Problématique et restitution du stage

            La refondation de la politique d’éducation prioritaire s’est généralisée à la rentrée 2015 afin de corriger l’impact des inégalités sociales et économiques sur la réussite scolaire grâce à un renforcement de l’action pédagogique et éducative. Pour permettre de donner plus à ceux qui ont le moins, il existe désormais les REP (Réseaux Educatifs Prioritaires) et les REP +, qui bénéficient de nombreux moyens comme l’école Maternelle de Gringoire située à Hérouville, dans laquelle j’ai effectué mon stage en classe de Grande Section. Lors de mon stage, j’ai pu observer la mise en place d’un projet de classe nommé « Matulu » car la diversité culturelle et religieuse est très dense dans l’école. Ce projet a pour but de faire comprendre et apprendre dès le plus jeune âge, les différences entre les personnes, pour être tolérant et respectueux.                                                                                                                                                   Je peux, ainsi faire un lien avec mon dossier d’ERCAPP qui est basé sur l’interculturalité et les différences. Je me suis donc questionnée sur la façon dont le professeur des écoles, dans un contexte social de REP doit adapter son enseignement face à la richesse de sa classe multiculturelle. Pour cela, dans un premier temps, je vais restituer le contexte social de l’école et ce qu’il engendre sur l’enseignement divulgué par le professeur des écoles. Puis, dans un second temps, je développerai ce que ce contexte procure à l’implication des élèves dans leur projet d’apprentissage de la classe.

              Tout d’abord, le contexte social qui est lié à l’école, représente le fait qu’elle soit bienveillante et accueillante mais elle est aussi ouverte à tous puisqu’elle est gratuite, laïque et obligatoire, c’est-à-dire, aux parents, aux enfants de tout horizon mais aussi à ceux aux besoins éducatifs et à ses partenaires. Les familles fréquentant l’école de Gringoire sont globalement défavorisées, ayant même parfois, des difficultés familiales ou langagières car certains parents viennent d’arriver en France et ne maîtrisent pas encore notre langue. Ainsi, on retrouve dans la classe de Grande Section, des élèves d’une grande diversité culturelle, de ce fait, il règne une interculturalité dans la classe. De plus, beaucoup de parents sont au chômage dans ces quartiers, ce qui entraîne un certain décalage de rythme des enfants car ils sont déréglés, les enfants se couchent plus tard comme les parents qui n’ont pas d’obligation contractuelle, de ce fait, les enfants sont plus fatigués.                                                                                                                             Pour pallier à cela, les professeurs des écoles font en sorte que les parents rentrent facilement dans l’école même si certaines relations entre les familles et l’école ne sont pas faciles à créer. En effet, souvent ces parents en difficultés ont une « peur » de l’école, peur de ne pas comprendre ce qu’on leur dit ou honte de leur situation, de ce fait, ils n’osent pas rentrer dans l’école. Il faut alors dès le début de l’année, créer un contact avec eux et les mettre en confiance car si les parents sont sereins, les enfants le seront aussi. Construire et développer cette relation représente un petit travail de tous les jours, qui peut se voir difficile. Je vais illustrer mes propos avec la mère d’une petite mongole arrivée récemment en France et qui ne parle pas encore français, pour communiquer avec elle, ma maître de stage use de sa gestuelle et de petite image pour se faire comprendre puis elle a décidé de faire appel à un interprète mais ceci prend du temps. Il ne faut pas laisser les parents dans le mal-être ou dans l’incompréhension car ils doivent se sentir concerner par l’éducation de leurs enfants. C’est pour cela, qu’il faut les inviter à participer aussi aux sorties scolaires en les interpellant lorsqu’ils déposent leur enfant et à l’aide de mots affichés à côté de la porte de la classe. En général, les parents sont volontaires et essayent de s’investir dans la vie scolaire de leur enfant. Un climat de confiance est créée entre les parents et l’enseignant car certains parents lui font part de leurs difficultés personnelles.                                                                                                                                                 