L’altérité en question

La Halle de la Machine, cette semaine à Montaudran

En cherchant à partir des mots clés sur ce blog, je me suis rendu compte que le mot « altérité » ne renvoyait à aucun billet. Alors que l’on parle à tout bout de champ de l’autre, de notre rapport à l’autre, et des autres, puisque dans nos interactions, nous agissons avec les autres, il était important à un moment donné de parler d’altérité, et de revenir sur cette notion fondamentale des sciences sociales.

Hérodote d’Halicarnasse naît vers 480 av. J.-C. en Grèce. À l’âge adulte, il s’interroge sur l’espèce humaine et effectue de nombreux voyages à la rencontre de peuples tous plus bizarre les uns que les autres. Il note ses observations dans des carnets, sortes de récits de voyages et constitue son œuvre que l’on nomme les enquêtes (L’enquête). La bibliothèque de la Pléiade (éditions Gallimard) a regroupé les œuvres complètes d’Hérodote et de Thucydide dans un même volume de 1876 pages. Parmi les neuf enquêtes qu’il a rassemblées sur XX années. Une œuvre incomplète, mais qui apparaît aujourd’hui comme la première enquête ethnographique (chaque discipline de l’histoire à la géographie s’approprie Hérodote). 

L’enquête II porte sur l’Égypte. Un texte fameux que l’on donne généralement aux étudiants de licence d’ethnologie et qui regroupe en quelques pages tous les a priori d’une lecture comparative entre le mode de vie des Grecs et celui des Égyptiens. Le paragraphe sur la coutume des Égyptiens est éloquent :

« Les Égyptiens […] ont aussi, en général, des coutumes et des lois contraires à celles du reste du monde. Chez eux, les femmes vont au marché et font le commerce, les hommes gardent la maison et tissent. Partout l’on tisse en menant la trame de bas en haut : les Égyptiens la mènent de haut en bas. Les hommes portent les fardeaux sur leur tête, les femmes sur leurs épaules. Pour uriner, les femmes restent debout, les hommes s’accroupissent. Ils satisfont leurs besoins dans leur maison, mais ils mangent dans la rue, ce qu’ils expliquent en disant que, si les nécessités honteuses du corps doivent être dérobées à la vue, les autres doivent se faire en public. »

Il s’ensuit la religion, les sacrifices, nous sommes avant l’ère chrétienne.

Ce qu’il faut retenir pour comprendre la notion d’altérité, c’est qu’à un moment de l’histoire, les hommes d’une société donnée se sont intéressés aux hommes d’une autre société, et plutôt que de faire la guerre ils ont observé les coutumes, les modes de vie et les traditions. Ils ont mis en avant les différences, et en ont respecté le sens. À l’époque, Hérodote était sans doute le seul à s’émouvoir des différences, et les peuples différents étaient généralement classés parmi les barbares. 

De nos jours, les étrangers sont « étranges », différents, de par leurs coutumes et leur mode de vie. Ils sont taxés parfois de « barbares » alors qu’ils sont suppléments différents. Le regard de cette différence s’inscrit dans l’altérité, c’est-à-dire dans le respect de l’autre que l’on perçoit comme autre, différent, certes, mais pas supérieur ou inférieur. Dans l’altérité, il n’y a pas d’échelle de valeurs. En retour, on peut se considérer comme « étrange » lorsque l’on observe, par exemple, les Anglais ou les Allemands prendre leur température corporelle en introduisant un thermomètre dans leur bouche, ou lorsque les Français épluchent les bananes par la queue, alors que les signes le font par la crosse (essayez, c’est beaucoup plus simple en fait). 


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