Picasso face à la guerre

Picasso face à la guerre

1937 – 1944 : Picasso devient l’artiste majeur du XXe siècle.

Picasso devient le symbole de la résistance à l’oppression, artiste de la Liberté. De grand artiste il accède au rang de  mythe.

Alors que jusqu’en 1937 l’art de Picasso, un art très personnel, est en rapport avec les autres artistes, les critiques d’art et les marchands, il accède désormais à l’Universel. Sa peinture rencontre le siècle. Mais c’est l’histoire qui ressemble à sa peinture et non pas l’inverse. C’est la souffrance des hommes et des femmes qu’il peint faisant œuvre de vérité au-delà des qualités plastiques de ses oeuvres. Cet artiste introverti, ce narcissique esthétique entre en contact avec l’Histoire en 1936 -37 quand il rencontre les milieux intellectuels résistant au fascisme franquiste. « Ce n’est pas tellement les évènements eux-mêmes qui se passaient en Espagne qui éveillèrent Picasso de sa torpeur volontaire mais le fait que ça se passe en Espagne », dit Gertrude Stein. Il redécouvre ainsi son « hispanité ».

Introduction.

Le changement de contexte vers 1935-36 : Picasso se découvre poète mais se tourne aussi vers l’Histoire en marche.

En 1935, Picasso écrit et les Cahiers d’art publient ses poèmes en 1936. Associations de mots et d’images grotesques : « Vénus sortie de chez-elle pour acheter à l’épicier des sardines à l’huile frappée d’insolation devient coquillage », exprimant la cruauté, « le peuple des oiseaux de proie déchirant des griffes et du bec l’épaule nue de la fleur de citronnier fille morte de peur »Picasso vivant la « pire période de sa vie » selon David Duncan, il exprime aussi le tragique « misérable peau de chagrin serrant le corps déchiré de l’amour qui saigne à l’étroit dans la couronne de son lit de ronces ». On peut rapprocher ces modes d’expression poétique des anatomies et des mythologies déréglées de 1933 à 1935 – 36. Pourquoi se mettre à écrire ?

Gertrude Stein affirme « vos poèmes ils sont plus choquants que des mauvais poèmes (…) c’est particulièrement détestable ». La production de toiles et de gravures se poursuit mais elle est plus réduite. Pour autant il ne s’agit pas d’une substitution car il continue à créer et, inversement, il poursuit l’écriture alors que Guernica est dans l’atelier. S’agit-il d’une autobiographie poétique ? Ce serait trop simple. C’est plutôt d’une « autographie » qu’il s’agit, mélange d’écriture spontanée de « fusées » de mots, « pot scie ma lady gai rit sable » pour  « poésie maladie guérissable » comme il disait ce qui ressemble aux expériences de Walter Benjamin fumant du haschich et notant ses réactions pour mieux se connaître, donc une forme d’introspection plutôt. Picasso n’avait-il pas écrit dans les Cahiers d’art en 1935 : « Ce qui nous intéresse c’est l’inquiétude de Cézanne, c’est l’enseignement de Cézanne, ce sont les tourments de Van Gogh, c’est à dire le drame de l’homme. Le reste est faux ».

Une série d’oeuvres de 1935 – 1936 confirme cette introspection sous deux formes.

Femme dessinant, (Jeune fille dessinant dans un intérieur). Paris février1935 crayon sur papier17,5 x 26 cm collection privée.

Une étude montre la jeune femme dessinant figurée à la manière de Boisgeloup et celle du miroir à la manière classique. Les toiles montrent d’autres choix. Tout en gardant le motif de la femme dessinant, Picasso choisit de placer une deuxième femme au second plan et de faire disparaître la figure féminine du miroir en la remplaçant par une figure indéfinissable.

La muse, Jeune femme dessinant dans un intérieur (Deux femmes) Paris, Janvier Février 1935 huile sur toile 130 x 162 cm Centre Pompidou.

La Muse (Centre Pompidou) titre discutable,

Deux femmes (Jeune fille dessinant dans un intérieur) Paris, 12-Février1935 huile sur toile 130 x 195 cm. MOMA.

Une femme qui dessine sur un carnet avec son stylet face au miroir qui ne porte pas son reflet mais une arabesque sur le modèle de dessins grotesques de la même période, pendant que l’autre dort dans une posture étrange la tête et les bras posés sur la table, rêve, deux formes de retour sur soi (motif repris dans Dormeuse aux persiennes huile sur toile du Musée Picasso 1936). L’espace est construit à l’aide du mobilier, du miroir et du fond fait de formes géométriques et d’aplats. Olga et Marie-Thérèse ? Peut-être. Selon Daix c’est Marie-Thérèse et sa sœur Jeanne. Marie Thérèse dort (cela rappelle La lecture interrompue ou Le rêve voir chapitre précédent). Mais du rêve à la poésie le chemin est tout tracé. Ici aussi malgré le colorisme joyeux l’inquiétude sur l’avenir se lit sur le reflet indéfinissable du miroir. Picasso , amoureux (?) semble donc attiré par la rêverie, la poésie, l’imaginaire.

