Mobilité physique et symbolique

Lors de la première séance sur l’altérité pendant laquelle nous avions fait l’usage du « Framapad », j’avais choisi cette définition de l’altérité : « La reconnaissance de l’autre dans sa différence. » , un peu par hasard au début, puis en la relisant il est vrai qu’elle me paraît correcte et est une très bonne image de ma propre façon de penser l’acceptation de l’altérité. En effet, pour moi, c’est une façon d’accepter l’autre et de le penser, justement, par les différences qui le caractérisent. Les différences culturelles, sociales etc. qui sont sources d’enrichissement personnel quand on les découvre chez autrui.

Et c’est en cela que je mets ma citation en relation avec « Il faut s’ouvrir au monde et à l’autre ». Car pour moi, l’altérité c’est une ouverture d’esprit qui fait de nos différences ce qui nous rend égaux, nous avons tous des aspects différents car nous venons d’horizons différents. Finalement l’altérité c’est s’ouvrir au genre humain, tous égaux par nos différences, pour pouvoir dans une même société, dans un même monde, malgré nos différences, construire sa citoyenneté en tant qu’individu, ou se construire en tant que citoyen du monde.

Lors du stage que j’ai effectué du 9 au 20 novembre 2015, j’ai pu observer que la diversité culturelle que l’on suppose dans les classes d’une France en 2015 n’est finalement pas présente partout. En effet, l’école était constituée très majoritairement d’élèves non issus de l’immigration ou avec une origine culturelle française. L’école est située dans un village du bessin calvadosien, où l’on peut qualifier la population de « favorisée ».

En supposant que la diversité culturelle française peut être un point de départ pour aborder le thème de l’altérité avec ses élèves. Dans une école où l’échantillon d’élèves n’est pas représentatif de la diversité culturelle existante dans notre société, quels sont les moyens de mettre cette diversité culturelle en perspective et comment amener les élèves à une réflexion sur l’altérité? Que ce soit à l’échelle française ou à l’échelle mondiale.

Dans L’Anthropologie, François Laplantine développe la nécessité de développer une problématique de la différence, « impliquant une décentration radicale par rapport à la société dont fait partie l’observateur, c’est à dire une rupture avec toute forme, sournoise ou délibérée, d’ethnocentrisme. Car c’est seulement ce que nous percevons (à l’état manifeste ou latent) dans une autre société qui nous permet de repérer ce qui est en jeu dans la nôtre, mais que nous ne soupçonnions pas. » *
J’ai donc interprété sa notion de différence du point de vue de l’altérité, ce qui est différent de nous culturellement, ce qui ne nous ressemble pas ou à des points de divergence rien que par le fait de venir d’une autre société, d’un autre modèle de pensée, d’une autre culture.

De même, la décentration serait sortir de son point de vue, en allant voir ailleurs ce qu’il se passe, par exemple en rencontrant des gens d’autres cultures. Sortir de son cercle culturel « naturel ».

Enfin, j’avais compris la notion d’ethnocentrisme comme le fait de se contenter des normes et coutumes culturelles que l’on reçoit à la naissance par son cercle familial ou social. Et juger de celles-ci qu’elles sont les seules valables et applicables.

François Laplantine nous parle d’un concept visant à sortir de son cercle culturel pour pouvoir comprendre les différences que nous avons avec autrui. Rester centré sur la société dont nous faisons partie ne permet pas d’appréhender l’altérité objectivement. Il recommande d’ouvrir son esprit en allant voir ce qui est en jeu dans les autres sociétés afin de pouvoir comprendre ce qui est en jeu dans sa société d’origine. Et de construire ainsi sa propre vision de l’altérité en sortant de son cercle de pensée « naturel ».

Ainsi il nous propose de comprendre les autres, leurs différences, les raisons pour lesquelles un individu qui est né, dans une autre culture avec d’autres rites, d’autres façons d’appréhender les relations humaines, une autre religion etc. est différent. Et comment cette compréhension d’autrui peut permettre à tout individu de remettre en question sa propre identité, car du point de vue de cet être « différent », lui aussi est finalement un être « différent ».

Pour l’enseignant, il est primordial d’entamer un travail de réflexion sur l’altérité avec les élèves. En effet nous vivons dans une société très riche culturellement et se construire en tant que citoyen du monde passe par l’apprentissage de la tolérance. La tolérance non pas par l’indifférence mais par la compréhension de ce qui fait la différence des autres citoyens de la société dans laquelle nous vivons et des sociétés que nous côtoyons.

Aillant personnellement effectué plusieurs voyages, qu’ils soient scolaire ou non, ma réflexion s’est dirigée vers le concept de mobilité des élèves et des enseignants.

Malheureusement, l’école dans laquelle j’ai effectuée mon stage ne menait aucun projet concernant la mobilité physique ou symbolique.

Les voyages scolaires à l’étranger sont cependant un très bon moyen de décentration par rapport à la société dont font partie les élèves. Malheureusement, dû au coût de ceux-ci, ils restent bien souvent réservés à des destinations proches culturellement de la société originelle des élèves. Mais malgré des cultures très proches, l’idée d’altérité peut être entamée grâce à ces voyages.

Une autre activité moins coûteuse pour entamer une réflexion sur l’altérité avec les élèves serait de donner aux élèves des documents qui nous disent comment des élèves, du même âges qu’eux, mais de culture et de pays différents nous voient nous, en tant que français. La décentration se ferait ainsi par le fait que nous serions les personnes « différentes » pour eux. Ou faire ce même questionnement mais cette fois-ci en commençant un travail de correspondance entre sa classe et une classe du bout du monde.

Après ce début de réflexion je me poserai donc comme fil de réflexion, la question suivante :

Quelle(s) possibilités de mise(s) en oeuvre existe(nt)-il(s), pour des enseignants d’école élémentaire, concernant une mobilité physique et symbolique des élèves et des enseignants ?

* Laplantine, F. (1987). L’Anthropologie. Paris : Petite Bibliothèque Payot, p. 169.