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CHAPITRE RETROUVÉ 64<65

De retour à Lavilledieu, Hervé Joncour n’osa pas tout de suite retourner sur la tombe d’Hélène. Pendant plusieurs jours, il resta chez lui, à réfléchir. Assis devant son parc, il tournait et retournait entre ses doigts cette enveloppe de couleur moutarde. Jamais il n’osa l’ouvrir. Il ne savait que penser. Il imaginait Hélène écrire cette lettre, la lire à Madame Blanche. Il entendait sa voix réciter les sept pages de cette lettre, sa voix douce qui résonnait maintenant dans son esprit comme une véritable torture.

Il ne savait pas s’il lui en voulait ou s’il il s’en voulait à lui même. Ou peut-être même qu’il en voulait à Baldabiou. Peut-être qu’il lui en voulait de l’avoir fait aller là bas, à la recherche de vers à soie. Qu’il regrettait d’avoir rencontré cette jeune fille dont il n’avait même jamais entendu le son de sa voix. Mais au fond il savait que ce n’était pas vrai. 

S’il regrettait bien une chose, c’était la mort d’Hélène. Il aurait aimé pouvoir lui demander comment elle l’avait découvert, pourquoi elle ne lui avait rien dit. Il aurait aimé savoir pourquoi elle avait écrit cette lettre. Mais à ces questions, il savait qu’il n’aurait jamais de réponses. 

Une semaine plus tard, Hervé Joncour osa enfin aller voir Hélène. Les mots de Madame Blanche résonnaient en boucle dans son esprit: « Cette lettre, c’est Hélène qui l’a écrite ». Il était partagé. Il aurait voulu dire à Hélène qu’il était désolé. Désolé de l’avoir trahie, d’en avoir aimé une autre. Mais il aurait aussi voulu lui dire que lui aussi, il aurait aimé qu’elle soit cette femme. Qu’il aurait aimé qu’elle ait ses yeux qui n’avaient pas une forme orientale et son visage semblable à celui d’une jeune fille. Qu’il aurait aimé la désirer comme il l’avait désirée, elle. Mais il savait que cela aurait été impossible.

Alors Hervé Joncour resta silencieux.

Il regarda la tombe d’Hélène où était gravé le seul et unique mot :

« Hélas« ,

et il pleura. 

Hervé Joncour pensa qu’il n’aurait pas fallu que quelqu’un le voie dans cet état. Mais il pensa aussi que maintenant plus rien n’importait, qu’il ne reverrait plus jamais les deux femmes qu’il avait aimées.

Il resta là pendant plusieurs heures,

silencieux, debout

devant cette tombe, en pleurs.  

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