A l’origine de l’anthropologie urbaine « à la française »

D’après Paul Auster, Le Noël d’Auggie Wren, illustration Jean Claverie, Actes Sud Junior, 1991

 

Maurice Halbwachs (1877-1945) n’est pas considéré comme un anthropologue, en regard de ses travaux sur la ré-interprétation du suicide ou de la mémoire collective. Il est plutôt considéré comme un sociologue, issu de l’école d’Emile Durkheim, père de la sociologie française. Son contemporain Marcel Mauss (1872-1950) est quant à lui le père de l’anthropologie française, neveu d’Emile Durkheim (1858-1917). Il s’agit d’une histoire de famille et ce découpage est très arbitraire.

Dans le travail qui nous occupe, le texte de Maurice Halbwachs peut être considéré comme un travail d’anthropologue, et ceci pour plusieurs raisons que nous allons voir à présent.

Alors que son étude sur le suicide reprend les grandes lignes du travail d’Emile Durkheim, grâce notamment à l’apport des séries statistiques entre la France et l’Allemagne, le texte intitulé Topographie légendaire des évangiles en Terre sainte, rédigé en 1941, s’intéresse à la lecture des évangiles à partir d’une grille d’analyse constituée sur la base de ses travaux portant sur la mémoire collective. Il s’agit concrètement d’un travail de relecture de textes sacrés et de textes anciens, à travers lesquels, Maurice Halbwachs cherche à positionner topographiquement les grands événements de la vie du Christ, de sa naissance à sa mort. Il y a un très gros travail de traduction de textes anciens, et un croisement des données des évangiles dans une lecture historique des faits.

Ce texte porte sur une réflexion historiographique, c’est-à-dire, de « comment on écrit l’histoire », et une réflexion épistémologique, c’est-à-dire, de « comment on écrit la connaissance ». Mais il explique aussi sa démarche et sa méthode, ce que beaucoup d’auteurs n’ont pas interrogé car portés plutôt sur les résultats en histoire des religions.

Le but du cours magistral sera de mettre à plat ces données et de les articuler avec des textes plus récents, faisant appel à cet ouvrage. Nous utiliserons pour l’occasion trois textes disponibles en version PDF, classés par ordre chronologique.

Mazzella Sylvie, « La ville-mémoire. Quelques usages de La mémoire collective de Maurice Halbwachs », in Enquête, 4/1996, La ville des sciences sociales, pp. 177-189

Bulle Sylvaine, « Espace et mémoire collective à Jérusalem », Annales HSS, 3, 2006, pp. 583-606

Bernier-Farella Hélène, « Maurice Halbwachs, la Topographie légendaires des évangiles en Terre sainte. Etude de mémoire collective », Revue de l’histoire des religions, 1/2012, pp. 131-133

Et bien sûr,

Halbwachs Maurice, Topographie légendaire des évangiles en Terre sainte. Etude de mémoire collective, (1941), coll. Quadrige, Paris : PUF, 2017

La version d’origine du texte de Maurice Halbwachs est disponible sur le site ssoar.

Outre le travail d’ethnologue en cabinet, propre à toute une génération d’ethnologues de l’époque, y compris de Marcel Mauss en France, ou de James  George Frazer (1854-1941) en Ecosse (à qui l’on doit le cycle du Rameau d’Or), Maurice Halbwachs est allé sur le terrain deux fois pour mener son enquête (qui a duré cinq jours en tout). Or, le terrain est ce qui fait l’ethnologue. Maurice Halbwachs s’est rendu à Jérusalem et dans la région, et a visité les « prétendus » endroits de la destinée du Christ. Il s’est entretenu avec la communauté chrétienne et à mener des observations in situ. En faisant cela, il fait de l’ethnographie. Cette démarche qu’il initie bien après son expérience au contact de l’Ecole de Chicago, lorsqu’il rédige le texte intitulé « Chicago, expérience ethnique », en 1932, publié dans l’ouvrage L’école de Chicago d’Yves Grafmeyer & Isaac Joseph, nous permettra de rebondir sur une ethnologie urbaine en devenir…

Grafmeyer Yves & Joseph Isaac, L’école de Chicago. Naissance de l’écologie urbaine, Alençon : Ed. Aubier, 1990

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