L’autre facteur favorisant cette propension à la poésie au milieu des années ’30, c’est le rapprochement avec Paul Éluard à Mougins(Picasso le portraiture en janvier 1936 et Éluard part à Madrid et à Barcelone faire une conférence sur Picasso) qui renforce Picasso dans ses expériences autographiques. Picasso grave une superbe Faunesse, un soleil borgne et un assemblage féminin pour le Grand air, poème d’Éluard. (héliogravure du 4 juin 1936. Musée Picasso).

Grand Air (Paul E?luard, Les Yeux Fertiles) Paris, 3~4-Juin , 1936  héliogravure 41,9 x 31,7 cm. Sotheby’s.

La Guerre d’Espagne remplace progressivement la crise conjugale dans les vers : « … les femmes à soldats font le compte de leurs seins et des membres de fantassins engourdis par la mitraille ordure et char d’ordures des ordures entassées sur la plage d’orgue de barbarie … »

Mais, comme avec Olga en 1917 et l’entrée dans le nouveau monde de Cocteau, de Diaghilev et des mécènes, Picasso rencontre l’élégante femme de caractère Dora Maar, née en 1907, artiste photographe engagée d’origine yougoslave (nom : Markovich)  qui voyage, immortalise des figures de la Grande Dépression en Angleterre, publie des photos d’art dans Minotaure, s’engage dans le combat des surréalistes contre le stalinisme en signant le manifeste Du temps que les surréalistes avaient raison avec Magritte, Man Ray et Tanguy. C’est l’égérie de l’extrême gauche intellectuelle et antifasciste parisienne.

Elle arrive à un moment où la géographie amicale de Picasso se modifie :

Il se rapproche de Saint Germain et va souvent sur la côte méditerranéenne.

– Picasso partage sa vie entre Olga installée rue des Augustins à la rive gauche (1937) et dans un atelier que Vollard lui a prêté où il installe Marie-Thérèse ?

– A côté, des séjours réguliers à Juan-les-Pins – Mougins avec Olga puis avec Marie-Thérèse.

Une exposition a eu lieu en 2006 sur Picasso et Dora Maar : Communiqué de presse ici. (Série de portraits non localisés ici)

La souffrance infligée et subie se traduit dans les toiles comme nous l’avons vu. Mais progressivement, la souffrance individuelle cède le pas à la souffrance collective de la guerre.

Pablo Picasso, « La Minotauromachie », 1935, Eau forte, grattoir et burin sur cuivre, 57,1 x 77,1 cm, Musée national Picasso, Paris.

Pablo Picasso, Le Minotaure blessé de 1936, gouache et encre sur papier, 50x65cm Musée Picasso.

cède le pas aux figures de Guernica en 1937 : guerre d’Espagne, pacifisme d’Éluard expliquent largement cette mutation.

I. Mettre en scène la souffrance.

Cela avait commence dès 1930 avec la Crucifixion, une toile incongrue dans un contexte où il s’intéresse davantage aux mythographies anciennes et contemporaines mises en avant par Documents.

Crucifixion 1930 huile sur bois 51x65cm Musée Picasso Paris.

Tableau exceptionnel tant par son sujet que par la complexité de son vocabulaire pictural, en particulier les tons stridents et le caractère particulier de ce tableau combinant peinture d’histoire, revisitée selon les principes iconoclastes des surréalistes, et univers privé de Picasso. L’influence des revues Cahiers d’art et Documents portées sur une redécouverte des « mythologies » et des rites antiques et médiévaux. Picasso montre sa volonté de revivifier la tradition picturale, tendance qui se confirmera dans les années 50 – 60.

En effet, il s’empare aussi d’autres « mythologies » en particulier chrétiennes avec cette Crucifixion datée de février 1930. Corps étirés, désarticulés, mâchoires ouvertes, disproportions inquiétantes rappelant la Danse, êtres microcéphales aux pieds énormes. Soldats jouant aux dés la tunique du Christ, saintes femmes, deux larrons allongés à gauche, Christ, le porteur de lance ressemblant à un « Picador », Marie Madeleine se lamentant à droite, échelle servant à clouer le Christ, subissent les transformations expérimentées dès 1928 que Picasso assemble comme un puzzle ou comme un dictionnaire du vocabulaire pictural depuis la Danse et le Baiser. Il seront repris dans un carnet qui précède l’oeuvre.

Tête bleue de mante religieuse rappelant de la Baigneuse assise du MOMA (1930), la figure blanche devant le Christ, très certainement la Vierge Marie, rappelle le Grand nu au fauteuil rouge du Musée Picasso (1929), attitude extatique de Marie-Madeleine levant les mains au ciel.

