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LE COFFRE DE TOBIE, MARINE, JÉRÉMY ET LOÏSE

Le coffre de Tobie a cette forme cylindrique, rappelant une boîte à chapeau, qui pourrait donc contenir une tête. Les illustrations présentes sur la boîte correspondent à des petits bateaux, évoquant le voyage réalisé par Tobie, l’arrivée de Déborah à Ellis Island, ou encore la flottille de petits bateaux en papier que Tobie offre à son arrière grand-mère, sur sa tombe. Ces petits dessins remémorent l’aspect enfantin qu’avait Tobie avant son périple, enfance qu’il a laissée derrière lui après le décès de sa bisaïeule.

INVENTAIRE :

  • Dessin du cri : cette illustration dépeint le portrait réalisé par Ragouël, censé représenter sa fille, Sarra, en train de crier. Celui-ci est tourmenté car il ne parvient pas à créer la sensation qu’il souhaite, et se retrouve finalement à dessiner un petit sourire indécis sur sa création, à la place de cela.

  • Bateaux en papier : à la page 174, Tobie repense à la tombe de Déborah sur laquelle il a déposé une petite flottille de bateaux en papier. Il l’a confectionnée en tant qu’offrande, y laissant lui-même, au même moment, son enfance et son innocence. De même, le bateau évoque le voyage, rappelant aussi bien le périple de Déborah que celui réalisé par Tobie en compagnie de Raphaël.
  • Statuette : lors de son voyage scolaire à La Rochelle, Tobie voit une statuette à deux têtes. Depuis ce jour, régulièrement il y pense, il l’imagine, il se la remémore. Ainsi la statuette à deux têtes est un objet central de ce roman et, de ce fait, de la vie de Tobie.

  • Médaillon : le médaillon est un souvenir de Boleslaw, mari de Déborah, décédé au combat. Ce médaillon est le seul lien physique que détient Déborah de son époux, raison pour laquelle elle l’a enterré dans un pot en terre cuite au fond de son jardin.

  • Pinceau : cet objet renvoie au moment où Tobie et Raphaël sont chez Ragouël, en train de visiter son atelier de peintre. Cette journée est un bon souvenir pour Tobie car c’est pendant ces instants qu’il rencontre pour la première fois Sarra.

 

  • Exégèses :

À la page 178, l’ombre de Tobie semble se détacher de lui. Elle prend son indépendance comme un nouveau personnage du livre. Personnage ayant au fur et à mesure un visage qui apparaît, le visage de Tobie plus jeune, le visage d’un enfant meurtri par son enfance, qui lutte contre la douleur et la peur de son passé. Ce passage fait penser à Peter Pan. En effet, dès les premières pages du livre écrit par James M. Barrie, Peter Pan se retrouve dans la chambre des enfants Darling car son ombre s’est détachée de lui. De plus, Peter Pan est un orphelin, ayant tellement peur de la solitude qu’il kidnappe des enfants pour s’entourer. Tobie, lui, est orphelin de sa mère, puis orphelin de son arrière-grand-mère. Il est également en quelque sorte orphelin de père, qui est tellement plongé dans le deuil de sa femme qu’il n’est pas présent en tant que père. Ainsi, Tobie s’entoure de livres, de poèmes morbides pour passer outre cette solitude qui le ronge. 

L’apparition de la mère de Tobie, revenue sans tête de sa balade sur sa jument, se fait dès les premières pages du livre. À cet instant, Anna, mère de Tobie, femme de Théodore, peut être comparée à Sleepy Hollow, La Légende du Cavalier Sans Tête. Dans cette nouvelle écrite par Washington Irving, l’intrigue tourne autour d’un enseignant nommé Ichabod Crane, venu enseigner dans la ville de Sleepy Hollow. Cette ville est le foyer du mythique cavalier sans tête, un fantôme effrayant errant la nuit, à la recherche de sa tête qu’il aurait perdue pendant la guerre d’indépendance américaine. Dans le premier chapitre de Tobie des Marais, nous pouvons imaginer qu’Anna est ce fameux cavalier, mais déjà décédée, c’est son mari qui va partir à la recherche de sa tête, qui ne lui sera finalement ramenée qu’à la fin du roman. 