Par ailleurs, le professeur de Grande Section a mis en place une pédagogie différenciée dans la classe afin de permettre à tous les élèves de progresser à leur rythme. Selon Philippe MEIRIEU, « Différencier, c’est avoir le souci de la personne sans renoncer à celui de la collectivité. » De cette façon, les enfants ont le même but mais différentes manières d’y arriver, par exemple, pour écrire des mots, les plus à l’aise disposent du crayon à papier et les moins à l’aise de trame et de feutres velledas. Le professeur trouve des moyens même pour ceux en réussite, qui peuvent réaliser des exercices plus complexes ou faire des exercices en plus s’ils finissent en avance, il faut donc des possibilités d’adaptation dans la classe. De plus, à la suite d’un entretien avec le professeur remplaçant, cette dernière juge qu’elle doit adapter son enseignement au jour le jour et pour faire face à l’interculturalité des élèves qui n’ont pas les mêmes connaissances. Elle trouve qu’il faut leur faire découvrir ce qu’ils ne peuvent pas voir chez eux. Elle peut donc leur faire écouter des choses diverses telles que de la musique classique et leur faire lire des choses plus poussées que « Tchoupi ». Selon elle, sa méthode fonctionne bien car à cet age-là, ils sont très curieux et adorent découvrir de nouvelles choses. Je pense que cela permet aux élèves de connaître les mêmes références, ce qui aide à leur créer une culture commune.

           Ensuite, les implications dans les projets d’apprentissage sont propres à chaque élève car aucun ne réagit pareil face à une situation d’apprentissage, en effet, ils n’ont pas tous les mêmes capacités. Certains sont réticents et préfèrent faire des bêtises pendant que d’autres vont être très impliqués. Pour réussir à tous les impliquer, bien que cela peut être à des degrés différents, ma maître de stage a décidé de créer avec les élèves, les règles de vie de la classe. Ainsi, en partant du principe, que ce soient eux, qui décident des règles et des punitions adaptées en cas de transgression de ces dernières, ils les comprennent et c’est plus simple pour eux de les respecter. Cet exemple illustre parfaitement la construction de la culture commune car à travers ces règles communes, ils apprennent à se respecter tout en vivant ensemble. Pour développer ce principe commun, l’enseignante de Grande Section commence à mettre en place le projet « Matulu » sur les différences afin que les élèves comprennent que s’ils n’ont pas le même mode de vie, ni les mêmes idées, ce n’est pas grave mais il faut accepter cela pour mettre le bon « vivre-ensemble » au sein de la classe mais aussi pour qu’ils s’en servent tout au long de leur vie. Les enfants doivent alors apprendre à contrôler leur émotions et savoir les exprimer, c’est pour cela qu’il faut continuellement les interpeller après des lectures ou après les tragiques événements récemment survenus en France. Le professeur a décidé de les rassembler et chacun devait dire ce qu’il avait compris et ce qu’il ressentait. Cela a permis d’effacer certaines stigmatisation car l’un des élèves pensait que c’était la faute de certaine communauté.                                                                                                                                                 Par ailleurs, pour impliquer les élèves dans des activités, il est important de le faire par le jeu, qui peut être très éducatif. En effet, pour le projet de classe, l’enseignante a décidé de retravailler dans un premier temps sur la description physique et la perception de leur corps et d’eux-mêmes. Ainsi, pour revoir les notions du corps comme la couleur des yeux, les élèves ont joué au « qui est-ce ? » par groupe. A la suite de cela, ils ont réalisé leur portrait, je me suis aperçue que beaucoup ne se percevaient pas comme ils étaient, je leur ai donc fait retravaillé leur portrait, en leur demandant, par exemple si l’une des élèves avait vraiment la peau blanche. De cette façon, grâce à l’image que les autres ont d’eux, les élèves peuvent remettre l’image qu’ils ont d’eux-mêmes en question. Mais il est quand même primordial de partir de leur vision d’eux-mêmes pour qu’ils puissent par la suite, bien décrire leur camarade. En effet, s’ils n’arrivent pas bien à se connaître et se décrire, ils ne pourront pas le faire avec l’image de leur camarade. Ce jeu a aussi permis de développer leurs compétences langagières avec notamment le lexique du corps humain. Le professeur de la classe de Grande Section préfère que les élèves ne soient pas regroupés par niveau car l’hétérogénéité est meilleure pour le progrès car c’est à travers les autres que nous pouvons évoluer et progresser.                                                                                                                                                       