Baigneuse assise au bord de la mer –  1930, huile sur toile, 163,2 x 129,5 cm.

Deux formes rondes étranges encadrent le Christ : à gauche une sorte d’éponge  (comme celle trempée au vinaigre qui a été tendue vers le Christ quand il a dit qu’il avait soif, masse surdimensionnée, peut-être figurant aussi la lune, à gauche une autre masse jaune, peut-être un symbole solaire qui rapproche le tableau du culte sacrificiel et solaire de Mithra et qui renvoie au texte publié par Georges Bataille dans Documents la même année. Dans ce cas la masse verte à gauche pourrait être le « soleil pourri » de Bataille alors que la forme lunaire jaune et rouge sur fond bleu à gauche représenterait la lune.

Le rouge du sang et le jaune dialoguent pour rendre le tableau angoissant. Le martyre est rendu dans son ampleur tragique. Un double caractère transparaît ici : le grotesque et l’épouvantable conformément aux écrits de Georges Bataille qui marient horreur et satisfaction. Les corps sont désarticulés, voire dissous, les figures biomorphiques rappellent un  organe ou un os. La tête dévorante, inscrite sur le buste du Christ est reprise dans une toile de 1931 du Musée Picasso La femme au stylet (voir ci-dessous) inspirée à la fois de Marat assassiné de David (lettre par terre et figure placée dans une sorte de baignoire, ainsi que fond vert) et, pour la forme serpentine, comme du sang qui coule, il s’agit d’une illustration d’un article des Documents sur les sacrifices humains aztèques avec arrachement du cœur, rite apprécié par Georges Bataille.

Crucifixion étude d’après Grünewald Paris hiver 1929-30 24x31cm Coll. privée.

La crucifixion (d’après Grünewald) Boisgeloup, 4 Octobre 1932 encre sur papier 34 x 51 cm. Musée Picasso.

Le thème de la Crucifixion sera repris en 1932 dans des dessins à l’encre à partir d’une reproduction de celle de Mathias Grünewald (Musée Picasso). Sur la relecture de Grünewald par Picasso lire:  Page Daix 1, Page Daix 2. La scène centrale du Christianisme est réinterprétée de manière à accroître l’angoisse de la mort dans une approche très « bataillienne ».

En 1934, Picasso reprend la composition de la Femme au stylet dans un dessin de Boisgeloup à la mine de plomb (Musée Picasso) appelé Le meurtre.

La femme au stylet (Mort de Marat) Paris, 19~25-Decembre 1931 huile sur toile 46,5 x 61,5 cm. Musée Picasso.

Ici, Marat est substitué par une femme aux formes arrondies du « style  Marie-Thérèse ». Violence privée et publique  d’une Olga – Charlotte Corday tenant un énorme couteau, figure aux traits déformés par la haine : lèvres étirées, dents surdimensionnées, doigts crispés nez en pointe, dont le corps est réduit à deux seins et une sorte de collage de formes géométriques.

Le meurtre Boisgeloup 7-Juillet1934. crayon 39,8 x 50,4 cm. Musée Picasso.

L’espace est réduit, le plafond fait de poutres, un couloir obscur. Cette mise en scène métaphorique de la violence et du meurtre rappelle Bataille et la mutation de la corrida de Granero en cérémonie mithriaque avec Simone comme officiante d’un culte sexuel sauvage qui a inspiré à Picasso les tauromachies transformées en parades solaires et sanglantes de Éros et Thanatos. Dans l’histoire de l’œil, la jouissance du meurtre rituel apparaît dans la profanation par Simone et Lord Stephen d’un prêtre sévillan violé, humilié et assassiné. Cette proximité entre Bataille et Picasso (plus importante que celle avec Breton) explique l’intérêt croissant de Dora Maar pour l’artiste.

Ces thèmes de la souffrance, de la jouissance du mal trouvera un écho d’une toute autre ampleur dans Guernica, (Daix Guernica page 2) la « mise à mort de l’Espagne » comme l’affirme Philippe Dagen.

Guernica (pages de Dagen et de la Monographie ici), la mise à mort de l’Espagne.

Exposé de Pierre Gruss (K-Chartes 2010-2011)

Guernica Paris 1 Mai -4-Juin 1937, huile sur toile 349,3 x 776,6 cm. Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia, Madrid prêté par le Prado. ((cliquez pour agrandir))

Songe et mensonge de Franco I Paris 8-Janvier1937  eau forte aquatinte sur papier Montval, édition 850 31,7 x 42,2 cm Christie’s.

Songe et mensonge de Franco II 1937 eau forte aquatinte 31 x 42 cm Sotheby. (les trois dernières vignettes sont postérieures à Guernica).

Sur ces deux oeuvres et sur le scandale de l’utilisation de Guernica dans une campagne publicitaire de la Bundeswehr lire le passionnant  l’article de Schneider Danièle. Guernica, le tableau outragé. In: Communication et langages. N°96, 2ème trimestre 1993. pp. 76-91.

