais poser  cette question, c’est aussi présupposer que l’on peut être comme ne pas être soi-même et que les autres sont  la seule chose qui nous empêche d’être nous-même. (7) Nous traiterons donc de ce problème en nous demandant si  les autres ne sont  pas ce qui m’empêche d’être moi-même ? Si face à eux,  je ne suis plus du tout moi et si les abolir, c’est pour autant me retrouver et être en accord interne avec moi : sont-ils vraiment le seul obstacle pour que je sois moi-même ? Ne sont-ils que des obstacles ?

Peut-on vouloir ne pas être conscient ?

 (1)Vouloir, c’est d’abord désirer. On désire ce qu’on n’a pas, ce qu’on n’est pas. (2)La conscience étant ce qui différencie l’homme de l’animal, l’homme ayant le privilège, selon Kant, de « posséder le je dans sa représentation », on peut donc comprendre qu’étant conscient, il puisse désirer ce qu’il n’est pas : être dans l’inconscience, être inconscient, c’est-à-dire ne plus présent à soi et au monde, ne plus être pour soi. Et, on peut d’autant plus le comprendre que la conscience a pour conséquence la responsabilité. Une responsabilité qui fait qu’on peut se sentir fier, mais aussi coupable et paralysé. Donc, on peut, face au poids des responsabilités souhaiter être inconscient, retourner à l’insouciance de l’enfant ou goûter à l’innocence du fou. (3) Mais, si vouloir, c’est d’abord désirer, c’est  aussi délibérer sur ce désir qui se présente, c’est-à-dire peser le pour et le contre, analyser les conditions de sa réalisation. Or  il semble difficile, même si le confort apparent de l’inconscience est tentant, de vouloir se lancer dans un projet qui, si on l’analyse, se révèle presque mort-né, car de même que devenu adulte, je ne peux plus être enfant  et qu’étant sain d’esprit , je ne puis volontairement être fou , il semble impossible qu’en étant conscient, je puisse  jouer l’inconscient. (4) Alors l’homme peut-il vraiment vouloir l’inconscience ? (5) C’est  donc du problème de la nature du  rapport de l’homme et sa conscience et des limites de notre volonté face à celle-ci, dont nous allons traiter. (6) Mais poser cette question, c’est aussi présupposer que si l’inconscience peut être désiré c’est parce que la conscience est, elle, déjà là, première, acquise et pleine et que si on a la capacité de vouloir l’inconscience, on en a aussi le droit, comme le suggère le double sens de « peut-on ». (7) Nous aborderons donc ce problème en traitant les questions suivantes : au regard de ses avantageuses conséquences, ne peut-on pas désirer l’inconscience ? Peut-on pour autant en  faire un réel objet de volonté ? Et, même si l’homme le pouvait, ne serait-ce pas un excès de zèle, discutable au regard de ce qu’il se doit d’être et de ses devoirs ?

Faut-il être seul pour être soi-même ?

 (1)Etre soi-même, c’est d’abord accorder son être avec son paraître, se donner à voir aux autres tel que l’on est, rester fidèle à soi. (2) Or il semble bien difficile de rester fidèle à soi quand les autres sont là. Souvent, nous nous taisons ou même mentons pour ne pas froisser les autres ; nous abandonnons un comportement naturel pour jouer la comédie ou nous forçons à paraître ce que nous ne sommes pas pour être accepté, intégré, aimé… Mais dès que les autres s’en vont, que nous retrouvons seul physiquement, sans entourage nous pouvons regretter de ne pas avoir été nous-même et semblons cesser de jouer la comédie. (3) Mais peut-on réellement, quand nous ne trichons plus, prétendre que  nous sommes nous-mêmes. Car être soi-même, ce n’est pas seulement paraître tel que l’on est, c’est aussi et surtout être ce que l’on est. C’est-à-dire être de fait pour soi ce que l’on est en soi. Ce qui présuppose que l’on se connaisse réellement et que ce que l’on pense être s’accorde avec ce que l’on est. Lorsque je triche pour plaire, je ne suis pas moi-même parce que je ne fais pas ce que je pense me plaire, mais ce besoin de plaire n’est-ce pas moi, et peut-être davantage moi que cet acte que je me suis interdit de faire. Aussi au moment même où je pense ne pas être moi-même, il se pourrait que je sois en réalité moi-même. Et dans ce cas, le rapport à l’autre m’a permis  d’être moi-même, m’a  révélé qui je suis. Donc l’absence des autres n’apparaît plus nécessaire, ni suffisante pour être soi-même. (4) Aussi on peut se demander s’il faut être seul pour être soi-même ? (5) Mais poser cette question, c’est aussi présupposer que l’on peut être comme ne pas être soi-même et que l’autre ne peut être qu’un obstacle pour moi et qu’il est même la seule chose qui, par sa présence, m’empêche d’être moi-même. (6) Nous aborderons donc ce problème des conditions pour être soi-même et de la possibilité même d’être soi-même, (7) en traitant les questions suivantes : les autres ne sont-ils pas ce qui m’empêche d’être moi-même ? Les abolir est-ce pour autant se retrouver et être en accord interne avec soi ? et finalement peut-on et veut-on réellement être soi-même ?

 

L’introduction se fait donc en 7 temps : 

  1. partir de l’analyse d’un des termes principaux du sujet
  2. ramener au contexte du sujet et à la réponse immédiate
  3. montrer une limite de cette réponse en rapport avec un autre sens possible du sujet
  4. poser le sujet sans changer sa formulation
  5. annoncer le problème dont vous allez traiter avec Nous aborderons donc ce problème…
  6. (éventuel!) énoncer le ou les présupposer du sujet avec  Mais poser cette question, c’est aussi présupposer…
  7. annonce de votre plan avec en traitant les questions suivantes