De plus, il faut savoir que les élèves apprennent beaucoup de leur pair puisqu’ils apprennent des autres enfants, dans ce cas, qui n’ont pas la même culture, ils se décentrent progressivement de leur point de vue et acceptent d’écouter l’autre et ses idées. Ils se permettent plus « d’échanger et réfléchir avec les autres » de ce qu’ils font avec leur camarade car parfois, ils n’osent pas s’exprimer devant les adultes parce qu’ils pensent qu’ils n’ont pas le droit de se tromper. Si un enfant arrive à s’exprimer correctement, il peut mener un groupe et aider les autres. Dans chaque groupe d’enfants, j’ai remarqué qu’il y avait toujours un leader, qui motive les autres. Mais chaque enfant doit « se construire comme personne singulière au sein d’un groupe » où « l’enfant trouve sa place dans le groupe, se fait reconnaître comme une personne à part entière et éprouve le rôle des autres dans la construction des apprentissages ».                                                                                                                            D’autres, ont des difficultés de langage car ils viennent d’arriver en France et ne maîtrise pas le langage français donc ils ne participent pas lorsqu’ils sont interpellés oralement mais ils excellent dans les activités à l’écrit comme la petite mongole qui termine toujours son travail avant les autres. Par ailleurs, d’autres possèdent un vocabulaire peu varié et sont alors aidés d’un maître E, qui les aide au développement du langage et à enrichir leur vocabulaire en mettant en place des aides spécialisées à dominante pédagogique. L’implication des élèves face à l’oral dépend aussi de leur degré de timidité puisque, plus ils sont timides, moins ils pourront participer devant les autres, dans ce cas, ils ne parlent qu’en chuchotant. Il faut alors mettre en valeur les enfants pour leur donner confiance en eux et leur permettre d’évoluer, comme l’explique le Bulletin Officiel. Pour cela, la mise en place d’un livret de progrès est diffusé dans la classe afin d’effacer les anciennes pastilles rouges, vertes et oranges. Dorénavant, il n’y en a que deux, les bleues pour marquer le progrès et les vertes pour dire que le progrès est en cours d’acquisition et lorsqu’il n’y a pas de progrès, on ne met rien. Les élèves se sentent alors valorisés car il n’y a plus la peur du rouge, qui était considérée comme une sanction. Cela permet de la bienveillance et d’individualiser le parcours de chacun.

          Pour conclure, à travers mes diverses observations, il me paraît primordial d’accompagner des élèves d’origines diverses et modestes tout au long de l’année tout en instaurant un climat de confiance avec leur parent. Bien que souvent la relation entre l’école et les familles est une réussite car ma maître de stage a remarqué que peu de parents (environ 8) avaient participé à la réunion de rentrée mais qu’à la fin de l’année pour la remise des livrets de réussite, presque tous les parents étaient présents. De plus, les élèves ont besoin d’être accompagnés dans leur mise au travail par des adultes car cela les rassurent mais il faut les laisser avancer leur travail seul car ils doivent aussi développer leur autonomie. L’entre-aide entre pairs permet de nombreux progrès et il est important qu’ils arrivent à développer leur individualité dans un groupe tout en prenant en compte l’avis des autres. Ainsi, les élèves réussiront à mieux se comprendre les uns et les autres, à mieux se faire comprendre mais aussi à mieux se respecter et se faire respecter. Je peux supposer que le professeur des écoles doit adapter son enseignement notamment pour des enfants ayant des cultures différentes pour les remettre à niveau et leur permettre de créer une culture commune, qu’ils ne pourraient avoir au sein de leur foyer familial. Il ne faut pas oublier que ces enfants ont aussi bien le droit et le devoir de réussite comme les autres, il faut juste adapter sa pédagogie mais comme dans toute classe, de REP non. Je peux maintenant baser un nouveau questionnement : comment les élèves arrivent-ils à s’approprier l’identité collective à travers la culture commune ?