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CAUCHEMAR EN CABINE

« Malheureusement, lors de cet appel,

l’un des plus importants de ma vie,

le silence gagne face à moi, il est roi… »

En 1996, Ernest Pignon-Ernest sort une sérigraphie qui s’intitule « Les cabines » ou encore « Derrière la vitre ». Cet artiste se sert des cabines téléphoniques des villes de Lyon et Paris pour installer ses personnages dessinés dans des positions particulières, qui ne semblent pas à l’aise. Les dessins sont en noir et blanc, très réalistes, expressifs et à l’échelle un, presque en trompe-l’œil. C’est une sérigraphie assez déstabilisante puisque c’est un réel effet d’optique, on croirait vraiment voir des personnes souffrantes dans ces cabines. Comme la plupart de ses œuvres, « Derrière la vitre » est une installation éphémère car le papier est fragile et finira par s’autodétruire. Cependant, il reste aujourd’hui une trace photographique de cette installation, affichée au musée de Landerneau. Cette œuvre est une installation  engagée car  Ernest Pignon-Ernest y dénonce les inégalités, les exclusions sociales ainsi que l’indifférence. Les dessins s’intègrent dans la ville mais interpellent les passants. Ils mettent en avant les laissés pour compte de la société, les SDF, les expulsés,  les chômeurs … Ernest Pignon-Ernest décrit lui même son œuvre comme une façon de saisir l’âme d’un lieu, sa puissance. C’est un travail d’encadrement et de point de vue, un projet en perspective.

Parmi cette sérigraphie, une œuvre m’a interpellée plus que les autres en raison de sa ressemblance avec une œuvre mondialement connue « Le Cri », de Edvard Munch.

Le Cri Edvard Munch | Louvain Médical
« Le Cri » de Edvard Munch

Écoutez, tendez l’oreille,

l’œuvre parlerait-elle ?

Ce que l’œuvre d’Ernest Pignon-Ernest a dit à Tess (émission réalisée avec l’aide de Louise, Fantine et Lucie )

« Je suis une œuvre d’Ernest Pignon- Ernest et je fais partie de la sérigraphie « Derrière la vitre ». C’est une sérigraphie qui aborde des sujets froids, comme aseptisés, de verre et de métal qui sont des éléments caractéristiques du thème de la ville, mais aussi des cabines, vous savez les cabines téléphoniques ! Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que j’ai été créée en 1996, date à laquelle ces petits lieux étaient encore particulièrement modernes et utilisés par un vaste public. J’ai bien conscience que pour les plus jeunes qui m’écoutent aujourd’hui, certains ont peut-être du mal à visualiser de quoi je parle, mais … j’aimerais profondément que chacun d’entre vous compreniez ma pensée.

Pour être très honnête, j’ai toujours détesté ce lieu ; il est ma plus grande hantise, ma plus grande peur, pourtant son utilisation et son principe sont très simples. Lorsque vous désirez appeler quelqu’un, il vous suffit de vous rendre dans cette cabine MAIS il vous faut connaître le numéro de la personne que vous désirez appelez sinon que comptez-vous faire… mise à part crier, comme moi, parce que vous vous rendez compte que votre vie n’est que peur et illusion, la peur que personne ne décroche à ce coup de fil, que personne ne vous apprécie vraiment… moi c’est cette peur qui me hante, qui me consume.

Malheureusement lors de cet appel, l’un des plus importants de ma vie, le silence gagne face à moi, il est roi…

Alors je crie, je hurletellement fort et de la même manière que le cri de Munch, c’est pour vous dire…

Et je prends conscience que je ne suis qu’un théâtre de drames du quotidien.

Retranscrit sous une lumière verticale, je me situe derrière ces grandes vitres transparentes, j’ai l’air idiot, je suis vu de tous et derrière ces vitres, la lumière de la ville se reflète sur moi, des lumières, bleues, vertes, rouges, jaunes , orange, les gens me regardent, remarquent-ils la peur qui se dégage de mon regard ?…

Sûrement …. »

Croquis de Tess

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