“La vieille Déborah trottinait le long de la route. Elle tenait un panier en osier contre son ventre ; dans le panier […] il y avait un gâteau tout juste sorti du four.” (page 30). À ce moment du livre, nous rencontrons un nouveau personnage : Déborah. Elle semble sortir de nulle part avec son gâteau en direction de chez Tobie pour lui apporter son gâteau préféré. Cela peut nous rappeler le fameux Petit Chaperon rouge, conte écrit par Charles Perrault au XVIIe siècle. En effet, dans ce conte original, nous rencontrons une jeune fille devant apporter du pain et du lait à sa grand-mère. Nous remarquons cependant qu’ici, dans le roman Tobie des Marais de Sylvie Germain, ce n’est pas une petite fille, mais une nonagénaire allant apporter un gâteau à son arrière-petit-fils. Nous pourrions alors penser que le temps a eu effet sur la petite fille, mais ne la faisant pas oublier sa générosité.

  • Lettre de Tobie à Déborah : 

Chère Déborah,

Cela fait plusieurs années déjà que tu es montée au ciel, mais ton souvenir continue de me bercer depuis les profondeurs du marais. Je ressens encore ta présence dans ma vie, comme une étoile brillante qui veille sur moi et qui me guide lorsque j’en ai besoin. Tu auras pour toujours ta place dans nos mémoires, tu vivras en chacun de nous jusqu’à ce que nous nous installions à tes côtés, dans les étoiles.

Lors de ton décès, le monde m’a paru plus sombre, plus morose, plus vide. Je n’ai jamais appris à exister sans toi, j’ai toujours pensé que tu vivrais pour l’éternité, que la Faucheuse avait oublié de t’attraper la main en chemin, que tu avais déjà dépassé l’âge de la mort. Néanmoins, ton envol fut comme ton tempérament : doux, calme et silencieux. Les anges de la mort t’ont emportée avec eux d’une manière paisible, sans chercher à réveiller les vieux démons qui te suivaient, afin de les laisser dans les troubles eaux des marais, te délivrant ainsi pour te confier l’une des plus belles places du Paradis.

Je ne sais si le monde a pu profiter de ta lumière, mais je sais que tu as éclairé le mien. Tu m’as guidé pendant toutes ces années, c’est grâce à ta personne que je ne me suis pas égaré. Tu as été ce phare dans ces marais si sombres. Tu m’as partagé le monde que tu emmenais partout avec toi, ce monde disparu, dans lequel avaient vécu ta naissance, ton enfance, ainsi que tous tes ancêtres.

Depuis ton départ, je me suis fait un ami, Raphaël. Je suis sûr que vous vous seriez très bien entendus, il m’a appris beaucoup de choses lui aussi. Nous avons voyagé dans des endroits qui m’ont fait penser à toi. En chemin, j’ai rencontré une fille magnifique, dénommée Sarra. J’aurais tant aimé te présenter ces deux nouveaux morceaux de mon histoire.

Te souviens-tu de ce que tu m’as dit avant de mourir ? « Puisse Dieu te faire ressembler à Mejdele ». Je ne crois pas avoir réellement saisi le sens de ces derniers mots. J’ignore du plus profond de moi qui est Mejdele, mais je suis convaincu qu’il s’agit de l’être qui a allumé cette étincelle qui a ravivé ton cœur jusqu’à son dernier battement. Si j’avais une requête à faire à Dieu, je lui demanderais plutôt les raisons pour lesquelles les choses sont ainsi, les raisons pour lesquelles il ne me laisse pas vous revoir, maman et toi, juste une toute dernière fois. Comme ce soir, il m’arrive parfois de ressentir ta chaleur à travers l’un de mes soupirs, de ressentir ta lumière à travers l’un de mes sourires, et de ressentir ta présence lorsque j’en viens à souffrir. Maman et toi me manquez terriblement, j’aperçois souvent vos silhouettes se dessiner au loin, lorsque la nuit tombe et que la lune apparaît. J’espère que tu as trouvé la paix et le bonheur que tu mérites à ses côtés.

Je sais très mal comme l’on cherche les morts, je ne sais pour quelles raisons l’on cherche à séparer les défunts et les vivants. Alors, j’espère que lorsque la vie n’aura plus rien à me faire découvrir, je pourrai rejoindre l’endroit où vous reposez tous en paix depuis votre départ de notre monde.

Repose en paix, chère arrière grand-mère. Tu resteras éternellement dans mon cœur.