La mise en scène de Franco et des ravages de la guerre civile (c’est la première fois que Picasso s’y attaque et de manière tout à fait originale suite à une commande pour le Pavillon républicain de l’Exposition universelle de Paris : un feuilleton burlesque en deux feuilles SONGE ET MENSONGE FRANCO. Il ajoute l’immense toile de 8m de long et 3,50 m de haut, Guernica

Un dialogue s’établit ainsi entre deux types d’oeuvres antinomiques.

Plus que la guerre, c’est un ensemble de figures symboliques qui peuple les deux oeuvres. Les allusions et les transformations issues oeuvres « mythologiques » antérieures sont aussi évidentes en particulier avec le monstre grotesque de Franco, destructeur de la beauté et des arts comme le rapportent les récits des bombardements de musées par les fascistes.

Il ne s’agit pas cependant de scènes narratives mais plutôt d’une mise en scène de la bouffonnerie du personnage dans de petites saynètes – vignettes. Cette représentation est sans précédent ni Otto Dix, dans une démarche quasi documentaire pour ses gravures et toiles d’après guerre, ni Goya dans les Désastres de la guerre (qui rappellent les gravures des Grandes misères de la guerre de Jacques Callot) Picasso emploie sa dextérité seulement dans la deuxième feuille avec le taureau, la femme alors que la figure de Franco dans première comme dans la deuxième feuille est schématique, caricaturale. En tout cas il n’est pas question pour Picasso de rechercher un quelconque réalisme dans la représentation du bombardement en utilisant les moyens de la photographie comme le montre cette réflexion faite à Brassaï :

« Quand on voit ce que vous exprimez par la photo, on se rend compte de tout ce qui ne peut plus être le souci de la peinture …Pourquoi l’artiste s’obstinerait-il à rendre ce que à l’aide de l’objectif on peut fixer si bien ? Ce serait une folie n’est-ce pas ? » (Sur PICASSO ET LA PHOTOGRAPHIE LIRE LE LONG article de P. Daix).

Ainsi, procéder par des transformations, des mythologies des symboles est à la fois conforme à sa démarche depuis 10 ans et en même temps le seul moyen possible pour la peinture de rendre compte de la réalité et de l’histoire.

II. Profanations et désastres de l’Occupation.

Picasso est entouré de photographes et de modèles, à commencer par Dora, Man Ray et son modèle Lee Miller, Nusch la jeune femme de son ami Paul Éluard (voir un exemple de portrait de Nusch du Musée Picasso). Il fera plusieurs portraits qui défigurent ces femmes à partir de l’été 1937 alors que jusque là leurs portraits étaient plutôt flatteurs Marie Thérèse de janvier 1937 Musée Picasso ou Marie Thérèse à la guirlande coll. privée (ci-dessous) ou le portrait de Dora Maar à la blouse noire et aux longs ongles et au profil classiciste du Musée Picasso, portrait qu’il gardera toute sa vie ->  Musée Picasso) .
Voir ci-dessous :

1937, 65 cm x 92 cm, huile sur toile. Musée Picasso

Picasso est un habitué de la profanation de la figure féminine. Olga en a subi les atteintes, alors que Marie Thérèse a été préservée et le restera même quand il se séparera d’elle. Toujours dans des chromatismes joyeux, des lignes tout en courbes.

Portrait de Marie-Thérèse Walter à la guirlande Paris, 6-Février 1937 huile toile 61 x 46 cm. Maya Widmaier Picasso Collection, Paris.

Portrait de Marie Thérèse Walter Paris 1937 huile toile 100 x 81 cm Musée Picasso Paris.

Dora en revanche n’est pas épargnée. Sa beauté est mise à mal dans plusieurs portraits. Deux tableaux sont emblématiques de cette dualité :

Femme couchée lisant (Marie-Thérèse Walter) Le Tremblay-sur-Mauldre, 21-Janvier 1939 huile sur toile 96,5 x 130cm. Musée Picasso.

Picasso rendait visite à Marie-Thérèse et à Maya les week-end à l’atelier du Tremblay situé près de Versailles.

Femme allongée sur un divan (Dora Maar) [Paris] Le-Tremblay-sur-Mauldre, 21-Janvier 1939 huile sur toile 97 x 130 cm Collection privée N.Y.

La Femme couchée lisant (Marie-Thérèse) dans l’atelier de Tremblay-sur-Mauldre, le 21 janvier 1939 Musée Picasso, et la Femme allongée sur un divan d’une coll. privée (New York) datée du même jour et visiblement au même endroit, on reconnaît la verrière à l’arrière plan, dans le même format mais là tout est triangulé : espace et figure déformés, chapeau hérissé, coussin cassé en plis durs, doigts pointus, profil à angle droit. Ce n’est pas une provocation mais le principe esthétique auquel Picasso est attaché. Près de la tête de Dora, une palette accrochée rappelle cette évidence.

