La ville à plusieurs vitesses

Course de caisses à savon, Toulouse, 16 mars 2019, © NJ

Même jour ce samedi 16 mars avenue de la Colonne, le carnaval bat son plein avec la célèbre course de caisses à savon. Des familles fabriquent des engins dans leur garage et viennent participer à la course, sans compétition. J’ai l’impression de me retrouver dans un village.

Course de caisse à savon, Toulouse, 16 mars 2019, © NJ

Le seul Gilet jaune présent s’occupe du service d’ordre de la course afin d’assurer la sécurité du public et des coureurs. En face, une fanfare anime la fête et crée une bonne ambiance : deux banjos, un tuba, un saxophone, une trompette, une flûte traversière, un piccolo, des percus…

Course de caisse à savon, Toulouse, 16 mars 2019, © NJ

Une foule nombreuse dont il ressort que beaucoup sont du quartier proche, de Jolimont à la Colonne, un public plutôt jeune, la plupart vêtus de manière décontractée de jogging,  de sweet ou de pulls un peu trop amples. On y trouve des étudiants, des anciens élèves de l’école d’architecture (comme Cristina Cosma), des anglais, des espagnols. On n’y trouve pas les jeunes d’Empalot, du Mirail ou des Izards, ni les moins jeunes d’ailleurs.

Atelier participatif de Simon, Villa Maricant, © NJ

A quelques dizaines de mètres des festivités, Simon mène son atelier participatif durant la semaine de la médiation organisée par son atelier de projet. Le parc de la Villa Maricant abrite d’anciennes salles de classe, dont une est reconvertie pour le club du troisième âge, et que Simon a investi pour l’après-midi. Dehors, deux couples jouent au Mölkky. Le souci de Simon est de rendre le quartier plus agréable possible en proposant que chacun s’exprime autour de parcelles en friches.

En contre-bas, la ville s’échauffe entre Gilets jaunes et les forces de l’ordre habituées maintenant pour cette dix-huitième semaine à canaliser les sursauts d’humeur qui un temps paraissaient sympathiques et qui aujourd’hui divisent les opinions. Avec mon vélo je passe à travers les cortèges et les policiers, histoire de traverser sans encombre. Partout il y a du monde, mais pas le même, et pas pour les mêmes raisons. Pourtant, tous ces gens font la ville. Je me dis que la ville est à cette image, une mosaïque socio-politique dont les articulations (ce mouvement unique et unifiant) sont encore à dessiner.

Dans cette ville à trois vitesses dont parle Jacques Donzelot, l’auteur se questionne sur cette apparence que la ville devrait faire société, ou aurait dû faire société. A-t-elle fait société un jour, en dehors du Moyen-Age ? Il n’en est plus question et déjà en avril 2004 Jacques Donzelot portait un regard critique sur le devenir de la ville.  « Au lieu d’un mouvement unique et unifiant les espaces de la ville, c’est à l’avènement d’une ville à trois vitesses que l’on assiste : celle de la relégation des cités d’habitat social, celle de la périurbanisation des classes moyennes qui redoutent la proximité avec les « exclus » des cités mais se sentent « oubliés » par l’élite des « gagnants » porté à investir dans le processus de gentrification des centres anciens » (p. 17). Nous sommes en présence de ce que Samuel Balti appelle une fragmentation socio-spatiale.

 

buy windows 11 pro test ediyorum