Ton arrière petit-fils, Tobie.

 

  • Lettre de Sarra à Tobie : 

Mon cher Tobie,

Cela fait tout juste deux minutes que tu as quitté ma chambre pour rejoindre ton père, mais me voilà déjà dans le besoin de t’écrire.

Il y a de cela plusieurs jours que nous nous connaissons, mais au premier instant où tu as franchi le portail, je me voyais déjà te répandre mon mal. En effet, je suppose que tu as entendu parler de la malédiction qui me touche et qui s’est abattue sur plusieurs jeunes hommes depuis quelques années. Je ne suis pas la fille que tout le monde pense. Je ne suis pas cette fille hautaine, froide, sournoise et sans cœur comme le racontent les gens. Je ne suis pas non plus une espèce de sorcière. Non je suis juste touchée par une malédiction tout droit sortie de je ne sais trop où et qui hante mes jours comme mes nuits.

À l’instant où tu es entré dans ma chambre, je suis tombée amoureuse de toi. Tes yeux, ton petit sourire, ta fossette sur la joue gauche, tes cheveux en pagaille, somme toute au premier regard, j’ai succombé à ton charme. J’ai bien essayé de te fuir pour t’éviter le même destin tragique que les autres garçons, mais mes sentiments me retenaient. Malgré cela, je suis bien heureuse que tu aies insisté et persévéré pour venir me voir et me parler.

L’autre jour dans la cabane, je pensais encore à toi. Je me demandais ce qui était le mieux pour nous, pour toi, pour moi. Fuir loin de ce pays en emportant avec moi ma malédiction ? M’enfermer dans ma chambre jusqu’à la fin de mes jours ? Me défigurer afin de ne plus attirer les garçons avec ma beauté ? Me jeter du haut de la falaise ne serait-elle pas la bonne solution pour éviter à un garçon de m’embrasser ? Tant de questions auxquelles je n’arrivais pas à poser de conclusions. C’est alors que tu es entré en jetant tes immondices par terre, m’ôtant tout mots de la bouche. Mais voilà, c’est ainsi que tu as réussi à me prouver le contraire de ce que je pensais, en insistant et t’obstinant à me confronter.

À très bientôt, je l’espère,

Je t’embrasse, Sarra.

 

  • Lettre de Tobie à Raphaël : 

Cher Raphaël, 

Te voilà parti comme tu es arrivé. Je ne saurais te dire à quel point ma vie à changé lorsque je t’ai rencontré. Je pense que j’étais toujours un enfant, fuyant mes responsabilités. Puis tu es arrivé et j’ai pris mon courage à deux mains et j’ai quitté le marais pour la vraie première fois de ma vie. Je suis sorti de cette zone de confort dans laquelle je me capitonnais depuis toujours. Était-ce même une zone de confort ou bien une zone de non-signal ? Se laisser porter au gré des jours sans jamais penser plus loin que l’instant passé… Avant ton arrivée, la vie était simple, ou plus exactement, elle était plate, sans reliefs, sans aventures, sans saveurs. Grâce à toi, cette monotonie est finie, je ne t’en remercierais jamais assez. 

Quand je t’ai vu dans la forêt pour la première fois, j’ai eu une forte impression de déjà-vu, comme si je te connaissais déjà. Tu sais, ce moment où tu ne sais plus si la personne vient de ton passé ou simplement d’un rêve. Ton visage m’a paru si familier, comme si tu m’avais déjà sauvé, comme si tu m’avais déjà mené sur le chemin de ma vie il y a des années. Ce sentiment est sûrement la raison de ma venue avec toi dans le voyage que tu me proposais. Dès le début, tu étais comme un membre de ma famille à qui je pouvais faire confiance les yeux fermés. Ce qui est drôle, c’est que mon père l’a ressenti également, il n’a pas hésité une seconde à faire de toi mon compagnon de voyage. 

J’ai fait des recherches, et savais-tu que le prénom Raphaël vient de l’hébreu et qu’il signifie « Dieu guérit » ? C’est assez amusant, car tu es clairement celui qui m’a permis de guérir de mon passé. Tu es la personne qui m’a permis de rencontrer la femme de ma vie, de faire en sorte que mon père trouve la paix auprès de ma mère. Une autre chose qui m’a fait tendrement sourire, c’est le fait que ton prénom vienne de l’hébreu. Même si cela s’est perdu avec le temps, ma famille paternelle est juive et j’ai souvent entendu des cantiques et des prières dans cette langue. 