Picasso revient donc à sa tendance sacrilège à l’été 1937  avec la Femme allaitant un chat (Eluard ?). Portrait cryptique ?

La femme au chat. Mougins, 30-August/1937.  huile toile 81 x 65,5 Collection prive?e, Paris

A la fin de l’été, Picasso montre ce très étrange et méchant portrait à ses amis : une femme dans un corps d’homme allaitant un chat d’un sein épanoui et coiffée à l’arlésienne. Le décodage n’est pas évident. Eluard – qui lui a «offert» sa femme (Nusch pour modèle) – est-il, pour le peintre, un homosexuel refoulé ? Ou faut-il voir le poète donnant à Nusch, sa deuxième compagne après Gala partie chez Dali, (le chat) une nourriture qu’elle va ensuite offrir à d’autres ?

C’est dans ce contexte dual, comme à l’accoutumée, que naît la grande Guernica. Les deux femmes nues sur une plage, de mai 1937 dépeçant un corps écorché sont des monstres, sont-elles d’ailleurs des figures féminines ?

Deux femmes nues sur la plage Paris 1 Mai 1937 Encre & gouache sur bois 22 x 27 cm Muse?e Picasso

La première étude pour Guernica date du même jour. La dualité s’élargit avec les portraits croisés de Maya, ou de Marie-Thérèse avec Maya enfance insouciante, face à la souffrance féminine déjà explorée dans Guernica et qui réapparaît plusieurs fois comme dans la Suppliante (petite gouache sur bois du Musée Picasso) en décembre 1937, dont le sein nu évoque la maternité.

La suppliante Paris, 18-Decembre 1937 gouache et encre sur panneau 24 x 18,5 cm. Muse?e Picasso.

Défigurées par l’excès de souffrance ces figures ont des yeux exorbités, la bouche béante, les lèvres retroussées les dents serrées dans un mouchoir, les larmes devenant des points entrant dans la peau comme dans la Femme en pleurs de la Tate Modern de Londres (octobre 1937) qui n’est pas Dora Maar mais plutôt l’Espagne martyrisée.

« Pour moi elle est une femme qui pleure. Pendant des années, je l’ai peinte en formes torturées, non par sadisme ou par plaisir. Je ne pouvais que donner la vision qui s’imposait à moi, c’était la réalité profonde de Dora. »

Femme qui pleure Paris 1937 huile toile 60 x 49cm Tate Modern Londres

La figure de la Femme assise au chapeau ci-dessous (chapeau : signe de Dora) à la chevelure qui rappelle les harpies de 1929, devient quasi impossible à identifier, sorte de monstre ressemblant Franco de la série de Songes et mensonges. La dislocation du visage humain est poussée à son comble, visage trompes ou museaux de chien où s’enroulent des  brins de paille ou de pelotes de laine, la série des femmes assises et des femmes au chapeau de 1938 – 1939 constitue la plus grave atteinte à la figure féminine, un défi plastique sans précédent. Humour féroce, violence destructrice, mais aussi tendresse tentent de s’exprimer dans ces transformations radicales de la figure sans pour autant tomber dans l’abstraction. Ces montres restent humains et c’est là le grand paradoxe du génie de Picasso.

Femme au chapeau, assise sur une chaise. Mougins, 10-Septembre 1938. huile et sable sur bois 54,6 x 45,7 cm. Collection privée Houston.

Ici la paille s’enroule pour figurer la tête monumentale dont les organes sont disposés sous plusieurs point sde vue à la manière cubiste. Les cheveux rappellent les femmes monstrueuses, les harpies et leurs cheveux en pointes de 1929 – 1930. Le chapeau ressemble à un carton plié alors que le fauteuil est schématisé, géométrisé , quasi abstrait.

Mais Dora assise apparaît dans une séquence qui commence par des gouaches, des dessins et s’achève de l’été en décembre par des toiles : la figure est traitée en bandes colorées, quadrillages, chevrons, cercles concentriques le point d’orgue étant la Femme assise dans un jardin,( coll. part. 10 décembre 1938).

Femme assise dans un jardin Paris, 10-Decembre 1938 huile sur toile 131 x 97 cm. Coll privée.

Cette œuvre joue le même rôle que le portrait de Jeune fille d’Avignon en 1914 (Centre Pompidou), sorte de condensé des expériences d’autant plus pertinent ici que les guirlandes de fleurs qui encadrent la figure rappellent les tapisseries florales et les trapèzes et autres triangles évoquent le collage dont la Jeune fille d’Avignon de 1914 était aussi un aboutissement.

De manière tout aussi comparable, Picasso transfère cette manière au masculin comme le marin en 1907.  Homme au chapeau de paille et au cornet de glace.

Homme au chapeau de paille et au cornet de glace [Paris] Mougins, 30-Aout 1938 huile sur toile 61 x 46 cm. Musée Picasso.

