Aller au contenu

IL ÉTAIT UNE FOIS MARINE

Il était une fois au pays des langues, une jeune fille qui parcourait la vallée Français à la recherche de vocabulaire à se mettre sous la dent. Chaque fleur, sur son passage, lui soufflait de nouveaux mots. Le soir, la jeune fille revenait à la maison, la tête pleine de termes inédits.

Un soir, elle alla voir sa mère qui cuisinait et lui demanda : «

-Maman, c’est quoi un dateau au sotolat ?

-Un dateau au sotolat ? Je ne sais pas.

-Non pas un dateau au sotolat. Un da-teau au so-to-lat. »

La mère, un peu perplexe, ne savait que répondre à sa fille, qui insistait cependant. Après beaucoup de recherche et surtout un petit tour dans la vallée pour entendre par elle-même ces drôles de mots soufflés par les fleurs, elle revint à la maison et dit à sa fille : «

-Voyons, ce n’est pas un dateau au sotolat, mais un gâteau au chocolat !

-Oui, c’est ce que je dis depuis le début : un dateau au sotolat. »

Plus le temps passait, plus les parents de la fillette s’inquiétaient de sa façon de parler. Plus l’enfant revenait de la vallée moins elle prononçait correctement les nouveaux mots : Limolate, Hélitoptère, pestacle… Après un certain moment, c’en fut trop pour les parents, qui décidèrent d’emmener leur fille voir une fée dans la forêt. Certes inquiets, mais surtout soucieux de savoir si leur fille allait bien, ils laissèrent cette dernière aux bons soins de la fée. Après seulement deux heures, la fée revint avec la fillette et rassura les parents en leur disant que tout allait bien chez l’enfant et que son défaut de prononciation s’effacerait tout seul avec le temps. La mère, le père et la fillette reprirent la route de leur maison, heureux et rassurés.

Quelques années plus tard, la fillette, qui était plutôt une adolescente, avait en effet retrouvé une façon de parler normale. Désormais, elle parcourait la vallée et ses alentours avec ses amis : Eudoxie, Harry et Carole. Chaque jour, ils exploraient une nouvelle partie de lande tous ensemble et s’amusaient grandement.

Cependant, un jour, ils se perdirent bien loin de leurs maisons : ils venaient de pénétrer dans la vallée Anglais. C’était une vallée verdoyante, avec des arcs-en-ciel partout et des habitants avec des têtes étonnamment grosses, des épaules larges, des genoux tordus et des chaussures qui laissaient entrevoir leurs orteils. Les quatre adolescents parcouraient ce nouveau paysage, très curieux d’en découvrir plus. Soudain, un énorme monstre arriva, sa peau était grise, il avait la tête couverte de petites plumes brunes qui lui donnait l’air de s’être réveillé il y a quelques minutes à peine et ses yeux cerclés de noir lui donnaient l’impression d’avoir des lunettes. Dès qu’il ouvrait la bouche des mots, immenses, piquants, assourdissants, en sortait: « Irregular verbs » , « In English please » , « present perfect » , « You’re a chatbox » , « Be quiet » …

Peu importait où les enfants allaient, le monstre les retrouvait toujours pour les assommer de ces mots sans queue ni tête à leurs yeux. Un jour, alors qu’ils fuyaient, Harry tomba. Lorsque ses amis voulurent l’aider, il leur cria de courir, de le laisser là. Il promit à la fillette qu’il allait s’en sortir. Ainsi, l’adolescente, Eudoxie et Carole continuèrent leur course effrénée.

Une fois bien essoufflées, les trois jeunes filles s’arrêtèrent pour reprendre leur souffle. En jetant un œil autour d’elles, elles se rendirent compte qu’elles venaient d’atterrir dans un endroit jusqu’alors inconnu. La fillette et ses amies étaient entourées de grands sapins couverts de neige. Eudoxie s’approcha d’un arbre et s’exclama : «

– Regardez ! Ce ne sont pas des pommes de pin qui pendent des branches, mais des bretzels !