D’ailleurs, t’ai-je déjà parlé de la femme qui m’a élevé, Déborah ? La veille de sa mort, elle m’a dit « Que Dieu te fasse ressembler à Mejdele. ». Je n’ai jamais su qui était ce ou cette fameuse Mejdele. J’ai passé des années à y penser, tard le soir, tôt le matin ou lors de mes cours. Qui est Mejdele ? Pourquoi est-ce le dernier message que mon arrière-grand-mère m’a laissé avant de mourir ? J’ai cherché à savoir si dans la religion juive il est question de ce nom à un endroit quelconque. Mais à part quelques comptines, rien ne ressort. J’aime à croire qu’il s’agit là d’un dieu protecteur, qui a veillé sur moi depuis ce jour. En fait, j’aime à croire que tu es ce Dieu. Je sais que c’est assez fou, mais n’est-ce pas là une douce pensée ? Tu m’es apparu lorsque j’avais le plus besoin d’une compagnie, tu m’as guidé vers mon avenir, vers l’aventure, vers Sarra et surtout vers ma mère… Ma tendre Maman qui n’avait rien de plus précieux sur cette Terre que sa famille… 

Je suis là, assis à mon bureau pendant que Sarra s’affaire dans la cuisine. J’entends le doux crépitement de la poêle et une succulente odeur me chatouille les narines. Je suis là, assis à mon bureau à t’ouvrir mon cœur, à te dire l’importance que tu as eu dans ma vie. Je revis nos balades et nos discussions, le sourire aux lèvres. Je suis là, assis à mon bureau, à réaliser que je n’ai aucune adresse à laquelle envoyer ce courrier. Suis-je fou d’avoir voulu t’écrire ? Je suis là, assis à mon bureau à écrire les dernières phrases de cette lettre qui n’arrivera jamais à son destinataire… 

Merci pour tout Raphaël, 

Avec toute mon amitié et ma sympathie, 

Tobie des Marais (puisque que c’est ainsi qu’on m’appelle).

 

  • Formule magique : 
"Il est important 
De se laisser porter par le vent
D'utiliser le passé
Pour mieux avancer."

 

  • Illustrations :

Photo de la statue de la Liberté : lors de son arrivée à New York, Déborah pose ses yeux sur cette statue qui signifie joie et espoir pour tout le monde, sauf pour elle. Au contraire, il est écrit que le flambeau que la Liberté tient à la main est comme un poignard pour elle. Cette statue représente la perte de sa famille, le deuil et toutes les mauvaises choses qui vont avec. Mais malgré tout, c’est grâce à ce voyage qu’elle rencontrera Bolesław, son futur mari. Cette statue est donc le symbole de perte et de renouveau pour Déborah. 

Illustration des marais : l’aquarelle représente les marais sombres, l’endroit où a grandi Tobie. Cette endroit a suivi tout le fil du roman, étant présent à chaque moment, à chaque instant de l’histoire de notre héros. Les barques présentes à gauche de la peinture rappellent le moyen de locomotion qu’a emprunté Arthur afin de fuir sa réalité lors du départ de Valentine. L’image est assez sombre dans le but d’évoquer cet instant assez funeste, mais aussi de rappeler la profondeur et l’aspect trouble des marais.

Dessin de la grotte : lors de leur périple, Tobie et Raphaël s’arrêtent dormir dans une grotte avant de passer chez Ragouël le lendemain. Avant de se coucher, les deux compagnons remarquent d’ailleurs la lumière présente dans l’atelier du peintre. Dans cette grotte, Tobie dit qu’il repense à Déborah,  et c’est ainsi qu’il se confie à son ami.

 

 

 

Représentations des statues Moai : après avoir aperçu la mer qui s’était retirée et les quelques bateaux de pêcheurs qui s’étaient échoués sur le port, notre héros songe une nouvelle fois à la tombe de sa grand-mère. Il repense aux rêves qu’elle traînait, dont celui de voguer jusqu’à l’île de Pâques. Les statues Moai sont l’emblème même de cette île et peut-être était-ce la raison pour laquelle Déborah souhaitait s’y rendre.

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