Cependant, Dora Maar est prise dans les métamorphoses, dans cette iconographie car elle participe au mouvement anti-franquiste, et parce qu’elle avait un caractère qui la portait vers le drame ; Marie-Thérèse ne sera jamais transformée ainsi même pendant les années noires de l’Occupation.

La guerre 1940-1944.

Rien de narratif sur la guerre en 1939-1940. Mais une « migration du motif », les mains fourchues et les doigts longs aux ongles menaçants se déplacent vers des figures animalières notamment les chats :

Chat dévorant un oiseau (Chat a? l’oiseau) Le Tremblay-sur-Mauldre, Avril 1939 huile sur toile  97 x 129 cm collection prive?e.

Les dents passent aux têtes de moutons écorchés (dessin Musée Picasso octobre 1939). Les signes se déplacent et s’amplifient.  L’animalisation de la souffrance était déjà présente dans la figure du Coq en 1938

La femme au coq Paris 15 fevrier 1938 huile sur toile 145,5 x 121 cm The Baltimore Museum of Art. (Voir aussi une étude ici et une très belle gravure ici)

ou du taureau dans les minotauromachies bien sûr, elle réapparaît en 1942 dans deux Natures mortes au crâne de bœuf (Düsseldorf et Milan) et surtout  dans la Tête taureau associant le guidon et la selle d’un vélo (1942).

Nature Morte au crâne de boeuf , huile sur toile 130 x 97 cm 1942. Kunstsammlung Düsseldorf.

Tête de taureau 1942 selle et guidon cuir et métal 33 x 43 x19 cm Musée Picasso. Les versions montrées en photo traditionnellement et celle qui est exposéee sont en bronze.

L’année 1942 est difficile, Picasso ne quitte pas son atelier de toute l’année. Étape importante dans la sculpture, cet assemblage est constitué d’objets récupérés, empruntés à la réalité. Voici comment Picasso joue de cette « métamorphose » en poussant au paradoxe :

 » Une métamorphose a eu lieu, mais à présent je voudrais qu’une autre métamorphose se produise dans la direction opposée. Supposez que la tête de taureau soit jetée au rebut et qu’un homme arrive et dise « Voilà quelque chose qui pourrait servir comme guidon de ma bicyclette. Ainsi une double métamorphose aurait été achevée ».

A. Valentin, Pablo Picasso, Paris, Albin-Michel, 1957, p.361.

La selle et le guidon sont transformés par le geste poétique d’un Picasso bricoleur de génie faisant preuve d’une imagination sans égal pour transformer le réel. Cette forme, véritable archétype de la tête du taureau, devient ici sorte de vanité dont il réalise un pendant humain dans la Tête de mort de 1943 :

Tête de mort, Grands Augustins, Paris, 1943, photo BrassaÏ.

Ce type d’assemblage de récupération annonce les sculptures des années 50, la voiture d’enfant qui deviendra guenon, le panier d’osier, corps de chèvre, la patinette, corps d’oiseau etc. Alors que le Verre d’absinthe utilisait la cuillère pour sa fonction, ou un autre objet pour son matériau ou son sens

Tête d’homme Juan-les-Pins, été 1930 fer, cuivre & bronze  83,5 x 40,5 x 36 cm Musée Picasso. Une tête rarement déformée de manière plus très radicale par Picasso.

Dans le cas de la tête de taureau, il synthétise les démarches antérieures : l’objet est choisi pour sa forme, son matériau et pour son sens mais un sens obtenu par glissement plastique, sens réinventé par Picasso. Comme souvent, la création relève chez Picasso de la magie, du tour de prestidigitateur, du jeu et de la facétie.

Le passage à l’animalité n’empêche pas la poursuite de l’altération féminine et  même son aggravation. Cela commence avec des collages peints de 1940, sortes de bricolages sinistres avec des bleus et des jeunes vifs, loin du biomorphisme de Boisgeloup.

Femme assise dans un fauteuil Paris, 2-Février 1940 carton ficelle peints et collés 17,3 x 14,9 x 3,7 cm. Musée Picasso.

Entre relief, collage et peinture, ce type d’assemblage reproduit les distorsions du visage et du corps visibles sur les toiles mais de manière plus radicale encore. Picasso joue des plans assemblés (corps, fauteuil), comme à l’époque des collages cubistes mais ajoute des traits pour rendre le volume des seins, du ventre ou les plus des tissus. La tête rappelle le visage de Dora Maar.

Femme se coiffant [Nu assis aux bras levés]. Royan, 6-Mars juin1940 huile sur toile130 x 97 cm MOMA.

Ça se poursuit avec La femme nue se coiffant du MOMA de 1940 : le torse laisse voir les côtes sous un sein vertical soulevé, le ventre protubérant, souligné par deux plis parallèles, les pieds démesurés avancent au premier plan, le visage est distordu mettant en avant la bouche – la femme se coiffe cependant, se fait belle. Espace clos, murs gris, sol violet. La même chambre d’hôtel que Leiris a reconnu dans Guernica, sans fenêtre, sans lumière. Peu après, les Allemands entrent dans Royan.