-J’ai déjà entendu parler de ça ! Répondit la fillette, qui s’était approchée. Nous sommes dans la vallée Allemand ! »

Comme la nuit commençait à tomber, les jeunes filles partirent à la recherche d’un village. Après une vingtaine de minutes de marche, elles finirent par trouver une petite maison en pain d’épice. Subjuguées par son odeur et son aspect attrayant, les trois amies frappèrent à la porte. Cette dernière s’ouvrit sur une fille de leur âge, blonde platine avec de grands yeux bleus. Carole s’occupa de raconter leur histoire. La blondinette s’écarta de la porte pour les laisser entrer tout en criant : «

-Hansel, on a de la visite. »

Un garçonnet tout aussi blond arriva, avec les mêmes yeux et les mêmes taches de rousseur que sa sœur. Durant la soirée, autour d’un bon jeu de cartes et d’une bonne tisane, les cinq adolescents se trouvèrent plein de points communs. Quand il fallut repartir le lendemain pour rentrer dans la vallée Français, les trois françaises promirent de revenir au plus vite auprès de leurs nouveaux amis.

Ce fut le cas, quelques temps après, les trois filles vinrent passer une semaine dans la vallée Allemand. A partir de ce séjour, la fillette commença à avoir le reflex d’utiliser certaines expressions de la vallée Allemand tout le temps. Quand Eudoxie éternuait : « Gesundheit » ; la fille devait s’excuser : « Es tut mir leid ! » , les gens font trop de bruit : « Ruhe bitte ! », elle ne comprenait pas quelque chose : « Was? » etc. Bien évidemment, régulièrement, des mots grossiers lui échappaient dans cette langue aussi ou même de mauvais jeux de mots qui persistaient dans le temps comme « Vogel et pas l’oiseau ».

Quelques années plus tard, Harry n’étant toujours pas revenu de la vallée Anglais, la fille, téméraire, décida de partir à la recherche de son ami. Une fois arrivée sur place, motivée par l’envie de retrouver ne serait-ce qu’une infime trace de son ami elle dut apprendre la langue de ce charmant pays pour interroger les habitants. Malgré le traumatisme créé par le monstre, la jeune fille se rendit compte que cette langue et cette culture méritaient de s’investir pour en apprendre plus. Après une multitude de séries et de films dans cette langue, elle finit par la maîtriser à peu près. Cependant, elle apprit que son ami, Harry, avait sympathisé avec le monstre et ne voulait plus rien savoir de son ancienne vie dans la vallée Français.

Attristée, par cette nouvelle, la fillette décida se changer les idées en partant visiter d’autres endroits encore inconnus. Sa famille et ses amis la laissèrent partir, la larme à l’œil. Après plusieurs jours de voyage, la jeune fille fatiguée, mais déterminée à trouver l’endroit idéal pour s’installer, continuait de marcher, jour et nuit. Un beau jour, elle arriva enfin près de la mer, dans la vallée Breton. Elle s’assit dans le sable pour respirer l’air iodé. Après quelques minutes, une dizaine de personnes de son âge, tous portant un sac à dos, arrivèrent de partout. Ils se regardaient tous, en se demandant quel était le point commun entre eux. Petit à petit, chacun commençait à discuter avec les autres et bien vite tous étaient assis en rond et discutaient gaiement. Ils se rendirent tous compte qu’ils étaient à la recherche de nouveauté et d’expériences inédites. Ils marchèrent tous ensemble vers le village le plus proche. Quand ils le trouvèrent, ils tombèrent sur les habitants qui étaient tous réunis sur la place du village en train de danser et de chanter. Sans comprendre pourquoi, ni comment la bande se retrouva à danser de façon endiablée avec les habitants. La langue qu’ils parlaient était chantante et intrigante. Ils se laissèrent envoûter par les chants. Malgré la difficulté à assimiler la langue, la fillette, qui maintenant était une adulte, et ses nouveaux amis plantèrent leur tentes dans un champ et décidèrent de vivre ici pour quelque temps. Peu leur importait combien de temps ils resteraient, ni s’ils arriveraient à comprendre et à parler cette langue un jour. Ils s’étaient trouvés et en étaient très contents, pour eux, c’était le plus important.

Alors à partir de ce jour, ils vécurent heureux et eurent beaucoup de fous rires.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

buy windows 11 pro test ediyorum