L’aubade (Nu allongé avec musicienne) [La sérénade (Nu couché et musicienne assise]) Paris, 4-Mai1942 huile sur toile 195 x 265,4 cm. Centre Georges Pompidou.

De ce nu à l’Aubade grande toile du Centre Pompidou, de 1942 et au Nu couché de 1943 ci dessous la filiation est établie, les offenses au corps s’aggravent.

Grand nu couche?. Paris, 28-Juin1943 huile sur toile 130 x 195,3 cm. Muse?e Picasso

Lieu clos, gris, corps posé sur un matelas ou sur le sol, pétrifié, cassé, les seins des ballons dégonflés, la colonne semble être une cicatrice longue de la nuque aux hanches. Sont-ce des humiliations telles que celles que pratique l’occupant maltraitant les êtres humains ?

La tête s’ouvre en deux, fendue en son milieu et reconstruite en pyramides, tétraèdres et autres schématisations. Dans un lieu gris, clos, sans l’ampoule de Guernica, un corps ridiculisé (ou malmené) surtout dans les études de Trois femmes nues debout études pour l’Aubade (gouache Musée Picasso).

L’aubade (Trois femmes nues) [E?tude] Paris, 5, 6, 8-Janvier 1942  Gouache sur carnet 30,3 x 40,5 cm. Muse?e Picasso.

Comment interpréter l’Aubade ?

Un motif musical ? Deux figures féminines (« Jouer de la mandoline » en argot signifie amour saphique, ce pourrait être le sujet du tableau comme la scabreuse Leçon de guitare de Balthus 1934 (coll. particulière) :

« Je prépare une nouvelle toile. Une toile plutôt féroce. Dois-je oser t’en parler ? Si je ne peux pas t’en parler à toi – C’est une scène érotique. Mais comprends bien, cela n’a rien de rigolo, rien de ces petites infamies usuelles que l’on montre clandestinement en se poussant du coude. Non, je veux déclamer au grand jour, avec sincérité et émotion, tout le tragique palpitant d’un drame de la chair, proclamer à grands cris les lois inébranlables de l’instinct. Revenir ainsi au contenu passionné d’un art. Mort aux hypocrites ! Ce tableau représente une leçon de guitare, une jeune femme a donné une leçon de guitare à une petite fille, après quoi elle continue à jouer de la guitare sur la petite fille. Après avoir fait vibrer les cordes de l’instrument, elle fait vibrer un corps »

Lettre de Balthus à Antoinette de Watteville.

Un retour aux prostituées aussi dans une atmosphère assez dramatique, scène de séduction et de plaisir, une nouvelle Vénus écoutant de la musique d’après Titien dans le Paris occupé. (Voir analyse sur le site du Centre Pompidou)

http://www.cineclubdecaen.com/peinture/peintres/titien/venusavecjoueurdeluthetcupidon.htm

Titien Vénus avec joueur de luth et Cupidon, 1565–70 . Huile sur toile, 165.1 x 209.6 cm. New York, Metropolitan Museum of Art.

Mais les circonstances dramatiques de l’Occupation semblent (en apparence) loin des toiles de dérision et d’insulte que sot la Femme à l’artichaut (Cologne Museum Ludwig)  et le Jeune garçon à la langouste (Musée Picasso) de l’été 1941.

Jeune garçon à la langouste Paris, 21-Juin 1941 huile sur toile 130 x 97,3 cm Musée Picasso.

Pourtant, les allusions culinaires se réfèrent aux difficultés du quotidien et au rationnement même si Picasso ne vit pas dans la privation (il prend ses repas au restaurant Le Catalan). L’enfant conjugue plus que d’autres la monstruosité et  l’innocence, la cruauté et la bêtise, la victime et le tyran. A la fois figure d’espoir et allégorie des difficultés de la vie sous l’Occupation, ce gnome édenté rassemble également les préoccupations picturales de Picasso à cette époque : tête creusée et étirée avec combinaison oeil – nez – front (il s’agit non pas de double point de vue mais plutôt d’une déformation), maléabilité des formes alternant souplesse et géométrie rigide. Assis de manière incongrue avec le sexe pointé comme un canon, cet enfant relève-t-il de la caricature d’un roi tenant un sceptre culinaire ou s’agit-il une évocation des misères de la guerre et des difficultés de ravitaillement ?

Si conformément à ses habitudes Picasso n’évoque pas de manière réaliste et narrative la guerre et l’Occupation, certaines figures féminines, certaines toiles portent les signes de la période :

Femme au corsage de satin (Portrait de Dora Maar a? la blouse raye?e. Paris, 9 Octobre 1942. huile toile92 x 73 cm. The Bellagio Gallery of Fine Art, Las Vegas.

Dora dans l’esprit naïf de Rousseau, Nusch épouse d’Éluard (engagé au PCF) plus « légère », deux portraits assez naturalistes comme s’il voulait réaffirmer l’existence de l’individu, de l’identité dans ce contexte de déshumanisation et de déportation.

Portrait de Nusch E?luard (Madame Éluard) Paris, 19-Aout 1941.  huile sur  toile 73 x 60 cm. Centre Georges Pompidou.

Si ces portraits imitatifs reviennent ce n’est pas par ingrisme, mais car ce type correspond soit à l’intimité de l’artiste pour Dora et Nusch, soit au traitement du héros et de l’héroïne de la Résistance qu’il peint ou dessine : 17 portraits de Nusch Éluard jusqu’à l’épure.Après la guerre, Picasso illustre la Chronique des temps héroïques de Max Jacob par des gravures :

Max Jacob ecrivant Chronique des temps he?roi?ques Mougins, 7-Septembre 1956 pointe seche et lithographie papier edition 170 26 x 20 cm Christie’s

Portrait de Max Jacob Chronique des temps he?roi?ques Cannes, 23-Septembre 1953 lithographie edition 93  23 x 17,5 cm  Christie’s

Les portraits en n & b ont la même fonction que les médailles antiques ou de la Renaissance, portrait est investi par la puissance paradigmatique du grand homme en fixant la physionomie, mélange d’autorité morale et politique. Ainsi, le portrait de type médaille de Max Jacob dont la maison est pillée en 1943 lui même arrêté et mort à Drancy, sa famille déportée. Picasso et Dora assistent à l’enterrement.

Photo de Brassaï Gr :oupe de lecture du Désir attrapé par la queue pièce de Pablo Picasso 1944, Lacan, Camus, Sartre, De Beauvoir, Leiris.

Lors de la lecture de la pièce de Picasso  Le désir attrapé par la queue en 1944, Picasso  tenu à ce que le portrait de son ami daté de 1915 devait être présent lors de cette lecture par Michel Leiris.

Le retour de l’Histoire dans l’oeuvre de Picasso à la Libération.

Le charnier Paris, Grands Augustins, 1944~printemps 1945 huile et fusain sur papier 199,8 x 250,1 cm. MOMA

Le tableau répond à ce geste de mémoire et d’hommage aux victimes de la déportation. Lire l’article de Pierre Daix, passionnant pour comprendre l’incompréhension suscitée par ce tableau dans les milieux communistes, en particulier le réquisitoire d’Aragon.

C’est la manière picassienne de traiter l’Histoire à la manière de Guernica, Zervos a immortalisé les étapes de la toile depuis février jusqu’en juillet 1945 : un couple dont l’homme a les mains attachés comme s’il était devant un peloton d’exécution, et un enfant massacrés, puis une table de cuisine qui transforme l’image en un carnage dans une maison, crime typique de la Guerre d’Espagne et de la Seconde Guerre mondiale : allusions à Guernica, au Nu se coiffant (disproportions, défigurations, pieds surdimensionnés, côtes de la cage thoracique). Il s’agit de l’intrusion de la guerre dans une maison (d’où l’adjonction d’objets du quotidien : casserole, cruche, table : homme torturé rappelant l’homme mort de Guernica, les mains liées comme le mouton de l’Homme au mouton (-> allusion au sacrifice)  femme martyrisée.

L’homme au mouton [E?tude] Paris, 19-February/1943 encre auqatinte 66 x 50,2 cm. Muse?e Picasso

C’est une variation sur le thème du Massacre des Innocents mais aussi comme une synthèse du travail de Picasso sur le thème de la guerre et de la souffrance depuis Guernica.

Les photographies  des charniers des camps prises George Rodger à Bergen-Belsen sont publiées dans le Monde illustré dès le mois de mai 1945. L’hôtel Lutétia qui accueille les rescapés n’est pas loin de la rue des Grands Augustins. Desnos n’arrivera pas jusque là il meurt sur le chemin du retour. Il n’est pas certain que Picasso ait vu ces photos des camps.

Le Charnier évoque tous les crimes du fascisme et du nazisme depuis Franco jusqu’aux camps nazis. Déploration des morts , memento mori, qu’il complète par des vanités qui précèdent et qui succèdent le Charnier. Paul Éluard a beaucoup mieux compris l’oeuvre la considérant comme prophétique du spectacle macabre des charniers découverts lors de la libération des camps.

Se rendre à Auschwitz et surtout à Birkenau, visiter les crématoires dynamités, les blocks, la chambre à gaz était une décision que bien peu prenaient à cette époque. Silencieux pendant la visite, Picasso aurait confié à Daix : « Dire que autrefois les peintres croyaient qu’ils pouvaient peindre le Massacre des Innocents » aurait-il confié à Pierre Daix.

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